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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Mario Vargas Llosa construit avec cette oeuvre une truculente satire globale mais aussi une expérience d'écriture. S'il a tenté au début de la création de ce livre, une oeuvre sérieuse, il a vite enfourché la fine frontière qui sépare l'humour de l'ironique caricature, impliquant un jugement de valeurs que l'auteur assume pleinement, puisque son ironie littéraire est le véhicule de son indignation. Comme dans L'éloge de la marâtre ou Les cahiers de Don Rigoberto, l'humour et la parodie signent là encore le plaisir du texte.

Partant de faits réels, Vargas Llosa livre le récit grotesque de l'organisation officielle mais discrète d'un service de prostitution pour étancher les besoins des troupes militaires péruviennes en zone amazonienne, évitant ainsi le viol des habitantes. Cette mission secrète de proxénète institutionnel est confiée à un zélé militaire dépourvu de vice et respectueux du pouvoir et de la hiérarchie, le précipitant dans la destinée d'un monde qui s'oppose à tous ses principes, croisant la route d'un religieux aussi obsédé de crucifixion que les hommes de troupe sont avides de sexe tarifé.
Adossé à la selva, sorte de théâtre environnemental naturel, la narration de Mario Vargas Llosa transforme le mythe stéréotypé péruvien de l'Eldorado amazonien comme terre des possibles en territoire littéraire paradoxal tragi-comique dépourvu d'authenticité, condamnant au passage l'utopie des penseurs indigénistes et régionalistes (voir son essai La utopía arcaica).
L'incongruité règne en maîtresse sur la narration d'inspiration moderniste comme sur le contenu, tant l'auteur maîtrise dans ce livre le mélange des genres littéraires et des sous-genres (information, notes, récit traditionnel, sollicitation, genre épistolaire…), simulant un discours littéraire factuel et pragmatique qui fait semblant de se passer de littérature.
Au-delà de la dénonciation de la double morale des pouvoirs politique, militaire, médiatique et religieux, Vargas Llosa nous prouve à nouveau qu'il est un incroyable architecte du récit littéraire.
Lien : https://tandisquemoiquatrenu..
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Prix Nobel de littérature 2010.

Pantaleon Pantoja est missionné par l'Armée pour créer un service de visiteuses à Iquitos. Mission très particulière qui doit rester secrète pour éviter un scandale national.
En effet, la réputation de l'armée est au plus mal du fait des nombreux viols de civiles par les soldats.
La solution improbable trouvée par les supérieurs de Pantoja est de créer un service qui recrutera des prostituées, des "visiteuses", pour que les soldats puissent assouvir leurs besoins sans compromettre leurs missions et leur réputation.
L'homme va donc créer le SVGPFA (Service de Visiteuses pour Garnisons, Postes Frontières et Assimilés), une petite entreprise avec ses véhicules, ses couleurs, son terrain et même son hymne.
Pantoja, homme rangé avec sa femme enceinte et suivi par sa mère, doit leur cacher sa véritable mission et se faire passer pour un civil auprès de la population.
Pantoja multiplie les sacrifices personnels et professionnels pour mener à bien sa mission, car l'Armée est sa vie. Quelle tournure va prendre cette entreprise originale ?
En parallèle nous est contée l'histoire d'un fanatique religieux, le frère Francisco.

Véritable critique de l'armée tournée au ridicule, du fanatisme religieux, du business de la prostitution, tout en parsemant le récit d'humour.

Les nombreuses didascalies, systématiquement accolées aux dialogues, sont drôles mais parfois très longues et font perdre le fil.
De plus, j'ai été dérangée dans ma lecture par le changement brusque d'interlocuteurs dans les échanges.
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Pour faire face aux plaintes de la population concernant les viols commis par les soldats basés aux frontières du Perou, l'Etat-Major missionne un capitaine fraichement promus pour qu'il mette sur pied un bordel de campagne. Mais ce capitaine, Pantaleon, est si discipliné, si organisé, que le résultat va aller au delà de toute espérance. Il va se retrouver officieusement à la tête de 50 "Visiteuses", nom donné pudiquement aux filles de joie et monter un système qui attendra bien le but de calmer les ardeurs sexuelles des soldats.
C'est très drôle, caustique et burlesque à la fois. La construction par petites touches qui entremêle les différentes actions du roman (l'épopée du bordel, les problèmes de famille de Pantaleon, ses relations avec sa hiérarchie, la presse, un gourou fanatique qui pousse ses fidèles à la crucifixion, ...) donne du rythme au texte qui se dévore alors avec plaisir.
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Quand ses supérieurs le convoquent pour lui confier la mission très spéciale de créer un lupanar pour soldats afin d'éviter les viols à répétitions qui nuisent à la réputation de l'armée dans la ville d'Iquitos, le capitaine Pantaléon en bon officier s'engage à fond dans sa mission secrète. Lui l'officier sobre part s'installer avec sa femme et sa mère dans cette ville amazonienne où la chaleur torride réveille chez les hommes les instincts les plus primaires. A travers les rapports échangés entre Pantaleon et ses supérieurs ou la correspondance de sa femme avec sa soeur, nous découvrons les désopilantes péripéties auxquelles il sera confronté pour mener à bien ce curieux projet.

@Vargas Llosa est un de mes petits chouchous, formidable conteur, il passe de sujets très sérieux comme @la fête au bouc, @la ville et les chiens ou @la guerre de la fin du monde à des sujets beaucoup plus amusants comme @tours et détours de la vilaine fille ou l'enchanteur @la tante Julia et le scribouillard. Pantaléon et les visiteuses fait indéniablement partie de cette dernière catégorie.

