AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Claude Pujade-Renaud (236)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Les Femmes du braconnier

L'histoire qui est racontée ici est tragique, en effet on a vraiment l'impression que les personnages sont rattrapés par leurs destins malgré leurs efforts pour s'en sortir. C'est une famille donc laquelle on n'aimerait vraiment pas naître avec un passé très lourd. On aurait presque du mal à croire que ces gens ont réellement existé et pourtant c'est le cas, de toute façon une pareille histoire "ça ne s'invente pas". Cependant malgré des faits assez lourds, l'auteur ne tombe dans un catalogue des malheurs et nous évoque des moments-clefs de la vie des personnages avec beaucoup de nuances et de subtilité. Le sujet exigeait d'ailleurs une telle démarche pour ne pas risquer d'ennuyer le lecteur.



A travers la forme du roman, qui regroupe des témoignages hypothétiques des personnages principaux ou de leur entourage, on a l'impression de se retrouver face à un dossier de preuves qui nous expliquerait comment sont arrivés les évènements. Les chapitres commençants par le nom du narrateur, le lieu, le mois et l'année font qu'on ne se perd pas dans cette multitudes de narrateurs différents et donne un rythme agréable à la lecture. Si agréable d'ailleurs que j'ai lu le roman d'une traite.



Le roman est par ailleurs très bien documenté comme en témoigne la bibliographie située à la fin de l'ouvrage et émaillé de citations des oeuvres des protagonistes. Je ne peux donc que vous conseiller ce livre captivant, qui m'a énormément marqué et dont je ne peux parler sans un pincement au coeur.
Commenter  J’apprécie          30
Le désert de la grâce

L'histoire de Port-Royal des Champs très habilement mis en scène par l'auteur grâce à un récit à plusieurs voix. Les 100 ans d'existence de ce mouvement sont décrits par les fondateurs-fondatrices eux-mêmes, par celles qui y ont séjourné dans leur jeunesse mais aussi par des personnes extérieures dont l'avis peut être très critique. On croise dans ce livre des personnages illustres tel que Pascal qui a grandement contribué à faire connaître cet ordre, Racine dont les relations avec Port-Royal sont beaucoup plus ambigües et aussi Madame de Maintenon qui n'a eu de cesse que d'anéantir Port-Royal.L'écriture et le ton du récit sont parfaits et cadrent bien avec l'époque. Tous les mystères entourant Port-Royal ne seront pas levés dans ce livre mais ce récit permet d'appréhender les motivations des moniales et de comprendre la ténacité avec laquelle elles se sont battues pour conserver leur monastère. L'auteur montre bien également l'acharnement quasi obsessionnel développé par le pouvoir royal pour détruire cet ordre. Le roi parviendra à ses fins mais il aura par la même occasion créé une légende.
Commenter  J’apprécie          30
Les Femmes du braconnier

Sylvia Plath est une poétesse américaine née au début des années 30. C'est une femme dépressive, atteinte de troubles bipolaires. Elle cotoie l'institution psychiatrique après un première tentative de suicide en 1953. Suite à cette hospitalisation, elle semble "guérie". Elle obtient une bourse d'études en 1956 et rejoint l'université de Cambridge en Angleterre. Elle y rencontre Ted Hughes, un poète anglais. Ils tombent follement amoureux. Ils se marient et naissent de leur passion deux enfants. Sylvia s'enferme alors dans son rôle d'épouse, de mère, de ménagère. Elle dactylographie les écrits de son mari. Tout cela au détriment de sa propre création. de son côté, Ted rencontre Assia Wevill, poétesse elle aussi, dont il tombe amoureux. le couple "Ted-Sylvia" bât de l'aile et finit par se séparer. Sylvia va vivre à Londres avec ses deux enfants dans le même immeuble que le poète William Bulter Yeats. le 11 février 1963, elle se suicide en ouvrant le gaz dans sa cuisine. Heureusement, ces enfants qui dorment dans la chambre à l'étage échappent à la mort. Ted est tenu responsable par beaucoup de cette mort tragique. Il devient l'exécuteur testamentaire de l'oeuvre de Sylvia. Assia Wevill se suicide cinq ans après en emportant shura l'enfant née de leur union.

