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EAN : 9782707177520
600 pages
La Découverte (24/10/2013)
4.72/5   20 notes
Résumé :
En 1914, Louis Barthas a trente-cinq ans. Tonnelier dans son village de l'Aude- Peyriac-Minervois-, il est mobilisé au 280e régiment d'infanterie basé à Narbonne. Il fera toute la guerre comme caporal. Il connaîtra le secteur sinistre de Lorette, Verdun, la Somme, l'offensive du Chemin des Dames; la boue, les rats et les poux; les attaques au-devant des mitrailleuses et les bombardements écrasants; les absurdités du commandement, les mutineries de 1917, les tenta... >Voir plus
Que lire après Les carnets de guerre de Louis Barthas, tonnelier, 1914-1918 : Edition du centenaireVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Un témoignage unique de la vie d'un poilu en la première guerre mondiale.
Unique par la tenue quotidienne de son journal d'un homme méthodique et scrupuleux, décrivant sa vie de simple soldat, au mieux caporal, au front.
Unique par cette destinée exceptionnelle d'avoir traversé l'entièreté de cette guerre, en fréquentant quelques uns des plus terribles champs de batailles d'alors et d'avoir survécu d'une pièce et reprendre sa vie après démobilisation.

Sa vie personnelle...Louis Barthas ne s'étend pas dessus. Il aura eu peu de permissions durant son incorporation, mais, pudeur de poilu conscient de survivre là ou tant d'autres disparaissent, il ne s'apitoie pas sur son sort de mari et père éloigné de sa famille ; il constate, avec peu de mots, simples.

Il réserve ses diatribes envers les officiers hautains, bien au chaud et mangeant à leurs faims, les "embusqués" ne montant jamais au front, et jalousés par les combattants. Sont aussi relatées quelques relations difficiles avec la population rurale, certains voyant quelquefois ces appelés comme des pillards.
De fait ces symboles de la France en guerre n'étaient paradoxalement pas toujours estimés à l'aune des sacrifices exigés d'eux, tant par leur hiérarchie militaire, les gendarmes ou la population de "l'arrière".

Les évocations des difficiles conditions de vie des soldats sont particulièrement prenantes tant en première ligne qu'au repos (qui n'en a que le nom), subissant les éprouvantes conditions météorologiques et les bombardements d'autant plus durement que les abris sont précaires ou inexistants.
A cela s'ajoutent les exercices militaires ou les corvées laissant peu de temps de récupération. le chroniqueur finira la guerre dans un état d'épuisement extrême.

Au plan politique Louis Barthas, enfant du peuple, instruit, se revendicant socialiste issu de l'un de ses bastions "rouges" historiques, ne manque pas de fustiger régulièrement la hiérarchie militaire peu soucieuse du bétail humain, corvéable à volonté, chair à canon, neanmiins disponible sur le terrain.

Même si ces réflexions et appréciations sont frappées du sceau de la lutte des classes, elles expriment bien le ressenti et le ressentiment des valeureux poilus.

Avec une ironie certaine le narrateur met bien en exergue l'exagération des communications officielles sur la valeur de l'armée française alors que lui, sur le terrain, décrit beaucoup d'improvisations. La communication, déjà, au centre de l'action politico-militaro-mediatique.

Nous n'avons malheureusement pas d'éléments de la vie d'après l'armistice de Louis Barthas, valeureux citoyen pris dans un maelström qui a dépassé toute une époque, ainsi qu'une société européenne dominatrice à son apogée et marquant depuis lors son déclin ; son témoignage d'un survivant de l'absurde, tenu au jour le jour pourrait être inclus sans problème dans les cours d'Histoire.
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Jean Norton Cru a contrôlé la véracité des témoignages publiés par des combattants de la Première Guerre mondiale. Il a analysé 304 titres à l'aune de son expérience de la guerre, mais aussi d'une abondante documentation (cartes d'état-major, journaux de marche…). Il a estimé que Barthas était un témoin fiable. D'ailleurs, Norton Cru considérait qu'au delà du grade de capitaine, on ne pouvait vraiment avoir connu la guerre.

