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Critiques de François Mauriac (776)
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Le Désert de l'amour

Voilà bien longtemps que je n'avais pas lu une oeuvre de François Mauriac.

Dans le désert de l'amour je retrouve les caractéristiques de l'écriture de Mauriac , les thèmes dominants de son oeuvre, le tragique de la vie, l'atmosphère et l'empreinte pesante et empesée de la bourgeoisie provinciale, ( celle de Bordeaux que Mauriac connait bien pour y être né) .

Ce roman (1925) est celui de l'incommunicabilité , de la solitude, de la vacuité de la vie quand l'amour n'est pas au rendez-vous.

Raymond Courrèges (prénom d'un des frères de F. Mauriac) , 35 ans, retrouve, par hasard, à Paris, dans une boîte de jazz, dix-sept ans après, Maria Cross, une femme entretenue qui l'a éconduit en l'humiliant alors qu'il était lycéen en classe de philosophie et qu'il vivait dans la banlieue bordelaise. (Talence) (Une de ses lectures : Aphrodite, ce roman libertin et sulfureux , lu par la jeunesse intellectuelle de cette époque)

Incompréhensibilité entre Raymond Courrères, jeune adolescent et son père Paul (Un des deux prénoms du père de F. Mauriac) , médecin dévoué, époux de Lucie, née Boulassier d'Elbeuf (c'est dire !) , indicibilité entre les époux, entre les autres membres de la famille, Madeleine, la fille , le gendre, Gaston , toute cette communauté parentale, ces générations différentes cohabitant sans beaucoup d'intimité , dans une grande maison.

Mais surtout attitude incompréhensible de Maria Cross qui ne peut s'assumer seule et qui préfère subir le statut de « poule », entretenue par Larouselle. Cette femme de 27 ans, dont le père et le fils vont tomber passionnément amoureux. Pour les deux, amour dévorant, humiliant, fardeau terrible pesant sur leur destinée .

Une passion stérile qui rendra tour à tour , le père et le fils malheureux, et qui fera de Raymond un gougeât, celui qui va « mépriser tout ce qui ne lui semble pas objet de possession », un homme dominateur ne recherchant que le goût de la satisfaction immédiate.

Maria Cross a finalement épousé l'homme qui l'entretenait et qui la trompe ouvertement, sans complexe. Une femme qui n'a pas voulu s'assumer.

Pourtant, des retrouvailles inopinées permettront enfin au fils et au père de se revoir après un si long silence, se retrouver, pour ne plus jamais se rencontrer .





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Le Sagouin

François Mauriac a-t-il la place qu’il mérite dans le Panthéon littéraire du XXe siècle ? Je n’en suis pas sûre. Je l’espère.

Le Sagouin est un livre à redécouvrir absolument. Bien avant que des psys de tout bord se penchent sur le problème, et bien après Poil de carotte, ou les romans de Balzac, François Mauriac nous offre le portrait saisissant d’un enfant mal aimé et d’une mère en négatif : Paule ne maltraite pas physiquement son enfant, elle se contente de ne pas faire tous ces petites gestes de tendresse que prodiguent les autres mères. François Mauriac dissèque avec minutie cette famille mal aimante, mal traitante, toute en haine, en rancoeur, où les cris n’ont d’égal que les non-dits.

Le seul mode de communication est la joute oratoire. Elle peut être à fleuret moucheté, quand madame la baronne attaque : elle sait distiller le fiel comme une aristocrate des temps jadis. Elle est explosive, presque mal embouchée, quand Paule éclate. Il n’est jamais de gagnante dans ces luttes cent fois recommencées, pour ne pas dire cent fois jouées – elles n’ont que les arguments qu’on leur a appris, les arguments qui peuvent faire mal, ou qui peuvent séduire. Elles n’ont de pensées que de leur milieu social.

Pas de gagnantes, mais deux perdants : Galéas et son fils Guillaume. Le premier n’ose tenir tête à sa femme, et quand il se décidera à veiller au bonheur de son enfant, ce sera de la seule manière possible. Guillou, lui, est bien présent, et même si, à l’image d’Antoinette, l’héroïne du Bal, sa mère a trouvé moyen de le reléguer dans un débarras plus que dans une chambre, il laisse des traces de son passage, parce que personne n’a envie, à part Fraulein, toujours de prendre un tantinet soin de lui.

