AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Georges Bernanos (309)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Journal d'un curé de campagne

Dans une France en voie de déchristianisation, un jeune séminariste se retrouve à la tête d'une petite paroisse rurale, il pense naïvement que venir veiller au salut des âmes des villageois lui assurera un bon accueil. Sa chétivité atavique et sa tristesse apparente lui fera subir les moqueries des enfants du catéchèse et le mépris des habitants mais sa force de conviction l'aidera à y faire face ainsi qu'au vieux couple d'aristocrates.



S'éloignant maladivement des contingences matérielles, il consigne ses réflexions et les conversations qu'il entretient au gré de ses rencontres qui ébranlent ses convictions. Doutant de son autorité, conscient de sa naïveté, il se demandera toujours si il sert correctement son sacerdoce au fil du récit qui s'articule en 3 parties et où le point d'orgue est l'échange houleux avec la comtesse.



Ce n'est ni une charge contre l'église, ni un texte opposant les croyants et les athées mais simplement un ensemble de questionnements sur la manière de faire face à la laideur, à la souffrance et finalement à la mort. C'est le cheminement fiévreux d'un membre du bas clergé qui voit dans dans son ministère une recherche constante d'amour et d'espérance et non une simple absolution. Il s'acquittera d'ailleurs jusqu'au bout de sa tâche tout en croyant mal faire.



C'est un texte riche et de haute volée qui ne peut laisser indifférent même les lecteurs mécréants comme moi. C'est pourquoi il est incompréhensible qu'une maison d'édition comme Plon ne soit pas en capacité de bénéficier de relecteur et laisse passer autant d'erreurs typographiques dans l'édition pocket.
Commenter  J’apprécie          60
Journal d'un curé de campagne

Je suis heureux d'avoir rencontré ce curé de campagne par l'intermédiaire de ce journal. J'ai eu de la sympathie et de l'empathie pour cet homme simple, honnête et attachant qui analyse les âmes et la sienne tout particulièrement. J'ai tout particulièrement aimé sa confrontation avec la Comtesse qui est un grand moment du livre, d'une très grande intensité.

Cela m'encourage à lire d'autres ouvrages de cet auteur tombé dans l'oubli.



Commenter  J’apprécie          60
La grande peur des bien-pensants

Je suis entrain de lire "Antisémythes " de Marie-Anne Matard-Bonucci; dans sa préface, l'auteur reprend la déclaration de Bernanos selon laquelle Hitler aurait "déshonoré l'antisémitisme. Cette déclaration se retrouvetrouve dans les annexes de "la grande peur...", édition du Livre de Poche, particulièrement la deuxième et la troisième. Certaines de ces annexes ont été écrites après la Guerre, ce qui établit bien que Bernanos n'a rien renié. Il essaie laborieusement de distinguer l'antisémitisme chrétien de l'antisémitisme nazi, alors que toute la recherche récente en histoire des idées établit le contraire.

C'est pourquoi j'ai eu envie de faire du sort à "la grande peur des bien-pensants", n'ayant jamais compris, qu'on ait si facilement pardonné le livre à son auteur, médiocre écrivain mais excellent antisémite

Car n'est ni plus ni moins que l'apologie d'un des pires théoriciens de l'antisémitisme français, auteur de l'immonde "la france juive",qui se fit tristement connaître lors de l'Affaire Dreyfus. Mais pour lui Drummond a des excuses: il était chrétien; Bernanos aussi d'ailleurs. Cela change tout évidemment!

Bernanos lui-même n'a jamais renié son antisémitisme de jeunesse. Il est vrai que son catholicisme l'a quand même tenu à l'écart du national-socialisme, ce qui, joint à sa condamnation du franquisme dans "les grands cimetières sous la lune" lui a permis de revenir après la guerre de son confortable séjour au Brésil avec une auréole de quasi-résistant (la résistance est plus facile à quelques milliers de kilomètres de l'armée allemande).

Mais cela ne l'empêcha pas de conclure, comme rappelé ci-dessus, qu'"Hitler avait déshonoré l'antisémitisme". Pour le reste ce grand penseur a commis quelques essais violemment antiprogressistes et anti-lumières, dont on ne sait s'il faut admirer le plus la naïveté ou la stupidité. Il rejette le progrès en bloc, qu'il soit social ou technique, au nom d'une Chrétienté médiévale en grande partie imaginaire

Et à vrai dire, on ne comprend pas trop quel régime politique et quelle organisation sociale aurait sa faveur.

