Dire que ce roman a été écrit par une jeune femme de 24 ans n'est pas anodin. Bien sûr toutes les femmes de 24 ans ne peuvent pas écrire comme
Marguerite Yourcenar...
On reconnaît tout le talent de cet écrivain qui est sans conteste un des plus grands du 20ème siècle. On doit aussi souligner la perspicacité d'une femme qui parvient à faire vivre par l'écrit les sentiments éprouvés par de nombreux hommes face à la vie qu'ils se choisissent ou qu'ils se laissent imposer, par confort, par crainte, par manque de courage ou simplement par lassitude de questions auxquelles ils ne veulent ou ne peuvent répondre.
D'aucuns pensent que dire ce qu'on a sur le coeur par le biais d'une lettre n'est guère courageux. Alexis fait ce choix. Il écrit à sa femme pendant près de trois semaines pour lui dire tout, pour se dire tout, dans toute la nuance que peut prendre l'écrit, dans les détours qu'il permet, dans la sincérité qu'il suscite. C'est donc véritablement un acte de bravoure et de libération qu'entreprend Alexis. Ce texte est intemporel, les sentiments qui y sont décrits sont de tous les temps. Si nos sociétés peuvent être moins « choquée » par ce qui motive Alexis, rien ne permet de croire que le choix d'une vie, d'un mode de vie soit plus simple aujourd'hui qu'hier, c'est toute la portée de ces quelques 120 pages…
La langue de
Marguerite Yourcenar est une des plus riches qui soient, parce que restant simple, elle cherche et trouve le mot juste, dans les formes les plus fortes.
Si le combat peut être vain, il mérite sans doute un jour d'être mené, parfois de manière égoïste, c'est ce que fait Alexis, il en a trouvé la force et le courage. Ce combat n'est donc pas si vain.