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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Une magnifique biographie écrite de main de maître par Stefan Zweig, auteur de celle de Marie Antoinette, où l'on retrouve la très riche documentation nécessaire à la rédaction de la vie si turbulente et dramatique de Marie Stuart, reine d'Ecosse et reine de France un temps. Un personnage très singulier et surtout un beau portrait de femme forte, avec ses faiblesses et ses forces, si humaine justement, ce qui est très bien rendu par Stefan Zweig, qui nous montre bien les deux facettes du personnage, alternant entre de profonds doutes et un orgueil et une ténacité qui l'accompagneront jusqu'à la fin de sa vie, jusqu'au dernier supplice de sa décapitation, où Marie Stuart honorera son rang jusqu'au bout par sa dignité infaillible.
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Le style de cette biographie historique est superbe. Stéphane Zweig est l'auteur de ce magistral ouvrage qui porte beaucoup de sens et beaucoup de vie.
C'est la biographie de Marie, reine d'Ecosse . Elle fut aussi un moment reine de France par mariage.
Elle reste catholique par conviction dans cette époque où les guerres de religions enflamment l'Europe . Elle est l'Ecosse , car elle symbolise la souveraineté de pays en tant que sa souveraine et elle est aussi dans la ligne successorale de la couronne d'Angleterre.
La situation en Ecosse est difficile pour la monarchie locale qui reste catholique ,alors que la reforme marque des points solides dans ce pays avec l'extension des presbytériens.
Elle est donc à la croisée de plusieurs dynamiques historiques à l'oeuvre dans les îles britanniques et en Europe.
La réforme qui en Angleterre porte principalement le visage de l'anglicanisme qui écarte brutalement le catholicisme , qui finira avec quasiment une mise quarantaine durable .
Les visées d'expansions territoriales de l'Angleterre et même celles de la France. Les soubresauts violents et risqués de la politique écossaise, l'urgence de la situation en Ecosse pousseront Marie Stuart à se retirer en Angleterre . Elle pensait y séjourner provisoirement. Elle y sera détenue longtemps, et longtemps après son arrivée , elle y sera exécutée, pour trahison.
Les monarchies anglaise et Ecossaise sont croisées et à ce titre, elles sont un danger l'une pour l'autre, Marie Stuart sera exécutée mais sa descendance cependant , règnera ultimement sur l'Angleterre.
Elle représentait donc un danger pour Elisabeth d'Angleterre à cause de sa place dans l'ordre successoral de ce pays et également du fait de son catholicisme . Elle pouvait en effet être une tentation naturelle pour le parti catholique anglais et contre Elisabeth qui était anglicane.
C'est une matière riche à analyser et l'auteur le fait avec brio. Il est éloquent et son texte est solidement construit.
Les récits sur L'exécution de Marie Stuart magnifient généralement son courage et sa dignité. C'est avec raison je pense mais je n'insisterai pas là-dessus pour conclure. Je préfère en conclusion souligner que c'est le premier régicide de l'histoire européenne.
Ce ne sera pas sans conséquences politiques et c'est là ,la fondation et la naissance d'un risque quasiment ontologique pour les monarchies européennes.
Ces pages sont un remarquable et passionnant moment d'histoire, avec comme vous le voyez , une matière excessivement dense, riche et variée.
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Voilà la deuxième biographie écrite par Stéphan Zweig terminée, et toujours aussi appréciée !
Marie Stuart est un personnage que je ne connaissais absolument pas avant ce livre, n'étant à aucun
moment mentionné dans mes cours d'histoire.
Et pourtant ! Quelle fut cette femme Reine d'Écosse à 6 jours puis Reine de France par la suite !
Son parcours aussi flamboyant que dramatique m'a ému et fait ressentir un profond respect face à sa résilience qui lui a permis de garder la tête haute jusqu'à l'échafaud.
La vie est compliquée au XVIe siècle pour une femme. Elle l'est d'autant plus lorsque vous êtes reine d'un pays divisé par les conflits religieux et par un entourage hypocrite qui ne souhaite que la reconnaissance royale.
