Ecoute, dit son père. L'homme n'est qu'un appendice de la femme. La femme est entière, elle n'a pas besoin de l'homme. Mais l'homme a besoin d'elle. Alors c'est elle qui décide. C'est pour ça que les règles n'ont aucun sens et qu'elles changent sans cesse. On ne les établit pas ensemble.
Il sut alors que Roy l'avait aimé et que cela aurait dû lui suffire. Il n'avait simplement rien compris à temps.
Une tempête s'abattit sur l'île durant presque une semaine, il n'avait rien à manger. Il ne voulait pas sortir. Il lui semblait que la cabane allait s'effondrer sous la pression des éléments. La grêle martelait les fenêtres, puis la pluie, la neige, des vents atroces, l'obscurité permanente. Il détestait cet endroit. Il rêvait d'un bon bain chaud.
Il l'allongea sur une couverture dans la pièce principale, puis le recouvrit des autres couvertures et des sacs de couchage.
Au matin, Roy se rappelait les pleurs et il lui semblait que c'était justement ce qu'il n'était pas censé faire. Par une sorte d'accord tacite pour lequel il n'avait pas été consulté, il était supposé les entendre la nuit puis, le jour venu, non seulement les oublier mais faire en sorte qu'ils n'aient jamais eu lieu.
Roy leva les yeux. Son père était penché en avant, les bras sur les genoux, la tête baissée. Il se frottait le front. Il demeura ainsi longtemps. Roy ne trouvait rien à dire, alors il ne disait rien. Mais il se demandait pourquoi ils étaient là, quand tout ce qui semblait importer à son père se trouvait ailleurs. Cela ne lui semblait pas logique du tout que son père soit venu s'installer ici. Il commençait à se demander si son père n'avait pas échoué à trouver une meilleure façon de vivre. Si tout cela n'était pas qu'un plan de secours et si Roy, lui aussi, ne faisait pas partie d'un immense désespoir qui collait à son père partout où il allait.
un roman froid , glacial et TERRIFIANT
Un livre qui m' a mis terriblement ma à l aise
« Ils allaient se coucher le soir épuisés, Roy ne parvenait plus à rester éveillé pour écouter son père et il réussissait parfois à oublier que son père allait mal. Il commença même à imaginer qu’il allait bien, dans la mesure où il ne pensait plus vraiment à lui. Il vivait au jour le jour, chaque journée tout entière consacrée à une activité, puis il se couchait pour se lever à nouveau, et comme il travaillait aux côtés de son père, il imaginait que son père ressentait les mêmes choses. »
J'ai le sentiment qu'une vie est en réalité constituée de plusieurs vies qui s'additionnent pour former un ensemble incroyablement long. Ma vie à cette époque n'avait rien à voir avec celle d'aujourd'hui. J'étais quelqu'un d'autre. Mais ce qui m'attriste, c'est que toi tu n'auras pas d'autres vies.
C'est quoi ton rêve ? Roy réfléchissait et ne trouvait rien à répondre. Il avait l'impression qu'il était seulement en train d'essayer de survivre au rêve de son père.