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EAN : 9782364685185
240 pages
Editions du sous-sol (13/01/2023)
3.82/5   369 notes
Résumé :
Une petite fille déterre des os dans un jardin, une femme développe des fantasmes sexuels autour du coeur d'un homme cardiaque, le fantôme d'un bébé erre en décomposition, deux jeunes fans dévorent une rockstar suicidée, des enfants disparus réapparaissent des années plus tard sans avoir grandi, une séance de spiritisme tourne au cauchemar Peuplées d'adolescents rebelles, d'étranges sorcières, de fantômes à la dérive et de femmes affamées, les douze histoires qui co... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (95) Voir plus Ajouter une critique
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Notre part de nuit est de mes lectures les plus marquantes et stimulantes de ces dernières années. Autant dire que je piste toute nouvelle publication de Mariana Ebriquez. Les dangers de fumer au lit vient d'être traduit en France mais ce recueil d'histoires courtes est paru en Argentine en 2009. Et ce qui est incroyable, c'est la cohérence entre les deux oeuvres.

Les douze contes horrifiques sont enracinés dans le quotidien, le terrifiant s'y infiltre au détour d'une phrase qui claque comme une matérialisation implacable et menaçante de nos névroses contemporaines. Chacun raconte la violence de nos sociétés capitalistes et patriarcales, innervée par celle du passé et notamment de la dictature qui a sévi en Argentine de 1976 à 1983, enlèvements, tortures, assassinats.

Les phrases de Mariana Enriquez ont une capacité dingue à générer de la métaphores, comme une manière d'opérer une catharsis tout en se distrayant avec la langue de la littérature horrifique et l'humour très sombre qui l'accompagne. La réalité est abordée sans anesthésie ni artifice avec une liberté absolue qui fait fi des tabous et pudeurs.

Une nouvelle fois, son talent à mélanger littérature engagée et réalisme magique latino-américain explose avec un naturel extraordinaire, parvenant mettre dans la tête du lecteur quelque chose d'impossible qu'il s'imagine pouvoir arriver, jusqu'à l'horreur la plus brute, la plus lubrique.

Toutes les histoires tirent un fil vénéneux qui explorent les abimes les plus retranchés de l'âme humaine jusqu'à la folie totale. Remplies d'hystérie collective, de malédictions, d'apparitions spectrales, de sorcières, de revenants, elles mettent en scène de très jeunes femmes, enfants, adolescentes, qui peuvent aussi bien subir la violence que la provoquer en tant comme protagonistes inquiétantes.

Parmi les douze, trois m'ont particulièrement impressionnée ( sans trop en dévoiler ):
- L'Exhumation d'Angelita : l'histoire d'une fillette fantôme enterrée dans un jardin qui pleure lorsqu'il pleut et revient hanter la petite-fille de sa soeur, comme écho aux charniers encore cachés hérités de la dictature de Videla.
- Les petits revenants : des centaines d'enfants disparus depuis des années réapparaissent tous en même temps mais sans que leur apparence n'est changé, comme une vengeance pour dire aux adultes qu'ils n'ont pas pris soin d'eux.
- Où es-tu mon coeur : menée par une jeune narratrice fétichiste des coeurs malades qui se masturbe frénétiquement en écoutant des battements cardiaques défaillants.

Convoquant aussi bien la poésie noire que l'horrifique le plus terrifiant, Mariana Enriquez créent durablement des images aussi puissantes que dérangeantes qui s'infiltrent viscéralement sous notre peau. La fulgurance de l'impact est renforcée par la brièveté des histoires ( une cinquantaine de pages pour la plus longue, une dizaine pour beaucoup ) et la volonté de ne pas leur donner d'élucidation, juste un point d'orgue perforant. Une expérience de lecture fascinante de radicalité.

PS : géniale idée que d'avoir exhumer une oeuvre peu connue de van Gogh ( Crâne de squelette fumant une cigarette ) pour la mettre en couverture !