Je vous invite à découvrir l'histoire de cette femme un peu trop passionnée à travers les trois contrées que sont l'Écosse, la France et l'Angleterre. Enfin, mieux connaître Marie Stuart à travers les diverses rencontres qu'elle a pu faire, notamment amoureuses et amicales, qui, vous le découvrirez, ne seront pas de tout repos !
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Mon avis :
Par son écriture aussi douce douce que précise, Stefan Zweig nous embarque dans la vie trépidante de cette femme. Reine dès sa naissance, sa vie ne lui a jamais vraiment appartenue, son titre guidant ses pas de son apparition à son trépas. Quoiqu'il en soit, cette femme a parfois vécu comme elle l'entendait, surtout quand l'amour venait la saisir, allant jusqu'à oublier ses prérogatives royales. Ce fut un être passionnel, entier, qui n'a jamais su renoncer à ses écueils même s'ils la menaient vers des issues fatales. Fière jusqu'à l'excès, elle ne connaît que la démesure. Naïve, elle s'est souvent retrouvée dans des situations auxquelles elle aurait sûrement pu se soustraire avec davantage de réflexion. Son plus grand défaut, sans aucun doute, semble le fait de ne pas choisir avec discernement les personnes qui l'entourent et la conseillent. Ils furent soit insipides, soit autoritaires mais ne lui donnèrent que rarement cette véritable reconnaissance à laquelle elle aspirait pourtant. Sans cesse, elle a renouvelé les mêmes erreurs, sans jamais apprendre et tirer les leçons de la précédente. C'est grâce à cela que sa cousine Élisabeth, la reine vierge, siégeant sur le trône d'Angleterre, l'a tenue en respect toute sa vie malgré les prétentions que Marie détenait sur cette couronne. Un véritable jeu de dupes, deux tempéraments différents mais parfois tellement semblables. Une partie d'échec, où la reine d'Ecosse semble toujours avoir un coup de retard.
Pour conclure, une lecture passionnante pour ce destin hors du commun et pourtant tragique.
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Dernier livre de mon challenge ABC 2021/2022 avec la lettre Z. Après un agréable séjour à Aubigny-sur-Nère, petit village du Cher connu par son histoire liée à l'Ecosse et appelé Cité des Stuarts, il me parut opportun de lire la biographie de Marie Stuart par Stefan Zweig. La vie de cette reine au destin tragique est fascinante au regard de son petit royaume qu'était l'Ecosse. J'ai visité plusieurs lieux où elle a séjourné comme Traquair House, le château de l'Hermitage, la maison-tour de Jedburgh, le château de Neidpath.
C'est le premier ouvrage que je lis de ce grand écrivain qu'est Stefan Zweig et cette biographie se lit comme un roman. Je connaissais un peu la vie de Marie Stuart grâce à des documentaires ou des films, mais ce livre m'a permis de l'approfondir.
Reine d'Ecosse à sa naissance, elle devient reine de France à l'adolescence par son mariage avec François II dont la mort prématurée fut les prémices d'un destin tourmenté après une vie jusque-là heureuse et insouciante, devant rentrer dans un pays qu'elle ne connaît pas. Malgré sa jeunesse, catholique dans un pays essentiellement protestant, elle essaiera de s'imposer. Après deux autres mariages désastreux, elle est accusée d'avoir fait assassiner le deuxième par son troisième mari qui s'enfuit et l'abandonne pour sauver sa propre vie. Cela précipite sa chute. La seconde partie de sa vie ne sera qu'emprisonnement, évasion, trahison, complot et ultime accusation de vouloir attenter à la vie de sa cousine, Elizabeth 1ère dont elle convoitait le trône d'Angleterre.
Quand Stefan Zweig écrivit cet essai, il se voulait totalement neutre face aux innombrables études déjà écrites sur cette reine, puisqu'il n'était ni anglais ni écossais, ni protestant ni catholique.
Si le mystère entoure toujours cette femme passionnée, le portrait qu'il en fait tient autant de la tragédie que du roman historique voire de la dramaturgie shakespearienne, la décrivant comme une femme fatale et amoureuse d'hommes qui meurent, se font assassiner, ou mourant pour elle.
