Ma connaissance des détectives des romans policiers se limitait jusqu'à présent à Hercule Poirot, Miss Marple, Sherlock Homes,
Nick Carter, Rouletabille, frère Cadfael et, pour notre époque, au commissaire Adamsberg. Je dois ajouter, désormais, Bony dont j'ignorais l'existence il y a encore deux jours, (de la date à laquelle cet article est écrit).
Bony, métis aborigène par sa mère, européen par son père, inspecteur de police, est un personnage créé par
Arthur Upfield que je ne connaissais pas davantage.
Mon amie Fred m'a prêté sept romans d'un coup de cet auteur anglo-australien qui a sillonné l'Australie, en aventurier explorateur, et a acquis une connaissance certaine du bush, des aborigènes, des fleuves, des moeurs des habitants... Né en 1890 en Angleterre, il est décédé en 1964 en Australie.
Le méandre du Fou a été publié en 1963 alors que, dès les années 30, l'inspecteur
Bonaparte entamait déjà ses enquêtes criminelles, en toute confidentialité littéraire au début, avant de connaître la célébrité jusqu'au milieu des années 70, 80, notamment grâce à des adaptations pour la télévision. Près de 30 romans ont été consacrés aux enquêtes de ce «
Sherlock Holmes du bush ».
Le méandre du Fou transporte les lecteurs d'aujourd'hui à une époque fort reculée du Xxème siècle. Pour ma part, il a constitué un véritable dépaysement :
Géographique, puisque l'enquête de l'inspecteur
Bonaparte se déroule en Australie, et non pas dans les grandes villes, mais dans les terres reculées aux alentours de fermes d'élevage de moutons, soumises, dans le cas présent, aux caprices de la rivière Darling dont les inondations périodiques rendaient indispensable la construction ou le renforcement de digue de protection ; renforcement auquel, notre héros, coincé par la rivière, à la ferme de Mira, prend part, aux côtés des ouvriers et des trimardeurs, avec une certaine bonhomie, sans perdre de vue son enquête.
Le Darling, en mauvaise santé, de nos jours, a d'ailleurs fait parler de lui récemment (2023) avec ses centaines de milliers de poissons morts, agglutinés et flottant à sa surface. Catastrophe attribuée à la canicule et à la raréfaction de l'oxygène de l'eau.
Dépaysement, encore, dû à la dimension de l'espace de jeu des protagonistes. En effet, les terrains d'élevage se chiffrent en centaines de milliers d'hectares, le plus proche voisin peut se situer à des dizaines de kilomètres et l'on se déplace en avion de préférence.
Dépaysement enfin, par la connaissance d'un petit bled qui s'appelle Bourke, d'où le Darling prend sa source, et de la vie de ses habitants à l'époque.
En effet, au-delà de l'enquête policière, le roman informe le lecteur sur la vie d'alors de ces fermes qui employaient, notamment à la période de la tonte des moutons, des trimardeurs, ces vagabonds, chemineaux, qui marchaient sur de très longues distances, campaient où ils pouvaient non loin des fleuves, vivaient de la pêche, de petits boulots et se faisaient employer par les fermiers. Cette existence, l'auteur l'a menée des années durant ; ce qui lui a permis cette connaissance intime de la vie du bush qui fait plus que transparaître dans ses livres.
Cependant, dans cet opus, des Aborigènes, il est peu question, mises à part les allusions du détective Bony sur le peuple d'appartenance de sa mère, ainsi que les qualités intuitives qu'elle lui aurait transmises.
Quant au nom choisi,
Napoléon Bonaparte,
Arthur-Upfield fait montre d'un certain humour pour ainsi nommer, son plus fin limier de Queensland.
Si l'on en croit sa biographie fictive, il aurait été baptisé ainsi par sa nourrice qui l'aurait surpris entrain de grignoter les pages d'un livre sur l'empereur des Français. En tout cas, Bony a rencontré aussi le succès auprès des lecteurs français grâce à la traduction des romans d'
Arthur Upfield, dans la collection 10/18 de la série des Grands détectives dirigée par J-C Zylberstein au cours des années 90/2000.
Pat.