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EAN : 9782213722368
352 pages
Fayard (02/11/2022)
4.15/5   10 notes
Résumé :
Dans cet ouvrage, son premier depuis qu’il s’est vu décerner le prix Nobel de littérature, Bob Dylan nous donne un aperçu personnel et hors du commun de la musique populaire. À travers soixante-six textes, illustrés de cent cinquante photos, il se penche sur les titres d’autres artistes, de Stephen Foster à Elvis Costello, en passant par Hank Williams et Nina Simone. Mystérieux, touchants, profonds, souvent empreints d’un humour ravageur, ces essais sont la quintess... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Surprise !
Je ne connaissais pas plus d'un tiers des chansons dont il parle, et près de la moitié de ce tiers par un autre interprète.
Du coup, je l'ai lu avec une oreille sur YouTube et un oeil sur Google pour les paroles, pour comprendre de quoi il parle. Parce que souvent, quand Dylan parle de chansons, il s'intéresse surtout aux paroles. C'est vrai aussi dans ce livre.
Et quand on se rend compte des nazeries qu'il écoute, genre Perry Como, Webb Pierce, Bing Crosby, Eddy Arnold, Bobby Darin, Johnny Ray, Marty Robbins… c'est encore plus miraculeux qu'il ait écrit les chansons qu'il a écrites.
(Bon en fait, ce n'est pas tout à fait ça : quand il déboula dans le New York des années 60, le jeune Dylan s'était formé à l'université de Philadelphie où il s'était surtout gavé de blues et folk des années 20, 30 et 40, de rockabilly et rhythm&blues des années 50. C'est bien plus tard que lui est revenue la nostalgie des roucouleries de la radio de son enfance, et il en a fait « profiter » le monde dans les trois seuls albums de sa discographie sur lesquels j'ai fait l'impasse.)

Pour ceux qui penseraient prendre une Master Class de songwriting, vous pouvez passer votre chemin. Dylan préfère broder des historiettes à propos du thème de la chanson (parfois jusqu'à la bête paraphrase) ou raconter l'histoire de l'artiste qui l'interprète ou du compositeur.
Ces histoires sont ainsi l'occasion de nous offrir des instantanés de l'Amérique des cent cinquante dernières années. La vie des ouvriers de l'industrie automobile à Detroit / Motor city ; une courte bio de Nudie (le costumier des stars mais aussi de deux papes et quatre présidents des USA) ; ce qu'était la vie d'un outlaw dans le far-west de la fin du XIXe siècle ; les spectacles itinérants de la première moitié du XXe siècle…
C'est grâce à ça que le vieux renard se rattrape. C'est à ça qu'il est bon. Il le sait et en use et abuse. Au point d'être parfois à côté de la plaque, comme pour "There Stands The Glass" où il invente des horreurs post-war syndrome là où il n'y a qu'un pov' type qui chiale dans sa bière qu'elle est partie. Et puis, cela finit par tourner un peu en rond. Déjà, l'emploi systématique d'un « tu » rhétorique pour mieux immerger le lecteur lasse vite. Et puis la « Voix de sa génération », donc celle qui a eu 80 ans aux prunes, fait souvent son vieillard grincheux : avant, y avait des vrais mecs, la corruption de la cité a tout fait disparaître… une fois, ça va (on se dit que c'est la chanson en question qui veut ça) ; au bout de trois, on se demande…
Bref, comme ces développements douteux représentent en gros les deux tiers du livre, je suis loin d'être follement enthousiasmé.

Quelles découvertes je lui dois au sortir de ça ?
Un obscur rockabilly Sun, « Take Me From This Garden Of Evil » de Jimmy Wages, agréablement sauvage.
Une chouette « Poison Love » de Johnnie and Jack, épitomés de la country à l'ancienne.
Alvin Youngbloog Hart, splendide voix de l'americana contemporaine.
« Ruby (Are You Mad At Your Man) », un bluegrass supersonique de fous furieux, les Osborne Brothers.
Et que la chanson de 1967 de Pete Seeger, que je connais depuis des temps immémoriaux comme la « Jusqu'à la ceinture » de Graeme Allwright, bien que déguisée sous son intro « En 1942, alors que j'étais à l'armée… », est en fait une métaphore de l'enlisement américain au Vietnam.

Voilà.
Pour la Master Class, même s'il y a quelques traits de longue portée, se reporter plutôt à l'excellent livret du coffret Biograph.

Et si vous cherchez encore à savoir pourquoi Dylan a eu le Nobel, lisez (et écoutez) ses chansons, pas ça. Après tout, il ne l'a pas eu pour sa prose. Vous l'avez compris, je suis un peu déçu. Mais j'achèterai le prochain.