C'est un beau portrait royal, malgré toute la dualité d'une jeune femme douce, insouciante, raffinée, cultivée et à la fois impulsive, désespérée mais déterminée et digne jusqu'à la fin qui en fait un personnage romantique par excellence, sinon romanesque, à l'inverse de son ennemie, Elizabeth 1ère, prudente et calculatrice, faussement amicale et qui signe, par inadvertance, l'ordre de son exécution.
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Un pan de l'Histoire à connaître et à dévorer !
Marie Stuart reine d'Écosse et futur reine de France possède un destin des plus tragique. C'est une femme d'une force imparable victime de la jalousie et de l'orgueil de sa cousine Elisabeth Ière.
L'auteur retrace la vie de cette femme dans un récit roche et passionnant.
Pour tous celles et ceux qui souhaitent accéder à L Histoire ce livre est idéal !
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Le biographe, chez Stefan Zweig est aussi important que le romancier ou que l'essayiste. Il arrive même que sur une oeuvre unique les trois états se confondent - pour notre plus grand plaisir - et que la plume de l'historien, par exemple, se laisse aller de temps à des écarts romanesques, et à d'autres moments à des réflexions pertinentes sur L Histoire. C'est pourquoi, il n'y a pas forcément une unité dans les biographies de Stefan Zweig : "Marie-Antoinette", par exemple, est un ouvrage plus "historique" que romanesque (encore que la restitution de l'Histoire se fasse dans un cadre très littéraire). Il n'en est pas de même avec "Marie Stuart".
Stefan Zweig s'en explique dans une lumineuse préface : "Ce qui est clair et évident s'explique de soi-même, mais le mystère exerce une action créatrice. C'est pourquoi les figures et les évènements historiques qu'enveloppe le voile de l'incertitude demanderont toujours à être interprétés et poétisés de multiples fois. La tragédie de la vie de Marie Stuart en est l'exemple classique par excellence".
Le problème, avec Marie Stuart, n'est pas tant que les documents soient rares, bien au contraire ils pullulent, se contredisent les uns les autres, tant ce personnage a suscité les passions les plus diverses. La fiabilité des témoignages et celle des "preuves" historiques est constamment remise en question. D'où le parti pris de l'auteur : là où l'incertitude ne peut apporter la lumière, il va s'appliquer à "interpréter" et "poétiser" sur ce qu'il maîtrise le mieux, le portrait psychologique. Il faut dire qu'il a là, avec la reine d'Ecosse, un sujet en or.
Marie Stuart (1542-1587) a eu deux vies : une dans la lumière de 1542 à 1567, une dans l'ombre, de 1567 à 1587. Reine d'Ecosse à 6 jours (1642), reine de France à 17 ans (1558), veuve en 1559, épouse de son cousin lord Danley (1565) puis du comte de Bothwell (1567) soupçonné d'être le meurtrier de Darnley, arrêtée et emprisonnée par des Ecossais révoltés, elle s'évade et va chercher protection et assistance chez Elizabeth d'Angleterre. Fin de la première époque. Elizabeth, à tort ou à raison, pensait que Mary en voulait à son trône, et la tint prisonnière pendant vingt ans, avant de la faire exécuter. Fin de la deuxième époque.
Ce n'est pas une vie, c'est une tragédie. Stefan Zweig ne s'y trompe pas : en tête de son ouvrage, en titre de la liste des personnages, il écrit les mots "dramatis personae", c'est à dire "personnages du drame", acteurs de la tragédie.
Et le drame est d'autant plus poignant que l'héroïne est parée de toutes les qualités du corps et de l'esprit. Trop sans doute. Suffisamment en tous cas pour susciter les envies et les jalousies, les médisances et les calomnies.
Stéfan Zweig, en historien et en romancier, nous livre un portrait à la fois plausible d'un point de vue historique, et passionné, sensible, critique aussi (il ne cherche pas à cacher les défauts et faiblesses de Mary Stuart). Comme pour "Marie-Antoinette", le livre se lit facilement, je dirais même goulûment, il y a en effet un plaisir de gourmandise à déguster cet ouvrage, ou si vous préférez une volupté de mélomane à écouter la petite musique de Stefan Zweig...

