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Citations de Alejo Carpentier (117)


Mouche, émerveillée, m'invita à les suivre, pour mieux examiner leurs robes et leurs coiffures. Elle, qui jusqu'alors était restée indifférente et alanguie, était transfigurée. Il y a des êtres dont le regard s'allume quand il sentent la proximité du sexe. Insensible, mécontente depuis la veille, mon amie semblait revivre dans la première atmosphère trouble qu'elle trouvait.
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A ma grande surprise elle me sauta au cou, s'écriant que la nouvelle était "formidable", car elle confirmait la prédiction d'un songe récent où elle s'était vue voler près de grands oiseaux au plumage couleur safran, ce qui signifiait sans aucun doute : voyage et succès, changement par transfert. Et sans me donner le temps de corriger l'équivoque, elle s'embarqua dans les grands lieux communs du désir d'évasion, l'appel de l'inconnu, les rencontres fortuites,, sur un ton qui faisait penser aux haleurs cloués nus et aux incroyables Florides du "Bateau Ivre".
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Entre deux rayons est suspendue une qena incaïque ; sur la table de travail, attendant la rédaction d'une fiche, gît une sacquebute du temps de la conquête du Mexique, instrument fort précieux dont le pavillon est un tête de tarasque ornée d'écailles argentées et d'yeux d'émail, avec la grande gueule ouverte qui tend vers moi une double denture de cuivre.
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Hélas ! l'objet de mon amour
qui l'arrête ?
Il tarde et il est midi
mais il ne vient pas.
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De l'asphalte des rues s'élevait une chaleur bleutée d'essence, traversée par des relents chimiques, qui stagnait dans des cours sentant le détritus, où un chien haletant s'étirait comme un lapin écorché, pour trouver des filons de fraîcheur dans la tiédeur du pavé.
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Mais s'évader, dans le monde que le sort m'avait donné en partage, était aussi impossible qu'essayer de revivre, à notre époque, certaines gestes saintes ou héroïques. Nous étions tombés dans l'ère de l'Homme-Abeille, de l'Homme-Néant, où les âmes ne se vendaient pas au Diable, mais au Comptable ou au Garde-Chiourme.
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Office des ténèbres
   … / …
                         V
  
  
  
  
   Le 19 août, après le chapelet et une collation de viandes froides, il régna une grande animation sous les arcades du théâtre. Le poète et le musicien, cravates à rayures, redingotes boutonnées jusqu'aux revers, recevaient sur leur propre domaine. Des jeunes filles arrivaient en robes de dentelles, parfumées ; elles étaient accompagnées de leur mère, qui, à peine descendue du marche-pied, renvoyait la voiture sur les quais de l'autre côté. Dans un grand tumulte de coups de fouet, d'attelages impatients, de fers à chevaux bleutés par les étincelles qui jaillissaient des galets, la société de Santiago devait assister à la générale. Les actrices d'un jour avaient copié leurs répliques sur des cahiers de collégiennes, de cette écriture caractéristique des élèves des bonnes sœurs. La jeune fille qui devait interpréter le rôle principal de L'entrée dans le grand monde s'empara de la loge où s'étaient déshabillées tant de chanteuses célèbres de tondillas émules d'Isabel Gamborino, maîtresses de grands propriétaires terriens et épouses d'acteurs. Il y avait encore des traces de rouge vif sur un plat de porcelaine blanche et une coulée de pâte au fond d'une tasse. Sur le mur s'étalait une salace interjection de muletier, tracée avec du rouge à lèvres. Le canapé de soie canari était si enfoncé, qu'il n'avait pu se creuser ainsi sous le poids d'un seul corps.
   Le souffleur se glissa dans son trou. alors commença la répétition de L'entrée dans le grand monde, qui devait être jouée le lendemain au bénéfice des Hôpitaux. On était au mois d'août, et cependant il faisait froid. Personne ne put remarquer, à cause de l'obscurité dans laquelle le parterre était plongé, que les araignées se balançaient d'étrange façon, dans un va-et-vient de pendule déréglé.



/ Traduit de l'espagnol par René L. F. Durand
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La famille Cué était convaincue - et en cela elle ne se trompait pas - que la justice et les tribunaux étaient une invention de gens compliqués, qui ne servait à rien, sauf à emmêler les choses et toujours emberlificoter le pauvre qui a raison.
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Bien que le tutoiement, à ce moment-là (post Révolution française), fût considéré comme une marque d’esprit révolutionnaire 
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Les soies de Lyon payaient un impôt très élevé en passant par l’Espagne pour être embarquer vers La Havane (Cuba) et México; en revanche si on les sortait par le port de Bordeaux et si on les envoyait à Saint-Domingues (République Dominicaine), elles étaient transportées ici (Port-aux-Princes, Haïti), frauduleusement, sur les bateaux nord-américains de retour dans leur pays après avoir apporté de la farine de blé aux Antilles.
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extrait 2 /B



