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Citations de Pierre Loti (922)


Ils traitaient très gaiement entre eux ces questions de mariage, – mais sans rien dire qui fût déshonnête. Non, c’étaient des projets pour ceux qui étaient encore garçons, ou bien des histoires drôles arrivées dans 'le pays', pendant des fêtes de noces. Quelquefois ils lançaient bien, avec un bon rire, une allusion un peu trop franche au plaisir d’aimer. Mais l’amour, comme l’entendent les hommes ainsi trempés, est toujours une chose saine, et dans sa crudité même il demeure presque chaste.
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La Bretagne, que beaucoup de gens me donnent pour patrie, je ne l'ai vue que bien plus tard, à dix-sept ans, et j'ai été très long à l'aimer, - ce qui fait sans doute que je l'ai aimée davantage. Elle m'avait causé d'abord une oppression et une tristesse extrêmes; ce fut mon frère Yves qui commença de m'initier à son charme mélancolique, de me faire pénétrer dans l'intimité de ses chaumières et de ses chapelles des bois. Et ensuite, l'influence qu'une jeune fille du pays de Tréguier exerça sur mon imagination, très tard, vers mes vingt- sept ans, décida tout à fait mon amour pour cette patrie adoptée
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Il avait le cœur bon, ce Yann, mais sa façon à lui de s'élever à la lame et de rebondir, plus lestement que bien des jeunes, taillés avec les finesses modernes.
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Et là tout près, la mer toujours, la grande nourrice et la grande dévorante de ces générations vigoureuses, s’agitant elle aussi, faisant son bruit, prenant sa part de la fête…
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Quelle bonne chose d’aimer et d’être aimé ; savoir qu’une nature d’élite a compris la vôtre ; que quelqu’un rapporte toutes ses pensées, tous ses actes à vous ; que vous êtes un centre, un but, en vue duquel une organisation aussi délicatement compliquée que la vôtre, vit, pense et agit ; voila qui rend forts ; voilà qui peut faire des hommes de génie.
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Ils étaient cinq, aux carrures terribles, accoudés à boire, dans une sorte de logis sombre qui sentait la saumure et la mer. Le gîte, trop bas pour leurs tailles, s’effilait par un bout, comme l’intérieur d’une grande mouette vidée ; il oscillait faiblement, en rendant une plainte monotone, avec une lenteur de sommeil. Dehors, ce devait être la mer et la nuit, mais on n’en savait trop rien : une seule ouverture coupée dans le plafond était fermée par un couvercle en bois, et c’était une vieille lampe suspendue qui les éclairait en vacillant.
Il y avait du feu dans un fourneau ; leurs vêtements mouillés séchaient, en répandant de la vapeur qui se mêlait aux fumées de leurs pipes de terre. Leur table massive occupait toute leur demeure ; elle en prenait très exactement la forme, et il restait juste de quoi se couler autour pour s’asseoir sur des caissons étroits scellés au murailles de chène. De grosses poutres passaient aud−dessus d’eux, presque à toucher leurs têtes ; et, derrière leurs dos, des couchettes qui semblaient creusées dans l’épaisseur de la charpente s’ouvraient comme les niches d’un caveau pour mettre les morts. Toutes ces boiseries étaient grossières et frustes, imprégnées d’humidité et de sel ; usées, polies par les frottements de leurs mains. Ils avaient bu, dans leurs écuelles, du vin et du cidre, qui étaient franches et braves. Maintenant ils restaient attablés et devisaient, en breton, sur des questions de femmes et de mariages.
