Il est toujours plaisant de se plonger dans la poésie d'
Aragon, surtout lorsqu'elle nous offre une flânerie dans ce Paris qu'il aimait tant. Et puis, il y a la présence d'
Elsa Triolet, son grand amour. Les deux sont liés - je veux parler d'
Elsa et de Paris- puisque
Aragon l'a rencontrée pour la première fois au café de la Coupole où se croisait la faune des surréalistes.
On comprend mieux ce titre évocateur : « Il ne m'est de Paris que d'
Elsa »
La nostalgie est à chaque coin de page, une nostalgie d'un Paris ancien, d'un Paris peuplé de fantômes. le Paris d'
Aragon, c'est aussi celui des petits matins lorsque la ville besogneuse se réveille. Mais toujours Paris évoque une certaine idée de la liberté.
« Paris s'éveille et moi pour trouver ces mythes
Qui nous brûlaient le sang dans notre obscurité
Je mettrai dans mes mains mon visage irrité
Que renaisse le chant que les oiseaux imitent
Et qui répond Paris quand on dit liberté. »
Alors, qui de Paris ou bien d'
Elsa est le plus présent dans ce recueil ?
Elsa « reine de cette ville » apparait ici en filigrane.
Elsa, muse et amante d'
Aragon, lui était indispensable, mais la ville de Paris reste immuable et c'est aussi la ville de sa jeunesse.
« Lieux sans visage que le vent
Ô ma jeunesse rue de Vanves
Passants passés printemps d'avant
Vous me revenez bien souvent. »
C'est aussi le poète lui-même que l'on retrouve dans chaque vers quand il évoque tous ces lieux qu'il a fréquentés,
Le poète évoque aussi les fantômes de ceux qui ont célébré Paris et
Aragon rend hommage à Madame Colette,
Baudelaire, Chagall ou encore Fernand Léger. Mais on trouve aussi ses contemporains comme
Francis Carco dans « Quai de Béthune »
Au-delà de ses souvenirs de jeunesse, de ses rencontres amoureuses ou amicales,
Aragon nous livre une part intime de lui à travers son évocation d'une ville si chère à son coeur. Et il le dit ainsi : « Arrachez-moi le coeur, vous y verrez Paris. »
La postface érudite de
Sylvie Servoise permet de mieux décrypter cette poésie complexe d'un grand poète et écrivain engagé qui nous a quittés en 1982 mais dont l'oeuvre reste immortelle.