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Critiques de Gustave Flaubert (1590)
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Salammbô

Incroyable, inimaginable, je suis heureuse d'avoir lu Salammbô. Depuis tant d'années il attendait dans ma bibliothèque, une crainte de ne pas aimer, de ne pas comprendre, de m'ennuyer parce que je ne lis que peu de romans historiques et que je n'avais pas d'appétence pour les guerres puniques, persuadée d'être perdue par manque de références... bref, impossible de le commencer.

Alors je m'y suis mise. Lentement. Et c'est là que je suis épatée par Flaubert car j'ai vu le carnage, j'ai ressenti la douleur, et j'ai eu l'impression de frôler les corps déchiquetés. J'avoue qu'il y a des moments de lectures difficiles, des tortures épouvantables et l'écriture de cet auteur plonge le lecteur dans l'infiniment beau comme le terrible. J'ai donc été gênée, perturbée, voire parfois dégoutée pendant la lecture car j'assistais à l'indicible. Mais j'ai suivi les différentes campagnes et ce roman me laisse une marque profonde de ce qu'à pu être cette époque.

Mais j'ai du m'accrocher car non seulement c'est un univers dur, mais Flaubert utilise toute la panoplie du vocabulaire qui va bien. Il m'a fallu lire lentement, mais les mots participent au dépaysement et ont fait que j'étais extraite d'ici pour être plongée dans Carthage l'ancienne. Envoûtant.
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Madame Bovary

Attention, avant toute chose, je n'ai nullement l'intention de casser Monsieur Flaubert.

Emma Bovary, je la déteste, et ce depuis de nombreuses années. J'ai cru que ma première impression était due à la fougue de mon adolescence mais une relecture de cette oeuvre l'année dernière a renforcé la haine viscérale que je voue à cette héroine.

Emma l'insatisfaite, qui sait mieux que son mari, qui s'embourbe dans des histoires d'amour abracadabrantes pour essayer de connaître un semblant de frisson...Non mais quelle sale bonne femme! Ce cher Charles Bovary est peut-être un peu benêt mais sa femme est indubitablement la pire des deux. Elle reporte inconsciemment sur ce pauvre diable toute la frustration qu'elle ressent vis à vis d'elle-même et là c'est le bouquet !

Charles, je l'ai plaint et ce tout au long de ma lecture et je me suis délectée quand son poison de femme s'est faite avoir par les deux amants qu'elle a pris. Emma se regarde le nombril, il n'y a qu'elle et uniquement elle, sans se soucier le moins du monde de ce que peut engendrer une telle conduite...Après tout elle a semé le vent, elle a récolté la tempête et c'est bien fait...

En ce qui concerne l'oeuvre en elle-même, c'est un bijou, un colossal portrait de femme d'une finesse incomparable. Emma est détestable, mais c'est chapeau bas pour Gustave Flaubert qui a reconstitué un tel caractère avec tant de détails. A travers cette femme il a poussé au plus loin l'exploration de l'âme humaine.

C'est un grand roman, malgré les trois étoiles de notation que j'ai mis il faut le lire, au moins une fois pour se faire une idée.

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Madame Bovary

Quelle œuvre tragique et poignante !

Quand je constate à quel point certains classiques peuvent me marquer, je n’ai qu’une envie, c’est d’en lire davantage.



D’abord, j’ai été complètement séduite par l’admirable plume de Gustave Flaubert. On parle de « la perfection du style » et en le lisant je ne peux que confirmer l’expression. Il suffit d’observer le manuscrit de l’ouvrage pour comprendre l’obstination avec laquelle il travaillait.

À travers ses descriptions, il réalise un vrai travail de composition qui nous laisse admiratif.

Le résultat est remarquable.



Ensuite, j’ai rarement vu dans un roman un personnage aussi profond et complexe qu’Emma Bovary.

J’admets avoir éprouvé une certaine réticence à son égard au premier tier du livre. Je ne parvenais pas à comprendre cette femme tourmentée.

Pourquoi est-elle si antipathique et sans-cœur envers son époux Charles ?

Celui-ci est pourtant aimable et plein de bonté. Il en va de même pour sa servante ou sa propre fille Berthe.

Mais c’est en poursuivant ma lecture et en m’imprégnant des personnages et du contexte que j’ai pu mieux comprendre.



Je pense qu’en lisant ce roman, on ne doit pas s’arrêter au caractère impitoyable que peut inspirer Emma au premier abord.

Au contraire, je crois qu’il faut avoir en tête que c’est un roman contemporain du spleen baudelairien et que le personnage d’Emma Bovary l’illustre bien.



Emma est une rêveuse, une romantique qui ne cherche au fond qu’à être heureuse loin de sa médiocre province. Même si son comportement est loin d’être exemplaire, on peut saisir l’ampleur de son ennui et de sa détresse intérieure.

Elle n’aspire pas à la même vie que son époux Charles, un médecin qui se contente d’une existence simple à ses côtés. Emma rêve d’une vie mondaine où les rencontres et les sentiments viennent la bouleverser. Un peu comme dans les romans qu’elle lisait au couvent durant ses années de jeunesse.

Mais son besoin d’amour impérieux la conduira vers des tentations bien plus mortifiantes que salutaires.



Bref, je suis une lectrice de plus à être émerveillée par l’authenticité et la puissance des mots de ce roman.

À lire impérativement !
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L'éducation sentimentale

Autant le dire de suite, je trouve qu'il s'agit - mais cela n'engage que moi - du moins bon roman de Flaubert. Dans "Madame Bovary", cette dernière avait une certaine profondeur, prenait le devant de la scène. Ici, Frédéric Moreau est un bien piètre personnage, un anti-héros dans toute sa splendeur. Que raconte ce livre ? Rien... ou, du moins, pas grand chose, et c'est bien ce que voulait Flaubert d'ailleurs.



Frédéric, jeune bachelier, nourrit le projet de faire son droit à Paris. Mais il doit retourner chez lui, à Nogent-sur-Seine, pendant deux mois. Il prend donc le bateau, le "Ville-de-Montereau", le 15 juillet 1840. Là, il fait la connaissance d'un amateur d'art, éditeur de "l'Art industriel", Jacques Arnoux, et de son épouse, que le jeune diplômé remarque, faisant naître des sentiments inconnus de lui jusque là. De retour à Paris, il erre lamentablement. Ses études capotent. Il fait la connaissance de Rosanette, dite "La Maréchale", femme entretenue qui, disons, va le divertir... Mais un heureux hasard lui fait revoir Jacques et, bien sûr, la délicieuse Marie...



