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Citations de Alexandra David-Néel (391)


Là encore, je ne pus que donner un peu d'argent et passer mon chemin... "Passer son chemin", n'est-ce pas ce que l'on est contraint de faire chaque jour, le cœur serré, impuissant que l'on et à soulager les innombrables malheureux gisant le long de tous les chemins du monde.
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[...] ... Pas mal d'erreurs ont été répandues au sujet de la lutte que Gandhi mena en faveur des "intouchables*" qu'il dénommait euphémiquement : Harijan - enfants de Dieu. Il a été dit que Gandhi se plaisait à vivre avec les "intouchables" ; c'est tout à fait inexact.

Il existe dans l'Inde, des hommes appartenant par hérédité à l'une ou l'autre des castes "intouchables" et qui sont ou riches, ou distingués par leur savoir comme le Dr Ambedkar, possesseur de grades universitaires de plusieurs universités occidentales et qui occupe un poste de ministre dans le gouvernement de l'Inde. L'ostracisme qui frappe la masse des "intouchables" est passablement atténué à leur égard. Quant à la tourbe des parias, Gandhi ne se plaisait certainement pas à partager leurs taudis infects et il serait absurde de lui en faire un grief.

Les conditions dans lesquelles s'est effectué le séjour spectaculaire que Gandhi voulut faire dans le quartier des "intouchables" (en majorité des balayeurs de rue) à Delhi, en 1946, sont peu connues en dehors de l'Inde. Gandhi ne s'installa pas bonnement comme commensal d'une famille de parias. Une maisonnette fut construite spécialement pour lui sur une parcelle de terrain soigneusement nettoyée et, pour en éloigner tout voisinage déplaisant, l'on déplaça un certain nombre d'"intouchables", guenilleux et pouilleux, considérés comme "voisinage déplaisant."

Ce contre quoi Gandhi s'insurgeait, ce n'était pas, précisément, la condition matérielle de la masse (environ 60 millions) d'individus relégués hors de la vie sociale et voués héréditairement à des besognes répugnantes et malsaines ; il s'affligeait, en premier lieu, de l'interdiction faite à ces parias d'entrer dans les temples pour y adorer les dieux. Il lui semblait que, si l'accès des temples leur devenait permis, le reste ne comptait guère. Pour ce reste, c'est-à-dire pour toutes leurs nécessités matérielles, ils pouvaient, eux, les Harijan - les enfants de Dieu - s'en remettre à leur Père.

Nehru était loin de partager ses vues. Il écrivait :

"Derrière le mot, "le Seigneur des pauvres" (Daridranarayan, un terme que Gandhi employait), il semblait y avoir une glorification de la pauvreté. Dieu était spécialement le Dieu des pauvres. Ils étaient son peuple élu. Je suppose que telle est partout l'attitude religieuse. Je ne l'apprécie pas, la pauvreté me semble, au contraire, être une chose haïssable qui doit être combattue et extirpée et non point encouragée de quelque manière que ce soit.

Cela conduit inévitablement à attaquer un système qui tolère et produit la pauvreté et ceux qui reculent devant cette nécessité doivent justifier l'existence de la pauvreté d'une façon ou d'une autre (= en Inde, cela se fait par les théories de la réincarnation). Ils ne peuvent que penser en termes d'insuffisance des produits et ne peuvent imaginer un monde abondamment pourvu de tout ce qui est nécessaire à la vie. Probablement, d'après eux, "il y aura toujours des riches et des pauvres avec nous."

Chaque fois que j'avais l'occasion de discuter ces questions avec Gandhi, il insistait sur le principe que les riches devaient se considérer comme les administrateurs de leurs biens pour le bénéfice du peuple. C'est là un point de vue qui remonte à une haute antiquité ; on le rencontre souvent dans l'Inde comme dans l'Europe du Moyen-Age."