Si l’aristocratie, la grande bourgeoisie est montrée ainsi de manière saisissante, l’instituteur et sa femme ne sont pas épargnés. Les hussards noirs de la république sont bien loin. Couple modèle, parents d’un unique fils paré de toutes les qualités, objets de tous les soins, ils sont presque aussi bornés que ceux contre lesquels ils disent lutter. Elle a d’ailleurs bon dos, la lutte des classes, jolie étiquette qui recouvre le conformisme, la jalousie, et la paresse intellectuelle. Instrument involontaire du destin, Robert Bordas sera sans doute le seul à tirer les conséquences de ses actes, le seul qui a pris pleinement conscience de la tragédie qui s’est jouée, là, dans le bordelais.

Les dernières pages sont à ce sujet saisissantes, et s’il fallait les rapprocher d’une autre oeuvre, ce serait sans conteste les poèmes de Baudelaire ou de Tristan Corbière. La poésie des mots, pour des êtres à qui rien n’a été épargnés.
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Le Baiser au lépreux

Jean Péloueyere, homme très laid mais aussi très riche. Sa timidité n’arrange rien, il n’ose regarder personne et encore moins leur parler. Il se voit proposer, par le curé du village, une jeune femme au doux nom de Noémi. Ce mariage un peu forcé n’est pas terrible car absolument pas assorti. Le fait que Noémi est très belle comparée à son mari très laid, d’où un mariage assez bizarre d'un couple qui vit ensemble mais est en même temps séparé dans toutes les situations . Jean qui aime sa femme au plus profond de lui et qui pourtant la voit si malheureuse va essayer de trouver une solution à ce mariage vraiment pas ordinnaire. Très beau roman qui livre ici une souffrance entre la laideur, et la beauté, et l’amour.



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Thérèse Desqueyroux

Ayant vu la version cinématographique de Claude Miller il y a quelques mois, il était bien temps de découvrir l’œuvre originale de François Mauriac, publié dans les années 20. Malheureusement le problème est que j’ai été influencée par le jeu des acteurs incarnant les personnages, en particulier Audrey Tautou en Thérèse Desqueyroux. J’avoue qu’après avoir vu le film, je trouve que le choix de ce personnage essentiel fut particulièrement bien fait, Audrey Tautou incarnant bien toute la fragilité, les démons intérieurs de Thérèse.



Mais qui est donc cette Thérèse qui a donné son nom au roman ? Projetons dans le Bordelais au début du XXe siècle. Nous voilà dans le fief des Desqueyroux. La libre Thérèse a épousé l’ennuyeux Bernard Desqueyroux, voisin de l’immense domaine familial. Deux familles de la bourgeoisie bordelaise, destinées à s’unir pour agrandir leurs domaines : « Tout le pays les mariait parce que leurs propriétés semblaient faites pour se confondre. »



Malheureusement pour le pauvre Bernard, Thérèse est une femme résolument moderne, née trop précocement alors que la société qui l’entourait n’était pas prête à accorder la liberté à laquelle elle aspire. C’est une femme d’une dureté terrible à l’extérieur, mais d’une fragilité intérieure extrême. C’est une femme qui sait ce qu’elle veut – garder ses pins, vivre sa vie – et ce qu’elle ne veut pas – être assujettie à un mari, et pire, à la famille de son mari : « Le lycée, au-delà de mon temps d’épouse et de mère, m’apparaît comme un paradis. Alors je n’en avais pas conscience. Comment aurais-je pu savoir que dans ces années d’avant la vie, je vivais ma vraie vie ? »



Femme lettrée, sans cesse plongée dans ses livres, elle s’opposera à cette même famille et à ce mari ne peuvent – et ne veulent pas la comprendre. Nouvelle Madame Bovary, elle souffre du gouffre entre réalité et littérature : « Elle exécrait dans les romans la peinture d’êtres extraordinaires et tels qu’on n’en rencontre jamais dans la vie. » Elle doit donc se cacher derrière un masque de froideur, de mensonges, y compris envers sa belle-sœur qui est celle dont elle est la plus proche, et en même temps la plus éloignée. Lumière et obscurité. Pusillanimité et réflexion. Voilà le vrai drame de Thérèse : être étrangère auprès même de ceux qui lui sont chers. Et qui la jugent, par exemple sur ses sentiments maternels : « Une mère qui ne s’intéresse pas à son enfant, vous pouvez inventer toutes les excuses que vous voudrez, je trouve ça ignoble. »



Petit à petit elle va donc gagner sa liberté, fut-ce au prix d’un geste terrible envers son mari. La chute sera fatale.