L'auteur s'était fortement inspiré d'une histoire personnelle. Marie Arnoux n'est autre qu’Élisa Foucault, qui deviendra la femme de l'éditeur de musique Maurice Schlesinger. Muse de Flaubert, elle hantera son esprit. Ainsi, l'Éducation sentimentale serait presque - j'ai bien dit presque - une autobiographie romancée. Le roman n'a pas obtenu de succès à l'époque de sa parution, en 1869. Il est vrai que l'on est quand même loin de "Salammbô"...
Lien : http://www.lydiabonnaventure..
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Salammbô

Je viens de terminer la lecture de Salammbô, de Gustave Flaubert et c'est pour moi un véritable coup de coeur littéraire. Je pense que le qualificatif de chef d’œuvre n'est pas exagéré. Ah ! Quand je pense que ce roman était là dans ma bibliothèque à m'attendre depuis des lustres ! Je m'en veux...

Dès l'incipit, le ton est donné. Il est à la fois d'une simplicité désarmante, d'une poésie inouïe et d'un exotisme flamboyant. Écoutez un peu, car Flaubert, cest aussi le bonheur de le lire à haute voix : « C'était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d'Hamilcar. »

Cela ressemble au début d'une fable, avec cette phrase sonore et harmonieuse qui sonne comme un haïku et qui invite à dérouler les pages...

Je vous pose rapidement l'intrigue. Nous sommes au IIIème siècle avant J.-C., la première guerre punique vient de se terminer, qui opposa Carthage à Rome. Roman historique ? Pas tout à fait, même si Flaubert s'est beaucoup documenté, a même voyagé sur les pourtours de la Méditerranée pour s'imprégner des paysages, des sensations, des odeurs, de l'espace, de la topographie, imaginer comment planter le décor, déverser des armées et des cohortes d'éléphants dans les pages de son récit, poser l'intrigue amoureuse et ce personnage totalement sorti de son imaginaire, Salammbô. Voilà aussi un nom teinté d'exotisme envoûtant !

Dans cette expérience orientaliste, Flaubert avoue même dans sa Correspondance avoir ramené de son premier voyage en Méditerranée un herpès génital, sans savoir laquelle des deux femmes, « la Turque ou la Chrétienne » ce sont ses mots, rencontrées la même nuit et invitées toutes les deux dans la chambre qu'il partageait avec Maxime du Camp son compagnon de voyage, lui avait offert ce souvenir désagréable dont on dit qu'il le poursuivra jusqu'à sa mort et en fut peut-être la cause de celle-ci...

Le récit démarre par la scène d'un festin, scène démente, outrancière qui donne le ton, les mercenaires, qui ont contribué par leur nombre et leur bravoure à la victoire, fêtent à Carthage la fin de la guerre, au sein même des jardins du suffète Hamilcar, général en chef des forces carthaginoises qui conduisit cette guerre et qui n'est pas encore revenu. Les mercenaires ont franchi les portes de Carthage et dans ce jardin sont venus réclamer leur dû auprès du général Hamilcar, absent. Les aristocrates de Carthage refusent de les payer, invoquant les finances mises à mal à cause de la guerre. Se sentant victimes d'une injustice, vexés, les redoutables mercenaires dévastent la propriété d'Hamilcar sous les yeux de Salammbô, la fille du général mais aussi prêtresse de Tanit déesse de la Lune, qui tente de les calmer. C'est le carnage à Carthage. Un homme, le chef des mercenaires, le libyen Mâtho tombe alors éperdument amoureux de cette vierge divine.

Plus tard, il aura l'affront de voler le zaïmph, le voile sacré et vénéré de la déesse Tanit, dans le temple qui lui est dédié et sous les yeux de Salammbô.

De cette rencontre va naître une liaison fatale, qui va précipiter tout le monde dans la guerre, une guerre sans merci, conquête du pouvoir, conquête de Carthage, conquête de Salammbô...

À partir de cet instant, Salammbô n'aura pas d'autre choix, imposé par son père sous la pression des prêtres de Carthage qui dictent le pouvoir politique et religieux, que d'aller elle-même récupérer le voile sacré, c'est elle qui doit laver l'outrage, Salammbô est envoyée au sacrifice par la justice des hommes et des Dieux...



" Il était à genoux, par terre, devant elle ; et il lui entourait la taille de ses deux bras, la tête en arrière, les mains errantes ; les disques d'or suspendus à ses oreilles luisaient sur son cou bronzé ; de grosses larmes roulaient dans ses yeux pareils à des globes d'argent ; il soupirait d'une façon caressante, et murmurait de vagues paroles, plus légères qu'une brise et suaves comme un baiser.

Salammbô était envahie par une mollesse où elle perdait toute conscience d'elle-même. Quelque chose à la fois d'intime et de supérieur, un ordre des Dieux la forçait à s'y abandonner ; des nuages la soulevaient, et, en défaillant, elle se renversa sur le lit dans les poils du lion. Mâtho lui saisit les talons, la chaînette d'or éclata, et les deux bouts, en s'envolant, frappèrent la toile comme deux vipères rebondissantes. le zaïmph tomba, l'enveloppait ; elle aperçut la figure de Mâtho se courbant sur sa poitrine. "



Après cela, toutes les scènes d'amour que vous rencontrerez dans les autres romans vous paraîtront bien fades...



Alors, ce sera un déferlement de violences inouïes, de massacres. C'est un récit d'une très grande férocité, les scènes décrites sont horribles. Les mots de Flaubert dans leur justesse sont là aussi pour dire l'innommable.

Le malheur humain est sans limite, il y a une violence de l'Histoire, Flaubert nous montre la capacité de violence de cette Histoire

J'y ai vu un pamphlet contre les guerres, Salammbô montre, dénonce en quelque sorte cette capacité de l'humanité de produire des massacres de masse. Ils seront nombreux, hélas, après Flaubert, après l'écriture de son récit. Les mots de l'écrivain auront été vains...

J'y ai vu aussi un autre pamphlet contre les religions qui sèment ces guerres. Ici Flaubert montre la folie humaine capable d'inventer des dieux qui vont exiger des hommes jusqu'à leur propre destruction. Ici ce qui m'a saisi c'est jusqu'à quel point les hommes peuvent se saisir des dieux qu'ils vénèrent pour justifier leurs actes. Cela ne vous évoque rien ?

Dans ce désastre et cette folie, Salammbô n'incarne pas que la passion amoureuse, c'est une femme fatale, damnée, comme celles des récits de la mythologie qui ont causé des guerres, précipité la chute d'empires par leur beauté et leur mystère. Comment ne pas penser alors à Hélène, à la guerre de Troie, à l'Iliade... ? C'est le roman d'une tentative d'émancipation, d'une femme qui cherche à transgresser les lois des hommes et des prêtres.

