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EAN : 9782846360319
170 pages
L'Esprit des Péninsules (30/11/-1)
4.5/5   1 notes
Résumé :
Suite à un problème de robinet tchèque mal fermé et à un providentiel détournement d’avion, monsieur Moritz a obtenu l’asile politique en Allemagne, où il partage l’appartement et l’existence précaire de monsieur Prague -qui n’est autre que Vlastimil Třešňák lui-même.
L’un peint et l’autre écrit, l’un porte une splendide bague ancienne et l’autre remarque un bijou identique au doigt de son codétenu lors d’une garde à vue. Intrigué par cette coïncid... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Un certain Monsieur Prague (qui n'est autre que Vlastimil Třešňák lui-même, dans ce roman), se retrouve en garde à vue dans un commissariat de police, avec un codétenu pour consommation de haschich. Comme par hasard, les murs du commissariat sont recouverts d'affiches colorées montrant des images de champs de marijuana dans les montagnes d'Afghanistan ! Et le policier qui l'interroge, porte au cou un pendentif en forme de feuille de marijuana !

Vous l'aurez compris, ce roman est d'une irrésistible loufoquerie.

Monsieur Prague remarque que son codétenu porte une bague qui s'enroule au doigt comme un serpent… Cette bague, il l'a déjà vue quelque part, mais où et quand ?
Le mot-clé dans cette histoire, c'est cet « anneau ». Monsieur Prague va aller en bibliothèque et demandera à avoir accès à tous les livres qui comportent le mot anneau dans leurs titres !

Le personnage de Monsieur Prague est un peu un mélange du brave soldat Chvéïk de Jaroslav Hašek, et du Lieutenant Boruvka de Josef Škvorecký, car à la fois, il se moque des autorités de façon ironique et subtile, et il est tenace dans son enquête, tel un bon inspecteur de police.
Je retrouve la plume habile et malicieuse de l'auteur de
« On ne mange pas la bouche pleine », son 2e roman.

-Enquête et quête de soi pour deux exilés tchèques-
voilà comment on pourrait intituler autrement ce roman. L'auteur, Vlastimil Třešňák, a dû lui-même quitter la Tchécoslovaquie, et s'exiler à l'Ouest.
Il était signataire de la Charte 77, ce courageux manifeste en faveur du respect des Droits de l'Homme, et de ce fait il avait été qualifié de dissident et très vite interdit de toute activité publique par le régime totalitaire communiste.

L'Ouest, pour lui, ce fut la RFA, la République Fédérale d'Allemagne. Un déracinement qui lui a inspiré
« L'essentiel au sujet de Monsieur Moritz », dont l'action
se situe à Francfort-sur-le-Main et met en scène la cohabitation de deux hommes, un artiste peintre, Monsieur Moritz, et Monsieur Prague, écrivain, avatar de l'auteur.
Ces deux exilés sont des traîne-savates, aux bourses plates et ventres creux.
Ce sont des glandeurs de haut vol, fumeurs de pétards et buveurs de bière.
Pour l'absurdité bouffonne de ses récits et de ses personnages, Vlastimil Třešňák est souvent considéré comme l'héritier de Bohumil Hrabal, dont il était l'ami.

Dans ce récit, tout est sujet à gags décalés, même les heures les plus dramatiques de l'Histoire de l'ex-Tchécoslovaquie.
Qui est Monsieur Moritz, se demande Monsieur Prague, et quelle est la relation entre la bague qu'il porte, et celle, identique, entrevue au doigt d'un vieux crasseux, nommé Müller ?
Monsieur Prague va se transformer en détective pour découvrir le secret de ce bijou, et ce faisant, le secret de la disparition des parents de Monsieur Moritz, lors de leur fuite à l'Ouest…