On écrivait bien à cette époque avec un simple certificat d'études ; 19 carnets, 1732 pages recopiées à la plume et à l'encre violette à partir de feuilles cousues entre elles et parfois un peu mangées par les rats ou couvertes de boue, écrites du 04 août 1914 au 14 février 1919.
Caporal rétrogradé simple soldat, Louis Barthas est resté 54 mois sous les drapeaux. Il dit avoir eu de bonnes intuitions de survie pour revenir vivant et entier.
Son livre est dense, critique à l'égard de la guerre et des officiers. Il montre la résistance passive ou active aux ordres des officiers zélés, planqués et vivants dans des conditions de confort en regard de celles décrites pour "la chair à canons". Il montre la ruse des chefs pour faire "monter" les hommes en première ligne. Il explique que les soldats feront un détour de 20 kms car l'officier de guidage était à bicyclette et préférait rouler sur la grande route plutôt que sur le chemin de traverse!
Il narre diverses expériences originales : celle de la réinsertion de jeunes petites frappes volontaires pour échapper à la prison, celle des révoltés russes qui chantent l'Internationale après la révolution, celle des coups de mains faits dans les tranchées ennemies par des indociles, des fortes têtes, des punis.
L'écriture est moderne, elle donne une force et une actualité prégnante et acide à ses propos. Ainsi, je citerai les dernières lignes de son ouvrage : "Souvent je pense à mes très nombreux camarades tombés à mes côtés. J'ai entendu leurs imprécations contre la guerre et ses auteurs, la révolte de tout leur être contre leur funeste sort, contre leur assassinat. Et moi, survivant, je crois être inspiré par leur volonté en luttant sans trêve ni merci jusqu'à mon dernier souffle pour l'idée de paix et de fraternité humaine". Quelle leçon !

Témoignage indispensable dans une bibliothèque des livres sur la "grande" guerre.
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Quel choc, que ce témoignage!
Certes, j'avais déjà lu différents livres sur la "Grande Guerre " mais aucun ne m'avait apporté autant d'informations sur la situation des simples soldats et sur leur vie pendant cette guerre.
Ils étaient moins bien traités que les chevaux, pire que des esclaves.
On peut se demander pour quelles raisons, il n'y a pas eu davantage de mutineries.
Ces soldats souffraient du manque de nourriture. Ils pouvaient rester trois jours sans être ravitaillés tout en combattant. Ils devaient également supporter la crasse, les poux, les exercices de combat, les ordres et les contre-ordres des officiers qui n'avaient aucun respect pour leurs troupes. On leur octroyait de très rares permissions ou moments de détente.
Même pendant les phases de repos, les conditions d'accueil étaient misérables. Pas question de dormir dans un lit, le plus souvent ils couchaient à même le sol, sans feu, dans le froid en compagnie des rats qui venaient dévorer le contenu des musettes.
Leur vie dans des tranchées, non étayées, était insupportable. L'eau, la boue les envahissaient et obligeaient les soldats à les reconstruire indéfiniment.
Combattants, blessés et morts vivaient souvent entremêlés, car les services de santé étaient plus que dépassés.
À la moindre peccadille, les soldats passaient en jugement et écopaient de corvées supplémentaires, de prison s' il y en avait une à proximité. Malheur à celui qui allait consulter le médecin, il était immédiatement renvoyé au combat car considéré comme bien portant.
L'état-major était commandé par des généraux totalement inconscients, qui ne respectaient pas la vie humaine. Que de kilomètres faits à pied, ces malheureux soldats ont-ils parcourus, souvent pour rien car il fallait revenir au point de départ.
Je pense que le livre du tonnelier Louis Barthès est certainement l'un des plus importants témoignages sur cette guerre qu'il a effectuée dans sa totalité et dans les plus grandes batailles.