Cette condamnation n'a rien d'original et on la retrouve sous la plume de beaucoup d'autres écrivains réactionnaires, y compris chez les idéologues de la Révolution Nationale

Ce qui n'est d'ailleurs pas surprenant, puisqu'on trouve dans les deux cas l'influence de l'Action Française

Pour les"Grands Cimetières sous la lune", tellement loués qu'en leur nom on excuse tout le reste, il faut les replacer dans leur contexte. Installé à Majorque, Bernanos était à origine favorable à la rébellion. Son fils était d'ailleurs phalangiste (dans le contexte de l'époque, ces engagements n'avaient d'ailleurs rien de deshonorants). Les Baléares ayant été rapidement occupés par les Franquistes, Bernanos eut l'occasion d'assister en première ligne aux excès de la répressions (ces excès d'ailleurs équitablement partagés entre les deux camps, comme dans toute guerre civile qui se respecte). Cette dénonciation est d'autant plus honorable que l'auteur appartenait au départ au camp responsable de ces exactions. Il fut apprécié en tant que tel par les gauches européennes. C'est bien, mais cela ne va pas au-delà et n'a nécessité aucun courage particulier, l'auteur étant protégé par son passeport de citoyen français, et les Franquistes évitant tout ce qui aurait pu être un casus belli pour la France

Quant à son oeuvre romanesque, elle est médiocre, ennuyeuse, et empreinte d'une vision si sectaire et exaltée du catholicisme qu'elle en est insupportable et ne rend pas service à cette religion. Le style heurté en rend la lecture pénible. Et l'auteur semble haïr tous ses personnages avec une belle equanimite



Du moins, le pauvre Léon Bloy, tout aussi exalté dans son genre, mais doté malgré tout d'une véritable verve polémique, et ne manquant pas d'un certain sens de l'humour, avait lui, écrit "le salut par les juifs"

Je ne suis pas certain que, sur le plan des idées, Bernanos vaille beaucoup mieux que Céline, le talent en moins.



Le sieur Lapaque, à qui j'ai déjà fait un sort, déclare dans sa préface à La Grande Peur qu'il n'y a pas lieu de distinguer le bon Bernanos des romans et le méchant Bernanos des pamphlets : Bernanos est un tout, qu'il faut prendre ou laisser en bloc. Je suis bien d'accord. Je laisse

Voilà bien du temps consacré à un méchant livre. Mais c'est œuvre utile vu l'aura dont il bénéficie encore.
Commenter  J’apprécie          64
Nouvelle histoire de Mouchette

Un petit roman d'une centaine de pages qui se lit très vite. L'histoire est tragique et sordide de bout en bout, néanmoins c'est très bien écrit et prenant, c'est un peu du Zola. Il s'agit d'une jeune fille "Mouchette" qui vit dans une famille de paysans pauvres à la campagne. Je dirai juste que la fin m'a surprise étant donné que la jeune fille avait trouvé une sorte d'alliée dans le personnage de la vieille dame. Ce roman dépeint de façon crédible la misère du peuple au début du siècle. Je suis curieuse de lire d'autres livres de cet auteur considéré comme majeur, des années 30.
Commenter  J’apprécie          60
Un crime

J'ai bien aimé ce roman qui m'avait été chaudement recommandé par mon père mais je ne pense pas en avoir compris toutes les subtilités...

Il s'agit d'une enquête pour essayer de trouver le responsable de deux morts criminelles dans un village des Pyrénées ; on a parfois envie de se croire dans un roman d'Agatha Christie ou plutôt de Simenon.

Ces morts coïncident avec l'arrivée du nouveau curé de Mégère, jeune homme au charisme surprenant qui fascine le commissaire chargé de l'enquête.

Il y a ensuite des histoires de famille et d'héritage autour du meurtre de la vieille dame du château mais je suppose que l'auteur a aussi voulu parler à mots couverts de la difficulté d'assumer une identité sexuelle aux limites du genre dans ce contexte. A voir... si je le relis une autre fois.
Commenter  J’apprécie          60
Journal d'un curé de campagne

Je respire enfin car j'ai terminé ce roman, que j'ai traîné depuis des semaines comme un boulet. J'ai failli l'abandonner plusieurs fois, et j'aurai dû mais un je ne sais quoi m'a retenu.

L'auteur nous offre ici le journal intime d'un curé de campagne. le personnage principal est un jeune prêtre exalté, plein de projets et d'ambitions pour son humble paroisse. Il me semble un peu naïf, car tout droit sorti du séminaire il connaît mal les usages du monde et devient parfois la risée des autres. Mais l'auteur a quand même semé le doute dans mon esprit : n'est-il pas aussi possédé par le démon de l'alcoolisme et son comportement agité n'est-il pas le fruit de son ivrognerie ? Est-ce la solitude qui lui monte à la tête et qui le rend si mélancolique et si triste ? Parfois, on a l'impression que la foi l'abandonne complètement et ensuite il se ressaisit et de nouveau, tout semble clair dans son esprit par rapport à sa vocation.