Mauriac s’inspira pour l’histoire de Thérèse Desqueyroux de celle d’Henriette Canaby qui fut accusée en 1905 d’avoir voulu empoisonner son mari Émile Canaby, courtier en vins bordelais alors endetté. Mauriac assista à son procès en Cour d’assises au cours duquel elle fut condamnée pour faux et usage de faux (fausses ordonnances). L’accusation de tentative d’empoisonnement fut rejetée, son mari témoignant en sa faveur pour sauver les apparences.



Mais Mauriac en a fait plus qu’un fait divers, mettant en scène une femme extraordinaire, représentant le désir de liberté féminine de l’époque, mais un désir de liberté poussé jusqu’à son extrême.



Un roman qui m’a intéressé, avec sa figure de femme forte, mais sans être une lecture exceptionnelle …
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Thérèse Desqueyroux

Relu la nuit dernière après avoir vu l'adaptation de C.Miller. A ma grande surprise, le roman n'a pas pris une ride! La famille bourgeoise est toujours antipathique, personne n'inspire la moindre compassion, et pourtant le récit coule d'un trait. Sauver les apparences, voilà la seule morale de l'histoire, mais à quel prix? La somme de rancoeurs, de frustrations, de jalousies ne peut se terminer autrement que dans le sang. Eteignons ce feu qui dévore les pins et menace la fortune, éteignons aussi tout sentiment qui puisse embraser un coeur! A lire absolument si vous n'avez jamais plongé dans un roman de François Mauriac.
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Thérèse Desqueyroux

Les Pins...



Ce fut une lecture difficile, obligatoire au collège...



Quel ennui...



Je me rappelle surtout des descriptions de la forêt landaise sombre, sinistre, les troncs noirs des pins... je venais d'arriver dans la région et je n'aimais pas cette enfilade d'arbres toujours revêtus de leur parure verte, sans aucun automne...!



Heureusement que je lisais Jules Verne et Pearl Buck ! Grâce à ces deux auteurs, je suis devenue une accro aux livres ... pas grâce à Mauriac !



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Le Baiser au lépreux

Tout le monde a vu le film "Titanic" ?

Je vous propose une version alternative.

Revenons dès le début : la mère de Rose attend de sa fille qu'elle se sacrifie pour épouser un bellâtre richissime et amoureux, afin de restaurer le train de vie de la famille maternelle ruinée.

Version alternative : Rose, convaincue par sa mère tout autant que par le curé, accepte le fiancé.

Ajoutons qu'à la place du grand dépendeur d'andouille du film, on a ici un être chétif, un "cloporte", une "larve", avec un long nez rouge comme un sucre d'orge à moitié sucé (et doté de surcroît d'un père "égrotant".)

Vous sentez l'abnégation ? C'est qu'on a de la religion, dans ce milieu.

Au lieu d'une découverte passionnée de l'amour en voiture sur les eaux glacées de l'Atlantique Nord... une nuit de noces abominable au son des vagues du bassin d'Arcachon.

Prélude à une vie de couple tissée de dégoût pour elle, de contrition pour lui : le gars, depuis qu'il a lu Nietzsche, il se la pétait en mode mâle dominant, mais sa nature timorée reprend vite le dessus et, entre Nietzsche et Dieu, c'est la pagaille dans sa tête.

Bon, elle a pitié la pauvre, il est amoureux, elle fait de son mieux ; mais il voit bien qu'elle dépérit.

Du coup il prend le large sous un prétexte quelconque, monte traînasser à Paris et la voilà qui, restée seule, sent frémir la Nature en elle au vu d'un joli médecin qui passe ; elle reprend des couleurs. Mais on a le sens du devoir : lorsque l'époux revient au foyer elle l'accueille en digne épouse. Et même, lorsque ce "débris" tombe malade et agonise, elle commence à le voir d'un oeil de plus en plus attendri...