C'est l'histoire de ces personnages que narre Claude Pujade-Renaud. L'écriture est belle, tout en poésie, tout en folie à l'image de ces trois êtres passionnés aux relations aliénantes.Poignant, émouvant sans tomber dans le pathos.

J'ai beaucoup aimé ce livre qui m'a donné envie de découvrir leur poésie.
Lien : https://lesravissementsdeval..
Commenter  J’apprécie          30
La danse océane

Un livre bouleversant, de bout en bout, magnifique de sensualité. On peut imaginer le rapport qu'entretiennent les danseurs avec leur corps, et ce livre nous le raconte . L'héroïne est bouillonnante de vie ,je me suis completement identifiée à elle . Un bonheur de lecture !
Lien : http://florence.berceot@neuf..
Commenter  J’apprécie          30
Le désert de la grâce

une splendeur ce livre ! Je l'ai savouré pleinement et lentement !

C'est un véritable tableau que l'auteure peint, touche par touche, en prêtant la parole sur plusieurs époques à des personnages-clés, permettant ainsi au lecteur s'imprégner de l'atmosphère de ce temps et des enjeux de Port-Royal, tout comme de prendre conscience de la traversée du désert qu'eurent à vivre ceux et celles qui tentèrent malgré les persécutions d'en conserver l'esprit.

On y découvre notamment Marie-Catherine RACINE (Mme de Moramber), la fille du célèbre tragédien. Pourquoi son père l'a-t-il subitement retirée de l'abbaye de Port-Royal alors qu'elle désirait plus que tout entrer en grâce ? Quelles furent ses motivations ? Quel est ce besoin qui la ronge de comprendre qui était l'homme dont elle parvient, poussée par cette quête, à établir des parallèles entre ses tragédies jouées sur scène et celles - cachées - qu'il aura vécues ? Claude PUJADE-RENAUD, avec un talent magistral, nous replace dans le contexte. On croisera évidemment un certain Blaise PASCAL,mais encore Claude DODART (futur médecin du roi), Isaac Le Maistre, (membre de la Chambre des Comptes accusant les moniales de "captation des esprits et des héritages" - et de plus ex époux de Catherine (soeur d'Angélique -celle qui imposa la clôture et le silence à l'abbaye de Port-Royal). On écoutera La Champmeslé, actrice principale des tragédies de Racine, Mme de Maintenon,etc. A travers les témoignages qui seront exposés, c'est le combat de ces femmes moniales - qui ,même contraintes à la clandestinité, jamais ne baisseront les bras pour défendre leur cause et leurs convictions - que Claude PUJADE-RENAUD nous donne à contempler.




Lien : http://entremotsetvous.over-..
Commenter  J’apprécie          30
La nuit la neige

C'est l'histoire de deux femmes au XVIIIème siècle, l'une va commencer sa vie, rencontrer son destin alors que l'autre déjà âgée va voir le sien s'achever par l'intermédiaire de la plus jeune.

Le début de ce roman commence par la rencontre si brutale de ces deux femmes dans une ville ensevelie par la neige, Jadraque.


Lien : http://l-ivresque-des-livres..
Commenter  J’apprécie          30
Belle mère

À la fois romance, épopée suburbaine et traité de la thérapie, Belle mère raconte le lent établissement de relation entre un paranoïaque et la deuxième femme de son père, mêlant la description du monde tel qu’il se présente à Eudoxie (la belle-mère) et les commentaires et réflexions personnelles de Lucien (le fils).



Le travail thérapeutique qu’entreprend Eudoxie, au début un simple refus de faire interner Lucien, sera de lui rendre la parole, puis l'acte fonctionnel, pour finalement accéder à une vie plus ou moins adulte.



La contrepartie, qui n’apparaît que petit à petit, c’est de se faire apprécier physiquement, d’où le titre sans trait d’union.