Les soucis quotidiens de sa paroisse sont brièvement évoqués et il faut deviner entre les lignes ce qui se passe.

En tout cas, nous allons suivre les méandres de ses pensées pendant trois cent pages : qu'est-ce que ça m'a paru soporifique, incompréhensible et ennuyeux ! le style d'écriture est lourd, assez dense et très riche. Il faut beaucoup de concentration pour saisir les tenants et aboutissants. Pour ceux qui ne seraient pas intéressés par les questions religieuses, métaphysiques et philosophiques, je vous conseille d'éviter ce roman. Même moi j'ai peiné et j'en garde un mauvais souvenir.

La fin est assez tragique et malheureuse, tout comme l'est l'ensemble de cet ouvrage. Après cette lecture, on a juste envie de se servir d'un bon verre de vin rouge et du fromage, de s'installer confortablement et de savourer la beauté de la vie sans se prendre la tête !

Pour conclure, un roman qui n'est pas dans mes goûts et que je ne recommande pas.


Lien : http://leslecturesdehanta.co..
Commenter  J’apprécie          63
Sous le soleil de Satan

Mouchette, une adolescente romanesque et révoltée est initiée au mensonge par son père impuissant et son amant peu aimant. Elle commet un crime. Le jeune abbé Donissan, après une confrontation avec le diable, a reçu la grâce de pouvoir lire dans le cœur des hommes. Il croisera Mouchette mais ne pourra pas la sauver d’un dernier péché, et peut-être en porte-t-il même une part de responsabilité.

Bernanos dans ce roman surnaturel cherche à renouer avec les Vies de saints. Un roman naïf, édifiant, qui veut redonner sa part au diable. Le Mal existe pour Bernanos, sans lui il n’y aurait pas de Bien. Ils sont même très proches : Qui peut dire la différence entre l’espoir et le désespoir, entre la vraie joie et la douleur, entre la sincérité et le mensonge, entre l’humilité et l’orgueil ? Même l’abbé Donissan, qui devient un saint aux yeux du monde à la fin du roman, ne le sait pas. Toujours il doute et lutte contre la malice de Satan. Il bascule constamment entre le Bien et le Mal, sans jamais arriver à les identifier vraiment. Et cette grâce qui lui permet de voir le Moi profond, l’intime de l’être, cette grâce qui lui permet de ressentir une compassion sans borne, ne lui a-t-elle pas été conférée par Satan ? La dernière partie du roman est un abîme de doute, d’humilité, de pitié. Mais il ne faudrait pas trop en dire sur ce livre qui s’adresse plus au cœur qu’à l’intelligence.

Bernanos ne met pas en scène des personnages mais des âmes, son style est ici un peu vieillot, les « ô rage », « ô folie », « ô miracle » sont d’un autre âge, mais ce roman se veut traditionnel.
Commenter  J’apprécie          60
Lettre aux anglais

C'est en exil, au lendemain de Munich, que Bernanos décide d'écrire au Anglais, ceux là même qui ont partagé la victoire de 18 et l'humiliation de 39/40..Une longue analyse sur les causes de cet effondrement...On découvre un homme ravagé par le déshonneur et l'attitude des élites, cherchant en le souffle nécessaire, l'espoir d'un redressement! Profondément croyant, il en veut à la lâcheté des "marchands" de ceux qui ont plié devant le besoin d'engendre toujours plus de profit et on oublié qu'une nation se construit avec des vertus et des principes, qui ne sont pas ceux du commerce...A ceux qui ont méprisé le peuple de France qui faisait confiance à cette nouvelle élite, alors qu'elle n'avait qu'un but, s'enrichir, non préserver la grandeur de la France, encore moins la bonheur de son peuple...
Commenter  J’apprécie          60
Sous le soleil de Satan

Lecture ardue pour un texte qui m'a souvent fait l'effet d'une douche froide. A quoi bon ces pages magnifiques ? Certains passages sont simplement époustouflants mais l'histoire, les personnages et le propos même du livre me restent totalement abscons. On se prend à relire 10 lignes deux fois ... juste pour le plaisir de sentir cette profusion de détails subtiles. Mais à force de subtilités on perd le lecteur qui comme moi n'a pas les capacités intellectuelles pour mettre ce puzzle bout à bout et en lire le sens. Si sens il y a...

