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EAN : 9782382921647
270 pages
Bouquins (22/09/2022)
4.39/5   9 notes
Résumé :
Des réseaux sociaux à l’intelligence artificielle, la transformation numérique est à l’origine de bouleversements profonds. Comme les grandes découvertes scientifiques de l’histoire, elle produit une rupture dans la façon dont nous nous représentons le monde.

En montrant comment les nouvelles technologies ont progressivement façonné nos imaginaires, Charleyne Biondi développe une analyse originale de l’avènement du tout-numérique et de ses conséquence... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Qu'y-a-t-il à décoder? le rôle des technologies dans l'organisation du monde ; mais aussi nos propres idées reçues au sujet du numérique, nos appréhensions qui font qu'on ne cesse de s'enliser dans les mêmes et éternels débats au sujet des réseaux sociaux et des fake news, des crypto et de l'IA... Cet essai est construit pour "ouvrir les yeux" à ses lecteurs : on comprend aussi bien l'impact de la technologie que les raisons pour lesquelles on s'en inquiète. J'ai trouvé l'approche excellente, abordable et très rafraîchissante.
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Si on croit avoir tout compris aux enjeux politiques du numérique, on se prend une claque à la lecture de cet essai qui nous emmène systématiquement là où on ne l'attend pas. L'auteure n'épargne ni les faiblesses de la philosophie techno-critique, ni l'arrogance de l'économie disruptive. Tous les a-priori sont déconstruits, de tous les côtés. Résultat: on n'est plus sûrs de rien. On ré-apprend à penser le familier. Et au fil de la lecture, d'ailleurs étonnamment fluide, la transformation numérique apparaît sous un éclairage inattendu. Renversant. A lire et à faire lire.
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Pour Charleyne Biondi, il est encore plus important pour nos sociétés démocratiques de prendre conscience des changements de valeurs induits par la diffusion des technologies numériques dans nos vies que de chercher à en réguler ou canaliser les multiples effets.
Voilà une invitation à laquelle il est difficile de résister. Malheureusement, le lecteur ne trouve de réponses que dans les dernières pages de Dé-coder. Pour l'essentiel, la liberté de l'individu (au sens libéral du terme, c'est-à-dire individu indépendant et autonome) ne constituera plus un des fondements de nos sociétés ; non pas que les technologies numériques s'opposent à l'autonomie de l'individu ou viole sa vie privée, mais simplement parce qu'elles s'en désintéressent.
Avant d'en arriver là, Dé-coder retrace avec une érudition impressionnante (et beaucoup d'emphase), la diffusion progressive des technologies numériques avec les craintes qu'elles ont inspirées à certains et les espoirs que d'autres y ont placés.
Au total, avis réservé sur cet ouvrage dont certains raisonnements m'ont un peu échappé.
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Un essai philosophique d'une certaine finesse, radical sans être prétentieux. La thèse défendue, au final, est celle d'une incompatibilité d'ordre métaphysique entre rationalité numérique et démocratie libérale... Mais avant d'en arriver là, l'auteure traverse élégamment l'histoire culturelle du numérique, nous élève au-dessus de ses débats politiques et sociétaux, et nous tire très, très progressivement vers sa thèse. Je recommande.
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Une approche vraiment étonnante. Techno-poétique? ça pourrait sembler tiré par les cheveux, mais on se laisse très vite entraîner par cet essai fluide, convaincant, et finalement... poétique. le numérique a-t-il quelque chose à voir avec la crise démocratique / crise de confiance qui touche l'occident ? Oui, mais pas pour les raisons que l'on croit. À lire. Belle découverte.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