Se voulant liaison entre l'époque de la Commune et de celle de l'Occupation, Belle mère est aussi une évocation d'une douce vie meudonoise disparue.



Belle mère est un roman de Claude Pujade-Renaud paru en 1993, lauréat du Prix Goncourt des lycéens 1994.
Lien : http://mazel-livres.blogspot..
Commenter  J’apprécie          30
La nuit la neige

Deux femmes qui ne se sont jamais vues se croisent en décembre 1714 dans le nord de l'Espagne. Anne - Marie des Ursins, septuagénaire, qui depuis des années est toute puissante à la cour d'Espagne et en particulier auprès de la reine décédée quelques mois auparavant, vient accueillir la nouvelle reine de 22 ans, Elisabeth Farnèse.

L'entrevue se passe mal et Anne Marie des Ursins est renvoyée directement en France dans le froid et la neige. De son exil, elle reviendra sur son passé et cherchera à rester au courant des nouvelles de la cour d'Espagne et des infants. La reine, elle, va découvrir son époux Philippe V et son destin d'épouse, mère et reine.



Tous les personnages ont existé, mais la plume de Claude Pujade -Renaud transforme une période de la grande Histoire en un roman passionnant. Les narrateurs alternent et permettent de découvrir les facettes des autres personnages, qui prennent vie devant nos yeux. On croise Saint Simon, ainsi que la fille, le gendre et la petite fille de Madame de Sévigné qui écrivit de la princesse des Ursins qu'elle était "folle" -à découvrir dans quelles circonstances.







"Le parfum du jasmin. Les oranges et citrons nourris de soleil , juteux, merveilleux tels les fruits des Hespérides. Et les grenades, elle en était encore éblouie ! Les grenades, insistait-elle, un écrin à l'apparence terne que l'on ouvre pour découvrir à l'intérieur des germes de rosée, de grenat, de rubis, tout en même temps transparentes et rutilantes."





"Après tout, de quoi l'Histoire est-elle tissée, pas à pas, cahin-caha, de petites histoires récrites par l'un ou l'autre, ravaudées et rapetassées, cousues ensemble, de fil banc parfois, suivant la passion ou la logique - ou les deux à la fois - de chaque conteur."





Encore une fois Claude Pujade -Renaud m' a enchantée par son style brillant et poétique, et épatée par l'étendue de sa documentation et de son érudition. Un grand bonheur de lecture.
Lien : http://en-lisant-en-voyagean..
Commenter  J’apprécie          30
Dans l'ombre de la lumière

J'ai reçu ce livre en cadeau et voilà un sujet vers lequel je ne me serais jamais dirigée et qui m'a captivée. J'ai pu découvrir ce personnage de Saint-Augustin, dont j'avais entendu parler mais que je ne connaissais absolument pas, je l'avoue. Le côté romancé m'a permis de me plonger avec délice dans le début de notre ère, quand manichéisme et catholicisme s'opposaient. Je ne savais pas ce qu'était les manichéens. Parvenir à rendre ce récit intéressant sans être ennuyeux c'est faire preuve d'un grand talent.
Commenter  J’apprécie          20
Le désert de la grâce

Encore un livre qui patientait avec résistance depuis plusieurs années, alors que j'ai beaucoup aimé deux autres livres de Claude Pujade-Renaud, "Belle-mère" et "Les femmes du braconnier", lus avec passion.

Celui-ci avec un sujet plus complexe et d'approche un peu plus difficile, n'aura peut-être pas été lu avec passion mais néanmoins avec intérêt. En effet, l'abbaye de Port Royal et le Jansénisme ont croisé plusieurs de mes lectures sans trop maîtriser le sujet. Ce livre habilement construit, à plusieurs voix, sur différentes périodes m'aura bien éclairé sur le sujet. Ce fût aussi l'occasion de découvrir plus en détail la vie de Racine et remettre en haut de ma PAL une biographie, qui patiente aussi !

