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sur 3480 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Quelle aventure ! L'oeil de Vincent Munier et la plume de Sylvain Tesson ! C'est magique !
Un fabuleux témoignage sur ces immensités sauvages encore préservées mais pour combien de temps ? le tibet, haut-lieu spirituel, sanctuaire animalier en passe de devenir un important site ésotérique du vingt-et-unième siècle car il importe de garder secret un tel endroit. Tant pis, je n'irai pas mais j'ai vécu un très beau voyage sans les désagréments : froid, longues marches, attente... Les loups, les yacks, la panthère, tout n'est qu'émerveillement d'autant que Sylvain Tesson est très inspiré et il nous livres de magnifiques commentaires, avec son incroyable vocabulaire et ses audaces folles quand à la conjugaison, je suis toujours très admirative de son style et de ces citations, aphorismes, réflexions.
Mais c'est avant tout le récit d'une complémentarité entre Sylvain Tesson toujours en mouvement, le cerveau en ébulition, donnant sa vision de la planète et des hommes qui joue un peu les candides car il passe souvent à côté de toute cette faune et Vincent Munier, ce photographe animalier passionné par son art, toujours en contemplation devant la nature à la recherche du moindre indice permettant d'approcher la panthère des neiges pour ramener quelques photographies de ces espèces en danger.
Un grand merci à ces quatre personnes : n'oublions pas Marie, la compagne de Vincent Munier et Léo, son aide de camp pour ce magnifique récit qui nous apporte aussi une vision du Tibet sous domination chinoise car ces quatre personnes prennent la température de la planète à chaque voyage et nous informent des changements en bien comme en mal.
Pour une fois malgré ce que Sylvain Tesson en dit : "Elle s'était adaptée pour peupler des endroits invivables et grimper les falaises. C'était l'esprit de la montagne descendu en visite sur la Terre, une vieille occupante que la rage humaine avait fait refluer dans les périphéries." Peut-être a-t-elle baissé sa garde pour nous montrer ce que nous risquons de perdre si nous n'y prenons garde.
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Infatigable voyageur de l'extrême, l'auteur accompagne le photographe animalier Vincent Munier dans une expédition au Tibet, dans l'espoir d'apercevoir l'une des dernières panthères des neiges.


La narration livre de magnifiques pages sur l'un des espaces encore préservés de la planète, en grande partie en raison de son inaccessibilité et de ses âpres conditions climatiques. Par des températures oscillant entre -20 et -30°C, au coeur de montagnes à première vue désertes offrant des paysages aussi rudes que somptueux, l'équipe d'observateurs doit déployer toutes ses ressources physiques et des trésors de patience, pour guetter indéfiniment, et peut-être vainement, l'apparition de la rarissime reine du camouflage. En attendant, affût après affût, la faune sauvage locale se dévoile peu à peu, poursuivant son cycle perpétuel de vie et de mort sur un territoire en peau de chagrin, de plus en plus menacé par l'activité humaine.


Un désenchantement plein d'auto-dérision imprègne le texte, face à la certitude d'observer un monde sauvage en sursis, décimé par l'irresponsable avidité des hommes, au nom d'un progrès au final sur bien des plans contestable. Empruntant à de nombreuses références tant occidentales qu'orientales, l'auteur nous livre, sur un ton caustique, une réflexion philosophique et spirituelle qui fait si souvent mouche que j'en conserve une collection d'aphorismes record pour une seule lecture.


Ce superbe récit d'aventure, qui fait autant rêver que méditer, frappe à chaque phrase, inoculant l'envie de prendre à son tour le temps d'ouvrir les yeux. Il m'a incitée à aller découvrir avec émerveillement les clichés de Vincent Munier, dont on sait plus ce qui impressionne le plus : la beauté des sujets ou la technique et la patience qu'il aura fallu pour la capturer. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Telle la panthère des neigesSylvain Tesson marie dans ce texte la puissance et la grâce. Il rend compte d'une nature tour à tour enveloppante, foisonnante et effrayante. La faune a un rôle, un rang, une place. Elle le sait et s'adonne à « des gestes délicats adaptés à la violence des altitudes ». Cette nature brute, vertigineuse se démarque en tous points des allures bien rodées de nos vies citadines.