* : l'on se rappellera que, d'après l'antique système des castes, il existe quatre castes : brahmines, kshatryas, vaishyas et soudras. Il ne faut pas confondre les soudras avec les "intouchables". Les soudras ne sont nullement "intouchables". Mais en-dehors des quatre castes, il existe une grande masse d'individus qui n'appartiennent à aucune d'elles (les hors-castes). Ceux-ci se subdivisent encore en plusieurs fractions et ce sont les individus appartenant à l'une de celles-ci qui sont tenus pour "intouchables." ... [...]
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Bénarès, 19 mars 1913
(...) Hier, en écrivant une date, j'ai subitement songé que c'était le 18 mars, l'anniversaire de la Commune, je jour du pèlerinage des fédérés.T'ai-je jamais dit que j'y avais été, au mur des Fédérés après la fusillade, alors que hâtivement on entassait les cadavres dans les tranchées creusées à cette intention... Une sorte de vague vision me reste de cela. J'avais deux ans à cette époque ! Si, c'est la première fois que tu entends ce détail, tu me demanderas qui m'avait menée là. C'était mon père qui voulait que, si possible, je gardasse un souvenir impressionnant de la férocité humaine.

337 - [Pocket n°2841, p. 248]
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Le lendemain, après un bref déjeuner ----deux oeufs et deux bananes ----
je pars à l'aube.
Un départ est toujours une promesse d'aventure et comme tel j'accueille celui-ci qui doit me conduire en un pays où je n'avais jamais projeté d'aller . Une fois se plus le destin malicieux s'était inopinément chargé de m'amener où il voulait.
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Notre club est un club de voyageurs, d'explorateurs ; il semble donc logique que nous donnions notre encouragement et notre support le plus actif au développement de celui des sports qui est le plus étroitement apparenté aux voyages, c'est-à-dire la marche.
Pour l'avoir beaucoup pratiquée, j'en ai pleinement goûté le charme, je dirai presque : la béatitude. Je me suis aussi rendu compte de l'enrichissement de l'ordre mental que nous apportent les voyages pédestres. Excusez donc mon zèle de propagandiste, je voudrais vous le communiquer.
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L'automne est paré, dans ce pays, de tous les charmes juvéniles du printemps. Le soleil matinal enveloppait le paysage d'une lumière rosée qui répendait la joie depuis la rivière aux eaux moirées opalines et vert clair, jusqu'à la cime des hautes falaises rocheuses sur lesquelles quelques rares sapins se dressaient en plein air d'un air triomphant. Chaque caillou du chemin paraisait jouir volupteusement de la chaleur du jour et babillait sous nos pas avec des rires étouffés. Des arbrisseaux minuscules croissant sur les bords du sentier imprégnaient l'air d'un violent parfum aromatique.

C'était un de ces matins où la nature nous ensorcelle avec sa trompeuse magie, où l'on s'abîme dans la béatitude de la sensation, de la joie de vivre.
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Il fait froid et triste quand on demande aux êtres de vous être un soutient, de vous réchauffer, d'alléger le fardeau de misère inhérente à toute existence. Nul d'eux n'a réellement le souci de le faire, nul d'eux ne le peut vraiment. C'est en soi qu'il faut cultiver la flamme qui réchauffe, c'est sur soi qu'il faut s'appuyer.
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Les vrais compagnons, ce sont les arbres, les brins d'herbes, les rayons du soleil, les nuages qui courent dans le ciel crépusculaire ou matinal, la mer, les montagnes. C'est dans tout cela que coule la vie, la vraie vie, et on n'est jamais seul quand on sait la voir et la sentir.
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«Sais-tu quelle figure a l’avenir lorsqu’on le regarde?
Elle ressemble à la danse des poussières dans l’air, le long des routes, par les jours de sécheresse. Elles sont là au repos sur la route, elles existent, prêtes à répondre à l’incitation qui les mettra en mouvement. Le vent passe et les voilà qui se soulèvent, voyagent et dansent, se rapprochant, se heurtant, formant des groupes, des dessins imprécis qui se défont avant qu’on ait eu le temps de reconnaître à quoi ils ressemblaient.
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Le manque de provisions m'épargnait la peine de cuisiner, je n'avais qu'à faire fondre de la neige et à bouillir l'eau ainsi obtenue. Ensuite, je pouvais me coucher et penser à loisir.
J'imaginais quelques-uns de ceux que je connaissais se trouvant à ma place. Je vis les uns s'agitant, jurant, maudissant Dieu, le diable, leurs compagnons et eux-mêmes ; j'en vis d'autres en pleurs, agenouillés en priant. La plupart des uns et des autres auraient, je le savais, blâmé la complète tranquillité d'esprit qui me permettait de suivre avec un intérêt amusé la marche de notre aventure. Un vers pâli chanta, suave, en ma mémoire : "Heureux, en vérité, vivons-nous ; sans anxiété parmi ceux que l'angoisse tourmente."
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En toutes circonstances, lorsqu'on a agi du mieux que l'on peut, se faire du souci est inutile.
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Le sage étend sa sympathie à ceux qu'il voit être méchants parce qu'il a sondé leur misère.
(Milarepa )