Lu dans le cadre d'une Masse critique privilégiée
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Une auteure totalement inconnue, je peux vous dire que je vais m'empresser de lire "Notre par de nuit" " Les danger de fumer au lit "est un recueil de 12 nouvelles, qui décapent. Je suis totalement hors de ma zone de confort, mais la je suis régalée. Je m'épate moi même. Des histoires glauques, terrifiantes, dérangeantes, un univers malsain, d'une extrême noirceur. Un mélange de nouvelles , où le surnaturelles, les fantômes, des corps en putréfactions ,d'autres sont plus soutenables, mais toujours un coté malsain formant un cocktail explosif .La jalousie de certains personnages, les poussent, à l'enévitable,. L'auteure ne tergiverse dans les descriptions au delà de l'impensable, des scènes d'abus sexuelles, des violences en tout genre, sont brut de pomme. Une nouvelle, m'a mis vraiment mal, a l'aise, des jeunes filles, où leur idole est décédé, profane sa tombe et se délecte de son corps.
L'auteure nous plonge dans les méandres de la folie sans un point de retour.
A travers ce recueil Marina, passe un message, sur le passé des son pays ,l'Argentine, notamment sur le système politique, la dictature, et les atrocités en tout genre et le problème des narcotrafiquants.
Ces nouvelles , nous font avancer, dans un monde oppressant, suffocant, terrifiant .
Un roman à découvrir.
Ce recueil de ces
nouvelles est destiné un public averti.
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Gothique de la pampa urbaine.
Moi qui pensais que l'Ecosse avait le monopole des fantômes les amerloques l'exclusivité des zombies, le Mexique le cartel des squelettes en fête, la France l'apanage des vieux chanteurs des années 80 en cire et la Transylvanie le privilège de regrouper tous les suceurs de sang, je découvre que l'Argentine ne fait pas que jouer au foot et possède son quota de revenants et d'esprits chagrins. Il faut dire que les périodes de dictature et les enlèvements de masse ont eu de quoi empêcher certains de reposer en paix.
Voici 12 petites nouvelles qu'il ne faut pas choisir quand il s'agit de raconter des histoires à la marmaille pour l'endormir. Même si elle le mérite parfois. Bon, le crâne avec cigarette de van Gogh en couverture annonce à bon escient la couleur. Difficile de confondre avec Nounours en ballon ou Les trois petits cochons.
Mariana Enriquez revi-gore le genre, l'hémoglobine en moins. Les âmes errantes, ici, présentent plutôt bien. Ils ont la finitude élégante. le problème, c'est plutôt les vivants et en particulier cette espèce instable, qui ne fait en général que râler et glander devant son téléphone, l'adolescente rebelle. L'auteure en fait des héroïnes tragiques.
Phénomène presque surnaturel dans un recueil, todas las nuevas (j'ai appris l'espagnol dans un camping) sont très réussies . Je n'ai pas senti l'effet remplissage que je retrouve souvent et qui consiste à enrober deux ou trois textes majeurs de récits de jeunesse et quelques brouillons d'écoliers pour épaissir l'ouvrage et le prix. Les histoires s'enchainent et permettent de découvrir un imaginaire horrifique cimenté dans le quotidien et par le poids du passé.
Mention pour le titre, génial, bien que mensonger car la cigarette présente bien moins de risques au lit dans la relation de couple que les miettes du petit-déjeuner qui grattent.
Les phrases claquent comme les portes d'un manoir hanté, les dialogues ressemblent à des musiques d'ambiance décalées et participent à ce mélange de modernité et de surnaturel. Il faut d'ailleurs rendre hommage à la traductrice du roman car elle su trouver les ombres qui se cachent derrière les mots.
Je ne vais pas énumérer les histoires façon liste de courses, même si nous sommes Samedi et que le frigo est vide, car Mariana Enriquez chasse le surnaturel derrière une modernité artificielle. Il en va ainsi de ces groupies absolues qui vont exhumer leur vedette pour perpétuer sa magie ou de cette jeune fille obnubilée par les battements du coeur d'un homme condamné par une terrible arythmie. Les désordres du coeur.
Que dire de ce récit incroyable qui accompagne le retour miraculeux dans une ville de tous les jeunes fugueurs disparus ou séquestrés par la dictature depuis plusieurs années ? Un chef d'oeuvre (très antérieur à la série « Les revenants » qui reproduit un peu le même scénario), qui interroge sur l'abandon, la mauvaise conscience des adultes et une certaine forme de vengeance contre l'oubli.
Mariana Enriquez inventent d'autres légendes urbaines qui vont plus loin qu'un simple relooking de vieilles superstitions car elles s'alimentent de la violence bien réelle de la société.
Je n'en dis pas plus pour ne pas gâcher davantage vos terreurs nocturnes. Je tiens à préserver vos insomnies.
Il me reste à lire son grand roman Notre part de nuit, qui m'attend depuis un bon moment.
C'est quoi ce bruit ?
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Les nouvelles sont le format idéal, je trouve, pour aborder l'horreur. C'est suffisant pour frissonner et trop court pour en suffoquer. Ce format est également très souvent la possibilité d'un pas de côté, d'une chute inattendue, d'un art extrême de l'étrange dans sa dimension la plus forte et quand ce pas de côté s'entremêle précisément à l'horreur, ça donne comme un supplément d'âme, un vertige, un moment de suspension, une parenthèse troublante et troublée nous poursuivant longtemps une fois le livre refermé. Car ces nouvelles touchent à l'intime le plus profond, à l'indicible, aux tabous.
A la lecture de « Les dangers de fumer au lit » de l'auteur argentine Mariana Enriquez aux étonnantes éditions du sous-sol, j'ai retrouvé la vive émotion que j'avais éprouvée à la lecture de Mortepeau de Natalia Garcia Freire, une de mes lectures coup de coeur de 2021, livre gothique à la poésie noire effleurant le thème de la transformation pour basculer dans le monde des insectes. Un livre également court mais horrifique…court et donc délicieusement, poétiquement, horrifique.