Frustrant !
Commenter  J’apprécie          60
Sous le soleil de Satan

"On gagne toujours à reprendre Bernanos. Ce grand homme de foi et tout aussi grand homme de passion, pamphlétaire redoutable et « plus grand romancier de son temps » selon Malraux (qui préfaça en 1974 le Journal d’un curé de campagne), avait la vocation...
Lien : http://www.denecessitevertu...
Commenter  J’apprécie          60
Madame Dargent

Dans cette brève nouvelle de Georges Bernanos, le drame se déroule autour de Madame Dargent, l'épouse d'un écrivain célèbre, sur son lit de mort. Lorsqu'elle révèle à son mari qu'elle a toujours su qu'il le trompait, elle laisse planer un mystère: « Ce que tu as rêvé, je l'ai vécu. » Cette déclaration énigmatique annonce des révélations déchirantes et entraîne le récit dans sa cynique fin.



Bernanos nous montre ce qu'est la corruption humaine, de l'agonie tout en dénonçant cet écrivain. Malgré la brièveté du récit, l'auteur parvient à intensifier la tension de manière remarquable. le personnage de Madame Dargent se donne de la profondeur, gagne en épaisseur, captivant l'attention du lecteur. Quelque part, une fois que l'on aperçoit le for intérieur de Madame Dargent, l'inéluctable développement s'exécute devant le lecteur impuissant.
Commenter  J’apprécie          50
Dialogues des Carmélites

Quel magnifique pièce de théâtre, sur un sujet qui va si bien à la tragédie!



Je ne sais pas comment exprimer ce que j'ai ressenti, c'est une œuvre qui envahie le cœur comme l'air pur remplit les poumons. Rafraichissant, puissant et émouvant. J'aurais tant aimé que cette œuvre ai une paternité, mais peut-être était-elle d'un temps qui n'était déjà plus le sien?



Confiance, Espérance, Soumission, Consentement et Abnégation, ce sont les ultimes remparts de l'Homme face au désordre et à la terreur. Dernière leçon que Bernanos nous offre, leçon brillante et flamboyante. "Il faut savoir risquer la peur comme on risque la mort, le vrai courage est dans ce risque."



J'en conseille très vivement la lecture, et également regardez l'opéra tout aussi incroyable qu'en a donné Poulenc!
Commenter  J’apprécie          50
L'Imposture

L’imposture / Georges Bernanos

L’abbé Cénabre reçoit M. Pernichon , un habitué, en confession. Ce dernier rédige régulièrement la chronique religieuse d’une feuille radicale, subventionnée par un financier conservateur, à des fins socialistes, et ce qu’il a d’âme s’épanouit dans cette triple équivoque ; il en épuise la honte substantielle avec la patience et l’industrie d’un insecte. Il avait en son temps cru en une vocation sacerdotale et jusqu’au bout il a joué la comédie de façon à demi-consciente.

L’abbé Cénabre consacre beaucoup de temps à un modeste travail d’historien et annonce à Pernichon que désormais, il lui faudra recourir, pour la matière du sacrement, à un autre prêtre, se réservant toutefois la faveur de lui prodiguer des conseils à sa demande.

L’abbé Cénabre en vérité perd la foi et ne reste fidèle que par orgueil à sa foi d’antan dont il semble parfois avoir perdu jusqu’au souvenir. Son ambition ne va pas plus loin que séduire et sa vie a une clef infaillible : une hypocrisie presque absolue.

M. Pernichon est un petit homme dont la vie intérieure est trouble, équivoque et malsaine, vouant une haine féroce à l’opprimé et un ignoble amour pour le vainqueur. Chrétien médiocre, folliculaire ambitieux, il admire inconditionnellement le chanoine Cénabre qu’il considère comme un être supérieur sur le plan de l’intelligence.

Après avoir écouté le pénitent en silence, l’abbé manifeste une certaine raideur impitoyable jusqu’au moment où Pernichon s’enfuit.

L’abbé, en vérité, ne croit plus depuis longtemps et en pleine nuit, il appelle l’humble abbé Chevance, ancien curé de la paroisse de Costerel sur Meuse, aujourd’hui destitué. Il dit vouloir se confesser, mais son véritable but, inavouable, est de se moquer de la naïveté de l’abbé Chevance qui finit par s’en aller refusant de confesser le chanoine car en désaccord avec lui sur des points essentiels.

Alors débute pour l’abbé Cénabre un délire introspectif plein de fièvre allant jusqu’à l’idée de suicide au cours d’une crise mystique et au terme d’un profond désordre intérieur lui faisant rencontrer Satan.

Il faut bien reconnaître que cette première partie du roman est d’un abord assez difficile, dénuée de véritable intrigue, se présentant comme une longue réflexion sur la sincérité de la foi, mettant en opposition des personnages très différents, principalement Cénabre et Chevance.

J’ai eu bien du mal à aller au terme de cette lecture, surtout de la deuxième partie qui n’est qu’une longue conversation entre divers protagonistes rencontrés dans la première partie pour une part et de nouvelles têtes pour une autre part, et c’est seulement pour la grande qualité de l’écriture que j’ai persisté.