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Née en 1542, reine d'Écosse à six jours à la mort de son père, élevée en France par crainte d'un assassinat par Henry VIII, reine de France à dix-sept ans, veuve à dix-huit avant un retour en Écosse où elle est reine catholique dans un pays devenu protestant, mariée trois fois, accusée d'avoir organisé le meurtre de son deuxième mari avec la complicité de celui qui deviendra son troisième, emprisonnée vingt ans puis exécutée par sa cousine la reine d'Angleterre Elizabeth 1ère à seulement quarante-quatre ans, le bourreau étant tellement ému qu'il a dû s'y reprendre à trois fois pour réussir à lui trancher la tête… Je suis, je suis… (mode questions pour un champion activé) : Marie Stuart.

Stefan Zweig s'empare de ce destin, aussi extraordinaire que funeste, et nous livre ici une biographie détaillée d'une grande acuité psychologique, où il a travaillé avec le plus d'objectivité possible. Il s'est surtout concentré sur ses années « écossaises » si l'on peut dire, du moment où, jeune veuve, elle embarque pour l'Écosse, jusqu'à son emprisonnement par Elizabeth. Six ou sept ans où sa personnalité se révèle, infatigable, impulsive, brillante et enflammée.

C'est une lecture qui m'a beaucoup intéressée. Je ne connaissais que les grandes lignes de l'histoire de Marie Stuart, et j'ai beaucoup appris. Cette biographie se lit souvent comme un roman d'aventures, avec péripéties et rebondissements, suspense et trahisons – jusqu'au bout, sa vie fut follement romanesque.

De Stefan Zweig, je n'avais lu jusqu'ici que quelques nouvelles, Amok, La confusion des sentiments, vingt-quatre heures dans la vie d'une femme, que j'avais adorées. Et pourtant au début de Marie Stuart, nous ne sommes pas partis du bon pied, Stefan Zweig et moi. Quand il s'est mis à parler des écossais en général comme des bouseux mal dégrossis et incultes, j'ai eu du mal, j'avoue. Ensuite, il s'explique. La noblesse écossaise ayant toujours comploté et rechigné à laisser le pouvoir à un roi, la couronne avait échu au clan des Stuart plutôt pour damer le pion à celui des Hamilton (moins malléables) qu'autre chose. Les Stuart avaient toujours la bride tenue extrêmement serrée et peu de subsides. Si on ajoute à cela une réforme religieuse récente et très agressive prônant l'austérité, résultat, la cour n'avait aucun faste et peu de lustre intellectuel. Vue des cours européennes en pleine Renaissance, où les nobles rivalisaient d'ardeur et d'éducation artistique, celle d'Écosse semblait complètement arriérée. Également, la vision des femmes de Stefan Zweig est souvent datée. Mais n'oublions pas que ce livre a été publié pour la première fois en 1935 – et sa traduction française date de 1936. Sinon, ce texte est vraiment formidable.

Cette lecture m'a souvent rappelé mon séjour il y a trois ans à Edimbourg. Touchée d'avoir vu la chambre où Marie Stuart a mis son fils au monde – le futur roi d'Écosse Jacques VI devenu Jacques 1er roi d'Angleterre à la mort d'Elizabeth : Marie Stuart, ayant déjà été victime d'un coup d'état dans ses appartements du palais de Holyrood, s'était réfugiée dans le château ancien pour son accouchement. Elle s'y savait plus en sécurité. Par contre, quand j'ai vu la statue de John Knox grandeur nature dans la cathédrale St Giles, je ne savais pas que c'était un si furieux prédicateur !
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Excellente biographie de Stefan Zweig sur une princesse qui fut très célèbre et très malchanceuse, puisqu'elle aurait pu réunir les trônes de France et d'Angleterre, mais, du fait de coups du sort et de sa religion catholique, ne fut que reine d'Ecosse, puis fut capturée et exécutée par sa rivale de toujours, la Reine d'Angleterre, Elisabeth. Zweig en profite pour développer certaines théories quant à la vie amoureuse de la pauvre Marie, qui m'ont souvent semblé d'une grande pertinence.
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Il y a déjà quelque temps que je voulais lire ce livre. Ayant découvert le style envoûtant de Stefan Zweig et sa façon d'exprimer l'essence même des sentiments de ses personnages, je voulais aborder un de ses exercices de style pour lesquels il est renommé, la biographie.

