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Ce qui m'a attirée d'abord dans ce recueil d'un poète que je ne connaissais pas encore, c'est la qualité des traductions: Pierre Jean Jouve, Jean Lescure, André Pieyre de Mandiargues, Francis Ponge ...et, chapeautant le tout, Philippe Jacottet, dont j'ai dit ailleurs tout le bien que je pensais de ses poèmes et de sa traduction en alexandrins de l'Odyssée. Il est rare qu'un poète soit traduit par ses pairs: Giuseppe Ungaretti a visiblement attiré les plumes de ses collègues..

On comprend pourquoi: une poésie concise, brillante, d'une apparente simplicité et toute en raccourcis, en images vibrantes qui, comme un caillou jeté dans l'eau, tracent, longtemps après leur lecture, des cercles concentriques dans nos mémoires..

Parfois ce n'est qu'une image qui s'imprime et le message reste énigmatique, comme dans ce poème Léda, écrit en 1925:.

La très pâle les dents
Lumineuses l'éteignent.

Et dispersé dans le présage de l'oubli
J'en serre de mes bras glacés
La dépouille gorgée de reflets,
Chaude encore,
Et qui déjà tressaille,
Dans un nouveau pullulement caché
De vagues.

Mais parfois c'est une joie, une douleur, une émotion - et elles sont immédiatement partagées, dans l'éclair d'une formulation étincelante:

Le soir venu
Je reposais dans l'herbe monotone,
Et je pris goût
A ce désir interminable,
Cri trouble ailé
Que retient la lumière quand elle meurt.

Le recueil de gallimard s'appelle "Vie d'un homme" et on suit chronologiquement celle de Giuseppe Ungaretti. Il perd un fils, et cette mort cruelle le laisse désolé, abandonné, ...orphelin:

Si, vivant, tu revenais à ma rencontre,
La main tendue, Je pourrais de nouveau,
Dans un élan d'oubli, serrer, Frère, une main.

Mais rien de toi, de toi plus ne m'entoure
Que rêves, que lueurs,
Les feux sans feu du passé.

la mémoire ne déploie rien que des images,
Et moi déjà
Je ne suis plus pour moi
Que le néant annihilant de la pensée.

Il perd les siens, et il se perd: les derniers poèmes parlent aussi de la vieillesse, hantée par la peur de la mort, mais veillée par les tendres mots de l'amour:

Dors à présent, coeur inquiet,
Dors à présent, va, dors.

Dors, l'hiver
T'a envahi, menace,
Crie : "Je te tuerai,
Tu n'auras plus sommeil."

Ma bouche, dis-tu, donne
Paix à ton coeur,
Dors, dors en paix,
Écoute, va, ton amoureuse
Pour triompher de la mort, coeur inquiet.

J'ai doucement voyagé entre ces énigmes et ces paroles fraternelles, et je me suis fait un ami. Ungaretti fait maintenant partie de ces voix que l'on aime retrouver, de ces mots que l'on se prend à relire, à redire...

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"D'une fleur cueillie à l'autre offerte
l'inexprimable rien"
C'est par ce court et très beau poème ("Toujours") que s'ouvre "La vie d'un homme" (Vita di un uomo), recueil de Giuseppe Ungaretti regroupant des textes parus entre 1914 et 1970.
Fondateur aux côtés d'Eugenio Montale et de Salvatore Quasimodo de l'école hermétique italienne, Ungaretti a toujours promu une poésie qu'il voulait sans rythme ni rime, non conventionnelle. Dans tout son parcours littéraire, il a défendu une écriture intimiste et sensible. Il perdit un enfant, terrible épreuve dont il ne se remis jamais et qui donna à son écriture un ton très douloureux, puis un élan mystique pour aboutir enfin à une phase de résignation. Cette dernière période qui coïncidera avec sa vieillesse donnera de magnifiques poèmes, pleins de maturité. Son écriture fut également inspirée par la vie quotidienne et les vicissitudes de son époque (les deux guerres mondiales, le nationalisme). Malgré cela, il a toujours voulu la tourner vers l'humain et surtout vers l'espoir.

Le poète se définissait souvent lui-même comme un "girovango", un nomade. Sa poésie tend pourtant à une recherche d'attachement, à un sentiment très fort d'unité, à une recherche ininterrompue de sens. Qu'elle soit dépouillée jusqu'à l'extrême (je pense ici aux deux magnifiques vers "M'illumino d'immenso" - Je m'illumine d'infini) ou dans des textes plus longs, sa poésie atteint toujours une vérité, un sentiment de pureté. Elle se déploie, se fait sens puis plénitude absolue, dans un style toujours allusif, tout en retenue, que l'on dirait minimaliste.

"La vie d'un homme" est un chemin que j'aime souvent emprunter. Il y a dans les poèmes de Giuseppe Ungaretti une grâce, une humilité et une ineffable beauté que le temps et mes différentes relectures (ce recueil m'accompagne depuis de très nombreuses années) n'ont jamais altéré.
À signaler la remarquable traduction des textes par Jean Lescure et Philippe Jaccottet.
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Le livre regroupe des poèmes pris dans différents recueils de l'auteur sur l'ensemble de son oeuvre et de sa vie.

Belles poésies, qui effleurent la vie, la mort, la religion, l'amour. Ce n'est pas désagréable, mais j'aurais aimé plus de rythme, plus de lyrisme.

Découverte plaisante, mais sans plus.
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Une très belle découverte en poésie. Beaucoup de douceur et de musicalité dans ces poèmes, brefs, vifs.
Le style me fait un peu penser à celui d'Apollinaire, avec un peu de Charles Juliet.
Les poèmes, brefs, sont parlants et m'évoquent les bords de la Méditerranée.
Très émouvants et chantants, ils m'ont fait voyager et ils font saisir, toucher du doigt, un sens au monde.
Je recommande vivement la lecture de ce poète, que je regrette d'avoir découvert aussi tard.
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Un recueil qui m'a laissé un sentiment mitigé.
D'un côté, la brièveté et la simplicité tranchante des poèmes m'ont assez plu. le style est efficace et sans fioritures. Les thématiques du désert, de la montagne, des saisons, de la guerre, de la vie, du temps sont certes des sujets souvent repris, mais il agréable de lire sous la plume d'Ungaretti une marque à la fois personnelle et touchante. Cependant, d'un autre côté, la voix monotone qui parcourt la lecture des poèmes ne m'a pas emporté plus loin. Toutefois, je ne peux en retirer un souvenir négatif.
Je laisse à d'autres la subjectivité et la sensibilité d'en parler mieux que je n'ai pu le faire ici...
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Je l'ai déjà signalé à plusieurs reprises, lire de la poésie n'est pas évident pour moi, je dois lire plusieurs fois les poèmes pour bien les « absorber » alors écrire au sujet de la poésie, c'est compliqué pour moi… J'étais d'ailleurs plutôt nulle quand il s'agissait de faire l'analyse de poème au lycée, seul le Spleen de Baudelaire et sa petite chauve-souris furent indulgents avec moi. Vous l'aurez compris, cet article sera bien court…

Je m'attendais à quelques poèmes de guerres, il y en eut moins que ce que je pensais mais ils étaient poignants et beaux.

Enfin, c'est principalement un recueil sur le déracinement, l'errance, l'abandon de soi et d'un pays. Par son prisme très personnel (enfant d'Egypte, puis d'Italie et de France, ayant connu les guerres), et de quelques rencontres fugaces en perdition, agissant comme un miroir pour son âme.


Lien : https://barauxlettres.wordpr..
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