La troisième partie nous fait rejoindre l’abbé Cénabre de retour d’un voyage en Allemagne et qui, finalement, ne voit pas le péril de la dissimulation de la perte de sa foi ; il n’en sent pas la honte non plus et comme si de rien n’était continue de célébrer la messe, renouant ainsi avec les habitudes anciennes tout en se livrant à une introspection permanente.

« L’abbé Cénabre goûtait une certaine espèce de honte, et il n’en éprouvait aucune peine, il s’y délivrait doucement. Il la goûtait sans arrière-pensée, tout à la joie d’échapper pour un moment à son perpétuel tête-à-tête, la silencieuse et tragique confrontation ; »

Dans une ultime partie, on retrouve l’abbé Chevance qui, en pleine tourmente, réfléchit au devenir de l’abbé Cénabre avant que les deux prêtres ne s’affrontent parfois violemment, une dernière fois pour régler leurs comptes comme dit ce dernier.

Ce roman est une œuvre qui invite à réfléchir sur certaines futilités de l’existence se plaisant dans un matérialisme rudimentaire où les apparences jouent un rôle de premier plan. Le péché, le combat du Bien et du Mal, la rédemption et le salut sont au cœur du livre qui ressemble plus à un essai qu’à un roman.

Une œuvre sombre, riche de longues réflexions parfois difficiles à suivre. En bref, je pense que c’est un livre d’une autre époque et qui parle difficilement à nos vies d’aujourd’hui.

Commenter  J’apprécie          50
Les grands cimetières sous la lune

Dans cet essai, Georges Bernanos revient sur la situation en Espagne et en Europe dans les années 1930 et les années de guerres. Il a une écriture magnifique avec un style à la fois élégant mais aussi proche des gens. J'ai beaucoup aimé la façon dont il s'interpelle lui-même par la voix de possibles opposants à sa pensée. Cette façon d'écrire donne l'impression de se détacher un peu du sujet abordé, dur, un peu comme si on parlait avec lui dans un contexte amical.

Par contre, il livre sa réflexion sur la société, la politique, la place de l'Église à une certaine époque et pour cela, il fait référence à de nombreuses personnes, lieux, faits, médias qui ne sont pas forcément restés dans la mémoire actuelle, ce qui rend ce texte très difficile à suivre pour quelqu'un qui n'aurait pas une extrême érudition sur ces périodes. C'est pourquoi je ne suis pas allée au bout de ce livre, mais je l'ai quand même poursuivis un bon moment (2/3 du livre lu) pour le plaisir de la langue et du style.
Commenter  J’apprécie          50
Un crime

Le nom de certains auteurs sonne de manière si familière à mes oreilles que j’ai le sentiment de les avoir lus et de connaître leur vie au moins dans les grandes lignes. Pourtant en y regardant de près cela s’avère souvent faux. Cela me fait penser à une citation d’un philosophe dont j’ai oublié le nom qui disait que c’est lorsqu’on nous demande la définition d’un mot que l’on s’aperçoit que l’on ne le connaît pas vraiment alors qu’il fait pourtant partie de notre vocabulaire.



Donc en choisissant ce livre peu connu de Bernanos « Un crime » publié en 1935, je me suis rendu compte que bien que possédant quelques-uns de ses romans dans ma bibliothèque et lisant souvent son nom dans les livres de littérature générale je ne savais pas grand-chose en fait de son style et de sa vie. Il est vrai que Bernanos est un peu oublié, car il est mort il y a plus d’un demi-siècle en 1948 à 60 ans. Certains de ses livres sont toutefois toujours réédités ce qui témoigne du génie de cet auteur. On connaît surtout « Sous le soleil de Satan », « Journal d’un curé de campagne » et « Les grands cimetières sous la Lune ».



J’ai accroché tout de suite à ce roman dès les premières lignes du premier chapitre. L’auteur installe une ambiance qui annonce une sombre histoire qui se déroule dans le petit village de Mégère près de Grenoble. C’est la nuit, il fait froid et deux personnages parlent d’une voix tremblante dans une maison pleine du souvenir d’un mort. Il n’est pas nécessaire pour découvrir un auteur de lire ses plus grands succès, on risque même de passer à côté. En tout cas je ne regrette pas d’avoir eu en main ce roman de Bernanos qui, d’après ce que j’ai compris de son œuvre, se démarque un peu, car il s’agit d’un roman policier ce qui n’est pas la spécialité de Bernanos. L’histoire est en trois partie. Un jeune curé vient s’installer dans sa nouvelle paroisse et dès la première nuit de son installation croit entendre des coups de feu et des appels au secours dans un champ non loin du presbytère. L’alerte est donnée, on trouve un premier cadavre puis un deuxième, une enquête commence. La première partie se lit exactement comme un roman policier (mais je n’en ai pas lu beaucoup) porté par une écriture raffinée et mettant en scène des personnages bien campés. Dans les parties suivantes, on sent que l’auteur va au-delà de la simple histoire policière, l’intensité dramatique et la psychologie des acteurs entraînent le lecteur dans un monde plus profond, plus mystérieux, plus dense où se révèle le génie de l’auteur notamment dans les conversations entre le prêtre et le juge. On devine que ce jeune prêtre sait quelque chose concernant ces crimes et que d’une manière ou d’une autre il y est mêlé. L’intrigue se complique et laisse un peu le lecteur perplexe sur les différentes hypothèses, l’auteur reste volontairement allusif et sème très peu d’indice au point que l’on peut être un peu perdu si l’on manque d’attention, mais ce léger défaut est estompé par la puissance d’écriture et si la fin déroute un peu le lecteur il est impossible de lâcher le roman en cours de route.