Contre un panneau du fond, une sainte Vierge en faïence était fixée sur une planchette, à une place d’honneur. Elle était un peu ancienne, la patronne de ces marins, et peinte avec un art encore naïf. Mais les personnages en faïence se conservent beaucoup plus longtemps que les vrais hommes ; aussi sa robe rouge et bleue faisait encotre l’effet d’une petite chose très fraîche au milieu de tous les gris sombres de cette pauvre maison de bois. Elle avait dû écouter plus d’une ardente prière, à des heures d’angoisses ; on avait cloué à ses pieds deux bouquets de fleurs artivicielles et un chapelet. Ces cinq hommes étaient vêtus pareillement, un épais tricot de laine bleue serrant le torse et s’enfonçant dans la ceinture du pantalon ; sur la tête, l’espèce de casque en toile goudronnée qu’on appelle suroît (du nom de ce vent de sud−ouest qui dans notre hémisphère amène les pluies).
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Et la grande tombe des marins était tout près, mouvante, dévorante, battant les falaises de ses mêmes coups sourds. Une nuit ou l'autre, il faudrait être pris là-dedans, s'y débattre, au milieu de la frénésie des choses noires et glacées : _ ils le savaient...
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Pierre Loti
Pauvre petit livre, très gauchement composé, je pense, mais où j'avais mis toute mon âme d'alors, mon âme en déroute et prise des premiers vertiges mortels, ne pensant pas du reste que je continuerais d'écrire et qu'on saurait plus tard qui était l'auteur anonyme d'Aziyadé. (Aziyadé, un nom de femme turque inventé par moi pour remplacer le véritable qui était plus joli et plus doux, mais que je ne voulais pas dire)
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Pierre Loti
Eh bien! vous les musulmanes, vous dormiez depuis des siècles d'un si tranquille sommeil, gardées par des traditions et des dogmes!... Mais soudain le mauvais enchanteur, qui est de souffle d'Occident, a passé sur vous et a rompu le charme et toutes en même temps vous vous éveillez au mal de vivre, à la souffrance de savoir...
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"Les désenchantées" répéta Djénane avec lenteur. On est désenchantées de la vie quand on l'a vécue; mais nous, au contraire, qui ne demandions qu'à vivre!... Ce n'est pas désenchantées que nous sommes, c'est annihilées, séquestrées, étouffées...
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On voudrait reprendre sur le temps le passé de la bien-aimée, on voudrait avoir vu sa figure d'enfant, sa figure de tous les âges; on voudrait l'avoir chérie petite fille, l'avoir vue grandir dans ses bras à soi, sans que d'autres aient eu ses caresses, sans qu'aucun autre l'ait possédée, ni aimée, ni touchée, ni vue. On est jaloux de son passé, jaloux de tout ce qui, avant vous, a été donné à d'autres, jaloux des moindres sentiments de son cœur et des moindres paroles de sa bouche, que, avant vous, d'autres ont entendues. L'heure présente ne suffit pas, il faudrait aussi tout le passé et encore tout l'avenir. On est là, les mains dans les mains ; les poitrines se touchent, les lèvres se pressent; on voudrait pouvoir se toucher sur tous les points à la fois et avec des sens plus subtils, on voudrait ne faire qu'un seul être et se fondre l'un dans l'autre.
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Elle fuyait devant le temps, la Marie, fuyait, toujours plus vite ; - et le temps fuyait aussi - devant je ne sais quoi de mystérieux et de terrible.
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Une nuit d'août, là-bas, au large de la sombre Islande, au milieu d'un grand bruit de fureur, avaient été célébrées ses noces avec la mer.
Avec la mer qui autrefois avait été aussi sa nourrice ; c'était elle qui l'avait bercé, qui l'avait fait adolescent large et fort - et ensuite elle l'avait repris, dans sa virilité superbe, pour elle seule. Un profond mystère avait enveloppé ses noces monstrueuses. Tout le temps, des voiles obscurs s'étaient agités au-dessus, des rideaux mouvants et tourmentés, tendus pour cacher la fête ; et la fiancé donnait de la voix, faisant toujours son plus grand bruit horrible pour étouffer les cris. - Lui, se souvenant de Gaud, sa femme, s'était défendu, dans une lutte de géant, contre cette épousée de tombeau. Jusqu'au moment où il s'était abandonné, les bras ouverts pour la recevoir, avec un grand cri profond comme un taureau qui râle, la bouche déjà emplie d'eau ; les bras ouverts, détendus et raidis pour jamais.