Si les insectes grouillent dans Mortepeau, ce sont les fantômes et les sorcières, sorcières qui parfois ne disent pas leur nom, qui abondent dans ce livre.
En douze histoires tranchantes, l'auteure creuse et fouille dans l'âme humaine pour aller sonder d'une plume chargée d'encre noire les voies les plus souterraines des fantasmes, de la sexualité, des obsessions…des organes et des humeurs. Les voies les plus tortueuses de l'âme et du corps.
Les femmes sont omniprésentes, et la frontière est ténue pour ces petites filles, ces adolescentes, ces femmes, la frontière est ténue entre le fantastique et la folie, entre le bourreau et la victime, entre la douleur et l'orgasme, entre la vie et la mort. Nous sommes à la margelle du puits de la raison, enveloppés d'une lourde brume de solitude, happés par l'abîme sans fond de l'étrange, hantés par les odeurs de cadavre et d'excréments qui s'en dégage, attirés dans les dédales d'un lieu envouté à l'image des personnages qui les habitent.

Mariana Enriquez, de façon sauvage et sans limite, sans tabou, nous offre à voir ainsi, entre autres, un clochard diarrhéique jetant un mauvais sort à tout un quartier, une femme se masturbant au son de battements de coeurs malades, une petite fille sacrifiée réceptacle à la folie de sa mère et de sa grand-mère, la réapparition cauchemardesque au sein des familles d'enfants autrefois disparus (cette nouvelle n'est pas sans me rappeler le scandale des enfants enlevés en Argentine pendant la dictature), une femme seule fumant sous les draps gris et rêvant de ciels étoilés, la vengeance de jeunes filles très belles jalouses devenues des monstres cruels, l'adoration jusqu'au cannibalisme, les os d'un bébé déplacés faisant apparaitre son fantôme, le corps d'une femme totalement scarifié par un esprit qui n'est autre que elle-même…
Le corps est tour à tour source du plaisir, source de l'abject, source de la douleur, source de la violence et l'auteure lève le voile sur des éléments depuis toujours cadenassés par la société, la pudeur et la honte : oui, la famille peut être un lieu non de protection mais de trahison, les corps peuvent être la source des humeurs les plus répugnantes, des femmes belles peuvent être d'une cruauté machiavélique, la douleur peut cohabiter avec l'érotisme, le désir avec la cruauté, parfois contre soi-même, tous ces éléments procurant bien plus de peur et de terreur que le surnaturel à grand renfort d'imagination.