Enfin, le scandale : pas la moindre chanson de Chuck Berry !!! C'était bien la peine de le désigner comme le Shakespeare du rock'n'roll…
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Quand on a soi même écrit près de 500 chansons dont certaines ont fait le tour du monde, reprises par des dizaines d'interprètes et pris des couleurs universelles, il est légitime de se pencher sur les chansons des autres, celles que l'on écoute pour en livrer des clés de lecture intimes ou non.
Les chansons de Bob Dylan sont des histoires ouvrant les champs du possible, emportant les auditeurs vers des mondes insoupçonnés où le remord se mêle au désespoir où l'amour est omniprésent où les héros ne sont jamais fatigués, où les femmes ne subissent pas les contraintes de la religion, où l'espoir n'est jamais loin malgré les défaites.
On se souvient du héros de Tom Thumb's Blues, sous la pluie à Juarez, incapable de célébrer la Pâque de l'amour à Saint Annie, rejeté par Melinda une femme vénale, malade sans que son ami médecin ne puisse diagnostiquer son mal, résigné et repartant pour New York parce qu'il en a eu marre.
Des centaines d'histoires analogues, mais aussi des hymnes à des héros détruits par la société, Davey Moore, Rubin Carter dit Hurricane, Georges Jackson et tant d'autres...
Des hymnes cultes, All along the watchtower magnifié par Jimy Hendrix, Knocking on heaven's door repris par Gun's and Roses pour enflammer les salles du monde entier, la fuite amoureuse éperdue de Tangled up in blue...
Mais aussi des prémonitions, la stupidité des fake news dès 1974 avec Idiot Wind par exemple.
Le livre que nous propose Dylan aujourd'hui est un très beau livre, un cadeau de dylanophile à des dylanophiles (il n'y a pas de genre attaché à ce terme). Les commentaires sont illustrées de photos des chanteurs et des groupes, de timbres, de publicités, de photos d'objets, d'affiches de cinéma ou de concerts
Une ode au disque vinyle qui s'ouvre sur une photo en double page où l'on assiste à la mise sous pochette des précieuses galettes noires. Tout un univers disparu.
Je n'ai pas résisté à la liste des chansons passées au scanner par l'auteur.
Ce n'est pas un livre qui se lit de la première à la dernière page, mais un livre marelle, le blister défait, je me suis précipité sur mes chansons favorites en commençant la lecture dans l'ordre suivant 189, 53, 305, 165, 171, 149,195, 237.
189 - Blue suede shoes de Carl Perkins et ses premiers vers obscurs "There's 1 for the money, 2 for the show, 3 to get ready, now run get go, but don't you step on my blue suede shoes." le message est évident nous dit Bob, tu peux faire ce que tu veux de moi mais surtout ne touche pas à mes pompes. Les pompes, refuges du rocker qui ne peut se payer une voiture mais consacre ses économies et son énergie au cuir de ses chaussures. Des chaussures siglées. Une histoire de la pompe dans le rock accompagne le commentaire de cette chanson avec l'anecdote de cet apparatchik de la Tcheka qui répond à Lénine, pour connaitre le nombre de personnes exécutées par mes services comptez le nombre de chaussures et divisez par deux !
53 - My generation des Who est "une chanson qui ne fait pas de cadeau" ; l'hymne d'une génération qui ne veut ni être comprise ni être représentée. Vous boomers, enfants de la Génération grandiose s'interroge Dylan, qu'avez vous fait de votre héritage ? Pete et Roger s'entendent à merveille pour faire passer un non message, "la crainte est probablement l'élément le plus honnête de la chanson"
Iconoclaste ?
305 - On oublie qu'avant d'être popularisée par the Animals, Don't let me be misunderstood a été écrite pour Nina Simone. Malentendus et quiproquos pour cette chanson d'un jeune prodige. "C'est insupportable d'être mal compris"
Dylan embraye sur les contresens ou les faux sens commis par les traducteurs. L'incipit de l'étranger le fameux "Aujourd'hui, maman est morte" a été traduit en anglais "Mère est morte aujourd'hui" très loin de l'intimité suggérée par la phrase originale.
Il poursuit avec les différences entre le passé simple et le passé composé du français comparés aux temps anglais. Il appelle à la rescousse Henri Estienne et même Zamenhof l'inventeur de l'espéranto, pour conclure "Je ne voudrais pas être mal compris"
Le clou du livre est le voisinage entre 165 - Volare de Domenico Modugno : "Attention à ne pas voler trop haut" ; "Quelques doux murmures intimes, un instant d'exultation, puis un intermède récitatif et enfin une touche de mélancolie qui se passe de traduction." ; et 171 - London Calling des Clash "Le punk rock est la musique de la frustration et de la colère (mais les Clash font exception) la leur est celle du désespoir" "Clash se moque de the Fool on the Hill des Beatles et vous allez prendre un coup de matraque sur la tête pendant que vous chantez Hey Jude"
En lisant ces commentaires après avoir réécouté ces chansons on se prend au jeu de la découverte, genre : je n'avais pas vu tout ça dans cette chanson, j'y retourne immédiatement.
Vous l'aurez compris, Dylan déploie sa connaissance de la musique rock des dernières décennies mais aussi sa connaissance de l'histoire, de la littérature, de la philosophie européennes. Ses commentaires sautent du coq à l'âne, manient l'humour et l'ironie, mais nous ramènent toujours à l'essentiel la chanson qui leur tient lieu de support.
"Strangers in the night est la chanson du loup solitaire, de l'étranger, l'outsider, l'oiseau de nuit (...)"
La prochaine fois je vous parlerai de 237 - Blue Moon, et de 195 - My Prayer.
Et aussi de toutes les autres, 66 au total...
Merci
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J'ai d'abord été un peu déçu par ce livre,
parce qu'il ne comportait pas les textes des chansons dont il parle.

