« A te voir marcher en cadence,
Belle d'abandon,
On dirait un serpent qui danse
Au bout d'un bâton. »
Charles Baudelaire –
Les fleurs du mal
Mon voyage continue dans l'oeuvre de
Maryna Uzun, un voyage poétique et mélodieux où les mots, pareils à des notes de musique, s'accordent élégamment pour composer des images parfois surprenantes.
*
Sur cette partition musicale,
se sont superposés
les pas graciles d'une petite ballerine.
Croches sautillantes, virevoltantes,
Pauline est gaie et passionnée.
Telle une fée dépliant son jupon de mousseline,
elle s'envole de Kharkov
espérant aller au bout de son rêve.
Intégrer le Conservatoire de Paris
et devenir un jour peut-être,
danseuse étoile.
Une consécration pour cette jeune femme qui,
depuis sa plus tendre enfance, se prive.
Vie de passion et de répétitions,
Vie d'exigence et de persévérance.
« Et ton corps se penche et s'allonge
Comme un fin vaisseau
Qui roule bord sur bord et plonge
Ses vergues dans l'eau. »
Baudelaire
Dans la ville de lumière, la jolie demoiselle,
Comme Icare qui rêvait de conquérir le ciel,
Se brûle hélas les ailes
A tenter de rejoindre les étoiles.
Rêves brisés, fracassés, émiettés.
Au détour d'un jardin,
ses yeux embués
se posent dans ceux de Tom,
dont le regard doux empourpre son coeur.
Tom est un baume sur son chagrin.
« Pauline observa le jeu des nuages qui évoluaient dans l'azur, et la vie lui sembla, d'un coup, étonnamment belle. »
Et c'est avec simplicité qu'il entre dans sa vie.
Tom devient son ancre, son présent, son avenir.
Désirs et plaisirs.
Donner et se donner.
Le ballet de deux corps.
Parfait accord.
« Leurs deux vies lui semblaient deux fleuves qui se rejoignent. »
Amour mutin sous les toits de Paris,
Rêves à deux.
Lui, le théâtre.
Elle, la danse.
Parfait accord.
« … elle improvisa une poupée mécanique qui à la fin, se transformait en un être vivant. Cela ne dura que trois minutes, mais la foule commença à s'attrouper autour d'elle. Puis Tom et Pauline s'envolèrent, main dans la main, sans faire la quête. »
Mais la vie cache un arrière-goût bien amer.
Car le bonheur est éphémère,
fragile, versatile,
Un éclat qui s'enfuit.
La petite étoile filante s'étiole,
Avalée par la nuit.
Aspirée par le vide.
Amputée par l'absence.
La douleur l'étreint.
Son coeur s'éteint.
La vie est un manège qui ne cesse de tourner.
Parfois douce, d'un bleu azuréen,
Elle se marbre aussi
de gris et de suie.
« Il faut que le noir s'accentue pour que la première étoile apparaisse. »
Christian Bobin
Le vent l'emmène et l'enlève,
Jusqu'à ce qu'il la ramène et l'apaise.
*
L'amour, la vie et ses ombres, s'entrelacent avec poésie.
J'aime l'écriture de
Maryna Uzun malicieuse, tendre, délicieusement décalée.
Douce comme un gant de velours,
légère comme de la dentelle.
« Lorsque Tom ouvrit la porte d'entrée, les feuilles de papier qui submergeaient la table s'éparpillèrent partout, entraînées par le courant d'air. C'était blanc comme une volée de mouettes, et Pauline crut entendre le bruissement de leurs ailes. »
*
Pour conclure, une nouvelle fois, je me suis laissée portée et emportée par le récit de
Maryna Uzun, mélange de bonheur et de douceur, de souffrances et de silences, de trêves et de rêves, écrivant le carrousel de la vie.
Merci
Maryna Uzun pour cette parenthèse que vous m'avez offerte, une jolie lecture tout en nuances et délicatesse.