Les chapitres courts invitent le lecteur à suivre sans s'essouffler. Nous sommes « dans un jardin très froid, un jardin très dur », sur le plateau tibétain, à cinq mille cinq cents mètres d'altitude. « le soleil blanchit la terre, les ombres noires courent sur les roches, le paysage dispose ses strates comme dans les toiles tibétaines tendues au mur des monastères. ». « Des milliers d'yeux nous surveillent et nous ne soupçonnons rien ». Il fait froid. Froid au-delà du raisonnable. Sylvain Tesson, Vincent Munier, sa compagne Marie et Léo sont à l'affût….
« le Tibet tendait ses paumes sèches sous un ciel bleu comme la mort ».

L'auteur est rentré en France et a accordé quelques entretiens aux médias. La valse frénétique de la promotion incontournable le fait entrer dans une danse endiablée, ici, maintenant. Il atterrit. Il confie ses rêves. Il mûrit sa réflexion et la livre en pâture à quelques journalistes affamés. Plus rien ne semble lui appartenir. Il vient de monter sur le plateau le plus élevé de la planète. Il est descendu au plus profond de lui-même et le voilà confronté « à un vacarme effroyable » qu'il dénonce régulièrement. de puissants projecteurs formalisent ce spectacle, chauffent les plateaux de télévision là où les éléments naturels réchauffaient les âmes leurs promettant de jolies surprises.

La panthère, « métaphore de l'invisibilité, de l'évanescence, de la fugacité, de la délivrance » laisse sa place. Elle ne lutte pas face à « l'impératrice modernité » Elle est en voie de disparition et s'efface devant presque huit milliards d'hommes dont un grand nombre en marche cadencée vers ce qu'ils appellent le progrès. Leur progrès.

Sylvain Tesson nous dit son plaisir de voyager, de « pousser ses portes » et de s'envelopper dans la dévotion, prenant conscience du miracle du vivant. Nous sommes dans le plus beau musée nous dit-il et nous en sommes les pires conservateurs. Ce livre est en même temps un hymne à l'amour de la nature et de ses contraintes. C'est l'éloge du silence, de la patience, de l'attention décuplée, de la discrétion, de l'humilité. C'est aussi un plaidoyer pour ces bêtes si robustes, si combatives, si fortes et en même temps si fragiles parce que justement elles sont menacées et leurs jours sont comptés.

Une expédition de cette trempe même sur papier « ça vous réveille, ça fait jaillir des choses qui vous embellissent ». Moi ça m'a fait rêver. Rêver que j'étais dans le plus beau musée du monde gardé par les conservateurs les plus talentueux.

Je rends hommage au travail de Vincent Munier dont le livre: Tibet minéral animal est un formidable complément visuel à cette lecture et nous aide à illustrer nos rêves
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Magnifique et magique

Sur les plateaux du Tibet, s'ouvre le monde de la panthère des neiges.
L'hommage de Sylvain Tesson à la nature est sublimé par une langue à l'affût de ses méditations.
Un sage taoïste nous parle avec les mots retranchés dans les anfractuosités des roches hivernales, chaque pouce de terrain de l'ample Himalaya pique sa curiosité.
Rien ne ressemble à son univers, à ce qu'il a connu, du passé il fait table rase.


L'aventure est totale, sans mesures, sans repères, à la découverte de la panthère des neiges.
Sylvain Tesson aime se dépouiller. Tous les vêtements sont trop lourds, trop serrés pour celui qui cherche à s'élever, et à se délaver de ses idées, de ses à priori, de son passé.
La grande découverte de l'affût, devient un langage, comme une lecture nouvelle du taoïsme, une façon de renaître au monde, faire surgir le doute sur la notion de temps.
"L'affût, tel ce luxe de passer une journée entière à attendre l'improbable ! Page 110."