C'est un roman énorme comme les éléphants qui traversent les pages, détruisent tout sur leur passage.

L'imaginaire de Flaubert est ici à son comble. C'est un tourbillon d'images. C'est un déferlement de sensations, d'émotions, de passion amoureuse...

Il y a une justesse de l'écriture, c'est comme un chant lyrique, une sorte d'opéra, c'est un péplum en prose poétique, ce sont des mots teintés d'odeurs et de couleurs, pour dire l'horreur, les guerres, la folie humaine.

La beauté fluide de l'écriture de Salammbô est intemporelle. Elle est envoûtante et dévastatrice comme les armées qui s'affrontent sous le soleil de Carthage pour Salammbô. Comme le vertige des mots de Flaubert et leurs mirages. C'est juste beau.

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L'éducation sentimentale

L’Éducation sentimentale de Flaubert, c'est un livre franchement ennuyant, mais aussi incontestablement magnifiquement écrit. C'est ennuyant, mais d'un très bel ennui!

Flaubert, c'est un talent d'écriture et une capacité de travail qui tiennent du merveilleux. Il nous permet de voir avec une clarté sublime ce qu'il veut bien mettre en lumière devant les yeux des ses lecteurs, que ce soit la pose d'un personnage, le détail d'une scène, la subtilité d'un état d'âme, etc.

Son génie grandiose aura toutefois été constamment irrésistiblement attiré par la médiocrité, qu'il ne se lassera jamais de découvrir partout, pour la décrire et aussi pour la dénoncer.

Tout au long de son œuvre, il s'attaquera ainsi avec un acharnement indéfectible à la bêtise, à la médiocrité, à la bourgeoisie, mais sans jamais montrer quoi que ce soit de mieux, en dehors de sa manière sublime d’exprimer ses dénonciations.

Sa soif d'idéal correspond bien à première vue à ce que l'on peut trouver de plus exigeant, mais comme il ne va jamais aller s'aventurer là où l'on trouve des possibilités dignes d'assouvir des exigences surhumaines, sa fin n'aura jamais voulu ses moyens et cela qui me donne l'impression de trouver chez lui plutôt une affectation de recherche sérieuse plutôt qu'une authentique quête de possibilités vraiment dignes d'être vécues. Il ressemble ainsi beaucoup à Nietzsche, qui l'appréciera d'ailleurs sans jamais s'en lasser. Tous deux me semble avoir fait mine de chercher l'idéal en soi avec des exigences absolues, mais sans jamais avoir rien fait d'autre que de critiquer les éléments médiocres des possibilités qui se déployaient autour d'eux. (Nietzsche aura bien proposé l'Éternel retour du même ou encore le surhomme, mais ce sera pour les détruire lui-même aussitôt)

Bref, Flaubert n’a jamais rien su faire de mieux que d’exprimer rageusement son dégoût de tout ce qui ne correspondait pas à ses aspirations réelles ou prétendues. Son combat, présenté avec un style d’un perfection, presque complètement absurde, puisqu’elle échappera à la grande majorité de son auditoire, comportera quelque chose d’une vanité absolue, risible, et sera poursuivi tout de même, sans espoir véritable, avec un cynisme envers lui-même frisant la volonté d’autodestruction.

Je trouvais important d'exposer ces réflexions sur l’œuvre entière de Flaubert puisque, à mon avis, Flaubert atteint un sommet dans son genre dans l'Éducation sentimentale. Le roman est en effet magnifiquement écrit, comme toujours chez lui, mais les états d'âmes du héros principal sont si petits qu'ils ont souvent failli glisser complètement en dessous de mon attention. Mon esprit restais constamment accroché dans les hauteurs sublimes où l'on trouve ses formulations magnifiques, je restais si souvent saisis devant l'exposition de détails si parfaitement exposés, qu'il me fallait parfois faire quelques efforts pour me souvenir du petit bonhomme de chemin insignifiant que Flaubert faisait traverser à son personnage principal.

Même la participation de Frédéric à des événements politiques pourtant bouillonnants et à des circonstances parfois terribles et tragiques prennent de la fadeur à son contact. Il est si imbu de lui-même et sa personne est si ennuyante!

Oui, définitivement, pour toutes ces raisons, l'Éducation sentimentale, c'est un très bel ennui!
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La Tentation de saint Antoine

A peine La Tentation de Saint Antoine refermée, j'ai envie de lui consacrer une petite chronique tant ce livre m'a touchée. Bien que ma contribution soit, comme d'habitude, modeste, je vais tâcher de vous donner l'envie de découvrir ce "délaissé" de la bibliographie de Flaubert.



En premier lieu, le genre dans lequel classifier cet ouvrage est indéfinissable. L'on pourrait facilement penser à une pièce de théâtre tant la construction du récit en est similaire mais certains passages sortent du cadre du théâtre donc cette oeuvre est un ovni rien que dans sa présentation, c'est un peu un électron libre de la littérature du XIXème.



L'histoire est basée autour du personnage de Saint Antoine, qui pour communier avec le Seigneur, vit en hermite dans le désert égyptien. Tressant des nattes et subissant volontairement les privations de toutes sortes pour se préserver des péchés que peut offrir une vie normale, Antoine reste néanmoins un être humain et va connaître une sorte de crise de foi. Tiraillé entre le bien et le mal, victime d'hallucinations, son périple mental va le conduire dans des situations mettant à l'épreuve ses croyances les plus tenaces...



La Tentation de Saint Antoine c'est avant tout l'image d'un homme en proie aux tourments de ses propres démons, a travers ce personnage d'Antoine l'on pourrait penser que Flaubert à transposé certains de ses sentiments sur son vécu dans le voyage délirant de son personnage principal. Le côté "torturé" est omniprésent dans les passages ou Antoine, guidé par Hilarion (qui m'a un peu fait penser au Virgile de La Divine Comédie), voit une facette des religions polythéistes qu'il n'aurait jamais imaginée et ne veux pas voir, conforté par l'apparente perfection de sa doctrine chrétienne. Les diverses divinités et personnalités importantes qui sont mises sur la route d'Antoine ne font qu'émousser le début d'agonie de cette foi déjà si fragile, confronté à sa dualité d'homme qui en a trop vu et en même temps pas assez . C'est aussi le récit d'une solitude, quand le mental prend le pas sur la volonté et met les résistances à l'épreuve comme un volcan endormi depuis trop longtemps et prêt à exploser...