En septembre 2020, un documentaire produit par Netflix et traitant du pouvoir de l’industrie numérique, de la manipulation des utilisateurs et de l’addiction aux réseaux sociaux, a atteint un record absolu d’audience : Derrière nos écrans de fumée a été vu par plus de 100 millions de spectateurs, traduit dans 30 langues et diffusé dans 190 pays. C’est dire à quel point personne n’ignore aujourd’hui les risques inhérents au pouvoir d’influence de l’industrie numérique pour les démocraties occidentales.
Cette prise de conscience collective marque un revirement important dans le débat sur le potentiel transformateur de la technologie. Parmi les personnalités du monde de la tech qui ont vécu les années du WELL et les débuts de la techno-utopie, beaucoup regrettent de ne pas avoir « vu venir » les dérives du web commercial, ou de ne pas avoir réagi plus tôt. L’inventeur de la fenêtre pop-up publicitaire, Ethan Zuckerman, considère qu’il a participé au « péché originel » d’internet et s’en est excusé publiquement. De manière générale, une large majorité des acteurs ayant participé au développement de cette industrie partage le sentiment que quelque chose a mal tourné, et veut désormais y remédier en appelant l’État à la rescousse. À tel point que même Mark Zuckerberg a de nombreuses fois interpellé les gouvernements à ce sujet, comme pour les rappeler, sur le ton du défi, à leurs responsabilités. En quelques années seulement, tous les discours au sujet de la technologie et de ses rapports à l’organisation politique de la société se sont inversés.
Ce renversement devient d’ailleurs troublant quand on compare les deux principales alertes qui ont été lancées, à quelques années d'intervalle, pour mettre en garde la société civile des dangers auxquels la technologie l’expose. En 2013, le lanceur d’alerte Edward Snowden quittait avec fracas son poste à la NSA pour dénoncer les pratiques de collecte de données des services de renseignement. S’ensuivaient de longues campagnes d’opinion pour limiter les intrusions de l’État dans la sphère technologique. Huit ans plus tard, la lanceuse d’alerte Frances Haugen quittait, son poste chez Facebook pour dénoncer les pratiques liberticides de l’économie des réseaux sociaux, et se lançait dans un tour du monde des hémicycles parlementaires pour implorer les États de mieux superviser la sphère technologique et d’intervenir fermement pour encadrer les pratiques de l’industrie numérique. Ce qui est frappant, c’est de constater à quel point Snowden et Haugen se sont inquiétés de la même chose. Ils ont craint l’instrumentalisation de la technologie à des fins de surveillance et de contrôle, ont identifié le fait que cette surveillance posait un problème de fond aux institutions démocratiques, et ont appelé, tous les deux, à régler ce problème par le droit. Mais là où Snowden concluait qu’ il fallait absolument limiter les pouvoirs de l’État et de ses services de renseignement, Haugen réclame l’inverse. La lanceuse d’alerte demande à l’État d’étendre son influence pour limiter celle de la sphère technologique. En somme, ce même État, qui incarnait une menace pour les libertés et les perspectives de la société technologique, est aujourd’hui appelé à la sauver.
C’est tout le problème de notre conception de la technologie numérique : parce que nous sommes convaincus qu’elle est versatile et indéterminée, que chacun peut en faire ce qu’il veut, on ne peut expliquer ses conséquences qu’à partir des intentions de ceux qui l’utilisent. Et ce faisant, on rend la définition de ses enjeux politiques impossible.
Comment comprendre ce qui change avec la transformation numérique de la société quand elle produit de manière si évidente une chose et son contraire ?
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Ce qu’il nous est permis d’espérer, notre « horizon des possibles », est un fait social. C’est un imaginaire que l’on partage, un héritage commun. Dans nos régimes politiques libéraux, les bornes de cet imaginaire ne sont pas fixes. Elles ne cessent d’évoluer en fonction d’un ensemble de facteurs (l’état des connaissances, les avancées de la science, la législation, etc.). C’est peut-être la plus belle promesse de l’État de droit : celle de nous laisser libres de repousser éternellement les frontières de l’espoir.