Le rapport au temps à 5600 m d'altitude s'ébauche dans la nature, c'est l'étalon primaire, le guide inaltérable de notre présence. le déroulement de la vie de chaque espèce emprunte le rythme qui lui convient, le pas lent des saisons ou bien le balancement de la Lune, ainsi naîtront les nouvelles pousses.


Sylvain tesson va même plus loin dans sa réflexion, " l'affût était une prière, page 57". On faisait comme les mystiques on saluait le souvenir primal. L'art aussi servait à cela, recoller les débris de l'absolu.


Quelle étrange méditation que de se tenir aux aguets. "L'espace ne défile plus. le temps impose ses nuances, par touches. Une bête vient. C'est l'apparition. Il était utile d'espérer". Mon camarade avait attendu la venue des musqués de Laponie. "Il s'était gelé des orteils dans la neige, posté jour et nuit, fidèle aux directives des snipers ; mépriser la douleur, ignorer le temps, ne pas céder aux fatigues, ni décrocher avant d'avoir obtenu ce que l'on désirait".


Le 22 novembre dernier,passait sur Arte un document unique sur la panthère des neiges. C'était Munier calfeutré derrière les pans de son abri. Une apparition comme un rêve, celle d'une mère et de son petit. Magique et émouvant de s'imprégner de ce couple qui se livre à une série de gestes de tendresse et de complicité. Puis on revoyait la mère repousser son enfant pour le libérer et qu'il puisse conduire son propre destin.
Chaque animal réalise sa part de vie et de beauté, écrivait Aristote.


Cette plongée dans l'ultime présence de l'animal, est une inaltérable découverte du monde animal débarrassé d'une morale humaine, trop humaine ajoute Sylvain Tesson. La bête est un joyau serti dans la couronne. Dût le diadème se laver de sang.
La patience est une vertu suprême, la plus élégante et la plus oubliée. Elle invitait à s'asseoir devant la scène, à jouir du spectacle. La patience était la révérence de l'homme à ce qui était donné.
Dans le frémissement des feuilles le silence est un élixir de beauté.

Une rencontre inoubliable, des hôtes mystérieux de la glace, et du vide, les panthères des neiges.
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Première rencontre avec Sylvain Tesson, un sacré bonhomme , quelle aventure!

Un fabuleux témoignage : à l'affût du monde animal ,il observe, écoute, fait silence , posté en attente, tapi , immobile ,pas un bruit , pas un son, l'air vide, hors du temps , l'absolu , « l'air froid craquait , le silence bourdonnait » petites phrases en boucles ——que l'on aimerait citer toutes——sur les traces d'un animal mythique . ....la panthère : «  Nous savions qu'elle rôdait ».La panthère somnolait , une journée , un luxe de passer une journée entière à attendre l'impossible !

A l'affût ....

Sylvain T. redonne tout son sens à la notion de quête et ses deux piliers : RESPECT et PATIENCE...
Invitation au voyage à l'autre bout du monde , au Tibet, dans les hauts plateaux du Chang Tang , sur les bords du lac Tao, aux pieds de la chaîne montagneuse de Kunlun , à 4800 mètres d'altitude, puis aux sources du Mékong ,par __ 30 ° , un voyage introspection , l' âme en haleine , acceptation de l'attente très noble— par là - même anti - moderne .

Hymne à la patience, à la nature sauvage , l'origine et les êtres , l'absolu et les choses , hommage à l'authentique et au vrai mêlé intimement d'impressions et d'errances métaphysiques.

Récit poétique et philosophique piqueté d'humour et d'élégance !