Pendant que Monsieur Moritz s'évertue à faire figurer sur une toile « quelque chose qui aurait disparu corps et
biens », Monsieur Prague vaque à sa mission d'investigation et prend racine dans un café anarchiste qu'affectionne une jeune femme brune, avec un sac en jean à l'emblème d'Amnesty International
Abracadabrantesque, aurait dit un de nos célèbres chefs d'état, en lisant des phrases comme celles-ci :
« Même à travers le mur, on voyait que Monsieur Moritz avait rougi. » ; « Monsieur Prague a pris son blouson de jean à la poignée de la fenêtre et s'est penché sur Monsieur Moritz, comme un père sur son fils qui n'arriverait pas à se faire entrer dans le crâne la division des fractions. » ; « Un genre d'endroit où le silence fait l'effet d'un brochet dans un étang. »

Cuites monumentales et dialogues de sourds animent l'enquête, et on assiste aux habitudes répétitives du quotidien des deux colocataires, et à leurs agacements mutuels, vu l'exiguité de leur espace de vie.
Les quatre-vingt-deux marches menant à leur logement , situé « rue des Braves gens », un oeuf dur tapoté le matin sur la machine à écrire, deux pinceaux couverts de bleu parisien, qui viennent et reviennent comme le refrain d'une ritournelle… ritournelle qui est la marque du chanteur populaire qu'est Vlastimil Třešňák dans son pays. (Il a de multiples talents : outre celui d'écrivain, il est musicien, chansonnier, et aussi peintre).

Au fil de ces pages loufoques, pleines de télescopages, de dérapages, de cabrioles et de pirouettes d'écriture,
« L'essentiel au sujet de Monsieur Moritz » sera révélé cahin-caha dans les effluves d'un thé au rhum.
Un de ses tableaux, entre-temps, aura été recyclé en banderole destinée à la jeune femme brune pour une manifestation en faveur des « Habitants Noirs d'Afrique ».

Quant à l'essentiel au sujet de Monsieur Prague, s'il s'était résumé jusque-là en quelques mots : « bonheur, histoire, paix, guerre, crime, châtiment », il lui faudra dorénavant compter avec un concept inédit, celui qui fera se craqueler ses couches de peintures de camouflage burlesque,
et qui se résume en « un mot à cheveux bruns » : l'amour.

Ainsi va la ballade de l'exilé, se battant avec pour seules munitions les mots,
et avec la nostalgie du pays perdu, en sanglotant de rire !

C'est à la suite d'un interrogatoire musclé de la police politique tchécoslovaque que Vlastimil Třešňák avait pris ses cliques et ses claques pour s'installer à l'Ouest.
Mais sa verve joyeuse, lucide et sarcastique ne l'a jamais quitté. Avec sa guitare, il livre des chansons à boire, à aimer, avec des textes tissés d'argot et de politique, mais sans jamais sacrifier à la poésie.

Depuis 1990, il vit de nouveau à Prague. Il est très lié au quartier autrefois ouvrier de Karlín, dont il est originaire. Un quartier à la mauvaise réputation, due à une forte présence Rom, des habitants souvent victimes de la xénophobie de la majorité. Vlastimil Třešňák, lui, s'en fiche! Il a grandi parmi les Roms et joue fréquemment avec ses amis musiciens.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Depuis longtemps il a cessé de se demander ce qu’était le bonheur.
(…) Il y a beau temps qu’il n’admire plus l’Histoire, depuis qu’il sait que les trois mousquetaires étaient en fait quatre et que le nombre des apôtres ne devait pas être le bon non plus.
Il tire trois fois sur sa cigarette et comme il n’a personne à qui la passer, il se demande si la paix constitue seulement un intervalle entre deux guerres.
Mais il n’est pas cynique.
« Je ne sais pas. Je ne suis même pas sûr que j’irais me dénoncer si je tuais quelqu’un, à moins qu’elle m’en convainque », se dit monsieur Prague avant de s’arrêter devant le dernier des mots qui lui reviennent après une interruption de plusieurs années.
C’est le mot amour…
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La jeune femme à la table voisine a agité son stylo comme elle aurait secoué un thermomètre et a jeté un coup d’œil affolé alentour, comme si elle avait 42°C.
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