Une très belle découverte qui m’a donné envie de mieux connaître Bernanos, j’ai notamment l’intention de lire prochainement son essai « La France contre les robots » publié en 1947, un livre prophétique sur ce que nous vivons aujourd’hui où il dénonce la société industrielle et les pertes de liberté que subissent les hommes au nom de la libre entreprise. Je lirais aussi sa biographie écrite par Max Milner qui m'attend sagement en haut de l'étagère située juste en face de moi au moment ou j'écris ces lignes.



— « Un crime », Georges Bernanos, Plon, le livre de poche (1968), 243 pages.
Commenter  J’apprécie          52
Journal d'un curé de campagne

Chronique vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=svV56uvlgnc



Nous suivons dans ce roman un jeune prêtre, qui vient d'arriver dans un village. Prêt à venir en aide aux paroissiens, cette mission va s'avérer plus compliquée que prévu, car la religion les intéresse moins que le concret, que les questions du quotidien.



C'est donc l'histoire d'un homme qui veut vivre pour le spirituel, et qui est toujours ramené vers le bas, vers le corps. Avec déjà ses douleurs d'estomac, qui le rongent comme un rappel éternel que la vie terrestre n'est que souffrance, on sent que ça s'insinue dans sa vie comme une moisissure. Cette douleur, on a parfois l'impression qu'il aime la raviver en manger très acide, du vin, et du pain, comme par hasard. Car notre curé porte le malheur des autres, prend à son compte les fautes, les bassesses de ceux qui l'entourent, et son dépérissement physique ne peut nous empêcher de faire un parallèle avec la figure de Jésus.



« Je prétends simplement que lorsque le Seigneur tire de moi, par hasard, une parole utile aux âmes, je le sens au mal qu'elle me fait »





En voulant expier les péchés des autres, et peut-être en se rendant compte que ce n'est pas la peine car la question du péché semble dépassée dans ce village, il se tisse autour de l'estomac une couronne d'épine, qui va se serrer, se serrer, l'éloigner et l'isoler de plus en plus.



Et en plus de cette souffrance physique, il y a la souffrance spirituelle, causée par les paroissiens, qui sont des gens ancrés dans le prosaïque, dans les cancans, dans les calculs, les bassesses, dans la bêtise ou la malignité. Et c'est un chemin de croix pour notre curé, conséquence directe de deux symptômes : qui sont d'abord sa versatilité, quant à sa foi, à sa vocation aussi, où on le voit passer du désespoir le plus sombre à un enthousiasme quasi-maniaque (mystique dirons-nous). Et puis aussi une tendance à noyer son chagrin dans le vin (ses parents étaient alcooliques, et la récurrence du vin laisse entendre que cela pourrait être aussi son cas). Il s'en défendra peut-être trop fortement dans le livre pour être tout à fait honnête. En tout cas, les préoccupations prosaïques vont empiéter sur le spirituel, que ce soit la soif, la faim, l'inquiétude quant à la manière dont on le perçoit, préoccupations qu'il balayera de sa formule favorite, le n'importe qui foisonne au début du livre, pour se raréfier et réapparaitre à la fin, comme le retour du réel. Car ce n'importe, c'est l'impuissance, l'abandon.





C'est une oeuvre du dialogue, car chaque rencontre, que ce soit avec Torcy l'autre curé, Delbende ou Laville les médecins, avec la comtesse ou sa fille permet d'opposer deux visions sur des sujets aussi variés que la liberté, la justice, la pauvreté, la foi, évidemment, la famille : avec souvent la vision naïve, voire enfantine du héros entachée par celle des autres, moulée par le monde réel. C'est aussi une sorte de conflit générationnel, pourrait-on dire, entre l'idéalisme d'un jeune homme et le cynisme ou la clairvoyance des autres.



— Nous sommes à la guerre, que veux-tu ? Il faut regarder l'ennemi en face », lui dit le curé de Torcy.