«  Attendre était une prière«  .«  Un être vous obsède , il apparaît partout. »   «  On se tient aux aguets , l'espace ne défile plus.Une bête vient. C'est l'apparition, il est utile d'espérer .... »
«  Adieu panthère » !
Magique ce livre ! A relire afin d'en savourer l'originalité, la plénitude et la richesse !
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En 2017 ou 2018, Vincent Munier, photographe animalier reconnu dans le monde entier, propose à Sylvain tesson, écrivain baroudeur, d'aller ensemble dans les montagnes du Tibet à la rencontre de la mythique panthère des neiges.
Rendez-vous est pris et quelque temps plus tard, les deux hommes se retrouvent, accompagnés de la compagne du photographe et d'un ami philosophe, à 5000 mètres d'altitude, pratiquant l'affût par des températures oscillant entre -20°C et-30°C...
L'affût, c'est l'art de se fondre dans le décor, muet, silencieux, immobile et interminablement patient... un peu comme les snipers qui se confondent avec le manteau blanc de l'hiver, allant jusqu'à manger de la neige pour que leur bouche n'exhale pas de buée.
À partir de ces éléments, Sylvain Tesson nous conte le récit de cette aventure qui va durer quelques semaines durant lesquelles, avant la "rencontre royale", nos bivouaqueurs de l'extrême vont côtoyer des paysages sauvages et préservés, d'une beauté inouïe, quelques rares humains, de nombreux animaux et... eux-mêmes.
Car ce voyage et ce livre, c'est avant nous un plaidoyer pour la nature et une quête spirituelle.
Le livre est serti de Beauté ( sous des formes diverses... ce qui nous semble cruel n'en étant pas exclu ), et la plume laser, intelligente, subtile, lucide, dextre et extraordinairement talentueuse de Sylvain Tesson lui rend un hommage grandiose.
Un court extrait pour illustrer mon propos :
-Elle reposait, couchée au pied d'un ressaut de rochers déjà sombres, dissimulés dans les buissons. le ruisseau de la gorge serpentait cent mètres plus bas. On serait passé à un pas sans la voir. Ce fut une apparition religieuse. Aujourd'hui, le souvenir de cette vision revêt en moi un caractère secret.
Elle levait la tête, humait l'air. Elle portait l'héraldique du paysage tibétain. Son pelage, marqueterie d'or et de bronze, appartenait au jour, à la nuit, au ciel et à la terre. Elle avait pris les crêtes, les névés, les ombres de la gorge et le cristal du ciel, l'automne des versants et la neige éternelle, les épines des pentes et les buissons d'armoise, le secret des orages et des nuées d'argent, l'or des steppes et le linceul des glaces, l'agonie des mouflons et le sang des chamois. Elle vivait sous la toison du monde. Elle était habillée de représentations. La panthère, esprit des neiges, s'était vêtue avec la Terre.-
Un récit d'aventure(s), un plaidoyer sans aucun paternalisme pour la défense de la nature, une quête spirituelle... pour tous et pour chacun... un formidable bouquin qui a reçu en 2019 un prix Renaudot plus que mérité.
Avant de céder la parole à l'auteur ( extrait d'une interview), je tiens à souligner que Vincent Munier et Sylvain Tesson, afin de limiter les risques d'anthropisation de ces terres vierges de touristes et de chasseurs, n'ont pas donné aux lieux de leur récit leurs noms véritables mais les ont "rebaptisés" à leur manière.
Un livre que je recommande vraiment à tous, et en particulier aux jeunes ( les difficultés lexicales peuvent être résolues grâce à Google)... et maintenant, avant d'embarquer pour cet extraordinaire voyage initiatique, écoutons Tesson.
-"Les chimères, les illusions, ça suffit ! On a le réel et on n'est pas fichus de le conserver. On est dans le plus beau musée et nous sommes les pires conservateurs. C'est affreux C'est ça que la panthère des neiges nous dit : " calmez-vous, cessez de vouloir les lendemains, occupez-vous de conserver cet extraordinaire joyau qui s'appelle le monde !"
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Elargir notre espace.
Aller au-delà de nos possibles.
Rejoindre l'authenticité de toute vie.