« Un des gosses empestait parce qu'il ne retirait jamais son seul et unique vêtement, même pour dormir. Ce garçon erre toujours dans la ville, diffusant sa puanteur partout pour qu'on ne l'oublie pas. On raconte que les assistantes sociales n'arrivaient pas à lui ôter ses fringues, tellement elles étaient collées à son corps à cause de la crasse. On dit qu'il avait des poux, mais aussi des vers blancs sur le cuir chevelu, et des plaies sur les bras ; il ne s'était jamais lavé, un petit animal, il se chiait dessus de peur et ne se nettoyait pas. C'est l'enfant que les gens voient le plus souvent, le fantôme le plus populaire, qui te touche avec ses mains noires, et lorsqu'il effleure ton blouson accroché à une chaise dans un bar, l'imprègne d'une odeur de chair morte ».

Ce recueil à la couverture aussi inoubliable que son contenu, d'une poésie noire allant jusqu'à l'horreur la plus implacable, nous promet des histoires gothiques et macabres, des histoires sur la santé mentale vue à travers le genre fantastique, qui se suffisent à elle-même dans leur tristesse et leur pouvoir horrifique, mais qui racontent également tout autre chose derrière la simple narration, comme un reflet scintillant et fantastique de la réalité sociale actuelle, notamment au travers la disparition de nombreux enfants, de la réalité argentine contemporaine faisant face à son passé.

Un grand merci à Babelio et à Nicolas Hecht pour cette Masse critique privilégiée !
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Ne vous arrêtez pas à la couverture du livre de Mariana Enriquez, ignorez-la et ouvrez le roman sans crainte et sans hésitation, l'auteure argentine va vous transporter dans son univers noir et flippant à souhait. Ses nouvelles vont vous entraîner dans son mode horrifique, peuplé d'êtres innommables et innommés. Dans cette Amérique Latine où la religion catholique se colore de superstitions d'origine africaine, où le culte des morts se mêle au culte des saints. Sorcières, fantômes, culte Vaudou, sacrifices humains, cannibalisme ; chaque page tournée apporte son lot d'horreurs et de frayeurs. Mariana Enriquez nous embarque dans les noirceurs de l'âme humaine avec beaucoup de virtuosité mais aussi avec pas mal de volupté car on se plait malgré tout à la suivre dans le dédale de ses douze nouvelles. Dans cette fange littéraire livrée brutalement, on y trouve un peu de poésie et c'est grâce à ces îlots de lumière salvatrice que l'on ne referme pas l'ouvrage.

Les personnages qui hantent ses nouvelles sont avant tout des femmes. Des femmes affamées, cabossées, qui souffrent, qui ont peur et qui sont opprimées. Les quelques hommes qu'on peut rencontrer sont eux inexistants comme de simple faire valoir. Ceux sont des gigolos sans sexualité attrayante. Des pauvres hères qui ne font que passer sans jamais véritablement s'arrêter. Ils oeuvrent à la limite d'un monde exclusivement féminin qui les domine. Une gynécocratie qui a pour héroïnes des Angelita, Silvia, Mariela, Josefina, Elina, Paula, Mechi, Vanadis, Julita et Pinocchia. Elles savent nous bouleverser par leur violence mais aussi par leur fragilité.

Mariana Enriquez possède enfin une plume qui bien qu'elle soit noire, n'en demeure pas moins belle et limpide. Elle sait nous emporter dans les méandres et les abîmes de l'âme humaine avec dextérité. Elle choque par ses mots crus qui souillent notre innocence mais qui savent aussi transcender notre nature humaine. Si l'insupportable est souvent là, le plaisant n'est jamais bien loin. C'est sa force et aussi son originalité de pouvoir nous souffler le chaud et le froid. de son horreur peut naître le beau.

