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Tout est bien qui finit mal.
Le diable est une nouvelle tellement posthume qu'on se demande si Tolstoï ne l'a pas écrite après sa mort. Cela vous donne une idée (noire) de la joie de vivre qui anime ce récit.
Pour mettre son lecteur dans l'ambiance, Leon cite Saint Matthieu, premier disciple et percepteur, grand comique et saint patron des contrôleurs fiscaux… « Mais moi, je vous dis que quiconque regarde une femme pour la convoiter a déjà commis un adultère avec elle dans son coeur. » Je vous épargne les versets suivants, qui prônent des amputations préventives. En résumé, même plus le droit de regarder le menu. Je suis sûr qu'il a aussi inventé la TVA.
Si le diable se cache souvent dans les détails, chez Tolstoï, père d'enfants à la douzaine, on le trouve en général à la frontière de la chair et de l'esprit, à proximité donc du pantalon.
Possédé par la métaphysique, flagellé par ses vieux démons, l'immense auteur raconte le destin d'Eugène Irténiev, propriétaire terrien tiraillé entre son épouse Lise, aimante, dévouée, ennuyeuse et son ex-future maîtresse, Stepanida, paysanne peu farouche qui harcèle ses hormones et réveille la bête endormie. Quand le démon de midi passe de la sieste au cinq à sept.
On retrouve ici les symptômes de la crise mystique de l'auteur à la fin de sa vie et au début de sa mort qui diabolise les pouvoirs de séduction des femmes. Chez Tolstoï, le diable ne s'habillait pas encore en Prada, mais succube croque la pomme jusqu'au trognon. Moi, c'est plutôt les croustades.
Eugène, dont le prénom suffit à expliquer l'état dépressif, éprouve des désirs. Enfer et damnation. Comme le garçon adopte une morale à géométrie variable, il passe des pages à se repentir de ses pensées impures tout en laissant le diable le tirer par la queue et je ne parle pas d'inflation.
Inspiré d'un fait d'hiver russe où l'adultère est un mode de chauffage éco-irresponsable, Tolstoï excelle toujours dans l'autopsie des passions même s'il condamne à nouveau son personnage, indigne de Dieu, comme tous les hommes en ce bas monde. Son génie agit dans les passages où il laisse ses personnages vivre et il m'ennuie terriblement quand il s'indigne de leurs infructuosités. Leon, plus il vieillit et moins il pardonne. Triste fin pour un tel ogre de vie.
Au club des tourmentés de Tolstoï, en compétition avec Zweig sur le plus grand nombre de suicidés par page, Eugène est un peu trop falot pour crier au chef d'oeuvre.
Le diable est une nouvelle de crépuscule qui annonce les ténèbres d'un immense auteur.
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Ce livre est très imprégné de morales religieuses, ça en a rebuté certains. Je ne comprends honnêtement pas, nous sommes en effet plongé dans la mentalité russe de l'époque (et moderne aussi). "Le Diable" est une immersion totale dans le combat entre un homme et le diable, j'ai pû tantôt le comprendre, tantôt le détester. Ce livre se lit bien c'est pourquoi je vous le recommande.
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Pas de suspense ici : dès le début, Tolstoï nous dévoile l'intrigue de sa nouvelle, en citant Matthieu, V, 28. Allez, bonne fille, je vous recopie la citation (pour les athées, les non catholiques et les autres) : « Et moi je vous dis que quiconque regarde une femme avec concupiscence a déjà accompli l'amour avec elle dans son coeur. » Bon, ceci dit en passant et tout à fait hors propos, si tous les violeurs pouvaient avoir été biberonnés avec cette citation, on pourrait peut-être de nouveau occuper l'espace public, s'habiller comme bon nous semble, et se promener seule le soir.

Donc, vous l'aurez compris, on ne lira pas cette nouvelle pour l'histoire, puisqu'elle est entièrement contenue dans la citation ci-dessus. Mais bien plutôt pour l'écriture car oui on se laisse porter par la justesse du propos, par la finesse d'écriture, par un sens de l'équilibre entre action, description et introspection.

Cette nouvelle est une bonne façon d'approcher tout petit tout doux non pas du diable mais du monstre (ceci dit avec énormément de respect, non pas dans le sens de « monstrueux » mais dans le sens de « grandiose », d' « énorme », d' « incontournable ») qu'est Tolstoï. Et le plaisir ressenti est pour moi un bon indicateur pour continuer à découvrir ce fameux écrivain. C'est peut-être même le seul indicateur valable, ce fameux plaisir.
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Une courte nouvelle pour accéder à Tolstoi.
Tres bien écrite elle decrit formidablement le dilemme masculin entre le désir et l‘amour.
Le heros est naturellement, physiologiquement et charnellement attiré par une jeune paysanne… tout en etant amoureux de sa femme et se retrouve tiraillé entre les deux. Pas facile à assummer pour le héros qui est catholique pratiquant…
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Comme si Tolstoï se remémorait ses années de jeunesse colorée loin d'être triste, comme si il prenait un plaisir particulier à évoquer les danses des paysannes qui l'ont affolé, comme s'il regrettait ce temps passé, où rien n'était grave, comme si, d'ailleurs, il voulait à tout prix rendre hommage à la petite Axinia, dont il a eu un fils, et qui continue à laver le plancher comme l'héroïne du Diable le fait , au grand dam de Sonia/Sophie, jalouse à en crever .