Sylvain Tesson nous entraîne à sa suite dans l'une des plus belles aventures qu'il nous ait jamais contée.
Le voyageur ardent qu'il est, bavard, amateur de Havane, s'est mis à l'affût avec le photographe animalier Munier et Marie et Léo.
Dans un silence percutant, dans une froidure douloureuse, non loin du Mékong, sous le ciel du Tibet et du Tao, ils ont consacré leur vie, leurs affects à l'impératrice des neiges et de la solitude méditative : la panthère des neiges, l'once, Saä.
L'animal dont les yeux sans concessions observent. Sans être vue la panthère sait le bipède ennemi, le bipède chasseur, le bipède qui décima ses pairs.

Sylvain Tesson, avec simplicité, justesse et précision, décrit ses longs moments d'attente qui se vivent avec sagesse. La récompense étant l'apparition unique, le moment privilégié qui se vit en silence, presqu'en lévitation…
Nous suivons ses émotions.
Nous suspendons notre pensée lorsqu'il bouscule notre confort.
Nous l'approuvons lorsqu'il démontre les sottises voire les vilenies de notre siècle enfoui dans un « pas assez » continuel.
Il nous remet à notre juste place en rappellant la chaîne de vie, ni plus ni moins, l'homme s'étant et se croyant souvent, trop souvent, l'échelon supérieur.

Splendide!

Ce livre est comme une longue méditation où affleure une quantité de réflexions lucides et pertinentes sur l'état de vivre des origines à nos jours.

Ce livre est comme une vibration qui se perpétue après l'avoir refermé.

Ce livre secoue avec délicatesse, use tantôt de l'humour, tantôt de l'image forte, tantôt de références philosophiques.

Ce livre est sans concession pour l'homme et pourtant ne conduit pas à l'amertume.
Il invite à se poser et à regarder.

Tel l'ouvrage d'un compagnon qui accède à la maîtrise, ce livre est un chef-d'oeuvre.

PRIX RENAUDOT 2019
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Homme du vent, de la neige et des hauteurs, Sylvain Tesson n'est jamais vraiment là où on l'attend. Je l'avais quitté après la lecture de : Dans les forêts de Sibérie, au bord du désespoir et je retrouve dans : La panthère des neiges un autre homme... avec toujours le même talent pour me faire partager ses voyages et surtout ses aventures qu'elles soient dans l'espace monde ou dans son espace intérieur.
Cette fois-ci, il m'a entraînée sur les hauts plateaux du Tibet avec ses trois compagnons : Munier, photographe de son état et celui "qui chante avec les loups", Marie, sa compagne, cinéaste animalière et Léo le philosophe de service. Quel puissante motivation cette "bande des quatre", comme la surnomme Tesson, partage-t-elle ? le fol espoir d'apercevoir et de mettre en images ou de fixer sur la pellicule celle que Munier considère un peu comme une déesse inaccessible : la panthère des neiges.
Un récit de voyage "à la Sylvain Tesson" ai-je envie de dire, grâce à sa prose vivante, colorée, mêlant tous les niveaux de langue et tous les paradoxes. D'abord ceux qui animent son auteur, même si dans ce récit autobiographique la part de l'auto dérision est très présente pour tout ce qui touche à son intimité de pensée ou de vie. J'ai d'ailleurs beaucoup aimé une très jolie parenthèse sur sur son amour perdu à la fois pour la distanciation qu'il a su prendre et pour "le romantisme écologique" qui s'en dégage. Mais Sylvain Tesson reste malgré tout un homme de tourments, celui qui se demande toujours pourquoi il voit "dans un paysage, les coulisses de l'horreur". Et sa vision de l'humanité n'est pas vraiment plus réconfortante. Il sait grâce à la vigueur de sa plume mais aussi son sens de l'humour, ramener notre humanité à sa juste place dans le monde. Il reste aussi un homme de tempête, comme dans ce très beau passage où il se livre à une violente diatribe contre la destruction de notre planète et les fausses espérances que l'on se donne pour éviter de voir notre danse au bord du gouffre.
Heureusement il y a les grands espaces vierges qu'il parcourt avec ses compagnons et qu'il décrit dans une prose ramassée, imagée et sensorielle : "le Tibet avait la peau à vif" ou "Vers midi, le soleil était à son rendement absolu: tête d'épingle dans le néant". Même talent pour la peinture du monde animal qui vit au sein cette nature sauvage et dont il sait admirablement rendre le côté caché, camouflé et aussi les paradoxes de comportement car ces animaux sauvages font preuve à la fois d'une permanence de vie étonnante pour nous humains et de la fugacité la plus totale dès qu'un danger se présente. Il rend donc au monde animal qu'il côtoie un hommage sensible, respectueux et la pratique de l'affût le renvoie très souvent à des considérations philosophiques sur l'ordre du monde. Celui qu'il vit sur ses hauts plateaux du Tibet - un ordre tragique et immuable de vie et de mort- qui à la fois le fascine et le terrifie, mais qu'il préfère sans doute au désordre civilisationnel dans lequel nous vivons.
Ces réflexions sont très fluides et incarnées, donc pas de lassitude ou d'ennui, en tout cas pour moi.
Ce dernier Sylvain Tesson m'a vraiment conquise : un savoureux cocktail avec sa dose de dépaysement, d'humour mais aussi de retour sur soi et sur un monde à la fois préservé et mal en point, le nôtre...
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Sylvain Tesson est avant tout un grand voyageur et se définit lui-même comme un « baladin du monde occidental ». En 2018 il est invité par Vincent Munier, photographe animalier de renom, à partir, aux confins du Tibet, observer la rare et farouche panthère des neiges, sur un gigantesque plateau qui culmine à 5000 mètres d'altitude. Sylvain Tesson relate son aventure dans ce territoire hostile mais majestueux, alors que la température tombe à -35° la nuit et que l'oxygène devient rare.