XI

      Canelo et Martial pissaient ensemble. Ils choisissaient parfois le tapis persan du salon, pour dessiner sur la laine des nuages sombres dont les formes se dilataient lentement. Cela leur valait d'être punis à coups de sangle, qui d'ailleurs n'étaient pas aussi douloureux que le croyaient les grandes personnes. Mais en revanche ils étaient un admirable prétexte à élever des concerts de hurlements et à provoquer la pitié des voisins. Lorsque la femme bigle de la maisonnette voisine qualifiait son père de brute, Martial regardait Canelo, les yeux rieurs. Ils pleuraient un peu plus, pour obtenir un biscuit, et tout était oublié. Tous deux mangeaient de la terre, se vautraient au soleil, buvaient dans la vasque aux poissons, cherchaient l'ombre embaumée au pied des basilics. Aux heures chaudes les parterres humides s'emplissaient de monde. Il y avait l'oie cendrée, au jabot renflé pendant entre ses pattes cagneuses ; le vieux coq au croupion pelé ; le petit lézard qui disait uri, ura, en sortant de son cou une cravate rose ; le triste serpent jubo, né dans une ville sans femelles ; la souris qui murait son trou avec un œuf de caret. Un jour, on montra le chien à Martial :
      — Ouah, ouah, dit-il.
      Il parlait sa propre langue. Il avait obtenu la suprême liberté. Il voulait atteindre à présent, de ses mains, des objets qui étaient hors de leur atteinte.


/traduit de l'espagnol par René L. F. Durand
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extrait 2 /A



XI

      Lorsque Martial eut pris l'habitude de briser des objets, il oublia Melchor pour se rapprocher des chiens. Il y en avait plusieurs chez lui. Le grand tigre ; le basset qui traînait son ventre par terre ; le lévrier trop vieux pour jouer ; le caniche que les autres pourchassaient à des époques déterminée et que les femmes de chambre devaient enfermer.
      Martial préférait Canelo parce qu'il prenait des souliers dans les chambres et arrachait les rosiers du patio. Toujours noir de charbon ou couvert de terre rouge, il dévorait la nourriture des autres, hurlait sans raison et cachait des os volés au pied de la fontaine. De temps en temps il vidait un œuf qui venait d'être pondu, lançait la poule en l'air d'un brusque coup de museau. Tout le monde donnait des coups de pied au Canelo. Mais quand on l'emmenait, Martial en faisait une maladie. et le chien revenait triomphant, en remuant la queue, après avoir été abandonné au-delà de la Maison de Bienfaisance ; il reprenait alors une place que, malgré leur adresse à la chasse ou leur zèle à monter la garde, les autres n'occupaient jamais.



/traduit de l'espagnol par René L. F. Durand
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extrait 1 /A



… / …
X

      Lorsque les meubles grandirent un peu plus et que Martial sut mieux que personne ce qu'il y avait sous les lits, armoires et secrétaires, il cacha à tous un grand secret : la vie n'avait aucun charme hors la présence du cocher Melchor. Ni Dieu, ni son père, ni l'évêque doré des processions de Fête-Dieu n'étaient aussi importantes que Melchor.
      Melchor venait de très loin. Il était petit-fils de princes vaincus. Il y avait dans son royaume des éléphants, des hippopotames, des tigres et des girafes. Là-bas les hommes ne travaillaient pas dans des pièces sombres, pleines de dossiers, comme don Abundio. Ils ne subsistaient que parce qu'ils étaient plus rusés que les animaux. L'un d'eux avait tiré le grand crocodile du lac bleu, en l'embrochant avec une pique dissimulée dans les corps étroitement serrés de douze oies rôties. Melchor savait des chansons faciles à apprendre, parce que les paroles n'avaient pas de sens et revenaient souvent. Il volait la nuit, par la porte des palefreniers, et une fois, il avait lapidé les gardes civils avant de disparaître dans les ténèbres de la rue de l'amertume.



/traduit de l'espagnol par René L. F. Durand
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"No se sabía ya lo que era del árbol y lo que era del reflejo. No se sabía ya si la claridad venía de abajo o de arriba, si el techo era de agua, o el agua suelo; si las troneras abiertas en la hojarasca no eran pozos luminosos conseguidos en lo anegado. Como los maderos, los palos, las lianas, se reflejaban en ángulos abiertos o cerrados, se acababa por creer en pasos ilusorios, en salidas, corredores, orillas, inexistentes. Con el trastorno de las apariencias, en esa sucesión de pequeños espejismos al alcance de la mano, crecía en mí una sensación de desconcierto, de extravío total, que resultaba indeciblemente angustiosa. Era como si me hicieran dar vueltas sobre mí mismo, para atolondrarme, antes de situarme en los umbrales de una morada secreta. Me preguntaba ya si los remeros conservaban una noción cabal de las esloras. Empezaba a tener miedo. Nada me amenazaba. Todos parecían tranquilos en torno mío; pero un miedo indefinible, sacado de los trasmundos del instinto, me hacía respirar a lo hondo, sin hallar nunca el aire suficiente." Capitulo cuarto, XIX
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