Commenter  J’apprécie          20
Dans l'ombre de la lumière

Une belle histoire très bien menée.

Les alternances entre passé et présent ne sont absolument pas gênantes.

Très belle écriture avec plein de détails qui eux non plus ne sont pas gênants, bien au contraire.

Question : Cl. Pujade-Renaud aurait-elle eu une autre vie à cette époque du IVe siècle ? :-)
Commenter  J’apprécie          20
Chers disparus

Très intéressant et d'écriture fluide : on découvre ou redécouvre ces écrivains célèbres fin 19è, début 20è siècle, par le regard de leurs veuves qui consacrent le reste de leur vie à finaliser l'oeuvre de leur homme - en y jetant par ci par là un oeil quelquefois surpris, quelquefois choqué, mais toujours admiratif et témoignant de l'amour qu'elles ont partagé avec leur mari - et sans s'appesantir sur les tâches qu'elles ont assumées pour permettre à leurs hommes de devenir de grands écrivains. Chapeau mesdames ! et merci à Claude Pujade-Renaud de nous les faire découvrir.
Commenter  J’apprécie          20
Platon était malade

Ce livre est incroyable, à la fois extrêmement bien écrit, ancré dans une Grèce antique plus vraie que nature, érudit sans en avoir l'air (de nombreuses références à l'oeuvre de Platon) et agréable à lire !

Une perle rare, de mon point de vue. Je l'ai lu lentement, j'ai pris le temps de profiter des détails, moi qui ai tendance à lire vite.
Commenter  J’apprécie          20
Dans l'ombre de la lumière

En ce qui concerne le style et l’élégance de la pensée, je ne suis pas déçue. Je connaissais mal saint Augustin et le texte permet d𠆚voir une approche intéressante. En revanche, la personnalité de la narratrice, dans son obsession amoureuse, m𠆚 profondément irritée. Je n𠆚ime pas les personnes qui stagnent, et encore moins les femmes vouées à un seul homme. Je dirais même que cette « adoration » dessert l’homme en question. Je comprends que ce point de vue avait pour but de mettre en valeur la campagne d𠆚ugustin. Pour moi malheureusement, cela n𠆚 pas marché. Elle n𠆞st qu𠆚gaçante et lui, un arriviste plutôt girouette.
Commenter  J’apprécie          20
Belle mère

Un livre qui m’a profondément émue, tout en pudeur et retenue, une belle histoire d’êtres marqués par le deuil et la perte, accompagnés de chats. Des histoires de vie et de vieillissement. Une écriture souple et simple
Commenter  J’apprécie          20
Tout dort paisiblement sauf l'amour

Régine, la fiancée éconduite de Kierkegaard passe sa vie, quoique mariée, à se souvenir de son premier amour et à découvrir après la mort de l'écrivain déjà célèbre de son vivant mille petits détails rapportés par ceux qui l'ont connu et quelques traces laissées ici ou là dans ses écrits.

Le lecteur ne peut être qu'impressionné par la véritable enquête historique qu'a dû mener Claude Pujade-Renaud avant, et sans doute pendant, la rédaction de ce roman. Cependant, mon intérêt pour ce livre ne vient pas de là, mais de l'aptitude qu'a l'auteure à --non pas revêtir-- mais littéralement entrer dans la peau de son personnage. Inutile d'aller vérifier sur une encyclopédie en ligne que Claude est ici un prénom féminin : toute la finesse de l'analyse des sentiments et toute la maturité des jugements ne peuvent avoir été décrites que par une femme, sans doute déjà mûre elle-même.

Tout au long de sa vie, dans un curieux ménage triangulaire, Régine, la tout à la fois fiancée éconduite et femme mariée, partage avec son mari attentionné une quête de son génial fiancé. Sa recherche tente de découvrir ce qui a pu conduire Kierkegaard à brutalement demander la main de Régine lorsqu'elle n'avait que dix-huit ans et, tout aussi brutalement, rompre peu de temps après.