En dépit des séquelles de son récent accident, Sylvain Tesson n'a rien perdu de sa volonté, de son énergie et de son goût pour les voyages, mais grâce à Vincent Munier, il a appris la patience et à regarder autrement. « L'affût était un mode opératoire, il fallait en faire un style de vie », Pour Sylvain Tesson, « nous vivons dans le plus beau des musées et nous sommes en train de le détruire ».

Ce livre a eu un grand succès dès sa parution. Avec son énergie vagabonde, Sylvain Tesson sait répondre au grand désir d'évasion de ses lecteurs. Il explore des régions peu fréquentées, hors des chemins connus et nous fait voyager. Il nous invite à communier avec la nature, à la respecter, à prendre le temps de regarder l'invisible en attendant des heures qu'un animal passe sans être sûr de sa venue.

On met longtemps à voir ce qu'on regarde. A une époque où on préfère le réel au virtuel, l'immédiat aux promesses, un autre rapport au monde s'instaure ; « La panthère des neiges », récit d'initiation à l'observation du monde, délivre un séduisant voyage poétique qui nous questionne sur notre mode de vie.
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J'ai aimé les "chemins noirs" et le séjour de Tesson "dans les forêts de Sibérie". Et pourtant je n'étais pas trop tentée par cette "panthère des neiges". Pourquoi ? je ne sais pas..... Je suis incapable d'expliquer pourquoi, alors que j'avais apprécié déjà deux textes de cet auteur, son dernier opus ne m'intéressait pas. Je ne l'avais pas approché à la librairie, pas mis dans mon "panier" de ma bibliothèque préférée. Tout simplement ignoré. Et puis samedi dernier, passage à la bibliothèque. Sur la table des nouveautés, il est là, disponible, me tendant les bras (pas facile pour un livre non ?). J'ai cédé, je l'ai pris.... et dévoré à peine ouvert !!! Magnifique, riche, cultivé, critique voire acerbe, documenté.... Beau en un mot. Si vous avez aimé les précédents textes de l'auteur, ne vous privez pas, il est au-dessus, encore meilleur.
D'ailleurs je sais désormais ce que sera le cadeau de Noël pour mon père....
Reste ma question sans réponse à cet instant : pourquoi n'avais-je pas été tentée ??? Je me sens surtout stupide........
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