Quand Flaubert affirme que La Tentation de Saint Antoine est l'oeuvre de sa vie, je veux bien le croire. Vingt-cinq ans n'ont pas été de trop pour élaborer cette oeuvre hors du commun, très loin de ce que l'on croyait connaître de cet auteur. Le degré d'érudition du récit est flagrant et Monsieur Flaubert met la barre très haut. L'on retrouve quand même certains points qui font le charme de ses ouvrages comme les descriptions parfois longues (sauf qu'ici elles sont dans le style didascalies) et l'aspect psychologique des personnages passé au peigne fin. Dans certains passages, j'ai trouvé quelques légères ressemblances avec Salammbô, dans les descriptions de l'Orient et la violence de quelques faits.

Hormis ceci, ce livre est un comme un boulet de canon, ça passera ou ça cassera, mais il contient ses propres richesses et n'a rien à envier aux autres classiques. C'est comme si il m'avait emmenée dans une exploration du cerveau humain, de plus ne vous fiez pas au format du livre (moi j'ai l'édition Folio) car sur les cinq cent pages, une bonne moitié est consacrée à la préface et aux notes, le récit est donc assez court mais c'est un bijou donc si le coeur vous en dit, n'hésitez pas à découvrir cette petite perle du grand Gustave. A lire!
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Madame Bovary

Madame Bovary, c’est le roman d’une âme sentimentale et romantique, qui cherchera « à savoir ce que l’on entendait au juste dans la vie par les mots de félicité, de passion et d’ivresse, qui lui avaient paru si beaux dans les livres. »(46) En faisant lire Paul et Virginie à la petite Emma, dans l’optique de la faire rêver à « ...la maisonnette de bambous, au nègre Domingo, au chien Fidèle, mais surtout à l’amitié douce de quelque bon petit frère, qui va chercher pour vous des fruits rouges dans des grands arbres plus hauts que des clochers, ou qui court pieds nus sur le sable, vous apportant un nid d’oiseau » (46), Flaubert ne pouvait trouver mieux pour la rendre parfaitement inepte au mariage bourgeois prosaïque que sera le sien. La pauvre petite fille en aura l’esprit tourné pour le reste de son existence dont nous verrons le petit fil brûler tout au long du roman, en écorchant tout ce qu’il touchera sur son passage.

Ce personnage d’Emma Bovary n’est pas entièrement original puisqu’il trouve un précurseur direct dans celui de Don Quichotte, ce petit provincial à qui les romans de chevalerie ont tourné l’esprit à un tel point qu’il se croit réellement chevalier en mission dans un monde rempli de sortilèges et d’enchantements. Lui aussi a tellement lu avec passion qu’il a voulu vivre dans l’existence réelle des idéaux magnifiques présentés dans les romans.

Par contre, en ce qui concerne la manière dont ces deux asociaux de cause littéraires sont présentés, on ne peut trouver deux romans plus différents que Madame Bovary et Don Quichotte. Alors que Flaubert a un style dont le réalisme est d’un cynisme implacable, Cervantès présente plutôt les aventures de son héros sur le mode du tragi-comique où le comique prédomine largement.

La réception de ces deux ouvrages monumentaux dans l’histoire de la littérature se fera aussi très différemment. Alors que le roman de Cervantès sera reçu dans l’enthousiasme, « le réalisme vulgaire et souvent choquant de la peinture des caractères » de Flaubert provoquera la controverse.

Il s’agit évidemment d’un quiproquo un peu bête, puisque le but de Flaubert consistait à démontrer l’absurdité de la position d’Emma, mais le second degré n’est pas donné à tout le monde et l’on voulait tellement croire, à l’époque, en l’indéfectible pureté du féminin.

En disant « Madame Bovary c’est moi! », Flaubert se montre extraordinairement ironique envers lui-même. En effet, tout au long de son œuvre, il a constamment, avec un acharnement indéfectible, dénoncé la bêtise, la médiocrité, la bourgeoisie, mais sans jamais montrer quoi que ce soit de mieux, en dehors de sa manière sublime d’exprimer ses dénonciations. Lui-même, à l’instar d’Emma, fut épris de tout son être d’un idéal indicible, hors de sa portée, et il n’a jamais rien su faire de mieux que d’exprimer rageusement son dégoût de tout ce qui ne correspondait pas à ses aspirations. Son combat, présenté avec un style d’un perfection, presque complètement absurde, puisqu’elle échappera à la grande majorité de son auditoire, comportera quelque chose d’une vanité absolue, risible, et sera poursuivi tout de même, sans espoir véritable, avec un cynisme envers lui-même frisant la volonté d’autodestruction. Oui, Madame Bovary c’était lui, Gustave Flaubert, dans toutes les grandeurs et les misères de son destin exceptionnellement tragi-comique.

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Madame Bovary

Tout tenter et ne rien réussir !

Un mariage poussif avec Charles.

S'entêter sans choix,

dans un couple qui s’ennuie.

S'apprêter sans voix,

Pour séduire ceux qui la font exister !



Madame Bovary :

Une femme naïve,

sensible et pourtant rebelle.



Vouloir la passion

Refuser le quotidien.



Une, deux, trois

éternités de vide,

de trous noirs,

de néant,

de rien,

de mélancolies qui la submerge.



Ne plus rester dans ce couple

Qui se délitent.

Refuser

L’amour pour Léon pour

Rester vertueuse.



Muette d'erreurs,

murée dans la pesanteur,

malaise de vie.

Elle se trompe,

Elle trompe,

Embarquée dans ses rêves

Sensuels,

Où elle guette le sublime

Dans les bras de Rudolphe.



Insister sans raison,

arriver à faire,

arriver à dire,

arriver à sortir,

des mots trop pleins de sens,

trop plein de vie,

trop plein de poids.



Et ne pas être comprise

Dans un monde de la

Bourgeoisie normée par les

Obligations où les plaisirs sont secrets

Cachés !



Pas de divorce,

Juste des mensonges !

Qui s’enchainent

Qui s’empressent

De tiédir,

D’Affadir

Une vie pourtant bien tracée,

Qui exige de sortir du carcan

Du prévisible,

Du convenu !



Finition dévalorisée,

perdue dans le spleen,

rescapée dénoyautée

de sa substance

par un insignifiant

Aristocrate libertin,

au tempérament brutal et

d'une intelligence perspicace.



Disparition de la passion

qui fait exister l’amour

en accepte le sens,

en distille le poids

en repartit la substance.



Suicide d’amour

de refus

de silence,

d'indifférence,

de trop peu,

d'inexistence,

de fuite,

de peur,

de fêlures,

de blessures...





Sans Rodolphe

la fièvre des mots s'intensifie,

la soie des sons se déchire,

L’hiver s'éparpille,

de feuillets volants vers

la destination finale,

fini,

fin.

Nous avons toutes une Madame Bovary qui sommeille en nous…

Une rêveuse, romantique, midinette, insatisfaite qui ne se contente pas de ce qu’elle a !