Passionnée de différentes époques de l'Histoire, dont le 16e siècle et les pays anglo-saxons, j'avais déjà plongé dans la lutte sanglante de la Guerre des Deux Roses, les Lancastre, Rose rouge, contre les York, Rose blanche, qui pris fin en apparence, avec l'avènement au pouvoir des Tudors, acté par le mariage d'Henri VII avec Elizabeth d'York, ayant pris comme emblème, une rose rouge à coeur blanc, symbole de réconciliation. Immanquablement, dans la succession au trône, j'ai "rencontré" le destin de la Virgin Queen, Elizabeth Ière, la plus grande reine d'Angleterre pour les uns, une incontestable hypocrite comploteuse pour les autres. Sa biographie m'a donné envie de passer de l'autre côté de la frontière pour connaître plus précisément la vie de sa cousine et ennemie jurée, la reine d'Écosse, Marie Stuart. Ces deux destins n'ont pas fini d'opposer les historiens, car l'affrontement religieux fratricide, Papistes contre Réformés, est intimement lié à la politique par les appuis puissants apportés de part et d'autre.

Pour construire sa biographie, l'auteur se base sur les documents d'époque, irréfutables fruits d'une recherche minutieuse. Les écrivains, les poètes, les ambassadeurs et les contemporains des deux femmes ont laissé de nombreux écrits. Même si bon nombre d'entre eux ont disparu à des fins politiques, ils sont le reflet du comportement des deux souveraines aux personnalités si divergentes.

La discorde entre la couronne d'Angleterre et celle d'Écosse est légendaire. N'étant pas soumis à la loi salique comme en France, permettant aux seuls héritiers mâles l'accession au trône, Elizabeth 1° succède à son père Henry VIII. Ce n'est pas sans soulever des protestations, car si le mariage du roi d'Angleterre et d'Anne de Boleyn a été consacré par un évêque reconnu du pape, légitimant ainsi la petite Elizabeth, son père la déclare bâtarde après avoir fait casser son union d'avec sa mère. Il s'ensuit une période sanglante où de nombreux prétendants perdirent la tête sous la hache du bourreau, à tort ou à raison, mais toujours pour répondre à la soif de pouvoir de certains.

de son côté, Marie Stuart est couronnée reine d'Écosse à l'âge de 6 ans, suite à la mort de son père Jacques V. Sa mère Marie de Guise est française, de la célèbre Maison du même nom. Fervente catholique, elle refuse la proposition de mariage pour sa fille avec Edward, protestant, fils d'Henri VIII et lui préfère François II, fils d'Henri II et Catherine de Médicis, catholique. La vie de Marie Stuart commence dans le calme et la prospérité à la cour française. À 16 ans, elle obtient une deuxième couronne, celle de France par son mariage avec François II. Étant malade et souffreteux de naissance, le jeune roi décède l'année suivante sans héritier. Sa veuve désemparée et encombrante pour les Français, regagne son Écosse natale dont elle est toujours la souveraine. Fini, les fastes et les honneurs en grandes pompes, les vers de Ronsard et Du Bellay, son absence a laissé des traces. Son demi-frère Murray qui l'a remplacée toutes ces années, a été gagné par la Réforme, entrainant avec lui beaucoup d'écossais. La misère règne sur cette terre rude et sauvage. Son peuple, majoritairement paysan, farouche et rebelle est prompt aux soulèvements.

Là où Elizabeth est manipulatrice peut-être, fin stratège certainement, faisant preuve d'un raisonnement implacable, Marie ne sait pas s'entourer de bons conseillers ou ne les écoute pas. Elle se laisse guider par son coeur et ses émotions, quitte à commettre de terribles erreurs de jugement et se compromettre dans des unions douteuses. L'affrontement de ces deux reines, si différentes, ne peut mener qu'à une catastrophe programmée d'où la première sort victorieuse, mais pas forcément grandie !

Dans la vie de ces deux femmes de pouvoir, tous les éléments d'une tragédie grecque sont présents. Ruses, intrigues, trahisons, passion, meurtres, dissimulations, arrestations, évasions, Stefan Zweig retrace le destin de Marie, la maudite avec une application d'historien, nimbée de romantisme. Héroïne shakespearienne, comme dans la tragédie d'Hamlet, Marie Stuart paraît superficielle, inconséquente et naïve. Pour l'auteur, elle est une "éternelle illuminée toujours séparée du monde réel, jusque dans sa détention."