Merci à Nicolas de Babelio et aux Éditions du sous-sol pour cette étonnante et surprenante découverte d'une auteure qui excelle dans l'art difficile de la nouvelle. Contrairement à beaucoup d'autres nouvellistes, elle nous laisse jamais sur la faim de la fin…


« Alors elle décida d'appuyer l'extrémité de sa cigarette sur le drap pour voir s'agrandir le cercle au bord orangé, jusqu'au moment où ça devenait dangereux, le feu crépitait et augmentait, et elle devait taper sur le drap pour l'éteindre, les bouts de tissu brûlé flottaient dans la tente. Les petits incendies circulaires la faisaient rire. Lorsqu'elle sortait la tête dans la semi-pénombre de la chambre, les trous de cigarette dans les draps laissaient passer la lueur de la lampe dont les faisceaux lumineux se reflétaient au plafond qui paraissait couvert d'étoiles. Il fallait qu'elle fasse plus de trous car, elle le comprit dès qu'elle le vit, tout ce qu'elle voulait, c'était un ciel étoilé au-dessus de la tête. Oui, c'était tout ce qu'elle voulait.»
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critiques presse (6)
LeDevoir
17 mai 2023
L’autrice propose douze nouvelles horrifiques soufflant sur les braises de la dictature argentine.
Lire la critique sur le site : LeDevoir
LaLibreBelgique
06 février 2023
Des ossements déterrés qui se transforment en petite fille, des enfants disparus qui réapparaissent à l'identique après quelques années, des jeunes filles réunies autour d'une table d'ouija pour entrer en contact avec des esprits… Les Dangers de fumer au lit, le recueil de récits de la nouvelle sensation littéraire argentine, Mariana Enriquez, ressort du fantastique mâtiné d'horreur.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
LeSoir
31 janvier 2023
Dans « Les dangers de fumer au lit », des fans dévorant le cadavre d’une rock star, de jeunes disparus revenus en zombies, un bébé mort errant dans la ville… Le fantastique de Mariana Enriquez parle d’aujourd’hui.
Lire la critique sur le site : LeSoir
LeMonde
23 janvier 2023
Très peu de mots suffisent à ­Mariana Enriquez pour installer l’ambiance. Chacune des douze histoires brèves qui composent Les Dangers de fumer au lit met en place un univers où évoluent des personnages auxquels on s’attache.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Liberation
19 janvier 2023
Les histoires de Mariana Enriquez apparaissent radicalement modernes, empreintes d’obsessions, de mal-être social et d’érotisme.
Lire la critique sur le site : Liberation
LeFigaro
16 janvier 2023
Fantastique, horreur et épouvante, onirisme et surnaturel, règne de l’incongru, errance sociale, indigence morale, misère sexuelle, spiritisme, sur fond de rock sombre ou de guitares saturées et démoniaques…
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
C'était l'après-midi, Juancho était bourré et faisait le caïd sur le trottoir, même si plus personne dans le quartier ne se sentait menacé, ni même inquiété, par sa présence toxique. Plus loin, Horacio lavait sa voiture comme tous les dimanches, en short et claquettes, ventre tendu, proéminent, poils blancs sur le torse, radio diffusant un match de foot. Au coin, les Espagnols du bazar buvaient le maté, la bouilloire posée par terre entre les deux fauteuils inclinables qu'ils avaient mis dehors, car il y avait un beau soleil. En face, les fils de la Coca prenaient une bière à
l'ombre, et un groupe de filles qui sortaient de la douche, trop maquillées, bavardaient devant la porte du garage de Valeria. Mon père avait tenté, plus tôt, de dire bonjour et de parler avec les voisins, mais il avait fini par rentrer à la maison, comme d'habitude, tête basse, légèrement contrarié, parce que c'étaient de braves gens mais ils n'avaient pas de conversation, tous les dimanches après-midi il disait la même chose.
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Le frapper, l'ouvrir avec mes ongles, lui imprimer d'autres cicatrices, une façon d'être au plus près de lui, qu'il m'appartienne davantage. Je devais contenir ce désir, ces envies de me rassasier, de l'ouvrir, de jouer avec ses organes, comme des trophées cachés. Je m'imposais de menus châtiments : ne pas manger de toute la journée, ne pas dormir pendant soixante-douze heures, marcher à en avoir des crampes dans les jambes...D'infimes rituels, comme une gamine qui a souhaité la mort de sa mère parce que cette dernière n'a pas voulu lui acheter quelque chose, puis les remords et les petites pénitences, "je ne dirai plus de gros mots, mon Dieu, je te le promets, mais ne fais pas mourir maman", et le gros mot qui lui échappe soudain et la cavalcade la nuit pour voir si maman dans son lit respire toujours.