Un brave type qui nous rassure, nous choie, nous aime ce n’est pas toujours suffisant!

Nous recherchons la passion et on finit par trouver un Rodolphe Boulanger qui va nous faire souffrir !

Pourquoi se contenter du doux quotidien qui nous ennuie alors qu’on peut vivre des émotions excessifs, passionnels qui nous transportent dans des mondes incertains.

L’agonie de Madame Bovary m’avais marqué lorsque je l’avais lu à 17 ans.

Elle m’avait plongé dans cette horreur d’un suicide à l’arsenic choisi où l’on peut mourir d’amour !

Cela m’avait semblé à l’époque absurde.

Je ne voyais l’amour que lumineux, éternel, doux, fusionnel et parsemé d’une fidélité sans limite ^^

Trente ans plus tard j’ai relu ce livre de Flaubert et j’ai compris cette absurdité !

On peut mourir d’amour mais on peut aussi vivre d’un amour doux et sécurisant !

J’ai choisi la deuxième possibilité ^^

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Salammbô

Adolescente, j'ai lu et aimé Salammbô. Je n'en ai gardé que des souvenirs très vagues, ceux d'une lecture riche, d'un style foisonnant, de magnifiques tournures de phrases et d'une belle héroïne au destin tragique.

Suite à la superbe critique de Berni_29 que je remercie infiniment, j'ai eu envie de le relire.



*

L'histoire commence au IIIe siècle avant J.C., après la première guerre punique, au moment où les riches marchands de Carthage, plus soucieux de leurs richesses que de la ville, refusent de payer ce qu'ils doivent à l'armée de mercenaires qui a vaillamment combattu Rome auprès d'Hamilcar, le plus grand général carthaginois. Ils décident alors de se révolter et d'attaquer la ville.



*

"Salammbô", c'est au départ Carthage qui nous apparaît dans toute sa magnificence, son opulence.

Gustave Flaubert commence son récit par de magnifiques descriptions de la ville. Sous les mots de l'auteur, elle se pare de majesté, de luxe et d'une surabondance de richesses.



"Salammbô", c'est aussi le récit de cet incroyable siège que vont entamer les barbares, bien décidés à profiter des récompenses promises. Mais le plus beau joyau de Carthage, ne serait-il pas la magnifique Salammbô, objet de toutes les convoitises ?



Car Salammbô, c'est avant tout le nom d'une grande prêtresse de la déesse Tanit et la fille du grand Hamilcar Barca.

Mathô, un des chefs barbares, va en tomber follement amoureux.



« Sa chevelure, poudrée d'un sable violet, et réunie en forme de tour selon la mode des vierges chananéennes, la faisait paraître plus grande. Des tresses de perles attachées à ses tempes descendaient jusqu'aux coins de sa bouche, rose comme une grenade entrouverte. Il y avait sur sa poitrine un assemblage de pierres lumineuses, imitant par leur bigarrure les écailles d'une murène. Ses bras, garnis de diamants, sortaient nus de sa tunique sans manches, étoilée de fleurs rouges sur un fond tout noir. Elle portait entre les chevilles une chaînette d'or pour régler sa marche, et son grand manteau de pourpre sombre, taillé dans une étoffe inconnue, traînait derrière elle, faisant à chacun de ses pas comme une large vague qui la suivait. »



*

Ce que je retiens avant tout de cette histoire, c'est le style inimitable de Gustave Flaubert. Je me suis laissée porter par le rythme, la mélodie, les mots qu'impose le texte.

Dans une prose poétique et musicale soutenue par de longues phrases, l'auteur décrit le conflit avec un luxuriance de détails. Son écriture très visuelle, très sensorielle capte les couleurs, les odeurs, les mouvements, les bruits, créant une ambiance écrasante tout au long du récit.



*

Mais c'est aussi une oeuvre où domine la cruauté, la barbarie, la sauvagerie.

La délicatesse, le raffinement et la beauté flamboyante de Carthage ne sont qu'apparence. Sous la couche de vernis, se cache un peuple dur, impassible, menaçant, féroce, monstrueux.



« Cent pas plus loin ils en virent deux autres ; puis, tout à coup, parut une longue file de croix supportant des lions. Les uns étaient morts depuis si longtemps qu'il ne restait plus contre le bois que les débris de leurs squelettes ; d'autres à moitié rongés tordaient la gueule en faisant une horrible grimace ; il y en avait d'énormes ; l'arbre de la croix pliait sous eux ; et ils se balançaient au vent, tandis que sur leur tête des bandes de corbeaux tournoyaient dans l'air, sans jamais s'arrêter. Ainsi se vengeaient les paysans carthaginois quand ils avaient pris quelque bête féroce ; ils espéraient par cet exemple terrifier les autres. Les Barbares, cessant de rire, tombèrent dans un long étonnement. « Quel est ce peuple, – pensaient-ils, – qui s'amuse à crucifier des lions ! » »



Le lecteur est confronté à un très fort contraste entre la beauté exotique de Carthage, de salammbô et les horreurs de la guerre où les hommes s'entretuent dans des combats au corps à corps.



M'apparaissent plusieurs tableaux effrayants et écoeurants dans lesquels des lions agonisants sont crucifiés ; où des corps, soldats et animaux enchevêtrés, s'entassent et se fondent dans des mares de sang et de viscères ; où des entrailles humaines font comme des guirlandes autour des défenses des éléphants mutilés, dressés à tuer ; où des corbeaux festinent de cadavres humains en décomposition ; où des hommes mourant de faim se nourrissent de la chair de leurs camarades morts ; où des enfants sont offerts aux Dieux pour obtenir leur clémence.



*

Ce récit m'a beaucoup plu, mais j'ai tout de même quelques petits regrets qui n'entachent en rien la qualité du récit. J'espère par mes aveux, ne pas m'attirer les foudres des passionnés de Gustave Flaubert.



Mon premier regret est que j'aurais aimé que la psychologie de Salammbô soit davantage approfondie. On la sent cachée entre les lignes, délicieuse, obsédante, mais sa présence est voilée par les affres d'une guerre impitoyable.



L'amour entre Salammbô et Mathô est présenté de manière passionnelle, tout en gardant beaucoup de pudeur et de retenue. Les deux amants sont déchirés par des émotions contradictoires, amour et haine, attirance et dégoût, détachement et convoitise. Les mots choisis par l'auteur magnifient cette relation par un jeu de symbolisme et de silences dans la narration.