Ce beau roman est servi par une construction savante où le récit passe souvent du journal intime à une conversation avec un vivant, puis à une interpellation adressée directement au disparu : "Ce matin, en triant mes partitions, je retrouve la sonate de Mozart (...) Et je rumine à nouveau : lorsque, après avoir rompu, tu as pensé à une reprise (...)".



La clé de tout cela ? "La réalité n'existerait que par le travail souterrain de la mémoire..."

Commenter  J’apprécie          20
Les Femmes du braconnier

Ce n’est pas une lecture distrayante mais une lecture grave, nécessitant concentration et détermination. Cette narration dramatique qui m’évoque Virginia Woolf atteint et consterne.une écriture pointue mais parfois agaçante dans laquelle j’ai pu me perdre.... quel drame.,,.
Commenter  J’apprécie          24
La nuit la neige

Abandonné au trois quarts de la lecture, ce roman s’avère décevant et finalement trop ennuyeux. Le récit avait pourtant bien commencé, le style travaillé tel l’ouvrage d’une dame consciencieuse du temps jadis.

« La nuit, la neige » voilà un beau titre, un joli thème alliant la neige et le lait. C’était aussi une bonne idée de donner dans chaque chapitre, la parole à un personnage différent afin qu’il /elle exprime son point de vue sur des événements. Les mariages successifs du roi d’Espagne Philippe V auraient pu passer pour un beau sujet de récit. Mais ce livre donne la nausée.

Quel dommage que personne ne soit sympathique et que tous se répètent ! Ces descriptions complaisantes : des maladies, des intrigues de la cour, des secrets d’alcôves, des jeunes filles abîmées, des vieilles femmes aigries, du pouvoir et des trahisons… ont de quoi lasser.

Commenter  J’apprécie          20
Vous êtes toute seule ?

Superbes nouvelles par une grande écrivaine, une femme aux prises avec la solitude, les hommes, la famille de son amant, la folie, l’amour… Et la danse. Quels passages dans cette écriture belle comme des pas de danse ! Un bonheur qui fait souvent sourire.
Commenter  J’apprécie          20
3 chats et 2 écrivains

