AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Pourquoi tu danses quand tu marches ? (60)

Personne n'en parlait en ces temps-là, soulignait ma grand-mère, mais le canal de Suez ne consistait pas en un progrès comme les journaux de Paris le proclamaient. Quel est ce progrès qui avait emporté des centaines de milliers de paysans égyptiens transformés en maçons et en terrassiers ? Quel était le progrès qui avait arraché à la mer des tonnes de sable ? Quel était ce progrès qui avait amené des maladies nouvelles comme la dysenterie et le choléra ? Personne n'était content parmi nos ancêtres. Personne. Pis, à peine le premier bateau avait-il emprunté le tout nouveau canal que les Anglais et les Français ont gâché les festivités avec leur rivalité. Les troupes britanniques ont chassé les Ottomans et occupés l'Égypte. Puis, avant la fin de la première guerre mondiale, a laquelle participèrent des cousins directs de ma grand-mère Cochise, les Anglais et les Français se sont mis d 'accord pour se partager toute la région.
p 218 et 219
Commenter  J’apprécie          10
Aujourd'hui encore, les mots sont des jouets merveilleux. Les noms de certaines personnes, de certaines plantes, de certains lieux où certains animaux nous font voyager. Certains mots te mettent en fureur, d'autres en joie.
p179
Commenter  J’apprécie          10
Ecrire était une obligation, une manière quasi biologique de respirer, de vivre par procuration, ce que je m'imaginais se dérouler à Rouen comme là-bas à Djibouti.
Commenter  J’apprécie          10
Ma mère voulait un bel enfant, vigoureux et sain, peu importe le sexe.
Papa la Tige voulait un garçon formidable pour ouvrir le bal de la lignée. Je n'ai assouvi ni le désir de l'un , ni le voeu de l'autre.J'étais une énigme, pas l'aîné bien portant voué à un avenir prometteur dont ils rêvaient tant.
Commenter  J’apprécie          10
C'est important les mots. Aussi important que l'eau, la nourriture ou l'air que tu respire, Béa. Notre vie en dépend.
Commenter  J’apprécie          10
À mi-chemin de notre trajet, un ballet de gros camions bâchés, remplis de légionnaires français, est arrivé dans le sens inverse. J’avais le sentiment qu’il nous dévisageaient. Mon cœur battait la chamade mais ma tante ne donnait pas l’impression de ralentir sa course, ni de se soucier du trafic. Essoufflé, je me suis arrêté. Ma tante a fait de même, pas contente du tout.
- Avance, nous n’allons pas rester au milieu du trottoir.
J’ai eu la bonne idée de lui poser une question juste pour reprendre mon souffle. C’était toujours comme ça, je devais compter sur mon cerveau quand mes jambes me faisaient défaut.
-Pourquoi sont-ils chez nous ?
-Comment ça ?
-Mais pourquoi sont-ils arrivés chez nous ? – Parce qu’ils sont nos colonisateurs.
- Nos co.… ?
- Parce qu’ils sont plus fort que nous.
Commenter  J’apprécie          10
Pas de doute, Ladane était innocente. Elle venait de la brousse, ses parents ne pouvaient plus la garder auprès d’eux parce qu’ils étaient pauvres ou morts. Je ne comprenais pas comment des adultes pouvaient faire des dizaines d’enfants et après les laisser partir où les déposer ici ou là comme s’ils étaient une valise encombrante. J’étais enragé par des adultes et j’imaginais que plus jeunes, les parents de Ladane était de l’espèce terroriste de Johnny et sa bande qui ne semaient que la violence sur leur chemin. Dès que j’évoquais ses parents, la bonne Ladane me regardait avec des yeux de chiot apeuré . Pourtant elle n’était plus une gamine. C’était une jeune femme désirable qui allait sur ses dix-sept ans. Enfin c’est ce qu’elle disait à tout le monde car elle venait de la brousse et là-bas, dans les djebels, personne ne connaissait sa vraie date de naissance. Personne n’avait poussé de chanson le jour de sa naissance. Personne n’avait préparé un gâteau comme Madame Annick pour ses enfants. Personne n’avait prévenu l’imam ou l’officier de l’état-civil. Mais où est-ce que j’avais la tête Béa, il n’y avait pas de mosquée dans le djebel. Les ouailles devaient se