Et à ses noces, il y étaient tous, ceux qu'il avait conviés jadis. Tous, excepté Sylvestre, qui lui, s'en était allé dormir dans des jardins enchantés - très loin, de l'autre côté de la Terre....
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Et c'est curieux de pénétrer dans ces logis abandonnés en hâte et en terreur, au milieu du désarroi des fuites précipitées, parmi les meubles brisés, les vaisselles à terre. Des vêtements, des fusils, des baïonnettes, des livres de balistique, des bottes à semelle de papier, des parapluies et des drogues d'ambulance sont pêle-mêle, en tas devant les portes. Dans les cuisines de la troupe, des plats de riz attendent encore sur les fourneaux, avec des plats de choux et des gâteaux de sauterelles frites.
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A cette saison de fin d'août, il y a comme un alanguissement de pays chaud qui remonte du midi vers le nord; il y a des soirées lumineuses, des reflets du grand soleil d'ailleurs qui viennent traîner jusque sur la mer bretonne. Très souvent, l'air est limpide et calme, sans aucun nuage nulle part.
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Ils s'en allaient, au vent froid su soir qui avait l'odeur de la mer, rencontrant çà et là, sur la rase lande, des chaumières déjà fermées, bien sombres, sous leur toiture bossue, pauvres nids où des pêcheurs étaient blottis; rencontrant les croix, les ajoncs et les pierres.
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Jeudi 30 décembre 1915.

Je m'éveille à Hendaye, dont je m'étais déshabitué depuis dix mois. Il y a vent de sud, tiédeur et soleil ; après les temps de la Marne, je me crois en été. Mon ami Otharré vient déjeuner avec moi.
Vers 3 heures, je vais au cimetière, pour ma première visite à la tombe de mon cher Jean-Baptiste. C'est par le même chemin qui jadis nous menait au jeu de pelote, chemin que tant de fois nous avons fait ensemble, au temps de notre jeunesse, d'un pas si léger, portant nos palas. Et lui, Jean-Baptiste, merveilleux d'agilité, de force et de gaieté, semblait fait pour ne jamais connaître la mort. Dans l'adorable petit cimetière, qui domine les eaux bleues de la baie et de la côte d'Espagne, je suis infiniment seul ; nulle part, dans tout ce déploiement des lointains, on n'aperçoit un être vivant ; ni un chariot sur les routes ; silence absolu partout. Et le vent de sud, le magicien d'ici, répand sa tiédeur nostalgique. Voici la tombe ; malgré le nom gravé, je n'ai aucune impression qu'il soit là, cet ami qui était la vie même ; je n'arrive pas à concevoir qu'il ne verra jamais plus toute cette lumière et toute cette beauté de son pays qui m'entoure.
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Un soir, il s’amusait à lui citer mille petites choses qu’elle avait faites ou qui lui étaient arrivées depuis leur première rencontre ; il lui disait même les robes qu’elle avait eues, les fêtes où elle était allée.
Elle l’écoutait avec une extrême surprise. Comment donc savait-il tout cela ? Qui se serait imaginé qu’il y avait fait attention et qu’il était capable de le retenir ?
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Et comment sont faites les âmes de ces gens, qui pour rien au monde ne tueraient un oiseau, mais qui ne se révoltent pas de ce qu’on laisse, devant leur porte, mourir les petits enfants ?
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(En passant à Mascate)

A mesure que nous avancions vers le large, l'air perdait de sa légèreté impondérable et sa transparence ; il s'épaississait de vapeur d'eau, et bientôt la lune se leva, funèbre, énorme et confuse, parmi des cernes jaunes.
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