C'est splendide, c'est superbement écrit, c'est de François Mauriac et ça s'appelle le baiser au lépreux.

Challenge Départements (Gironde)

Challenge Nobel
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Thérèse Desqueyroux

Avec Thérèse, ce sont toutes les femmes enfermées dans des mariages ennuyeux, des familles oppressantes, des vies étriquées, des destins non choisis que Mauriac met au-devant de la scène.

Et finalement, si le verbe est d'époque, le propos reste assez contemporain.



La plume de Mauriac n'est plus à encenser, elle fait chanter le français tout simplement. Plusieurs notes en bas de page de l'édition livre de poche 2017 nous apprendront que même Grévisse y a trouvé là des tournures de langue inédites suffisamment intéressantes pour paraître dans ses publications comme Mauriacisme. C'était mon premier roman de l'auteur, assez charmée par sa prose, je vais me pencher sur le reste de son oeuvre.



Du côté de l'histoire en tant que telle, je ne suis jamais entrée ni en empathie, ni en compassion avec Thérèse. Question d'époque et de génération sans doute...
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Le Sagouin

La grande force de ce roman c'est d'avoir exprimer tant de choses en si peu de mots et c'est la marque des très grands dans lesquels je place @Mauriac aux côtés de @Camus ou @Steinbeck après la lecture de @le sagouin dont je n'avais aucune idée du sujet avant d'en commencer la lecture.



L'ouverture du roman commence par une paire de gifles assénées par Paule de Cernès à son fils Guillaume, coupable, coupable de ne pas avoir été désiré, coupable de ne pas savoir s'exprimer par des mots et de rester taiseux comme son père qui assiste sans broncher aux joutes de Paule avec sa belle-mère la Baronne et quelle victime idéale qu'un petit garçon non désiré et innocent pour étaler toutes les rancœurs accumulées au fil des ans.



Et pourtant Guillou recèle un potentiel incroyable, il est capable de réciter par cœur des passages de l'île aux trésors et quand sa mère décide de demander à Robert Bordas l'instituteur de l'éduquer, on se dit qu'enfin il pourra entrevoir le bout du tunnel de la déconsidération mais là encore c'est peine perdue car Bordas ne pense qu'à la lutte des classes et Guillou est le symbole de l'aristocratie décadente. Alors l'enfer continue et @Mauriac nous entraîne un peu plus dans les tréfonds de l'inhumanité avec ce texte d'une noirceur indicible.



Une claque monumentale. Un roman magistral par un immense romancier.





Challenge Multi-défis

Challenge Riquiqui

Challenge Atout-Prix

Challenge Nobel

Challenge solidaire
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La chair et le sang

Commencé en 1914, l'écriture de La Chair et le sang a été interrompue par la grande guerre. Achevé en 1918 ou 1919, le roman est publié en 1920. Mauriac s'est inspiré pour son roman d'un fait divers, le suicide en 1909 de Charles Demange, neveu de Barrès, écrivain qu'il a beaucoup admiré et qui a eu une grande influence sur ses premières œuvres.



Le personnage principal, Claude, est le fils d'un régisseur d'un domaine viticole, qui abandonne ses études au séminaire juste avant de devenir prêtre. Pas par manque de foi, en réalité l'auteur ne nous explique pas vraiment pourquoi. Il revient chez ses parents, qui ne désespèrent pas de le faire changer d'avis. Le domaine sur lequel travaille son père a été acheté par un nouveau propriétaire, M. Dupont-Gunther, un homme dur, méprisant et violent. Ses deux enfants, Edward et May, très proches l'un de l'autre, ont des relations difficiles avec lui, d'autant plus que se pose la question de l'héritage de leur mère. Edward a réclamé sa part, mais son père espère garder celle de sa sœur dans ses affaires en la mariant à un homme facile à manipuler. Il met donc en place une stratégie pour rendre la vie insupportable à May, et l'obliger à se marier. Il se sert d'une de ses anciennes maîtresse, devenue son intendante, Mme Gonzalès, ainsi que de sa fille Edith, dont il espère faire sa nouvelle maîtresse. Le frère et la sœur ont sympathisé avec Claude, qui tombe sous le charme de May, qu'il idéalise beaucoup. Pendant ce temps, Edward s'amuse à essayer de conquérir Edith au détriment de son père.