débrouiller toutes seules dans les gourbis, c’est-à-dire dans des trous dans la montagne qui n’avait ni électricité ni vaisselle. Elles ne profitaient pas de la science religieuse pour les aider à grandir. Je savais par grand-mère Cochise que ces gens-là avaient tous les yeux un peu rapprochés, les sourcil en accent circonflexe. Ils avaient l’air idiot car toutes les nuits, les enfants cherchaient la lumière dans leur gourbi plus sombre que le cul de Satan. Même que certains n’essuyaient pas la bave qui leur pendait aux lèvres, on les appelait les crétins du djebel. Ils finissaient bouchers ou assassins. Heureusement que Ladane avait échappé à la sécheresse et à la famine du djebel. Même si chez nous, elle devait travailler du chant du coq au coucher du soleil. Même si elle courait dans le coin de la cour qui servait de cuisine pour faire tinter les casseroles et remettre à maman le plat de haricots blancs ou la soupe de pois chiches que mon paternel adorait. Dès qu’elle entendait le boucan d’enfer de la Solex de mon père, Ladane bondissait comme un fauve. Elle restait en faction jusqu’à la fin du dîner. Ensuite, elle devait laver les ustensiles et ranger la cuisine. Si papa la Tige laissait quelque chose au fond de son assiette, il fallait le remettre à la matrone. Grand-mère rappelait à Ladane qu’il ne fallait pas se gaver de nourriture dans la nuit car ce n’était pas très bon pour la digestion sauf pour les enfants comme Ossobleht qui devaient se goinfrer à toute heure et laisser comme preuves des cacas bien souples et bien malodorants. Grand-mère adorait les humer avec joie et émotion. Elle préférait les cacas verts et jaunes d’Ossobleh qui allait vers ses cinq ans à mes crottes de bique. Ce n’était pas de ma faute si je n’aimais pas manger, si ma jambe me faisait toujours mal, si la visite au médecin n’avait rien donné ou six cette guibole me remplissait de honte. Ce n’était pas de ma faute si Ladane avait atterri chez nous et si j’aimais les yeux châtaigne de cette fille du djebel qui était beaucoup plus âgée que moi. Dans un an ou deux, grand-mère lui trouverait un mari, un boucher du djebel peut-être. Et moi je devais trouver un mur contre lequel j’irai me cacher, sangloter et pousser mais lamentations à l’abri de la matrone.
Commenter  J’apprécie          10
Après un soupir un peu là, d’un œil inquisiteur Maman ausculta mon visage. Elle avait senti que quelque chose ne tournait pas rond mais elle n’en était pas absolument certaine. Je ne fis rien pour l’aider. Persistant dans le mensonge, je me mis à siffloter un petit air de mon invention. Sans le savoir, j’imitais les grandes personnes qui se donnent un air important en traversant la nuit les ruelles de notre quartier du Château-D’eau. Je souriais à maman. Pour une fois. Pour la tromper. Pour garder ma douleur aussi. Ma douleur est une île déserte, pensais-je au plus profond de moi, elle m’appartient. Elle ne saurait se partager. Je ne m’explique pas aujourd’hui Pourquoi j’ai persisté à mentir à maman. Ces mots m’auraient recousu le cœur lorsque Johnny m’avait fait injustement souffrir, encore fallait-il que je lui confie ma peine.
Commenter  J’apprécie          10
Depuis que j'avais contracté le virus de la polio, je n'ai jamais pu recourir à nouveau. Pourtant j'avais des rêves plein la caboche. Je me voyais bien cowboy à l'âge de sept ans, footballeur à douze, marin à dix-huit. Dessinateur de bandes dessinées à vingt-deux.
Commenter  J’apprécie          10
S'ils avaient été à ma place, ils auraient pleuré autant que moi sinon plus. Les gens disent à tout bout de champs : " Mets-toi à ma place. " Ils le disent seulement avec les lèvres. Mais rarement avec le coeur.
Commenter  J’apprécie          10






    Lecteurs (257) Voir plus



    Quiz Voir plus

    L'Afrique dans la littérature

    Dans quel pays d'Afrique se passe une aventure de Tintin ?

    Le Congo
    Le Mozambique
    Le Kenya
    La Mauritanie

    10 questions
    289 lecteurs ont répondu
    Thèmes : afriqueCréer un quiz sur ce livre

    {* *}