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EAN : 9782343089300
528 pages
Editions L'Harmattan (06/04/2016)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
Le vodoun masque-t-il une autre réalité ? Une réalité totalement différente de celle qui est visible, bruyante, intempestive… ? Telle est la conviction de l’auteur qui nous propose une voie d’accès à ce vodoun des profondeurs ; celui qui ne relève pas d’une religiosité mais d’un tout autre paradigme, celui de la raison.
Un paradigme qui gouverne une pédagogie active, située totalement hors du champ religieux, et entièrement dans le magistère de la raison, ... >Voir plus
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
LE BOUC DU ROI.
… Il est question d’un pays, un pays quelque part… autant dire que nous sommes dans l’universalité pour le problème abordé ici aussi. Le roi du pays, certains disent que c’est le roi Mêtolofi, envoie un jour son héraut parcourir les chaumières de son royaume pour convier ses sujets ; tous doivent se rendre au pied du grand baobab, celui sous lequel se tient le monarque entouré de sa cour face à ses sujets chaque fois que les affaires du pays nécessitent une discussion et l’information du peuple ; chaque fois qu’une colère doit être partagée pour s’apaiser ; chaque fois que les peurs, la crainte des souffrances à venir exigent la présence de tous pour le réconfort de chacun.
L’assemblée se tint un jour de marché après que chacun eut fini de traiter ses affaires ; le roi le voulait ainsi, avant que ne disparaisse le soleil et que ne tombât la nuit. Mêtolofi parcourut du regard la foule silencieuse qui se tenait devant lui. D’un mouvement lent de la tête, le regard alla de droite à gauche ; puis, la tête revint en sens inverse et alla le plus loin possible à droite... Quelques personnes dans l’assemblée crurent déceler un léger sourire sur le visage du monarque, tous notèrent que le roi avait la mine réjouie. A ses pieds, il y avait un bouc debout sur ses pattes, un grand bouc blanc… trop grand, selon certains pour sa nature. Aucune corde n’entravait l’animal, on aurait dit que la bête était chez elle… dans son élément… entourée des siens. Comme le roi, l’animal regardait la foule, de droite à gauche, puis, de gauche à droite... Les courtisans s’en tenaient à distance respectable, mais pas trop loin, afin que le monarque ne pensât qu’ils s’éloignaient de lui, leur maître. Mêtolofi jeta un regard au bouc impassible… il leva ensuite la tête pour haranguer la foule : "Vous êtes mon peuple ! Vous êtes mon bien ! Vos chaumières et vos maisons sont à moi… comme chacune de vos personnes ! Vos pensées, vos paroles et vos actions m’appartiennent également… Quand elles sont bonnes et me sont agréables, je me réjouis ; parfois, je vous en récompense… Aujourd’hui, je vais aller plus loin… plus loin dans la possession de mon bien… plus loin dans le contrôle de mes gens… plus loin pour tout savoir de vos pensées, de vos paroles et de vos actes. Pour cela, voici mon bouc ! Ce n’est pas n’importe quel bouc… non ! Le mien peut entendre des choses qu’aucun d’entre vous ne peut entendre. Il peut voir aussi bien de jour que de nuit ; voir des choses qu’aucun de vous ne peut percevoir, mon bouc le peut ! Par lui, je saurai tout sur vous ! Je connaîtrai toutes vos pensées et toutes vos actions, tout ce que vous direz et tout ce que vous ferez… de jour comme de nuit ; chez vous ou en dehors de chez vous, que vous soyez en voyage, que vous soyez seul ou que vous soyez entre vous. Je saurai qui sont vos amis et qui sont vos ennemis… Plus rien sur vous tous ne pourra plus m’échapper ; rien… grâce à mon bouc ! »
« Ah oui ? » cria quelqu’un dans la foule. « Tout à fait ! » lui rétorqua, très sûr de lui, le monarque qui l’avait entendu sans le voir. L’homme s’en alla en maugréant : « Moi Lêgba, je saurai faire ce que je veux, s’il me plaît, sans que ton bouc ne le sache ! » Chacun regagna sa demeure, pensif, inquiet ; quelques-uns ruminaient une colère sourde, une colère impossible à laisser éclater.
Lêgba qui assistait à l'assemblée alla trouver Fa ; comme à son habitude, le dieu des croisements [dieu de l’intelligence et de la réflexion] était dans un état d’excitation extrême ; comme à son habitude à lui aussi, Fa [dieu de l’art divinatoire] était d’un calme olympien ; il dit simplement :
« Je t’attendais ! »
« Ah oui ! Parce que tu n’as pas écouté comme moi ? Tu n’as pas entendu le roi Mêtolofi parler de son bouc ? Tu m’attendais pour dire ton indignation… »
« A quoi bon, tu le fais si bien ! » répliqua Fa drapé dans sa sérénité.