NDL : Oui, quand on voit cette "misère"... Mais quand on ne la perçoit pas, quand on a l'impression que "tout va bien", mais que la personne est méchante quand même, c'est assez dur de pardonner.
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Les choses jugées difficiles et terribles deviennent, en général, bien simples lorsqu'on les affronte.
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L’actrice ne peut se contenter, sous peine de perdre de sa valeur cotée, de se faire entretenir matériellement. Il lui faut soigner sa réclame. Pour cela, elle doit s’attirer les bonnes grâces d’une foule de gens : directeurs, régisseurs, auteurs, journalistes – une multitude se renouvelant sans cesse, avec laquelle on n’a jamais fini. Ah dame ! il faut être douée de patience et d’une constitution permettant d’affronter la fatigue !... J’imagine que les moins bêtes de ces individus comprennent que c’est leur pouvoir qui les fait rechercher : mais la fatuité idiote de la plupart d’entre eux doit certainement leur faire croire à un succès mâle désiré pour lui-même.
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Les massacres entre hommes ne se comprennent que dans ces périodes barbares où le manque de nourriture, la réelle lutte pour la vie contraignaient des peuplades à se jeter sur leurs voisins pour leur arracher les vivres qu’ils possédaient ou, parfois, pour se repaître de ces voisins eux-mêmes. Par quel aveuglement des hommes en viennent-ils à s’entretuer pour une ambition de despote ou de ministre, une parole de diplomate, une combinaison entre financiers ou toute autre cause qu’ils ignorent absolument et qui ne peut les toucher en rien ?
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Je n’ai pas à me rendre immortel. L'Éternité est, à la fois unité et diversité, moi et l’autre.
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[...Si l'on admet, comme le font les Thibétains que, certaines personnes sont capables de rendre leurs pensées visibles et même tangibles en créant de toutes pièces un fantôme, ces phénomènes s'expliquent aisément.

L'on peut aussi croire qu'au moment ou ceux-ci se produisent, l'esprit des assistants étant concentré sur une même idée ou sur une même personnalité, cette unité de pensée favorise grandement la formation d'une vision.

Les traditions et les légendes rapportent un bon nombre de ces faits surprenants mais, de façon générale, leurs descriptions se répètent et il y a peu de variété dans les types d'apparitions.
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Les profanes imaginent, en général, que les bouddhistes croient à la réincarnation de l'âme, voire même à la métempsychose. C'est là une erreur. Ce que le bouddhisme enseigne, c'est que l'énergie produite par l'activité mentale et physique d'un être, cause l'apparition de nouveaux phénomènes mentaux et physiques après que cet être a été dissous par la mort.
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Alexandra David-Néel
Choisissez une étoile, ne la quittez pas des yeux...elle vous fera avancer loin, sans fatigue et sans peine.
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15 août 1906 : Les êtres ont droit au bonheur, si l'on peut parler de droit ici. Je veux dire qu'ils ont l'instinct du bonheur comme ils ont celui de manger, car qu'est-ce que le bonheur sinon la satisfaction, d'un besoin de notre organisme, besoin matériel ou mental. Nous sommes absurdes de trouver mauvais que tel être cherche son bonheur de telle manière qui correspond à l'étoffe dont il est fait. Les vieux principes, la hiérarchie des pensées et des actes, toute l'échelle du Bien et du Mal nous tient trop encore et les plus affranchis d'être nous ne peuvent guère se défendre de jauger selon leur catalogue propre les gestes d'autrui. Oh! les dogmes, les devoirs, l'idéal, quelles sources de tortures!… On veut être ceci, on veut que ceux qui vous approchent soient cela et, ni soi ni les autres ne ressemblent au modèles rêvé… Alors c'est la contradiction perpétuelle et comme l'animal, pourvu qu'il ait sa ration suffisante de satisfactions animales, tient à continuer sa vie, on continue à vivre rongé, dévoré, désolé d'une échéance illusoire et insupportable à autrui…

209 - [Presses-Pocket n° 2841, p. 33]
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