Et on sait que ces soldats de Dieu, ce qu'ils ont a affronter, ce n'est pas que l'incroyance des fidèles, c'est les conséquences de la grande guerre, c'est la pauvreté et la misère, c'est l'impuissance et la peur de manquer, c'est la haine entre les membres d'une même famille, c'est la concupiscence, bref, c'est l'homme tel qu'il est.



Et notre curé, parfois, dans cette lutte impossible, nous fait penser à la mort : avec le médecin Delbende, et la comtesse, avec le curé défroqué qu'il rejoint, et même le médecin Laville vers la fin, une parade macabre en accéléré, presque tous les personnages avec qui il aura argumenté vont mourir, parfois dans l'amour de dieu, comme la comtesse, ce qui souligne l'ambiguïté du texte ; dieu préfère-t-il ses fidèles morts ? La souffrance est-t-elle le seul moyen de mettre la foi à l'épreuve ? Bref, notre curé doit-il vivre comme Job, dans le dénuement et la douleur pour prouver son amour de dieu, et quel dieu met à l'épreuve ses brebis de la sorte ?



Ce qui est intéressant aussi, c'est la réflexion sur le texte même, les questionnements du prêtre sur la réception, la manière dont liront ceux qui y auront accès plus tard (ce qui semble annoncé assez tôt, comme s'il se savait déjà condamné). Ce qui nous donne l'impression que d'une part, c'est Bernanos qui parle à travers lui, mais qui renforce d'autre part la plausibilité du texte, plausibilité affermie aussi par le faux-paratexte, toutes ces petites notes qui précisent que des pages sont déchirées, ou raturées, ce qui met en exergue la crise passionnelle (dans le sens christique) du jeune curé.



Bref, un livre à lire si ces thèmes vous intéressent. Je vous remercie, et vous dis à très bientôt.

Commenter  J’apprécie          50
Sous le soleil de Satan

L'abbé Donissan est un homme du commun. Issue de la paysannerie, c'est un être simple, profondément pieux, qui témoigne par ses actions. Il ignore l'éloquence, c'est avec un vocabulaire modeste tiré du plus profond de lui, avec une humilité peu commune qu'il convainc. C'est un mystique qui, martyr de lui-même, pratique toutes les macérations imaginables pour châtier ce corps vecteur du péché. Il porte cilice, se flagelle impitoyablement, jeûne et veille au-delà de ses forces. C'est par la mortification qu'il atteint au sublime, dans la communion avec le Père. Si le rachat des fautes est proportionnel aux souffrances librement consenties, alors sa place est à la droite du Seigneur. On le considère d'ailleurs comme un saint, mais il est sourd à tout ce qui l'élèverait au-dessus de l'humble pêcheur. Il rencontre sur un chemin le diable qui joue de ses prestiges, mais l'abbé est inatteignable, il lui est même accordé de lire dans les âmes.



Georges Bernanos est une figure majeure de la littérature du siècle passé, auteur de chefs-d'œuvre. Sous le soleil de Satan porte la marque de son génie et possède des qualités littéraires indéniables. Malheureusement je crains que la monnaie de l' auteur n'a plus court. Il faut avoir été éduqué dans les mystères de la religion ou être un authentique lettré pour en apprécier tout le prix. Au lecteur lambda, pas spécialement croyant, lisant non pas au soleil de Satan mais au plus prosaïque soleil de la plage, cette lecture sera à peine plus douloureuse que les sévices que s'impose ce brave abbé Donnissan. Une œuvre admirable, mais d'un autre temps, qui par le sujet traité nous est plus étrangère, par exemple, bien que postérieure, au courant naturaliste ; paradoxalement pour ceux qui vivent profondément leur foi Sous le soleil de Satan est en dehors du temps, d'une vérité toujours présente.
Commenter  J’apprécie          50
11 Oeuvres : Journal d'un curé de campagne, S..

j'aimais Bernanos dans ma jeunesse(catho) j'y reviens en audio avec le Journal d'un curé de campagne.

Ce jeune prêtre qui se cherche est émouvant, il a toujours peur de se tromper, il écoute les conseils d'un vieux curé. Pauvre, il se nourrit très mal: surtout de pain rassis trempé dans du mauvais vin sucré. Il souffre en silence de maux d'estomac violents qui vont mettre fin à sa courte vie. L'intérêt réside en ses relations parfois délicates, méfiantes voire hostiles de ses paroissiaux.
Commenter  J’apprécie          50
Les grands cimetières sous la lune