Bien sûr certains titres m'étaient connus : blue suede shoes, tutti frutti, strangers in the night, my prayer, on the road again, etc… mais de là à en connaître les paroles…ou simplement de quoi elles parlent…

Mais le livre est beau avec sa couverture en carton fort, sa mise en page impeccable et ses illustrations soignées.
Et puis il y a Bob Dylan qui nous raconte.

Les chansons d'abord, puis ce que pour lui elles disent de leurs interprètes, de l'Amérique, des temps qui changent ou des humains qui eux restent ce qu'ils sont.

La plume de Bob Dylan, tout en précision et en ironie, nous charme encore et toujours par sa pertinence et son humour, mais aussi par son immense érudition.

Ce portrait de « ecce homo » que dresse Bob Dylan est finalement un autoportrait de l'artiste en philosophe.

On le retrouve tel qu'en lui-même, irrécupérable (au sens où il ne peut être l'objet (ni le sujet!) d'aucune récupération idéologique).

Le vagabond inclassable, l'éternel rebelle qui mécontente tout le monde : ceux qui détestaient ses chansons quand il occupait le devant de la scène contestataire, les fans qui ne lui pardonnèrent pas de tracer sa route dans d'autres directions pour ne pas se laisser enfermer dans le rôle de porte étendard qu'on lui avait taillé sur mesures, ceux qui lui reprocheront toujours de viser et souvent d'atteindre la perfection, sans parler des cris d'orfraies des grincheux que l'attribution du prix Nobel a scandalisés.

Bob Dylan tel qu'en lui-même « ni tout à fait le même ni tout à fait un autre », si je peux me permettre, suit sa route, lucide et exigeant, sans oublier de jeter un petit coup de pied par derrière, à la Charlot, à tous les imbéciles ; et ni son regard ni sa plume ne déshonorent, loin s'en faut, le prix Nobel qu'il a reçu.
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critiques presse (1)
LaPresse
22 décembre 2022
Le ton de ces deuxièmes parties m’a fait penser à ces mille fois, à l’époque où je traînais avec des critiques musicaux, où on m’étalait des connaissances inutiles, mais amusantes, sur des chansons. Et c’est sûrement dans cette rencontre du lyrique et de l’historique que se trouve le poids de cet essai.
Lire la critique sur le site : LaPresse
Citations et extraits (3) Ajouter une citation
In the Elvis’ myth, it’s easy to paint Colonel Parker as Judas tossing silver into the one-armed bandits thirty pieces at a time, but it’s important to remember that there would have been no King to be brought low without the Colonel’s hard work and unwavering faith from the beginning.

[Dans la légende d'Elvis, il est facile de dépeindre le Colonel Parker comme un Judas jetant les pièces dans les jackpots par paquets de trente, mais il est important de se souvenir qu’il n’y aurait pas eu de King à rabaisser sans le dur travail du Colonel et sa foi inaltérable depuis les débuts.]
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Little Richard is anything but little.

[Little Richard -le petit Richard- est tout sauf petit.]
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Si nous voulons voir un criminel de guerre, il n'y a qu'à se regarder dans la glace.
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