« Salammbô était envahie par une mollesse où elle perdait toute conscience d'elle-même. Quelque chose à la fois d'intime et de supérieur, un ordre des Dieux la forçait à s'y abandonner ; des nuages la soulevaient ; en défaillant, elle se renversa sur le lit dans les poils du lion. Mâtho lui saisit les talons, la chaînette d'or éclata, et les deux bouts, en s'envolant, frappèrent la toile comme deux vipères rebondissantes. »



Gustave Flaubert n'a pas son pareil pour nous décrire cet amour qu'ils se vouent, tout en nuances, mais et c'est mon second regret, je trouve que la relation amoureuse prend une place relativement minime au regard des scènes de guerre.



*

Pour conclure, ce roman est une épopée historique triomphante de cruauté et de violence, mais également une belle histoire d'amour vouée à l'échec. Tout au long du récit, le lecteur peut voir, dans la multitude de détails et de références à la mythologie, l'énorme travail de recherche effectué par Flaubert.

"Salammbô" vaut la peine d'être lu pour la grandeur de Carthage, la beauté tragique de la jeune femme qui obsède Mathô, l'amour passionnée des deux amants, le récit épique des combats, mais surtout pour l'écriture fulgurante et lyrique de Gustave Flaubert.

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Un coeur simple

Les faits se situent dans la campagne normande, à Pont l'Evêque peu après 1810.

Très jeune, Félicité rencontre un homme qui décide de marier une autre.

Félicité est orpheline et rentre au service de Mme Aubain, jeune veuve avec deux enfants ,Paul et Virginie.

Elle se dévoue entièrement à ses maîtres .

"Un cœur simple" est un très beau roman court, très riche qui nous donne des renseignements sur la vie au 19ème siècle, qui nous présente une personne qui accepte son sort et ses tâches courageusement.

Félicité et sa maîtresse vont traverser des épreuves, des deuils.

La vie n'est pas un paradis mais les personnages assurent bravement, simplement.

Les scènes de Félicité et le perroquet, qu'elle reçoit car son propriétaire s'en est allé, sont très colorées.

Des tableaux de la vie quotidienne comme le pique-nique à la ferme, le voyage à Trouville sont très agréables à lire.

Dans la préface, Albert Thibaudet nous indique que Flaubert a beaucoup projeté sa personne dans ce roman.







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Madame Bovary

Si Flaubert avait vécu à notre époque, se serait-il acharné à démontrer les vices que produit la télévision dans le cerveau des jeunes demoiselles, comme il a voulu montrer, dans Madame Bovary, les dommages que pouvait provoquer la lecture de romans à l’eau de rose lors de la formation des jeunes filles au couvent ? Cette idée ne me semble pas impossible, et aujourd’hui, à l’heure on la majorité se désole de voir les petites têtes du monde entier se tourner plus rapidement vers un écran de télévision qu’au-dessus des pages d’un bouquin, le point de vue de Flaubert sur la perversion engendrée par la lecture apporte un point de vue intéressant sur les bienfaits et les méfaits de la culture.



Heureusement, Madame Bovary ne se limite pas seulement à cette réflexion intéressante. Peut-être même Flaubert n’avait-il jamais voulu étayer une quelconque théorie sur la culture, car la totalité de ses personnages, qu’ils soient issus de la plus haute caste intellectuelle ou de la plus longue lignée de paysans, n’échappe pas à son mépris le plus glacial, à ses remarques les plus acides, à son humour le plus féroce ! Et c’est cette haine de l’humanité, qui se dessine petit à petit entre les phrases travaillées et raffinées de Flaubert, qui donne son aspect le plus jubilatoire à Madame Bovary.



Rien ni personne n’est épargné dans ce roman. Flaubert disait être cette Emma, pauvre fille sans cesse déçue par les espoirs qu’elle portait en la vie, et cette affirmation ne me surprend pas. La psychologie de Madame Bovary est passée au peigne fin, démontée rouage après rouage. Alors qu’elle se dessinait vaguement, dans les premiers chapitres, comme une jeune fille de paysans légèrement tournée vers la vie intellectuelle et artistique, on la découvre de plus en plus complexe, hésitante, incohérente voire tordue. Quiconque ne se reconnaîtrait pas une fois dans les pensées d’Emma serait sans doute beaucoup moins humain qu’elle, ou peut-être moins honnête.

Et c’est là où le réalisme de Flaubert devient magique : il brosse sous ses yeux le portrait d’une femme, d’une famille, d’un village… de petites confréries qui deviennent universelles par la finesse des descriptions qu’il en fait.



Sur un ton en apparence posé et cordial, Flaubert a écrit, avec Madame Bovary, un roman d’une cruauté réjouissante !
Lien : http://colimasson.over-blog...
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Salammbô

Salammbô est un roman que j'apprécie énormément. C'est est un texte vivant et méticuleux . L'univers punique du texte est d'une présence intense.

Si on se réfère aux sources historiques et que l'on a en mémoire le site de Carthage ( dans sa dimension punique ) avec un rien de connaissances sur la fin de la première guerre punique , ce texte possède la puissance évocatrice nécessaire pour vous transporter dans l'antiquité , au pied des murailles de Carthage et pour imaginer son port militaire circulaire , ses arsenaux , pour imaginer aussi la citadelle de Byrsa et les champs et les vergers inclus dans les murs , le tissus urbain serré , les navires nombreux sur la mer écrasée de soleil .

L'atmosphère historique soignée du roman ,restitue le contexte dramatique de la toute fin de la première guerre punique .

Flaubert est bien documenté , il n'est pas véritablement fidèle à l'histoire évènementielle de ce conflit implacable entre Carthage et ses mercenaires et alliés révoltés . Mais l'ambiance et les enjeux matérialisés par le roman sont historiquement valides et éloquents .

Il rend bien les affects , les scènes hallucinantes et quelquefois grandioses dont parlent les sources ,. le rythme , les angoisses , les enjeux existentiels , qui ont balayés ce bout de terre , littéralement ancré , tel un vaisseau redoutable et riche , sur les rives méditerranéennes de l'Afrique .

Au début du deuxième siècle avant l'ère commune , débute le premier choc de titan entre Rome et Carthage . Un conflit d'une violence et d'une âpreté inouïe aux enjeux existentiels pour les deux états,. Avec un retentissements déterminant dans l'imaginaire de la Rome républicaine .

Rome contrôle la péninsule italienne , Carthage contrôle l'Afrique du nord , une frange côtière principalement , sauf sur l'actuel territoire tunisien ou son territoire est plus en profondeur vers l'intérieur de l'Afrique . Carthage contrôle également les cotes méditerranéennes de l'Espagne de l'Ebre à Cadix , avec une profondeur stratégique importante en Andalousie . Une flotte de guerre redoutable lui permet également de dominer la Sardaigne et la Corse . Les deux puissances s'écharperont pour la domination de la Sicile .

