Asta, c'est un livre de femmes. le personnage éponyme, pour commencer, femme qui traverse le temps, qu'on suit dans sa jeunesse à la campagne, auprès de Joseph, puis quelques années plus tard, en Europe, perdue, seule la fin dévoilera pourquoi, puis des années plus tard, âgée d'une cinquantaine d'années. Ses parents, Sigvaldi et Helga, trop beaux pour rester heureux. Et le temps, personnage central si ce n'est le personnage principal, temps qui brise et apaise :
« Avons - nous un autre but dans la vie que celui de naître, de tousser deux ou trois fois , puis de mourir ? »
Le temps est primordial car il change les personnages, Asta n'est pas la même à quinze ans qu'à vingt ou à cinquante, manière de montrer l'évanescence de l'identité, et comment les mots, comme nous l'avions vu dans
Entre ciel et terre peuvent changer la trajectoire d'une vie.
Tu iras loin avec ta chatte, ces 6 mots briseront la vie d'Asta, la réduiront elle et tout ce qu'elle pourrait entreprendre à son sexe, résumant la misogynie et le ressentiment de tous les hommes dans la bouche d'un seul. Puisqu'elle est libre, puisqu'on ne peut l'enfermer dans ce rôle de mère et de femme, rôle qui avait déjà enfermé sa mère, on lui rogne les ailes et sa destinée.
La forme est à présent rodée : labyrinthe de poésie, de musique, qui parle de famille, d'abandons, de renoncement mais aussi d'amour : Asta, qu'on pourrait traduire par le prénom Aimée en français, c'est aussi le livre de l'amour familial aussi bancal qu'il puisse être, de l'amour de jeunesse, qui sert de moule à tous les autres, sans doute trop fortement. Allégorie, symbole, cette histoire n'est pas seulement à prendre au premier degré, mais comme une frise des relations humaines, où chaque personnage pourrait être l'archétype d'un membre familial, comme un jeu des 7 familles agrandi, dans lequel on se perd parfois, mais où la poésie nous rattrape.
On voit à présent son style tel qu'il l'est : les exergues, le mélange entre passé et présent, le fait que ce ne soit pas raconté de manière linéaire aussi, les dialogues longs de retrouvailles, les lettres envoyées souvent trop tard.
Si on faisait partie d'un jury du bac, on dirait à Stefansson de prendre garde encore à ses aphorismes : « Parfois, le silence est plus parlant que les mots. », « La lecture ouvre tant d'espaces à l'intérieur des gens. » qui plombent le texte, et à ses analyses politiques pas toujours des plus précises (à peu près tout le monde en Europe est d'accord pour dire que Trump, c'est pas la panacée, qu'un auteur le fasse sans préciser son propos (comme Knausgaard par exemple, qui, lui, apportera une réflexion personnelle et argumentée sur le sujet,) donne juste l'impression de vouloir monter pate blanche, qu'on est dans l'équipe des gentils.
Je suis en train de préparer une vidéo sur
Jon Kalman Stefansson " La naissance d'un poète", je vous partagerai le lien très prochainement. Lien : https://www.youtube.com/watch?v=IKgRikgsnoU
Lien :
https://www.youtube.com/watc..