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EAN : 9782908958171
Art Books International (02/12/2002)
4.4/5   5 notes
Résumé :
Lorsque j'ai vu pour la première fois les personnages de Giacometti où pas un gramme de gras ne subsiste, des hommes et des femmes qui sont, comme dit René Char en 1954, "tels des décombres ayant beaucoup souffert en perdant leur poids et leur sang anciens", j'ai tout de suite pensé aux hommes que je voyais le mercredi dans un centre de consultation de maladies psychosomatiques. Même si certains n'étaient pas maigres, je les voyais comme dépouillés de tout, décharné... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Rencontre entre un artiste et un écrivain

Avant de se tourner vers le patrimoine des communes puis de sombrer, Jean-Luc Flohic a publié une vingtaine de ces rencontres, dans une collection nommée musées secrets.
Si tous les auteurs ont été aussi inspirés que Tahar Ben Jelloun, il faut se précipiter sur toute la série.

Ben Jelloun convoque non seulement Genet, qui lui a fait aimer Giacometti, mais encore Artaud, , Cervantes, Sartre, Beckett, Billie Holiday et peut-être toute l'histoire du XXe siècle, ses guerres et ses exils. Il se raconte, raconte le sculpteur (et peintre), mais aussi divague et réfléchit sur l'art et le temps, sur l'homme.

Ben Jelloun insiste sur le rôle de témoin de Giacometti, témoin en particulier de la souffrance. Mais : «Encore une fois n'oublions pas qu'il sculptait sans chercher à s'exprimer. Il faisait son travail sans le charger de message ou de mission. Il pensait simplement saisir et arrêter ce qui est fugitif. Or c'est une illusion. Il le savait et s'en amusait. »

Le livre conte (et compte) de nombreuses anecdotes et souvenirs , de Giacometti et de Ben Jelloun, l'auteur cherchant toujours à créer des résonances entre ces souvenirs et les oeuvres, ou au moins aux sensations qu'elles ont fait naître chez lui. Il n'y a pas, le plus souvent, de lien immédiat entre le texte sur la page de gauche et la grande photo de la page de droite, mais on a l'occasion et le plaisir de revenir feuilleter en arrière quand un mot rappelle une image. Il y a quelques descriptions de sculptures, parlant plus de la manière que du sujet, mais ce sont les mots plus que le fond qui me semblent importants dans ces phrases – le texte est donc l'écho de la sculpture.

Le livre est très opportunément complété par une biographie de Giacometti (il n'est pas question ici de défendre l'indépendance de l 'oeuvre par rapport à la vie de l'artiste), et par une liste de musées exposant les oeuvres.

Pris par le texte, peu à peu rempli de compassion pour les deux artistes, j'ai beaucoup aimé ces pages qui ont changé mon regard sur Giacometti. Puissent-elles avoir le même effet sur vous !
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
En revenant à son atelier à une heure inhabituelle, toutes ses sculptures se figèrent sur place, Giacometti remarqua que des choses étaient déplacées. Il crut un moment qu'un ami de passage avait touché les objets. Quand il se remit au travail il se rendit compte que le visage de Diego sur lequel il travaillait était en sueur. Il prit le chiffon et au lieu d'éponger le front de la sculpture, il le passa sur son propre visage qui était effectivement trempé par la sueur.
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Ce n'est pas le souvenir d'un étonnement marquant ni les traces d'une folie de passage. Le regard des êtres de Giacometti est plus que cela. C'est une mine d'information pour le romancier. Tout le monde se souvient du regard accaparé par l'horreur de cet enfant, future victime des nazis, qui, comme les adultes, lève les mains en l'air et attend. Ce regard est aussi célèbre que la Seconde Guerre Mondiale. Si on devait le sculpter, il faudrait d’abord le traduire, le lire dans sa violence et ce qu'elle implique. Pour cela une simple représentation d'un visage tuméfié par l'horreur n'est qu'une répétition dérisoire du tragique.
C'est par le détour, par la fiction, que cet épisode de la tragédie du XXe siècle pourrait être dit. Je ne sais pas si Giacometti a essayé d'être le témoin de son époque. A mon avis il l'a été pleinement et a été aussi d'une humanité encore plus large et meurtrie dans la vie quotidienne.
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Il existe dans la médina une rue si étroite qu'on l'appelle "la rue pour un seul",
Elle est la ligne d'entrée, longue et sombre. Les murs des maisons ont l'air de se toucher vers le haut. On peut passer d'une terrasse à l'autre sans effort. Les fenêtres aussi se regardent et s'ouvrent mutuellement sur des intimités. Si une seule personne peut passer à la fois, il est bien sûr exclu que les ânes, surtout chargés, puissent y trouver passage.
Cette rue est dans ma mémoire, ancrée comme un souvenir vif. J'en parle souvent même si elle est au fond insignifiante.
En observant les statues de Giacometti, j'ai su qu'elles ont été faites, minces et longues, pour traverser cette rue et même s'y croiser sans peine."
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Je ne sais pas si Giacometti a lu Cervantes, mais l'homme qui marche est un double silencieux de Dom Quichotte, pour une fois livré à sa solitude et à ses méditations profondes. Le personnage de cette fiction rejoint son double. Ils marchent l'un à côté de l'autre, ne se disent rien, mais leurs pensées s'agitent et communient à leur insu. De là à ce qu'ils rencontrent sur un chemin désert et gris l'ombre de Kafka, rêvant à l'impossible amour ; il y a juste un peu de hasard.
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Il existe dans la médina de Fès une rue si étroite qu'on l'appelle "la rue pour un seul". Elle est la ligne d'entrée du labyrinthe, longue et sombre. Les murs des maisons ont l'air de se toucher vers le haut. On peut passer d'une terrasse à l'autre sans effort. Les fenêtres aussi se regardent et s'ouvrent mutuellement sur des intimités. Si une seule personne peut passer à la fois, il est bien sûr exclu que les ânes, surtout chargés, puissent y trouver passage.
Cette rue est dans ma mémoire, ancrée comme un souvenir vif. J'en parle souvent même si elle est au fond insignifiante.
En observant les statues de Giacometti, j'ai su qu'elles ont été faites, minces et longues, pour traverser cette rue et même s'y croiser sans peine. Il me semble même les avoir rencontrées, alors enfant.
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Tahar Ben Jelloun vous présente son ouvrage "Les amants de Casablanca" aux éditions Gallimard. Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2755520/tahar-ben-jelloun-les-amants-de-casablanca
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