« J’ignore si je le fais bien, mais je le fais… et je le ferai encore et toujours ! Je le ferai tant qu’on n’aura pas compris… »
« Je sais... Dis-moi, et si Mêtolofi était honnête… »
« Non, ça n’a rien à voir ! Personne ne peut être honnête pour tout, en tout, en tout temps et en tout lieu… non, personne ! Non, car l’homme doit exister par lui-même et non par l’honnêteté des autres. L’homme doit exister par lui-même et non par ce que, qui que ce soit d’autre veut bien lui concéder… Il est inacceptable que quelque part sur cette terre, il y ait quelqu’un qui puisse tout savoir des autres humains. Il est inacceptable que dans un pays, il y ait quelqu’un, fût-il le roi, qui sache tout, absolument tout, des habitants de ce pays. C’est inacceptable, et moi, Lêgba, je ferai tout pour qu’il n’en soit jamais ainsi... Jamais ! En effet, accepter cela et laisser faire serait ouvrir la voie à la sclérose de la pensée, cette extraordinaire boîte à outils que les hommes et nous avons construite pas à pas, millénaire après millénaire, souffrance après souffrance, interrogation après interrogation… Cette boîte à outils fruit de notre intelligence, cette boîte à outils fruit de nos questionnements ne peut vivre, prospérer et nourrir l’homme pour en faire l’homme que si elle demeure constamment en mouvement, que si elle se renouvelle indéfiniment, et cela, seul l’homme qui est libre de penser, libre de choisir, peut le garantir. Accepter le bouc, ce serait admettre que l’homme n’est rien d’autre qu’un objet, un poids mort, un être dépersonnalisé, sans âme… ce serait nier tout son parcours depuis les balbutiements au sortir du Commencement jusqu’à aujourd’hui ; pire : cela met en danger son devenir ; cela met en péril sa marche vers l’homme, celui qui doit être ! Il faut que chacun sache qu’il n’y a de pensée que libre ! Alors, non ! Il faut absolument qu’il n’en soit jamais ainsi ! Donc le bouc… »
« Alors, fais un sacrifice ! »
« Quel sacrifice exiges-tu ? »
« Je vais fouiller Fa pour toi. »
Ce qui fut fait aussitôt ; le dieu trouva le signe Di Guda.





Di Guda

Fa demande à Lêgba d’aller acheter du tissu, c’est une partie du sacrifice. Il faut qu’il se procure quatre pièces de tissu, une de couleur rouge, une autre de couleur blanche, une troisième de couleur bleue et enfin, une quatrième de couleur noire. Lêgba doit modeler également quatre têtes en argile, chacune coiffée d’un chapeau fait dans un morceau des tissus qu’il a achetés, chaque effigie a ainsi sa couleur de coiffe ; c’est la seconde partie du sacrifice. Les quatre têtes affublées chacune d’un des couvre-chefs doivent être enterrées par le dieu aux quatre points cardinaux. Fa demande en outre à Lêgba d’apporter une mesure d’alcool et une mesure d’eau.
« Ce sera fait ! » répondit Lêgba sur un ton de défi puis il s’éclipsa.
Dans le pays, les hommes et les femmes voyaient passer parfois le bouc blanc sur les marchés, dans les villages, et même en pleine campagne… la bête déambulait sans se presser, sans craindre le voisinage comme s’il n’existait pas… sans craindre la colère des hommes qui se savaient surveillés... A son approche, le silence s’installait au sein des attroupements, la gêne aussi ; quelques personnes fuyaient même et allaient chercher refuge derrière un arbre ou une case tout en épiant l’animal d’un œil inquiet.
Lêgba fit ses emplettes, il revint les apporter à Fa après s’être acquitté de sa part de rituel : confectionner puis enterrer les effigies aux quatre points cardinaux. Le dieu lui donna rendez-vous au prochain jour de marché. « Dans trois jours donc ! » s’assura Lêgba ; Fa confirma d’un mouvement de tête.
Au jour convenu, tôt le matin, Lêgba se présente au domicile de Fa, dit la légende ; celui-ci lui montre un couvre-chef qui était posé sur une table, il est réalisé avec les morceaux restants des quatre calicots que le dieu des croisements avait fournis. Le chapeau comporte quatre côtés, façonnés chacun avec l’un des morceaux de tissu, il a donc quatre couleurs, mais un observateur n’en voit qu’une à la fois, celle de son point de vue sur le porteur : blanche, rouge, noire ou bleue, selon sa position. Affublé de son couvre-chef multicolore, Lêgba se met en route pour le marché, non sans avoir versé auparavant, selon le rituel, quelques gouttes d’eau, puis d’alcool sur le sol en quittant la demeure de Fa ; « ceci est fait pour la paix de l’âme de ceux qui vont périr aujourd'hui ! » dit-il en sortant.
En approchant du marché, Lêgba note qu’il y a foule et qu’elle est aussi bruyante que les semaines passées, les hommes et les femmes sont aussi épanouis qu’avant l'entrée en scène du bouc ; il se dit alors que la présence de la bête dans le pays n’a pas inhibé la jovialité et l’enthousiasme du peuple ; cela lui fait plaisir. Sa joie est cependant de courte durée, car, il remarque la présence de l’animal par lequel le roi veut s’assurer la docilité des habitants. La bête déambule, insouciante en apparence, jetant un regard par-ci et un regard par-là. Le bouc voit approcher un homme qui porte un chapeau noir ; de dos, quand l’homme le dépasse, il le voit avec un chapeau blanc ; le dieu tourne à gauche dans une allée puis s’arrête devant un étal comme un client ordinaire, Lêgba apparaît à l’animal comme une personne qui porte un couvre-chef rouge, et quand le dieu change à nouveau de direction pour s’adresser, en allant à droite, à un autre marchand, le bouc voit un homme portant un couvre-chef bleu. L’animal en conclut qu’il vient de voir quatre personnes occupées à leurs emplettes ; il poursuit son chemin et ses inspections. De loin, Lêgba aperçoit la première épouse du roi, elle quittait le marché, il la rattrape en quelques enjambées et lui tranche la tête d’un seul coup de machette ; plusieurs personnes ont vu la scène, le bouc aussi ; aussitôt, l’animal va annoncer à Mêtolofi l’assassinat de sa première épouse, il ajoute que le crime est le fait d’un homme qui porte un chapeau blanc. Le roi envoie sa police sur le marché sous la direction de son principal ministre, cette petite troupe
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