Nous allons aujourd'hui faire un peu d'archéologie, aux deux sens du terme, puisque cette histoire nous fait vivre l'un des fantasmes certainement les plus répandus chez les archéologues, remonter le temps, mais aussi parce que j'avais ajouté ce
Fatum à ma PAL lorsque notre
Jean-Daniel BREQUE national en avait fait mention dans son avant-propos bibliographique de
la patrouille du temps, c'est à dire il y a très longtemps.
Le roman raconte les aventures d'un homme du XXe siècle propulsé à l'époque de la mythique Atlantide !
Malheureusement, ce petit retour de lecture ne fera que vous mettre en garde au sujet de ce roman qui n'est pas de la grande SF (on y retrouve évidemment les facilités habituelles de l'époque), vous devrez plutôt vous attendre à une sorte de conte gentillet, un beau voyage dans le bassin méditerranéen de l'Antiquité, très poétique.
Je l'ai souvent trouvé un peu lourdeau, didactique, avec de nombreuses ruptures de l'immersion, et un problème de chronologie externe sur lequel il vaut mieux ne pas s'arrêter, mais tout de même surprenant de la part de
Poul ANDERSON, ainsi qu'au contraire des raccourcis bienvenus nous épargnant des explications formelles, montrant par là qu'il fait tout de même confiance à l'intelligence de son lecteur.
A noter également que les révélations sont téléphonées plusieurs chapitres à l'avance, il n'y a donc guère de surprises à attendre...
Le récit me fait plus penser à une mosaïque de tronçons de vie/culture/époques différentes, juxtaposées sans autre liant qu'un agréable paysage antique, auquel il manque de l'épaisseur selon mes goûts, les scènes se succédant sans écho ni tension, hormis peut-être celui du destin que les personnages tentent timidement de modifier.
Bref, une gentille promenade dans l'Antiquité, presque une visite guidée.
Il faut d'ailleurs attendre la moitié du livre pour que se dessine enfin un but, et encore, les moyens choisis pour l'atteindre ne sont pas logiques...
Autant vous l'annoncer tout de suite, l'arrivée et la découverte de l'Atlantide est une grosse déception !
Tout d'abord, la traversée maritime ne nous est même pas racontée, le personnage n'évoque aucune impression, même de loin, et une fois qu'il y arrive, il n'a d'autres mots que le qualificatif de "charmant"... vraiment le gros soufflé qui retombe !
Poul ANDERSON a choisi une Atlantide très ancrée dans une réalité "historique", bien différente des Atlantides fantasmées que nous sommes habitués à déguster.
L'histoire pourrait d'ailleurs très bien se passer ailleurs que dans l'Atlantide, cela n'aurait absolument rien changé !
Il y décrit les habitats, les détails de la vie quotidienne, tels les vêtements, les coiffures, les accessoires ou le mobilier, et l'on a plus l'impression de lire de l'ethno-histoire que de la SF, avec un poil de sociologie (plutôt dans le dernier quart).
On est même plusieurs fois surpris, voire sceptiques, des réactions peu crédibles qu'il attribue à ses personnages, par exemple en faisant apprécier à cet architecte du XXe siècle un vin de l'antiquité, alors qu'il serait certainement aigre et aqueux.
Au bout de quelque temps, les intrigues politiques - pourtant à peine survolées jusque-là - s'effacent complètement... À un autre moment, ce sont plusieurs journées de fête nationale qui sont décrites en quelques lignes laconiques, oubliant complètement le volcan apocalyptique jusque là omniprésent... étrange construction du récit qui me laisse perplexe, on en vient à se demander si
Poul ANDERSON sait où il veut nous conduire, ce qu'il a vraiment envie de faire de cette histoire et de cette situation.
Au-delà de cette balade et de ces descriptions, l'aspect intéressant du roman demeure dans sa relecture du mythe de Thésée/Ariane et du Minotaure, allégorie politique ma foi très convaincante et satisfaisante.
On a aussi droit bien sûr aux questions habituelles concernant le destin, l'altération de la ligne temporelle, les anachronismes, etc...
Il en reste qu'avec son écriture simple, l'histoire se lit très vite, et peut être appréciée comme une belle balade poétique dans l'Antiquité méditerranéenne.
L'histoire se termine par un épilogue qui ne dit pas son nom, vite expédié et plein de facilités.
Tirez le rideau, il n'y a plus rien à voir.