Il est totalement normal que les historiens discutent encore de nos jours sur le bien-fondé de leurs théories. Les opposés ne s'attirent pas toujours. Elizabeth, fière, célibataire sans héritier, ne se laissant émouvoir par aucun prétendant éventuel et voulant conduire les affaires du royaume comme elle l'entend. Marie, fière également, mais emportée par la passion tombe sous l'emprise d'hommes ambitieux et prétentieux la prenant dans les filets de la sensualité. Malgré tout, si elle se sent légitime pour revendiquer la couronne d'Angleterre portée, selon son camp, par une usurpatrice, elle a un atout de poids avec la présence de son fils, née de sa deuxième union avec Darnley, nommé roi d'Écosse. Il est le prince héritier indiscutable, déclaré héritier de la couronne à l'âge de 1 an à la suite de l'assassinat sordide de son père. Décidément, le sort s'acharne sur les Stuarts très tôt, grâce à des mains habiles à orienter le destin.

La tragique vie de Marie Stuart est totalement passionnante et peut se brosser en 4 phases : une enfance dorée en France, un retour en Écosse hostile, une existence débridée passionnelle puis une chute dramatique, mais très digne, au bout d'un enfermement d'une durée de 20 ans, transférée de châteaux en châteaux en terre ennemie qui, comble d'ironie, aurait pu être sienne.

Je ne pense pas avoir spoilé quoi que se soit, tous ces faits sont dans les livres d'Histoire. le talent de Stefan Zweig est de faire vivre tous les protagonistes de ce mélodrame rocambolesque. Il livre le tréfonds de leur âme si bien que, même connaissant les sorts réservés à Darnley, Bothwell et même Marie, je n'ai pu m'empêcher de ressentir de l'admiration et de la compassion pour cette reine qui a perdu la tête par amour avant de la perdre pour de bon le 8 février 1587 avec une dignité, une piété et une sagesse qui hanta longtemps Elizabeth. Mais le destin est en marche, car ce sera son fils, Jacques VI d'Écosse qui sera couronné roi d'Angleterre sous le nom de Jacques Ier. Il réalisera, ce que ses prédécesseurs n'ont jamais obtenu, l'union si attendue et désirée entre l'Angleterre et l'Écosse malgré divers complots dont il fera l'objet, comme il sied à toute Cour Royale !

Des critiques ont qualifié Stefan Zweig de misogyne par les opinions qu'il a émises dans ce livre. "Dans le temps, dans l'espace et dans ses formes, l'opposition est grandiose : quel dommage que la lutte qu'elle a provoquée ait été d'une aussi pitoyable mesquinerie ! Malgré leur envergure extraordinaire, ces deux femmes restent toujours des femmes, elles ne peuvent pas surmonter les faiblesses de leur sexe ; la haine qu'elles se portent, au lieu d'être franche, est petite et perfide. Placés dans la même situation, deux hommes, deux rois s'expliqueraient nettement, une fois pour toutes et, dans l'impossibilité de s'entendre, se prendraient aussitôt à la gorge ; au contraire la lutte entre Marie Stuart et Élisabeth, c'est une bataille de chattes où l'on rampe et s'épie en rentrant ses griffes, un jeu plein de traîtrise et d'astuce." Je reconnais que ce paragraphe peut faire lever le sourcil de féministes impitoyables. Pour ma part, époque mise à part, je ne souscris pas à cette allégation connaissant l'humanisme de l'écrivain et sachant que la perfidie, l'intrigue et la sournoiserie ne sont pas uniquement brodées sur les bannières féminines. L'Histoire a montré nombre d'hommes puissants ne brillant pas par leur courage et leur sincérité ! L'affrontement à l'épée au fond d'un pré dans l'aube brumeuse n'est réservé qu'à un romanesque désuet et l'empoignade virile est souvent la conséquence d'une altercation avinée.

Dans une Histoire plus proche de nous, Hitler ayant pris les rênes du pouvoir en 1933 et la biographie étant parue en 1935, je ne peux m'empêcher de penser que beaucoup de réflexions émises par l'auteur, au sujet de la politique et de la façon de traiter leurs sujets, n'évoquaient pas exclusivement l'Écosse et la perfide Albion.

Une période trouble et sanglante de l'Histoire à découvrir, immense fresque romanesque et tragique qu'aucun récit d'imagination ne saurait égaler. Encore une fois, la réalité dépasse la fiction !
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