J’aime lire les journaux d’écrivain : pas seulement celui de Virginia Woolf mais aussi celui de Charles Juliet, de Françoise Ascal, de Pierre Bergougnioux, d’Hervé Guibert et j’en passe. Je ne comprends pas que cela ne soit pas un genre prisé des lecteurs. Quoi de plus stimulant que de partager un coin de quotidien d’un auteur que l’on aime ? Notre vie semble alors mise en écho. Il y a nécessairement des vibrations entre le parcours des êtres et la vie bouscule souvent la vision de l’œuvre. Evidemment, je ne suis pas dupe : je est un autre même au cœur du journal dit intime. Quelles traces y sont laissées ? Quelles notations éditées, lesquelles supprimées ou même jamais écrites dans le cahier ? Il est impossible de livrer sa vie : parfois un événement important n’est pas consigné, parfois un détail occupe une page entière. Le journal, genre paradoxal, tient de l’aide-mémoire, du déversoir, à la mise en garde, au galop d’essai, inclassable et aussi divers qu’il existe d’auteurs. Que dire alors de celui que je viens d’ouvrir ? Un journal écrit à quatre mains par Claude Pujade-Renaud et Daniel Zimmerman. Ce couple franchit une limite ou transgresse joyeusement les non-règles de l’art. Tout d’abord, la notion d’intime est dynamitée : l’un lisant ce que l’autre écrit et inversement. Ils poussent le vice jusqu’à parler d’eux à la troisième personne. Le « je » si cher au journal devient Claude ou Daniel. Ce pas de côté m’a, au début, agacée : le pacte de lecture semblait rompu. Ils me laissaient dehors. Je regardais deux personnages s’agiter à devenir universitaires, écrivains, amants et propriétaires de chats. La cadence et le dispositif d’énonciation rendaient a priori la complicité impossible. Le couple était refermé dans sa coquille, se mettant en scène mais ne laissant rien à l’a peu près, au flottant, le propre de l’écriture du diariste. Je ne suis pourtant pas descendue du train de leur vie. J’ai tourné les pages et succombé à la litanie des Claude et des Daniel. Cette fausse objectivité qui dit la nature des repas, le nombre d’allers retours à Cavalaire, puis à Dieppe, les amis reçus, les heures d’écriture, de corrections d’épreuves, les rencontres avec les journalistes, les éditeurs, ne forme que la part émergée de leur vie. Au bout d’une cinquantaine de pages, je fus happée par la prose qui déroule des faits de vie comme un rouleau compresseur avançant coûte que coûte pour tenir, traverser les maladies, les coups de fatigue, les moments de découragement, les refus d’éditeurs, garder le cap de l’envie d’écrire encore et s’y remettre malgré tout comme la mort douloureuse d’un chat fera qu’un jour un autre chat viendra. Tout semble déposé à une certaine distance, peu de réflexion mais quantité de petits événements : restaurant, lieux, cours à la fac, opérations, noms de la famille et des amis mais rien sur leurs caractères, défauts, comportements, juste leur implication ou pas dans une revue littéraire. Peu de chose sur la composition et les enjeux des livres, seulement leurs titres et le nombre d’heures consacrées à leur écriture, les doutes, les renoncements et les nouveaux départs. Même l’amour du couple apparaît en filigrane et souvent en rudesse : temps de « baise », répétition des 20 roses pour l’anniversaire de Claude, achat répétitif d’une robe à l’occasion d’un livre accepté par un éditeur, huîtres et champagne offerts pour l’occasion. Il y aurait de quoi se sentir frustré. Pourtant, je n’ai pu lâcher ce défilement de vie, sans doute car quelque chose déborde la mise à distance : une tendresse mêlée d’exigence et d’incompréhension. Daniel n’hésite pas à pousser Claude sur le devant de la scène tout en critiquant et jalousant son succès. Il reste excessif en tout et Claude ne gomme rien de cette monstruosité. Le sulfureux ne les lâche pas non plus, comme paradoxalement l’extrême routine : les camps de base que forment leurs lieux de vacances, toujours les mêmes comme des rituels indispensables à la vie avec et pour l’écriture. Le cadre est sans arrêt redonné. Il ne faudrait pas que la passion amoureuse ébranle la construction littéraire : les habitudes protègent. La manière d’écrire, déroutante au début, marque cette nécessité d’objectiver ce qui sinon ne pourrait s’écrire. J’ai la sensation au fil du temps que c’est Claude qui prend de plus en plus la plume. Daniel dicte sans doute les règles du jeu mais Claude tient le stylo, comme elle tient la maison, repasse, cuisine. La femme qui écrit reste malgré tout celle qui assure l’intendance. Dans ce couple qui fait de la transgression un art de vivre, le bousculement des valeurs s’arrête là. Il est touchant qu’ils décident de ne pas effacer les manquements. Ils auraient pu enjoliver la mise en scène or ils mettent à nu les coulisses non glorieuses de la vie à deux. Les faits ont sans doute la peau dure mais le sang afflue sous cette épiderme et le lecteur est chamboulé d’avoir parcouru toutes ces années. La mort de Daniel, résumée en une phrase, en retrait du texte ajoute à ce parti pris de journal « objectif », une conclusion brutale mais décisive. Le quatre mains s’arrête et le livre se referme pour eux comme pour nous.
Lien : http://atelierdupassage.cana..
Commenter  J’apprécie          20




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Claude Pujade-Renaud (986)Voir plus

Quiz Voir plus

Métro Quiz

🎬 Film français réalisé par François Truffaut sorti en 1980, avec Catherine Deneuve et Gérard Depardieu, c'est ...

Le premier métro
Le dernier métro
L'ultime métro

10 questions
148 lecteurs ont répondu
Thèmes : métro , chanson , romans policiers et polars , cinema , romanCréer un quiz sur cet auteur

{* *}