De Georges Bernanos je ne connaissais que " Le journal d'un curé de campagne " ainsi que " Sous le soleil de Satan " et encore, plus grâce au film de Maurice Pialat, et j'ai lu le roman " Pas pleurer " de Lydie Salvayre, et plus récemment " Péreira prétend " d'Antonio Tabucchi, dans lesquels il est question de ce " cri de colère " littéraire publié en 1937 qui est devenu mythique et dont la lecture m'est apparue indispensable. On comprend pourquoi ce chef d'œuvre a tant marqué ces auteurs, autant d'ailleurs que Michel Del Castillo qui a signé la préface de cette édition " Points ". En 1936, Georges Bernanos, écrivain de droite, qui se revendique fervent catholique, réside avec sa famille sur l'île de Majorque au moment où débute la guerre civile espagnole. Il est alors témoin des massacres de masse perpétrés par les phalangistes et les milices franquistes, avec la bénédiction de l'épiscopat espagnol sans que le Saint-Siège ne s'y oppose. Il n'accepte pas que l'église dans lequel il place sa foi, soit complice de ces tueries, surtout lorsqu'elles touchent des pauvres et des paysans, qui n'ont pas pris les armes, mais sont potentiellement, aux yeux des fascistes, des communistes où sympathisants des républicains. Il se lance alors dans la rédaction de ce pamphlet dans lequel il exhorte les gens de droite à ne jamais tomber dans l'extrême et dans le nationalisme. Il dénonce en termes directs la connivence entre l'église catholique et la répression franquiste, il lui reproche l'utilisation du terme " Croisade " pour justifier ces exactions. Dans ces 300 pages il en consacre assez peu à décrire les horreurs dont il est témoin, mais elles sont si fortes, si précises, qu'elles vont à l'époque, marquer les consciences. Il reproche aux évêques espagnols leur proximité avec la royauté, avec les riches, avec la droite, puis l'extrême droite de Franco, au détriment des pauvres, des humbles, contrairement aux paroles du Christ. Au delà du manque de compassion envers les défavorisés, il montre que l'humiliation est le pire des affronts. Il dénonce également la passivité de la droite et des catholiques de France face à la répression franquiste. Au delà de ces dénonciations il appelle à la tolérance et à la liberté d'opinions politique et religieuse. Il analyse la situation de l'Europe, et son analyse est prémonitoire, car il démontre que le fléau qui s'abat sur l'Espagne en 1936, va s'étendre sur l'Europe entière. Il a parfaitement compris les intentions nationalistes, racistes, notamment vis à vis du peuple juif, de Hitler et de Mussolini, ainsi que leurs velléités belliqueuses et expansionnistes, sans oublier le rôle de Staline. Il prédit, que pour envahir la France, l'Allemagne nazie devra avoir le soutien d'une personnalité iconique dans le pays, bien sûr il ne cite pas Pétain, dont au moment de la rédaction de son brûlot, il ignore le rôle futur. Il explicite la mise en place de la terreur par les dictatures, qui conduit aux massacres lorsque les dictateurs décident " d'en finir " avec leurs bêtes noires. Beaucoup de ses écrits de 1936, auraient dû donner à réfléchir aux hommes politiques qui lui ont succédé et lui succèdent encore. Il appuie ses pensées d'une multitude de références politiques et religieuses très argumentées qui rendent le texte ardu, mais au combien passionnant. Imagine-t-on un écrivain engagé, voire un homme politique, déclarer avec autant de véhémence que ceux de son parti, de sa religion se sont trompés et que ce qu'ils ont fait où couvert est inadmissible. Ce livre n'est pas de ceux que l'on lit avec plaisir, mais qu'il faut avoir lu pour comprendre la première moitié du XX ème siècle. C'est en cela qu'il atteint le mythe littéraire.
Commenter  J’apprécie          50
Sous le soleil de Satan

Je ne suis pas encore remise de la lecture de ce roman. Roman qui aura sa place dans ma bibliothèque.

Les personnages sont ciselés au grès des pages. Les effets de styles sont parfaits. L'écriture est magnifique et d'une fluidité que j'envie. L'univers campagnard est traité avec beaucoup de sobriété et en même temps, l'auteur décrit les paysages et les sentiments avec lyrisme et sensibilité.

Deux chemins, de vie s'entrecroisent dans l'Artois au début du 20 ème siècle. La première guerre est encore dans les mémoires. Le vie est rude et miséreuse dans le monde rural. Mouchette, une jeune femme belle se brûle les ailes. Il y a aussi l'abbé Donissan, un être mystique. Et le mal qui détruit tout sur son passage.

Commenter  J’apprécie          50




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Georges Bernanos Voir plus

Quiz Voir plus

Le journal d'un curé de campagne de Georges Bernanos

En quelle année ce roman a-t-il été publié ?

1930
1933
1934
1936

12 questions
18 lecteurs ont répondu
Thème : Georges BernanosCréer un quiz sur cet auteur

{* *}