Le principal intérêt du livre, réside à mon sens, dans les descriptions de la nature, de la maison, du lieu qui sous un nom d'emprunt est Malagar, la maison familiale de Mauriac. Le lien très fort entre Claude et la terre, les arbres, tout cet environnement, est aussi très bien rendu. En revanche, l'intrigue en elle-même est assez maladroite, et les personnages, tournent parfois à la caricature (Dupont-Gunther, Mme Gonzalès...). Mauriac a trouvé son cadre, il lui reste encore à construire une structure romanesque convaincante.
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Le Noeud de vipères

"Je connais mon coeur, ce coeur, ce noeud de vipères : étouffé sous elles, saturé de leur venin, il continue de battre au dessous de ce grouillement". Ainsi parle Louis, ce vieil homme, narrateur de l'épouvantable confession faite à sa femme Isa, qui définit son existence comme un cloaque dans lequel surnagent avarice, irréligion, et surtout, surtout haine de sa famille !



En une glaçante autocritique il laisse éclater cette haine qui a empoisonné son coeur, le coeur du jeune homme avide d'amour qu'il fut durant ses fiançailles et déçu dans ses espérances dès le début de son mariage.

C'est de cette haine qu'il va vivre durant quarante années, cette haine sera le moteur de sa vie familiale, haine de son épouse et de ses enfants mais aussi, haine de la religion "raisonnable, modérée" en honneur dans cette famille bourgeoise qui pratique une foi desséchante, où le dogme, respecté au pied de la lettre, reste sans véritable substance et confit les coeurs dans une aimable indifférence envers autrui.



Lui, Louis, issu d'une famille paysanne, ayant épousé une jeune femme de la meilleure bourgeoisie bordelaise, contemple avec dégoût sa famille bourgeoise, confite dans ses privilèges de caste, cette famille qui le craint et le rejette ; elle craint le patriarche tout puissant qui détient le pouvoir et l'argent et lui se délecte à la pensée de déshériter sa descendance.

Tout ici est d'une totale noirceur, mais où sont véritablement les vipères dans cet inextricable noeud familial et qui sont-elles ? Que penser du fils qui, "au nom de la défense des droits sacrés de la famille", envisage tout simplement de faire interner son père ?



François Mauriac emporte le lecteur dans un ballet magistral orchestré par l'incompréhension, le désamour, les frustrations, la soif ardente d'un amour perdu qui laisse le coeur dévasté de chagrin, les tristes manigances du cercle de famille et épingle avec férocité l'hypocrisie et les vices bourgeois tout autant que la stupidité prolétarienne, référence faite ici au fils adultérin de Louis, ce sombre crétin !



Tout est haine et rejet de l'autre dans ce roman magistral. Avec le personnage de Louis, François Mauriac tente et réussit une plongée hallucinante de maîtrise dans les méandres les plus obscurs de l'âme humaine en en débusquant toutes les noirceurs mais aussi les attentes, les secrets espoirs et ce fragile élan avorté envers son épouse qui rend poignante la relation des vieux époux, irrémédiablement entachée par les non-dits ou plutôt les mal-dits.



Un chef d'oeuvre, ce noeud de vipères ! Un des très grands romans de la littérature française.

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Thérèse Desqueyroux

De Thérèse Desqueyroux, les gens disent : "On se demande pas si elle est jolie ou laide on subit son charme". Qui est donc, au fond, cette femme étrange jugée pour avoir tenté d'empoisonner son mari?

Thérèse est un mélange d'Emma Bovary et d'Anna Karénine, mariée à un homme qui lui fait horreur dès la première nuit. Le drame est qu'elle a conscience qu'une autre vie serait possible que cette existence de renoncement, de soumission, que l'on attend de toute femme respectable dans la campagne landaise. Comment arrive-t-elle à l'idée de l'empoisonnement? Elle reconstruit elle-même le raisonnement après le non-lieu, espérant avoir l'occasion de l'expliquer à Bernard. Implacable dans sa faiblesse, ledit mari ne lui laissera pas cette chance, ayant déjà élaboré avec la famille tout un plan pour sauver les apparences. Y a-t-il autre chose qui compte vraiment que les apparences, au fond?