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Une nouvelle fois, elle remua la nourriture dans son assiette, mais réussit à avaler deux bouchées et un 7 Up entier, c'était au moins du sucre. Puis elle sortit en direction de la plage, qui se trouvait à un bloc à peine de distance ; il fallait passer par un chemin pavé entouré d'arbustes qui lui coupèrent la respiration, et si quelque chose se cachait là, mais elle courut et arriva aux anciens escaliers en bois et à la mer, la plage immense diaphane, au sable plus clair que sur le reste de la côte, et le ciel d'un bleu violacé parce qu'il allait pleuvoir. Elle s'assit sur une chaise, sous un parasol, et observa des quadras au corps encore svelte jouer au foot ; elle envisagea de s'approcher, d'en attirer un dans son lit peut-être, pourquoi pas, cela faisait un an qu'elle ne baisait pas, mais elle savait que non, le désespoir se sent, et elle empestait. Elle vit des filles défiant le vent avec leurs maillots de bain. Elle attendit la pluie. Se laissa mouiller. Et quand sa longue chevelure se mit à s'égoutter sur son pantalon, quand l'eau froide coula dans son cou vers sa poitrine et son ventre, elle sortit de son sac son rasoir et s'entailla le bras avec précision, une, deux, trois fois, jusqu'à ce que le sang apparaisse, qu'elle ressente la douleur et quelque chose de semblable à un orgasme.
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Son nez bouché à cause du rhume - elle chopait toujours un virus dans les avions - perturbait sans doute son odorat ; C'était sûrement ça, pourtant quand elle se mouchait avec un Kleenex et réussissait à renifler, l'odeur était encore pire. Elle ne se rappelait pas que Barcelone ait été aussi sale, en tout cas elle ne l'avait pas remarqué lors de son premier voyage, cinq ans plus tôt. Mais ce devait être son rhume, probablement les mucus coincés qui empestaient, parce que dans certaines rues elle ne sentait absolument rien, et soudain l'odeur l'assaillait, lui donnant de violentes nausées. Ca puait la charogne de chien pourrissant au bord de la route, ou la viande périmée et oubliée dans le frigo quand elle devient violette comme le vin. L'odeur se cachait et, par rafales, gâchait les endroits les plus jolis, les ruelles pittoresques avec du linge suspendu entre deux balcons, qui empêchait de voir le ciel. Elle atteignait même les Ramblas.
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Sa mère lui avait donné une gifle qui l'aurait fait pleurer si Josefina n'avait pas été habituée à ces crises de stress qui se terminaient par des larmes et des étreintes et des "ma petite fille, ma petite fille, et s'il t'arrivait quelque chose". Quoi, par exemple ? avait pensé Josefina. Puisqu'elle n'avait pas l'intention de se jeter dans le vide. Puisque personne n'allait la pousser. Puisque tout ce qu'elle voulait, c'était voir si l'eau reflétait son visage, comme cela arrivait toujours dans les puits des contes de fées, son visage comme une lune avec des cheveux blonds dans l'eau noire.
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Vidéo de Mariana Enriquez
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Ne manquez pas les moments clés de la vidéo :
00:10 Claudia Durastanti 01:15 Jan Carson 03:23 Maria Sonia Cristoff 03:47 Jonathan Coe 05:20 Mariana Enriquez 06:20 Maria Sonia Cristoff 06:43 Jakub Szamalek
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Interview : Amoreena Winkle, Julie Fuster, Lionel Tran. Caméra : Lionel Tran - Montage : Ryu Randoin.
QUI SOMMES-NOUS ? Les Artisans de la Fiction sont des ateliers d'écriture situés à Lyon. Nous prônons un apprentissage artisanal des techniques d'écriture et avons pour objectif de rendre nos élèves autonomes dans l'aboutissement de leurs histoires. Pour cela nous nous concentrons sur l'apprentissage et la transmission des techniques de base de la narration en nous inspirant du creative writing anglophone. Nos élèves apprennent en priorité à maîtriser : la structure de l'intrigue, les principes de la fiction, la construction de ses personnages… Nous proposons également des journées d'initiation pour vous essayer au creative writing et découvrir si cet apprentissage de l'écriture de fiction est fait pour vous. Retrouvez tous nos stages d'écriture sur notre site : http://www.artisansdelafiction.com/
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