C'était mon vélo !
Paul, parisien écolo-bobo, est fier de circuler à vélo dans la capitale et le fait savoir. Il décide un jour d'investir dans un bon vélo, amélioré avec des accessoires haut de gamme. Coût de l'opération : 600€.
Dans une ville où plus de 500 vélos disparaissent chaque mois, il faut être téméraire pour acheter un vélo neuf. Et malgré un antivol solide et les précautions prises par Paul (il monte son vélo chaque soir dans son petit appartement du 3ème étage- sans ascenseur) son 𝑇𝑟𝑖𝑏𝑎𝑛 500 est volé dans le XIIIe arrondissement.
« 𝑇𝑜𝑢𝑡 𝑣𝑜𝑙𝑒́ 𝑒𝑠𝑡 𝑢𝑛 𝑒𝑛𝑑𝑒𝑢𝑖𝑙𝑙𝑒́ »
Paul fait alors une obsession de ce vol : son vélo était le seul bien de valeur qu'il n'ait jamais possédé ; et en lui volant son vélo, on l'avait aussi dépossédé d'une partie de lui-même et d'un peu de sa liberté.
Paul tente de mener une enquête pour retrouver son bien : après s'être adressé à la police, il fouille les sites Internet de petites annonces, dans l'espoir que son vélo soit mis en vente par le voleur. Et c'est alors que sur Facebook Marketplace apparait cette annonce : « 𝑇𝑟𝑖𝑏𝑎𝑛 500. 450€. 𝐸𝑡𝑎𝑡 : 𝑛𝑒𝑢𝑓. 𝑀𝑎𝑟𝑞𝑢𝑒 𝐵'𝑡𝑤𝑖𝑛. 𝑇𝑟𝑖𝑏𝑎𝑛 𝑐𝑎𝑠𝑖 𝑛𝑒𝑢𝑓 𝑐𝑎𝑟 𝑡𝑟𝑒̀𝑠 𝑝𝑒𝑢 𝑢𝑡𝑖𝑙𝑖𝑠𝑒́. 𝑃𝑟𝑖𝑥 𝑛𝑒́𝑔𝑜𝑐𝑖𝑎𝑏𝑙𝑒. 𝐿𝑖𝑒𝑢 : 𝑆𝑎𝑟𝑐𝑒𝑙𝑙𝑒𝑠. » Son vélo !
Sarcelles, banlieue parisienne… il n'en fallait pas plus pour que Louise, la compagne - très à gauche - de Paul, ne s'insurge : il faut dire qu'elle supporte mal le fait que Paul passe ses journées à fouiller Internet à la recherche de son vélo « 𝑇𝑢 𝑡'𝑒𝑚𝑚𝑒𝑟𝑑𝑒𝑠 𝑙𝑎 𝑣𝑖𝑒 𝑎𝑙𝑜𝑟𝑠 𝑞𝑢𝑒 𝑡𝑢 𝑎𝑢𝑟𝑎𝑖𝑠 𝑙𝑒𝑠 𝑚𝑜𝑦𝑒𝑛𝑠 𝑑𝑒 𝑡𝑒 𝑟𝑎𝑐ℎ𝑒𝑡𝑒𝑟 𝑢𝑛 𝑣𝑒́𝑙𝑜, 𝑛𝑜𝑛 ? »
Ce vélo volé est le point de départ de disputes fréquentes entre Paul et Louise, elle lui reproche son rapport à la propriété trop bourgeois : « 𝑝𝑟𝑜𝑝𝑟𝑖𝑒́𝑡𝑒́ 𝑒𝑡 𝑙𝑖𝑏𝑒𝑟𝑡𝑒́ 𝑖𝑛𝑑𝑖𝑣𝑖𝑑𝑢𝑒𝑙𝑙𝑒, 𝑚𝑎𝑖𝑠 𝑒́𝑐𝑜𝑢𝑡𝑒-𝑡𝑜𝑖 ! 𝑇𝑢 𝑝𝑎𝑟𝑙𝑒𝑠 𝑐𝑜𝑚𝑚𝑒 𝑢𝑛 𝑢𝑙𝑡𝑟𝑎𝑙𝑖𝑏𝑒́𝑟𝑎𝑙 ! ».
Paul est l'archétype du citadin de gauche à la sensibilité écolo, qui défend les causes sociales et les opprimés, mais qui a des réflexes petits-bourgeois sur l'insécurité et la propriété et n'hésite pas à collaborer avec la police pour récupérer son bien. « 𝐸𝑡 𝑡𝑢 𝑣𝑒𝑢𝑥 𝑎𝑙𝑙𝑒𝑟 𝑣𝑜𝑖𝑟 𝑙𝑎 𝐵𝐴𝐶, 𝑡𝑜𝑖 ? 𝑇𝑜𝑖 𝑞𝑢𝑖 𝑎𝑠 𝑡𝑜𝑢𝑗𝑜𝑢𝑟𝑠 𝑣𝑜𝑡𝑒́ 𝑎̀ 𝑙'𝑒𝑥𝑡𝑟𝑒̂𝑚𝑒 𝑔𝑎𝑢𝑐ℎ𝑒 ? »
Le récit des mésaventures de Paul est entrecoupé de scènes du film italien 𝑳𝒆 𝑽𝒐𝒍𝒆𝒖𝒓 𝒅𝒆 𝒃𝒊𝒄𝒚𝒄𝒍𝒆𝒕𝒕𝒆 de Vittorio de Sica, sorti en 1948 (drame social qui relate l'histoire d'un père de famille qui s'est fait voler l'outil de travail indispensable à la survie de sa famille, sa bicyclette).
Dans cette fable morale contemporaine,
Bruno Gibert expose les contradictions et la mauvaise foi de la petite-bourgeoisie parisienne, succulent.
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