Rome aligne une armée de citoyens appuyés par des contingents alliés , Carthage aligne une armée de soldats puniques , qui est néanmoins majoritairement composée de mercenaires qu'il faut payer et nourrir .

Rome remporte la victoire et Carthage doit faire face après la paix , à la révolte de certains de ses sujets africains , qui se joignent à ses mercenaires révoltés que sa trésorerie à sec ne lui permet pas de rétribuer correctement .

Flaubert s'engouffre dans ce conflit entre Carthage et son domaine africain non punique . Ce conflit fut total , de forte amplitude , il a retourné l'Afrique du nord de fond en comble . Flaubert l'a compris et il est parvenu à rendre parfaitement l'ampleur de de cette tragédie implacable .

Les sources sont principalement et presque uniquement les pages de Polybe sur la fin de la première guerre punique . Flaubert nous fait découvrir un peu de cet imaginaire punique beaucoup trop marginalisé.

Carthage n'existe pas seulement dans l'imaginaire romantique et orientaliste . Elle fut réelle , de pierres et de sang , et Flaubert l'a magistralement ancrée dans la mémoire de tous les amateurs de littérature française .

Je mentionne le chapitre consacré à Carthage dans le Politeias ( le Politique ) d'Aristote . Un texte qui permettra au lecteur de salammbô de comprendre institutionnellement Carthage et son fonctionnement face aux mercenaires , dans ce roman . Il me semble très possible que Flaubert se soit inspiré du personnage de Didon et de son destin tragique pour bâtir le personnage de salammbô . Didon la reine fondatrice de Carthage , souveraine légendaire que Virgile évoque dans l'Eneide .

salammbô repose sur une maitrise à rendre les mouvements dans leurs contextes et sur des qualités scéniques patentes . C'est crucial dans ce roman de guerre où les éléphants écrasent les fantassins , où les murs tremblent , où les champs brulent , où la faim est tenace , où la mer scintille au soleil et où Carthage résonne de clameurs parfaitement audibles par le lecteur. 

Delenda est Carthago !



 





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Salammbô

Je me suis lancée dans l'histoire de Salammbô après avoir lu Madame Bovary.

Cette lecture réclame beaucoup d'attention et de courage.

Malgré la violence qui émane du récit, Flaubert sait envoûter et entraîner son lecteur dans cet épisode de la guerre de Carthage. J'ai trouvé Salammbô, l'héroine, d'une grande distinction et pleine de grâce.

Le point fort du livre sont les descriptions, très longues et fournies, elles donnent moult détails nécessaires à l'histoire.

Parfois fastidieuses à comprendre, c'est un des rares récits pour lequel j'ai relu deux fois chaque page pour bien comprendre et assimiler la richesse du texte.

J'ai trouvé ce livre très beau, une fois de plus Flaubert sait manier son art avec perfection et talent.

C'est sûr, ce n'est pas un livre qui se lit rapidement, quand on le commence, il faut lui consacrer du temps et de la patience, même si on peut être tenté d'abandonner en cours de route, ne jamais lâcher l'affaire il en vaut la peine. A lire !
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Bouvard et Pécuchet

Quelle surprise de découvrir, à travers les mésaventures de deux apprentis tout et n’importe quoi, un Flaubert dans la peau de l’homme en colère contre ses contemporains.

Bouvard et Pécuchet nous refont l’Encyclopédie à l’envers : agriculture, religion, histoire, archéologie, tout y passe et rien ne résiste, pas une certitude, pas une opinion, pas même un livre, tous bons à jeter.

Un roman vraiment étonnant, faramineux projet inachevé, qui par le biais d’une bouffonnerie grinçante détricote les bienfaits de l’instruction et fait le procès d’une époque pontifiante.

Mais finalement, sont-ils si bêtes nos deux zozos, avec tout ce qu’ils ont appris et désappris ?

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Madame Bovary

Qui ne connaît la triste destinée d'Emma Bovary ?



Une existence tout en désillusions et en ennui, un ennui que d'aucuns considèrent comme la marque du plus célèbre roman de Flaubert mais que, pour ma part, je n'ai ressenti que dans le quotidien de l'héroïne, très bien retranscrit, non dans ma lecture.



Ce qui m'a le plus frappée et émue, c'est la terrifiante solitude de cette femme pour laquelle j'ai ressenti de grands élans de compassion et d'indulgence. Et j'ai également été très surprise du plaisir pris à découvrir enfin le texte de Flaubert car, connaissant la trame, je pensais surtout à combler une lacune dans ma culture littéraire.



Souvent, les accents de la narration m'ont fait penser à Zola, jusque dans le style, ce qui ne fut pas pour me déplaire, loin s'en faut.



Le traitement de la psychologie des personnages, même secondaires, est brillant. Les figures de Charles Bovary, de sa mère, du père d'Emma, des amants et surtout, surtout de celle d'Homais, l'apothicaire, sont inoubliables. Le cynisme qui transparaît dans les actes de Rodolphe - notamment dans l'incroyable scène de la rédaction de sa lettre de rupture - motive particulièrement mon enthousiasme et mon admiration.



Un très grand roman.





Challenge 19ème siècle 2016

Challenge BBC
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Un coeur simple

Nouvelle 100% descriptive, "Un cœur simple" ne brille pas par son action. Le récit retrace la vie ordinaire de Félicité, fille de maçon au parcours semblable à bien des destins des gens du commun : un temps ouvrière agricole puis domestique, entrée au service d’une famille qu’elle ne quittera plus jamais et à laquelle elle survivra.



Flaubert semble vouloir rendre ici hommage à cette immense catégorie des âmes bonnes et simples, dont la vie de servitude fut également partagée entre ingratitude et dévouement, catégorie souvent oubliée par la littérature, en tout cas sous-représentée.



Nonobstant ce louable enjeu, le destin de Félicité ne m’a pas particulièrement captivée, je savais déjà à quoi m’en tenir sur la vie d’une domestique en province au 19ème siècle. Toutefois, si vous avez un goût prononcé pour les récits à l’office, pour les mœurs de femmes humbles et pour les perroquets, vous ne passerez pas un mauvais moment.





Challenge PETITS PLAISIRS 2015

Challenge 19ème siècle 2015

Challenge ABC 2015 - 2016
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Trois contes : Un coeur simple - La légende d..

Un coeur simple, c'est celui de Félicité, jeune servante, qui consacre sa vie au service de Mme Aubain, dame de la petite bourgeoisie, après avoir connu une enfance misérable marquée par la perte prématurée de ses parents et les passages difficiles chez différents patrons.



Un coeur simple mais qui s'attache durablement à la famille de Mme Aubain, en particulier ses deux jeunes enfants, Paul et Virginie.