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Comment ne pas être ému aux larmes en achevant la lecture de ces carnets de guerre de Louis Barthas. 4 années de guerre, 4 années de souffrance vécues et racontées au quotidien par un soldat du front qui,
à aucun moment, au coeur de ce véritable enfer que fut la guerre des tranchées, ne succomba ni à la barbarie, ni à la haine, ni à la folie.
Immense respect pour Louis Barthas, homme humble et lucide comme bien d'autres autour de lui, témoins, acteurs et victimes de ce chaos innommable, qui surent préserver leur humanité en dépit des ordres absurdes qu'ils recevaient et la violence insoutenable des combats.
Beaucoup de grands livres ont été écrits sur la guerre de 14/18, il en est de même pour ces carnets de guerre de Louis Barthas, tonnelier, qui méritent tout autant la plus grande attention et le plus grand respect.
Cette oeuvre écrite sans prétention, sans emphase et avec une profonde lucidité est, sans conteste, d'une grande valeur historique, littéraire et humaniste.
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Notre-Dame de Lorette, Verdun, la Somme, des noms où Louis Barthas a aussi connu, dans sa chair entre 1914 et 1919, quand il a enfin été libéré de ses obligations militaires. de ces années, il a ramené 19 cahiers, soit 1 732 pages à l'encre violette, dont il a tiré « Les carnets de guerre de Louis Barthas, tonnelier, 1914-1918 » (2007, Editions La Découverte, 564 p.). le tout avec des croquis, des photos, et surtout une description, non pas des combats, à la Barbusse ou à la Genevoix, mais de la vie ordinaire de ces jeunes soldats, et des animaux, chevaux principalement. Tous traités en esclaves par des officiers supérieurs. Au dire du livre de Jean Norton Cru « Témoins » qui a analysé les récits publiés par les anciens combattants de la Première Guerre (2007, Presses Universitaires de Nancy, 727 p.) ou l'édition augmentée qui vient de ressortir (2022, Agone, 1128 p.), le livre montre et démontre la façon dont certains de ces récits écrits après coup contribuent à falsifier l'histoire. En particulier, il admet qu'au-delà du grade de capitaine, les officiers supérieurs n'ont pas connu la guerre. Cela rejoint ce qui est écrit dans les cahiers de Louis Barthas, ou de ce qu'écrit Edlef Köppen dans « L'ordre du jour » (2022, Tusitula, collection Insomnies, 452 p.). Ordres et contre-ordres au mépris même du simple bon sens, au mépris surtout de la vie des hommes envoyés à une mort certaine. « On a menti… mais je renonce à écrire tous les mensonge sortis de la bouche ou sous la plume de nos gouvernants ou journalistes » conclut Louis Barthas. de même qu'il remet en place l'hypocrisie des monuments aux morts. « Si les morts de cette guerre pouvaient se lever de leur tombe. Ils briseraient en mille morceaux ces monuments hypocrites, car ceux qui les ont érigés les ont sacrifiés sans aucune pitié ».
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Quelquefois il y avait échange de politesses, c'étaient des paquets de tabac de troupe de la Régie française qui allaient alimenter les grosses pipes allemandes ou bien de délicieuses cigarettes "made in Germany" qui tombaient dans le poste français. On se faisait passer également chargeurs, boutons, journaux, pain...
...On peut être certains que ce genre de fraternité s'est produit en plus d'un endroit, partout où la proximité des postes le permettait et que nos grands chefs, nos dirigeants, ne s'illusionnent pas : s'il n'y avait pas eu entre les tranchées une distance raisonnable, s'il n'y avait pas eu une barrière de fils de fer épineux c'est partout que les mains se seraient tendues, preuve entre mille que cette horrible guerre a été déchainée contre le consentement des peuples.
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Si nous souffrions ainsi stoïquement sans plaintes inutiles, qu'on ne vienne pas raconter que c'était par patriotisme pour défendre le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, pour que ce soit la dernière guerre et autres balivernes, c'était tout simplement par force, parce que victimes d'une implacable fatalité on devait subir son sort, chacun sachant bien que pris dans les dents terribles d'un formidable engrenage il serait broyé à la moindre tentative de velléité de révolte. Et perdant notre dignité , notre conscience humaine, nous n'étions que des bêtes de somme avec comme elles leur passivité, leur indifférence, leur hébétude.
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Lorette! Nom sinistre évoquant les lieux d'horreur et d'épouvante, lugubres bois, chemins creux, plateaux et ravins pris et repris vingt fois et où pendant des mois, nuit et jour, on s'égorgea, se massacra sans arrêt, faisant de ce coin de terre un vrai charnier humain et cela par l'obstination criminelle de notre état-major qui savait bien qu'une décision ne pouvait sortir de cette guerre en détail, ces attaques par petits paquets; mais ils avaient imaginé cette guerre d'usure croyant bêtement que les Allemands seraient à ce jeu cruel usés les premiers.
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Accablé de fatigue et de sommeil, je m'accroupis un instant. J'étais appuyé au cadavre carbonisé et le mourant vint s'appuyer sur moi. Je dormis entre un mort et un agonisant; cela ne me faisait aucune sensation: soumis à certaines épreuves, le coeur perd toute sensibilité.
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Videos de Louis Barthas (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Louis Barthas
L'adaptation graphique signée Fredman du récit le plus célèbre de la Grande Guerre.
Tonnelier originaire de l?Aude, Louis Barthas est envoyé au front dès 1914. Démobilisé en 1919, il met au propre ses notes prises tout au long du conflit. Militant socialiste et écrivain à son insu, le caporal Barthas a observé jour après jour la vie dans les tranchées : les rats, la boue, les bombes? Avec une plume extraordinaire et un étonnant sens de l?humour, il décrit les poilus livrés en masse à une mort anonyme, les chefs assoiffés de gloire, mais aussi les Allemands, qu?on appelle « ennemis » mais avec lesquels on fraternise à l?abri des regards. Publiés aux éditions Maspero en 1978, les Carnets de guerre de Louis Barthas sont devenus un classique, traduit dans de nombreux pays. Fredman met son trait au service de cette ?uvre unique. Composée d?extraits soigneusement sélectionnés, respectant l?esprit et la lettre des Carnets originaux, son adaptation graphique donne une nouvelle vie à ce témoignage exceptionnel.
Pour en savoir plus et feuilleter la bande dessinée ? https://bit.ly/2SyG8EQ
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