Thérèse Desqueyroux est un roman très court, qui met profondément mal à l'aise de la première à la dernière page. Et pourquoi? Parce qu'on devrait, raisonnablement, détester cette femme mais que je n'y suis pas parvenue une seule seconde. Bien au contraire. Thérèse s'inscrit dans la lignée de toutes ces héroïnes de la littérature qui ont voulu changer leur destinée mais n'ont fait que se condamner davantage. Ou peut-être pas. Car ce qu'il adviendra d'elle dans le Paris ou son mari la dépose pour l'éloigner, c'est à nous de l'imaginer.

Ce roman était le premier que je lisais de François Mauriac et j'en reste abasourdie.



Challenge XXème siècle 2020
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L'enfant chargé de chaînes

Acheté 2 euros sur le marché du Cours Lafayette à Toulon, ce vieux livre imprimé en 1929 est le premier roman de François Mauriac, écrit entre 1909 et 1912, publié en 1913 chez Bernard Grasset.



Le livre est illustré par les dessins de Clément Serveau qui restituent admirablement l'ambiance d'une époque.



L'auteur annonce dans sa préface "les évidentes faiblesses de ce petit livre" et le caractère ridicule de son héros. C'est donc un premier roman d'un futur grand écrivain. Et pourtant, déjà, perce sous cette plume la qualité littéraire, la richesse de la phraséologie au travers notamment des descriptions de l'environnement des protagonistes, qu'il s'agisse des toits de Paris, des vieux meubles riches de l'histoire de leurs propriétaires successifs, des pins des Landes où des fougères de leurs sous-bois.



L'histoire est celle d'un jeune mystique auquel on identifiera sans doute l'auteur, mais Mauriac n'exagère pas lorsqu'il le qualifie de ridicule, il l'a voulu ainsi et le dépeint tel quel. Ce garçon balance entre l'ivresse d'une foi exacerbée et une soif, pour lui coupable, des plaisirs du monde. Il ne sait pas que les deux ne sont pas inconciliables, il ne veut que recevoir, ne sachant pas donner.



Il a la chance d'être aimé et, finalement, c'est peut-être cette amoureuse maladroite mais persévérante qui est la véritable héroïne de ce roman, elle à qui Mauriac donne le dernier mot de son "minutieux amour".
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Le Noeud de vipères

Un excellent roman, parmi les meilleurs de Mauriac, comportant toutes les tortures psychologiques de l'âme humaine pour déboucher sur... le divin, la grâce, l'illumination. Chacun rencontre Dieu suivant un chemin mystérieux, celui-ci est pavé de haine, de cupidité, de rancoeurs et puis soudain un événement peut-être ou autre somnolence dans ce noeud de vipères, c'est le chemin de Damas du héros du livre, Louis. le style de Mauriac décrit admirablement la bourgeoisie du début du XXème siècle avec ses règles, ses contraintes, ses renoncements, son hypocrisie et ses désastres. Une lecture de qualité exceptionnelle.
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La Fin de la nuit

Si Emma Bovary était Flaubert, j'ai tendance à penser que Thérèse Desqueyroux est un peu Mauriac. Sinon, comment aurait-il pu analyser aussi finement les joies de la manipulation, les remords qui s'ensuivent et les affres de la solitude d'un esprit supérieurement intelligent frôlé par la paranoïa? Des oeuvres de Mauriac, je n'avais aimé jusqu'à présent que Thérèse Desqueyroux. Mes incursions vers d'autres romans (dont je n'ai pas gardé de souvenir précis) m'avaient convaincue de me tenir loin de cet auteur dont je jugeais les écrits tourmentés et sans grand intérêt pour moi. Le hasard des rencontres m'a incitée à le « revisiter » en ouvrant La fin de la nuit et je n'ai pas été déçue de ma lecture. Ce roman m'a paru aussi bon, si ce n'est meilleur, que Thérèse Desqueyroux. Je me suis replongée avec délices dans l'ambiance du début du siècle dernier où les voitures étaient encore presque toutes hippomobiles, où la bourgeoisie provinciale se pensait immuablement servie par des domestiques relégués à l'office et où les femmes de 45 ans au front ravagé mourraient de façon inéluctable d'une pathologie cardiaque pourtant bien diagnostiquée…

Je recommande donc cette lecture à tous, amateurs ou non de Mauriac, avec ou sans la lecture préalable de cet autre chef-d'oeuvre qu'est Thérèse Desqueyroux.
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Thérèse Desqueyroux

Quelle puissance dans l'écriture pour écouter cette femme se raconter. Nous entrons dans le psychique de cette femme malheureuse d'avoir une vie si commune. Il ne se passe pas grand chose mais le style est sublime, et ça suffit.