Un prédicateur complètement fou, des personnages hauts en couleurs parmi lesquels des militaires haut gradés, la brésilienne et surtout Pantaléon, une situation qui dégénère sont les ingrédients de ce roman délirant qui m'a beaucoup amusé.

Challenge Nobel
Challenge multi-défis
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Le grand bonheur. Découvrir une écriture bien spéciale, s'y couler sans trop de difficultés, et se repaître de cette histoire avec queue, avec tête, une histoire délurée comme un gloussement de môme gourmand.
Au Noooord, c'était le Pérou. Capitale, Lima. Dans un coin d'Amazonie péruvienne, il y a Iquitos. Il y fait chaud, et moite, ce qui agite considérablement les bistouquettes des soldats nouvellement basés dans le coin. du coup ça trousse ça chevauche et ça engrosse n'importe qui n'importe comment, ce qui n'est pas bien pour le blason de la très catholique armée. Il faut faire quelque chose. Une sorte de bordel de campagne, mais discret, organisé, avec des lois implacables et une main de fer pour tenir tout ça.
Tiens, on va prendre ce Lieutt', là, Pantaleòn Pantoja. le gars est sérieux comme un pape, marié, il vit avec son épouse Pochita et sa môman Leonor, est tout dévoué à l'armée sa grande famille, respectueux des ordres, idéal. On va le nommer Capitaine et l'envoyer avec ses affidés à Iquitos, ses adorables 40° et ses 100% d'humidité, un régal.
La pauvre Pochita et madame Mère ne sont pas ravies d'aller transpirer si loin, surtout que, par mesure de discrétion, on les loge hors de l'enceinte bénie de la Grande Muette tout confort, fi de la vie sociale des épouses de trouffions. Mais Pantaleòn, lui, il obéit. Prend son rôle très au sérieux. Sa première mission lui fera prendre contact avec une mère maquerelle un peu désoeuvrée, Madame Chuchupe, son aide de camp Wong le Chinois, et le serviteur des basses oeuvres, de très petite taille et fort efficace, Choupette. Quelques filles sont d'abord contactées, dont la célèbre Gros-Lolos, la préférée, et trois autres damoiselles en perdition. Les "lavandières", prostituées amateurs qui vont de maison en maison proposer de "laver le linge" avec des gros clins d'oeil tu-m'as-compris-tu-vois-ce-que-je-veux-dire, rejoindront le staff des Visiteuses avec soulagement.
Et Pantaleòn Pantoja, rebaptisé Pan-Pan, va gérer ça de main de maître. Gros succès, soldats heureux, filles ravies d'exercer un métier quasi honnête dans un encadrement salutaire, médecins en visites régulières, ordre et service. Toujours dans le plus grands secret, même s'il devient de plus en plus difficile à garder, notamment auprès de ces dames Pantoja qui croient leur mari/fils en mission d'espionnage.
L'écriture de Mario Var-Llo est étrange. Un coup à prendre. Exemple :
- Ta mère et moi nous nous sommes faites à l'idée d'aller à Iquitos - plie des mouchoirs, range des jupes, enveloppe des chaussures Pochita.
- Vous êtes notre homme, Pantoja - se lève et le prend par les bras le colonel Lopez Lopez. Vous allez mettre fin à ce casse-tête.
- Nous pouvons réciter par coeur vos états de service - ouvre le dossier, brasse des fiches et des imprimés le général Victoria.
- Quel joli garçon tu fais en Capitaine, mon petit - installe la confiture, le pain et le lait sur la table Mme Leonor.
Des pages entières de dialogue comme ça, celui ou celle qui parle étant cité en fin de phrase après description de ce qu'il-elle fait. Un coup à prendre. D'autant qu'on peut passer d'un bureau militaire à un salon familial, sans prévenir, sans trop de concordance des temps non plus. Mais on s'y fait. Je ne sais pas si Vargas-LL utilise ce même style dans ses autres livres (on m'a vivement conseillé la Tante Julia et le Scribouillard), mais ayé, j'ai mon brevet de vargas-llocisme, je suis prête à tout.
Et ce n'est pas le seul style employé. On se retrouve avec des rapports militaires, puis des articles de journaux, puis des diatribes radiophoniques. le sérieux militaire des rapports est hilarant, les coups de coude que se donnent les différents gradés entre eux sont savoureux, les émois de la bien-pensance toute vibrante d'hypocrisie sont bien troussés, comme ces dames d'ailleurs.
Et nulle part trace de récit "normal". Tiens, je ferais bien une battle Vargas-LLosa VS Flaubert, tant l'un balance un style enlevé, avec cette déjante sud-américaine éperdue d'humour, tant l'autre passe des pages et des pages à nous conter le décor d'un salon bourgeois après avoir fait des mois de recherches sur le mobilier en cours cette année-là dans ce quartier là...
De plus, il n'y a pas que le style, dans la vie. L'histoire que nous conte MVL est toute pétée d'humanité, tout y est bien vu, les réactions les affections, les rapports humains, le pognon, les grincements de la hiérarchie, les attachements, les petites jalousies, les petites concessions, les délires religieux, la bêtise des uns, la bonne volonté des autres, la vie, quoi. On s'attache à nos personnages, on espère d'ailleurs qu'à la toute fin, Pan-Pan changera d'avis... Mais chut, le capitaine Pantoja autant que Mario VL font bien ce qu'ils veulent, ce sont les seuls maîtres à bord. Pour notre plus grand plaisir.
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