Sous-titré Paroles d'élèves, pratiques de profs, cet essai donne un grand coup de pied dans la fourmilière scolaire en renversant le paradigme habituel qui affirme que c'est l'enseignant•e qui fait l'école. Et si on écoutait les élèves ? Et si nous leur permettions de s'exprimer plus librement ?
Bien entendu, ces pratiques inspirées de Freinet ou de la pédagogie institutionnelle remettent en cause le schéma classique et mettent certain•es enseignant•es dans une position inconfortable. Mais est-elle plus inconfortable que celle où la classe ne coopère plus, voire sabote le cours ? Vers qui se tourner alors ? Comment partager ses difficultés et avec qui ?
Il convient donc de se remettre en question, de se défaire de son omnipotence pour aller vers l'élève et partir de ses propres représentations. En mettant de côté le qu'en dira-t-on et les persifflages de collègues moins bienveillants - ou peut-être juste inquiets de ne plus faire "comme on a toujours fait"...
En cette période où les inégalités se creusent, tentons d'être attentifs à tou•tes, essayons de ne laisser aucun élève sur le carreau et penchons-nous sur le tutorat, sur l'échange entre pair•es, sur les pratiques collaboratives qui favorisent la cohésion du groupe et la solidarité. Ne gommons pas les spécificités de chacun•e mais faisons-en une richesse qui donnera du relief à nos cours.
Quelle place sommes-nous prêt•es à donner aux élèves mais aussi aux autres intervenants scolaires: la direction, les éducateurs, les personnels oeuvrant à l'inclusion ? Et d'ailleurs comment faire une réelle inclusion tant des élèves en situation de handicap que des élèves allophones ? C'est une des questions que pose l'autrice sans réellement y répondre mais en livrant des expériences vécues dans ses propres classes. Objective dans ses témoignages, elle ne craint pas de nous faire part de ses échecs comme de ses réussites.
Enseigner ce n'est pas débiter un savoir à une classe passive. C'est remettre constamment l'ouvrage sur le métier, faire des liens avec le monde "hors-école", tester de nouvelles méthodes, être ouvert•e au dialogue, interroger nos buts et nos pratiques. C'est faire société et former les citoyens de demain. C'est ce que cet ouvrage rafraichissant et plein d'optimisme réaliste nous propose. Ecrit par une prof de français de collège, l'essai nous invite à repenser nos classes, nous lance sur des pistes inexplorées, nous réconforte par le récit de difficultés qu'on se croit parfois seul•e à éprouver. Salvateur !
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Les consignes paradoxales que nous pouvons avoir envers les élèves sont frappantes : d'un côté, travailler en silence, ne pas contredire l'enseignant•e, ne pas poser de questions "hors sujet". De l'autre côté, prendre la parole, s'impliquer, poser des questions. Difficile exercice que nous leur demandons là, équilibre malaisé dans une période de la vie où prendre la parole, c'est engager son être, s'exposer aux regards des autres, craindre d'être jugé•e, se sentir fragilisé•e.
Poser la question de l'émancipation, c'est poser la question des finalités de l'école ; pourquoi apprendre ou enseigner ? A quoi veut-on former les jeunes ? Quel sens donne-t-on à l'école ? A quelle société l'école contribue-t-elle ?
Loin de la peur de l'autre et de ses différences - sociales, culturelles, statutaires -, se relier dans une école du commun, accepter de partager des expériences, des réflexions mais aussi des craintes et des difficultés permet de sortir de l'isolement, de la peur, du découragement et du sentiment d'impuissance pour nous réemparer, collectivement, de notre pouvoir d'agir.
L'expérience personnelle paraît en effet difficile à partager parce qu'elle nous engage, elle met en jeu qui nous sommes, les valeurs que nous défendons pour l'école et la société et nous oblige à accepter la confrontation avec l'autre, dans sa propre singularité et avec ses différences.
De façon consciente ou inconsciente, nous participons à un projet politique en travaillant comme enseignant•es. L'enjeu est de savoir comprendre lequel.