On me l'avais conseillé, je n'ai pas été déçue. Fort.
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Thérèse Desqueyroux

Thérèse Desqueyroux a tenté d'empoisonner son mari. Pour éviter le scandale, son mari fait des déclarations permettant d'obtenir un non-lieu.

Ainsi affranchie de la justice officielle, Thérèse Desqueyroux se retrouve confrontée à celle voulue par son mari qui devient ainsi juge, partie et exécuteur de sa peine.

C'est ainsi qu'elle se retrouve enfermée chez elle et tombe dans un prostration profonde.

François Mauriac nous fait vivre ici un angoissant huis-clos. Et même si le geste commis par Thérèse est bien là, le récit de cette captivité privée est difficile.

Mauriac a écrit, à cette occasion, certaines de ses plus belles pages.

Ce roman est angoissant, mais il est difficile d'en décrocher tant que l'on a pas atteint la fin.
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Le Noeud de vipères

Le noeud de vipères est un long cri de haine et de souffrance, qui m’a bouleversée. Un vieil avare extrêmement riche explique dans une lettre destinée à sa femme qu’il a l’intention de la déshériter, elle et leurs enfants, tant la haine qu’il éprouve à leur endroit est intense.

La frustration explose dans ce récit, en même temps que le sentiment d’un immense gâchis.

Mauriac décrit très justement les petites bassesses et conventions de la bonne société bourgeoise de province du début du 20e siècle, et comment l’argent domine tout dans ce milieu.

Il nous brosse aussi un portrait saisissant de ce vieil homme, aigri et et meurtri, qu’on déteste et plaint tour à tour. Je n’en dirai pas plus pour ceux qui ne connaîtraient pas encore l’histoire, mais j’encourage vivement la lecture de ce grand classique.





Challenge solidaire 2021

Challenge des 50 objets 2021-2022

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Thérèse Desqueyroux

Thérèse Desqueyroux, quelle femme! Celle dont le mari et la belle-famille ont fini par traiter de monstre pour avoir laissé, peut-être par ennui, son mari s'empoisonner, pourtant, par ses émotions aussi fades, ses sensibilités aussi fastidieuses, on vaudrait quand même croire qu'elle ne l'est pas, ou plutôt on voudrait mieux la comprendre. Mais elle est comme une statue de marbre, endurcie avec le temps alors qu'elle est vouée à une vie de confort...

Une belle plume, un style assez particulier, un personnage féminin atypique, celle qui subit le confort que lui offre la société, curieusement pour elle, ce qui n'est qu'un leurre, alors, qu'elle s'est sentie pousser des ailes et qu'elle voudrait prendre son envol peut-être autrement, peut-être ailleurs....sortir de ce confort quelque peu empoisonneur...

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Thérèse Desqueyroux

D'habitude j'ai du mal à lire les classiques, les trouvant souvent difficiles à lire et à comprendre. Mais il s'avère que le roman de Mauriac m'a bcp plu.

J'ai trouvé que ce roman était facile à lire, ayant une syntaxe légère et un vocabulaire accessible.



J'ai particulièrement aimé le fait que l'auteur aborde la condition de la femme dans les années 1900, et son rôle en tant qu'épouse, de bourgeoise provinciale.

Je trouve que l'auteur est audacieux d'avoir eu le courage d'exposer une femme singulière, qui remet en cause l'existence individuelle à cette époque et la place des femmes.



En somme cefût une lecture agréable et enrichissante car j'ai découvert que la femme n'avait pas beaucoup de droits à cette époque et une liberté d'expression quasi nulle.

Le statut de la femme fut et reste toujours difficile dans nos sociétés, car on se bat encore aujourd'hui pour se faire respecter auprès des hommes.
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