Dans « le diable », l'arrivée à la campagne du héros lui pose problème : comment faire ? comment consommer, et qui ? En ville, tout est facile, même si Irténiev ne se croit pas débauché, il n'est quand même pas un moine. Il payait, et donc ne se sentait aucunement attaché, il fortifiait sa santé, rien de plus innocent.

Une chose est sûre, la continence non voulue lui est insupportable, alors, alors.

Facile, une paysanne mariée se présente, tout va bien, plaisir réciproque, liberté assurée, chacun sa place.
Sauf que la femme, belle comme le jour, danse, et l'ensorcelle : c'est elle qui le possède, avec ses robes brodées jaunes et son fichu rouge vif, (ou le contraire) pieds nus, elle danse.
Elle est libre, cette serve, elle rit et elle se moque, désinvolte, elle fanfaronne, elle ne comprend absolument pas le problème de conscience que se monte soudain Eugène Irténiev.
Car depuis il s'est marié, avec une femme passionnément amoureuse de lui, aimante et compréhensive. Elle l'aime, le comprend, elle sent ses moindres changements d'humeur, elle apaise sa propre mère pour écarter de son mari tout sentiment douloureux.

Oui, mais il désire l'autre, ne veut pas que cela lui arrive, mais elle est plus forte que lui, sans rien faire qu'apparaître de temps en temps, et qu' échapper aux rendez vous, il est vaincu, une force étrangère le possède. Un petit juge intérieur lui souffle que ce qu'il ne peut éviter reste répréhensible et criminel.

Conclusion plutôt cul-cul la praline après un plan-cul assez bien explicite.
Et une fin tragique
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Ouvrage d'un autre temps qui apporte une réflexion sur la nature de l'homme (le mâle), son rapport à la chair et son incapacité à communiquer avec l'être aimé. La fin, violente, contrebalance la narration souvent nonchalante.
L'éthique et la morale ont désormais changé. La communication aussi. Et heureusement.

« Tout était si beau, joyeux et pur dans
la maison ; mais dans son âme tout était laid, sale, horrible. » (p.73)

« Et la pensée qu'il allait révéler son secret à son oncle, qu'il n'estimait pas, la pensée qu'il allait se montrer à lui sous l'aspect le moins avantageux et s'humilier devant lui fut agréable à Eugène. Il se sentait coupable, misérable et il voulait se punir. » (p.74)

« Cette même expression d'effroi que tu avais autrefois, quand tu ne voulais pas me parler. Génia, mon chéri, parle-moi. Je vois que tu te tourmentes. Parle-moi, tu te sentiras mieux. Quoi que ce soit, tout vaut mieux que tes souffrances. Je sais bien que ce n'est rien de mal. » (p.85)

« les plus malades d'esprit sont indubitablement ceux qui décèlent chez les autres les signes de la folie qu'ils ne voient pas en eux. » (p.87)
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L'une des nombreuses nouvelles de Tolstoï consacrées à son sujet fétiche : la vie maritale. Décidément cela avait l'air de l'obséder, surtout vers la fin de sa vie. En même temps, sa relation avec son épouse avait l'air passablement compliquée. Mais ce texte-ci est surprenant à deux égards : il ne parle qu'indirectement de religion, et directement de sexualité. En général, chez Tolstoï, c'est plutôt l'inverse.

Eugène Ivanovitch Irténiev mène la vie oisive de jeune fils de famille à Saint Petersburg. Comme tous ses pareils, il a de l'argent de poche, une place dans l'armée et un arrangement avec une couturière qui lui sert de maitresse/courtisane/prostituée plus ou moins attitrée. Tout change le jour où son père meurt. Il décide de reprendre la gestion du domaine, découvre que celui-ci est grevé d'hypothèques, part vivre à la campagne, se lance dans le travail à corps perdu. Mais au bout de quelques mois, son célibat forcé commence à lui peser. Il conclut un nouvel arrangement avec une paysanne, Stepanida. Cela dure quelques temps, puis il rencontre une jeune fille de la noblesse, en tombe amoureux, l'épouse. Leur couple est heureux ; ils ont un enfant. Il aime sincèrement son épouse, celle-ci le place sur un piédestal. Mais un jour, il recroise cette paysanne qu'il avait totalement oubliée. Et il est pris pour elle d'un furieux, irrépressible désir…