Félicité est dévouée, sensible, aimante, elle donne beaucoup d'elle-même, beaucoup d'affection, de soins, sans recevoir beaucoup en échange.

Elle aime son neveu, qu'elle aide régulièrement, elle aide un vieillard qu'elle soigne.

La vie va être particulièrement dure avec elle, retirant de son affection ces différents personnages, emportés par la maladie pour Virginie et par une tempête pour son neveu, jeune matelot.

Elle soutiendra jusqu'à la fin l'inflexible et hautaine patronne Mme Aubain et n'aura plus qu'un perrroquet à qui donner de l'affection.



C'est un récit court, sombre, mélancolique mais qui a le mérite de regorger de détails sur la vie quotidienne dans la Normandie du 19ème siècle, ainsi que sur la structure sociale de l'époque;

Les personnages sont bien campés mais peut être manquent un peu de nuances.

Une histoire sérieuse et triste qui nous plonge dans tout un univers.
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Madame Bovary

Qui ne connaît pas « Madame Bovary » ? Sans l'avoir lu, sans avoir vu ses adaptations cinématographiques, on a au moins entendu une fois parler de ce roman de Flaubert, le plus célèbre de l'auteur assurément. Posséder quelques bribes de l'histoire, celle d'une jeune vierge nourrit aux lectures romantiques qui se retrouve mariée à un homme terne, aimant certes mais sans envergure et sans passion, qui s'ennuie dans sa province normande et qui croit trouver dans ses amants l'accès à ce bonheur idéal qu'elle n'atteindra jamais, est une chose. Lire cette oeuvre monumentale de la littérature française en est une autre.



La lecture d'un roman dit classique me procure, généralement, toujours le même effet : je suis estomaquée par la beauté du style, que cela soit dans des descriptions à la fois réalistes et poétiques qui nous donnent à voir un tableau ou bien dans les dialogues qui nous révèlent une peinture sociale sans filtre et sans complaisance, et par la teneur du thème qui chahute les bonnes moeurs de l'époque, qui bouleverse les esprits hypocrites bien pensants avec un personnage absolument hors norme.

« Madame Bovary » est de ces classiques. Et Emma Bovary est hors norme.

Si son histoire est a priori banale - une femme qui s'ennuie dans son ménage et trompe son mari –, c'est son insatisfaction permanente, son désir absolu d'atteindre un bonheur qui se conjugue avec passion et ivresse, idéalisé par ses lectures romantiques de preux chevaliers, qui révèle un personnage prêt à tout pour atteindre ses rêves. Emma désire, Emma franchit les interdits, Emma aime passionnément, Emma pleure. Emma se meurt. Et Emma recommence.

Car même dans les rares instants où elle n'est plus dupe de ses illusions romantiques, elle tente une nouvelle fois de reconquérir une certaine valeur d'idéal, encore et toujours. Jusqu'au jour où la réalité la rattrape pour de bon.



« Madame Bovary, c'est moi ». Cette citation de Flaubert, sujette à controverse, déclarée même comme fausse, n'en résume pas moins le sentiment qui imprègne le lecteur à la fin de sa lecture. Celui d'avoir assisté à l'incroyable incarnation d'un personnage par son auteur. Incroyable car le personnage est une femme adultère pleine de passion et de contradictions et que l'auteur est un homme. Incroyable car nous sommes à la moitié du XIXe siècle dans une société étriquée où on ne plaisante pas avec la morale. Incroyable car l'on pourrait dire « Madame Bovary, c'est nous », lecteurs. Les émois d'Emma, nous les partageons : sa folie passionnelle, son abandon, ses peurs face aux créances, ses faiblesses, ses rapides tendresses vis à vis de sa fille et de son mari, ses divagations. Emma transpire en nous.



Outre ce personnage inoubliable, le tableau dressé par Flaubert de cette société provinciale du XIXe siècle est virulent dans la démonstration d'un monde pétri de fausse morale et petit d'esprit, de la lâcheté des hommes et de la convoitise du moindre petit pouvoir. Toutes les pseudo valeurs de l'époque sont attaquées par l'écrivain à travers les différents personnages du roman : le mariage, la maternité, le commerce, la banque, l'Église, la science, l'État, le théâtre, et même le roman… Quelle satire sociale incroyable !

Voilà, tout a déjà été écrit sur cette oeuvre. Tout reste encore à dire.

J'en ressors éblouie par le talent d'un artiste – et non d'un simple écrivain - car à ce stade, nous sommes effectivement face à une oeuvre artistique . le temps passant, lire des oeuvres comme « Madame Bovary », comme lire les romans de Zola ou Maupassant m'apparaît comme parcourir un musée et être émerveillée par la beauté et la puissance évocatrice des oeuvres qui s'offrent à nos yeux.

C'est à chaque fois une bulle enchanteresse, pleine d'émotion.

Un instant où on touche l'Art du doigt.
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Un coeur simple

Félicité est entrée au service de Mme Aubain à la suite d'une déception amoureuse. Elle se dévoue pour cette veuve qui s'est retirée à Pont-l'Évêque. Flaubert ne s'attarde pas sur la description physique de Félicité. Son objectif est d'analyser ce coeur pur qui n'a pu s'épanouir dans l'amour conjugal et la maternité. L'affection de Félicité va se reporter successivement sur les deux enfants de sa patronne, une famille de pêcheurs, un indigent et enfin un perroquet. Cette âme pieuse va s'éloigner du dogme catholique pour s'enflammer dans une religiosité mystique.



Le style de Flaubert est magistral… J'ai conscience de ne rien dire de nouveau mais je suis impressionné par sa faculté à décrire un milieu social en peu de mots. En deux lignes, l'auteur vous fait comprendre qu'un intérieur bourgeois est décati ou il vous livre une description magnifique d'un débarquement de bateaux de pêche. Alors oui, il n'y a pas d'aventures rocambolesques dans ce conte. Mais le texte est remarquable en ce qu'il associe l'étude d'un caractère « simple » au portrait social de la paysannerie et de la petite bourgeoisie normandes. Et que dire de cette dernière scène qui mêle l'agonie de Félicité à une procession religieuse, si ce n'est que c'est un formidable moment de littérature.



Merci à Marie-Hélène Lafon qui m'a donné l'envie de redécouvrir ce petit bijou.
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Fumichon, concernant la propriété, évoque les arguments d'un homme politique dont Flaubert parle en ces terme dans une lettre à George Sand: "Peut-on voir un plus triomphant imbécile, un croûtard plus abject, un plus étroniforme bourgeois! Non! Rien ne peut donner l'idée du vomissement que m'inspire ce vieux melon diplomatique, arrondissant sa bêtise sur le fumier de la Bourgeoisie!". De qui s'agit-il?

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