Pour la démocratie libérale, la société « juste » est celle qui permet aux hommes d’espérer le plus possible. Au sortir de la seconde guerre mondiale, les régimes occidentaux ont juridiquement entériné l’idée qu’une société juste était nécessairement conditionnée à la garantie d’un certain confort économique, que l’espoir ne pouvait naître dans la misère. La satisfaction d’un certain nombre de besoins matériels est devenue un droit fondamental , l’État-providence s’est érigé en Europe comme une barrière contre la précarité morale et matérielle : c’est ce que l’on a appelé la « démocratie de marché ».
Celle-ci fait des institutions politiques les garants d’un cadre moral, au sein duquel le marché, la science, tous les produits de l’ingéniosité et de l’entreprise individuelle peuvent éclore et fructifier librement au nom du progrès et du bien commun. Ainsi, la démocratie de marché de l’après-guerre a fait le pari que la croissance et le progrès technologique élargiraient tant les frontières de l’espoir qu’ils suffiraient à combler l’existence des hommes, et que ceux-ci trouveraient dans l’amélioration de leurs conditions et la jouissance privée de leurs biens assez de plaisir, et assez de sens, pour être définitivement détournés des tentations offertes par les projets politiques concurrents et autoritaires.

Ce pari a fonctionné à merveille. Sûrs d’avoir trouvé la solution à la misère humaine, certains ont cru un instant à la fin de l’Histoire . Jamais la science, la technologie, l’industrie, n’avaient autant participé à l’accomplissement des idéaux démocratiques et du progrès social. Les technologies numériques ont joué dans cette dynamique un rôle essentiel. Incarnant à la fois la puissance novatrice du marché libre et l’esprit des Lumières, elles ont été célébrées, de la guerre froide aux printemps arabes, comme les véhicules de choix des grands idéaux démocratiques et libéraux de l’Occident . Du micro-ordinateur au premier iPod, de Facebook aux derniers objets connectés, les innovations numériques ont offert aux individus des espaces inespérés, démultiplié l’horizon des possibles. En somme, elles ont été pour la démocratie de marché ce que l’électricité a été à la société industrielle : à la fois un point de culmination et un révélateur spectaculaire. Comme les visiteurs de l’Exposition universelle de 1889 qui s’émerveillaient devant « l’orgie de lumière » du Champ-de-Mars et voyaient dans la « magie » de l’électricité le triomphe étincelant de leur civilisation et la preuve de son indéniable supériorité , la « société des individus » a trouvé dans le numérique une forme de consécration.

Mais le vent a fini par tourner.La mécanique vertueuse par laquelle l’industrie techno-scientifique participait à la croissance économique, au progrès social et à l’accomplissement des idéaux démocratiques s’est rouillée. À mesure que la liste des « risques » inhérents aux technologies numériques s’est allongée, l’équation entre progrès techno-scientifique et progrès social est devenue de moins en moins évidente. Pire : il semblerait désormais que la technologie numérique ne participe plus à la « vie bonne » promise par les démocraties de marché de l’après-guerre, mais qu’au contraire elle la déséquilibre... Ce ne sont d’ailleurs pas les techno-sceptiques qui le disent, mais les Nations Unies qui exigent aujourd’hui un moratoire sur l’intelligence artificielle pour juger des « risques graves » qu’elle pose aux droits humains .

C’est la « crise de la vérité » liée aux fake news qui a marqué une véritable rupture, et donné à cette dissociation entre horizon techno-scientifique et horizon moral de la démocratie libérale un caractère indéniable.
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(…) je ne crois pas que la gouvernance algorithmique conduise à la disparition du libre arbitre et de l'autonomie de l'individu. En revanche, je considère que la transformation numérique, en insérant partout la rationalité de la technologie comme le « mode de fonctionnement par défaut », a normalisé une représentation de l'homme et de son rapport au monde dans laquelle le « point de référence », le postulat théorique de départ, n'est pas celui d'un individu monadique, indépendant, autonome, mais celui d'un organisme profondément dépendant de son environnement et dont l'« identité » dépend davantage de ses « relations » que de sa « vie intérieure ». En somme, je constate simplement que la liberté de l'individu (au sens philosophique et politique libéral du terme) ne constitue plus un point d'ancrage fondamental, qu'elle n'est plus, au regard de la rationalité numérique, un postulat théorique, et encore moins une valeur morale essentielle.
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La rupture dans l'horizon de sens ne vient pas d'une grande découverte scientifique dont on aurait du mal à prendre la mesure et qui serait venue renverser nos certitudes, elle résulte de la réorganisation totale et profonde de toutes nos « pratiques », de l'intégration silencieuse d'une logique propre au numérique qui modifie notre perspective, notre point de vue sur le monde.
Il ne s'agit pas de confondre science et technologie, mais de suggérer que la transformation numérique de la société - le processus par lequel les innovations technologiques pénètrent les différentes strates de la vie sociale et redéfinissent, subrepticement mais totalement, la façon dont on fait les choses - a un impact similaire à celui d'une grande découverte sur la psyché individuelle et collective. Elle ouvre une brèche dans notre horizon de sens, elle le renverse, avec la même violence qu'une révolution copernicienne.
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On ne peut pas virtualiser les musées, dématérialiser les paiements, transformer une thérapie en nudges algorithmiques, remplacer son banquier par un robot investisseur, et en même temps, conserver le sens que l'on donne au musée, l'idée qu'on se fait de l'argent, l'image que l'on a de soi.
On voit alors se dessiner, à travers ces milliers d'innovations anodines qui refondent petit à petit notre quotidien, ce qu'il y a de fondamentalement politique dans la transformation numérique : non pas des «idées», et encore moins des « projets » politiques; mais tout simplement une certaine façon de faire, de penser, d'organiser, d'anticiper, d'espérer, que la technologie importe partout, qu'elle tresse silencieusement dans le tissu social, au cœur des organisations et entre les hommes. En bref, une nouvelle rationalité.
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Charleyne Biondi présente "Dé-coder, une contre-histoire du numérique"
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