De façon étonnante pour un écrivain dont certains personnages n'hésitent pas à se couper un doigt plutôt que de succomber à la tentation, il est donc ici question de frustration sexuelle. le religieux entre très peu dans les sentiments d'Irténiev : recourir à des services sexuels tarifés ne lui cause aucune honte. Tous ses tourments viennent du fait qu'il est vraiment tombé amoureux de Stepanida, et que s'il donne libre cours à ses sentiments il ruinera la vie de sa femme, et par la même occasion celle de son enfant. L'histoire a donc quelque chose de curieusement moderne – en fait, on n'est pas très loin d'un scénario à la Woody Allen, avec quelques scrupules en plus pour le personnage principal masculin.
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Une nouvelle qui se lit très vite, c'est facile à lire et bien écrit ; on s'attend toutefois à un peu plus de pathos. Moralisateur ou y aurait-il un sens plus profond ? La tentation de la chair qui tourne à l'obsession et la mort. A lire, mais pas indispensable.
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On démarre dans la vie avec de bonnes résolutions, mettant plus de raison qu'on ne le pense, et quand les premières difficultés se présentent, on trouve bien une parade à cela : ou en conscience on verra cette question plus tard, ou on trouvera un palliatif qui vaut ce qui vaut mais qui semble à peu près justifier l'écart qu'on s'apprête à commettre.

Eugène Ivanovitch Irténiev est un jeune homme qui ressemble un peu à son auteur à cause de ses considérations morales qui vont faire tout de même l'objet de petits arrangements chemin faisant et sembler répondre à la deuxième éventualité exposée plus haut.

Irténiev se dit que "sa vie avait commencé à seize ans (sa sexualité) et jusqu'ici tout s'était bien passé, en ce sens qu'il n'avait pas sombré dans la débauche, ne s'était engoué d'aucune femme et n'avait jamais été malade. Il avait séduit à Pétersbourg une couturière ; celle-ci ayant mal tourné, il s'était arrangé autrement ; ce côté de son existence avait été si bien organisé qu'il ne le troublait guère .."

A la faveur de la succession, suite à la mort de son père, Irténiev se retrouva moyennant de sérieux arrangements à la tête d'un domaine important à la campagne, chose qui le changeait puisqu' habitué à la vie à Pétersbourg, .à ses aspects canaille et tutti quanti, son installation à la campagne même si elle fut accaparée par une importante reprise en main du domaine, Il se posa assez vite pour le jeune Irténiev une complication d'ordre intime : "une continence involontaire commençait à mal agir sur lui." Et comme écrit le narrateur en tête de chapitre : "Au milieu de ses soucis, il se produisit une chose, à vrai dire peu importante, mais qui néanmoins tourmentait Irténiev", de cette chose apparemment non fondamentale, contournable, c'est pourtant ici que commence le vraie histoire du protagoniste de la nouvelle. Son père et son grand-père s'interdisaient toute intrigue avec leurs servantes ..

Irténiev, lui, se dit : " qu'il ne s'agissait plus de serves à présent, il décida qu'il n'y avait pas lieu de chercher autre part ce qu'il pouvait trouver sur place. L'essentiel était que personne n'en sût rien ; ce n'était pas le goût de la débauche qui le poussait, se disait-il, mais le souci de la santé. Cette décision prise il se sentit encore plus inquiet : quand il s'entretenait avec le staroste, avec les paysans ou le menuisier, il mettait involontairement la conversation sur les femmes, il s'employait à faire durer la conversation. Et ses yeux épiaient de plus en plus les femmes .."

Déjà à ce stade, j'en tire un enseignement : Anne Coldevy Focard, écrivain, critique, éditrice, traductrice, soutient que Tolstoï s'encombre de sa facette de moraliste dans ses fictions, mais quand celui-ci introduit dans son texte autant de références liées à la sensualité qu'il sent dévastatrice, comment peut-on le prétendre ? C'est vrai aussi pour Anna Karénine, La Sonate à Kreutzer... Ici l'obsession de la chair est vraiment le sujet central. Ne pas la mettre en résonance avec les préceptes de la vie, ne pas parler d'interdit, n'est-ce pas cela pourtant qui précisément donne une dimension supérieure à la chose qu'on ne saurait voir ou qu'on penserait dominer.
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Léon Tolstoï sublime un Feydeau dramatique avec brio. L'élan du coeur qui pousse le sang dans la sphère intime est le personnage principal de ce roman court.

Eugène est un jeune homme bien sous tous rapports, en passe de sauver l'héritage laisse par son père. Mais Eugène est un homme et à des besoins qu'il ne réprouve pas. Stépanida, dont le mari vit à la ville, comblera le jeune homme flamboyant de désir.

Le désir est-il un mouvement que l'on puisse maîtriser ?

"Il savait qu'il pensait tout contrôle sur lui-même, qu'il devenait presque fou. Sa sévérité envers lui-même n'avait pas faibli d'un poil ; au contraire, il voyait toute l'abomination de ses désirs, et même.de ses actes, car ses marchés dans la forêt étaient déjà des actes. Il savait que, pour peu qu'il la rencontre quelque part, de près, dans l'obscurité, s'il pouvait l'effleurer, il s'abandonnerait à ce qu'il ressentait. Il savait que seule la honte vis-à-vis des autres, vis-à-vis d'elle et de lui-même le retenait. Et il savait qu'il recherchait les circonstances dans lesquelles cette honte passerait inaperçue : l'obscurité, ou bien un attouchement qui submergerait la honte sous la passion bestiale."

Une couverture plus que suggestive, et pourtant d'une simplicité douce ; l'image même du diable à la peau douce et rose.
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