Merci aux éditions Au-delà du raisonnable et à Babelio pour ce livre reçu dans le cadre de l'opération Masse Critique.
Un bon livre. Pas exceptionnel mais un bon livre, par un écrivain tout à fait digne de ce mot.
J'ai l'impression d'une sorte de mélange entre du
San Antonio, notamment dans certains dialogues, avec une petite influence
Tarantino, et un volet social, sociétal et de réflexion sur l'humanité qu'on retrouverait dans un film comme Fight Club. Qui donne aussi une dimension supplémentaire qu'on retrouve assez peu dans des livres de violence Brett Easton Ellissienne, by the way. On voit ici la critique d'un monde du travail où les inutiles ont les postes les mieux payés, les plus influents alors qu'ils ne servent vraiment à rien, menant à la baguette ceux qui font le vrai travail et qui galèrent, tout ça les pieds dans l'eau de leur piscine... La critique d'un système et d'un fossé vraiment plus supportables... Actuel...
"- Si je peux me permettre, nota Pascal, la vie trépidante de consultant devient un peu lassante. On ligote, on bâillonne, et on recommence.
- Comme tu vois, une forme de travail à la chaîne.
- C'est moins pénible à la Sécu, tu forces les gens à rester assis pendant des heures, sans les attacher ! Voilà l'efficacité du secteur public."
Il y a un peu de violence, physique, beaucoup de violence symbolique en creux, le physique venant en réaction.
Le style est vraiment intéressant comme je le disais, assez drôle parfois, jamais trop "facile", il y a une recherche, une connaissance du-des sujet-s, même si ça ne va pas aussi loin que - je ne sais pas moi - qu'un Maurice Dantec (pour prendre un auteur que je l'ai récemment). Ce livre-ci est moins une somme, ça reste modeste. Deux cent pages, que voulez-vous.
"- Et c'est quoi ça, consultant ?
- Un de ces nouveaux métiers qui ne servent à rien et qui rapportent gros.
Blanco fit sauter un stylo rongé dans sa main et, après une double vrille piquée parfaitement exécutée, il retomba dans sa paume pour une réception impeccable.
- Comme flic ?
Voisembert ne releva pas. Flic était le troisième plus vieux métier du monde. Celui qui faisait vivre le premier en tant que client avant d'arrêter le proxo."
J'ai passé un bon moment en compagnie de cette fuite d'héros qui cherchent une sortie, une solution à une situation qu'ils n'aiment pas, à une vie qu'il méprise.
Un "consultant", en fait
un tueur pour liquider du personnel, sommet des techniques HR, un syndicaliste qui se révèlera ... , une femme entre femme-objet et femme dominante, tout ça dans une voiture, destination on ne sait trop bien, vers un chaos annoncé ? Ou pas.
"Pascal chercha dans les yeux d'Harold un peu d'innocence, un peu d'humanité, des faiblesses excusables qui pussent expliquer pourquoi il le persécutait. Pourquoi il avait détruit son amour avant de le donner en pâture à la mort. Mais rien. C'était ainsi. La loi du monde. du chacun pour soi. La défense du territoire. Avec ou sans lui. Et toutes ces phrases fabriquées, assénées jour après jour par les médias et la culture dominante pour transformer les moutons en loups et réciproquement. Ces banalités dont se repaissait Antoine et dont il avait fait sa raison d'être.
- Putain quel monde..., soupira Pascal.
Il leva le Beretta et, sans crier gare, froidement, avec un vrai soulagement, abattit Mattéi d'une balle dans la tête. Il se tourna vers Antoine :
- Tu avais raison. Nous vivons dans un monde de violence.
Antoine lui renvoya le sourire customisé d'un vendeur d'assurances.
- Bienvenue dans la vraie vie."
Bref, ce livre a tenu la route, tenu le choc de mon regard critique, de façon honorable.