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EAN : 9782253080848
352 pages
Préludes (25/08/2021)
3.64/5   133 notes
Résumé :
Dans la famille Haddad, on sait qu’il faut beaucoup de courage et de détermination pour échapper à un destin que l’on n’a pas choisi. C’est ainsi que les parents ont élevé leurs sept enfants ; mais des quatre filles, c’est sur l’espiègle et intelligente Amal que leurs espoirs reposent : elle ira faire ses études en France, horizon lointain qui la fait rêver depuis toujours. Jusqu’au jour où la jeune fille croise la route du beau Youssef aux yeux vairons, un homme qu... >Voir plus
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Librement inspiré de son histoire familiale, Oublier les fleurs sauvages, premier roman de Céline Bentz nous conte le destin hors du commun d'une jeune femme, Amal, qui va se trouver déchirée entre deux pays. C'est également une plongée très intéressante dans le Liban des années 1980.
L'histoire débute l'été 1984 avec Amal qui vient de terminer sa première au lycée public de Saïda. Elle est la quatrième fille d'une fratrie de sept enfants et vit dans le petit appartement misérable situé à côté de la bananeraie la plus étendue de la ville, les aînés étant partis. Elle est issue d'une famille modeste, mais ses parents Dibba et Ahmad Haddad, bien que limités par leur illettrisme, tiennent à donner à leurs enfants la chance qu'ils n'avaient pas eue et à préserver leur scolarité à tout prix.
Invitée par Abbas, le plus âgé de ses frères, marié à une Française et vivant en Lorraine, à Nancy avec leurs deux enfants, pour venir y étudier, Amal est immédiatement séduite par la proposition et ne rêve plus qu'à ce départ.
Durant cet été, pourtant, elle rencontre Youssef, un beau jeune homme aux yeux vairons, un homme qu'elle n'a pas le droit d'aimer, car il est maronite et elle est sunnite (Les maronites étant les chrétiens catholiques orientaux et les sunnites, le principal courant religieux de l'islam)…
Ayant réussi à se faire admettre en filière scientifique, son voeu étant de devenir pédiatre, elle réussit son Bac en juin 1985. Un autre été au Liban et c'est le départ vers la France.
« Ce qu'il lui revenait de faire était immense, en traçant son chemin, elle devait relever la dignité bafouée des siens et leur prouver enfin que leurs batailles n'avaient pas été vaines, qu'ils n'avaient pas vécu pour rien ».
Ce récit extrêmement touchant nous fait effleurer les blessures éprouvées par ce peuple libanais qui tente de vivre malgré les guerres fratricides qui dévastent le pays, ces guerres qui ont conduit à l'effondrement de la classe moyenne et à une forte paupérisation de la population, ont contraint une partie de la bourgeoisie à l'exil, privant ainsi le pays de ressources humaines et financières importantes. Céline Bentz décrit bien la tension entre les différentes communautés de ce pays où les infrastructures ont été fortement endommagées. Je dois dire que j'ai eu souvent du mal à comprendre tous les tenants et aboutissants de cette guerre très complexe où se mêlent aspects politiques, religieux mais aussi quasi-mafieux.
Le Liban malheureusement en proie à la guerre civile depuis de nombreuses années avec certes, quelques périodes d'accalmie est un pays riche en traditions où la cuisine a une grande place et le talent de l'auteure a été d'intégrer la beauté des paysages à la noirceur de la guerre et à juxtaposer la pauvreté de la majorité à la richesse d'une élite.
Quoi de plus naturel donc, pour cette jeune fille intelligente tout en étant éperdument reconnaissante à ses parents pour les efforts qu'ils ont fait et font pour elle, que d'être tentée par cette liberté qui s'offre à elle, même si elle découvre bien vite le goût amer que recèle l'exil.
Mais son prénom Amal, signifiant Espoir ne lui assigne-t-il pas « cette mission sacrée et intimidante » qu'elle était née pour les racheter ?
Oublier les fleurs sauvages est un roman remarquable et très instructif sur le Liban et l'exil « ce prodigieux écartèlement entre deux langues, deux cultures, deux aires géographiques et deux appartenances ».
Merci à Babelio et aux éditions Préludes pour la découverte de ce roman à la belle couverture !

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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A Beyrouth, alors que la guerre n'en finit pas d'étendre le champ des ruines et d'endeuiller au quotidien les familles qui vivent au rythme d'un conflit dont les enjeux les dépassent, Ama rêve d'une autre vie, soutenue par ses parents, prêts à vendre leur dernière chemise pour qu'elle puisse accomplir son destin ailleurs. C'est avant son départ pour le pays qui doit lui assurer la réussite qu'elle croise sur son chemin Youssef, riche, beau, mais chrétien, donc ennemi juré !

On partage les doutes, les espoirs de la jeune fille, qui après son succès au bac devra partir vers la France dont elle apprend en urgence la langue ! Pas assez de bases pour tenter d'emblée le concours qui fera d'elle un médecin, elle doit refaire une terminale dans un environnement peu chaleureux, chez une belle-soeur dépressive et distante. Malgré tout, le lien avec son amant libanais se maintient.

L'histoire est prenante et on partage avec interêt ce que fut pour les civils cette guerre de territoire, les impliquant dans ses absurdités, en les touchant personnellement par les risques permanents de perdre un proche ou condamner un enfant à une infirmité majeure pour avoir posé le pied sur une bombe cachée. Impliqués aussi par l'injonction de devoir prendre parti et de ne pouvoir évaluer son prochain qu'en ami ou ennemi selon des alliances fluctuantes et dérisoires.

Le roman est assez court pour parler d'autant de sujets, et on a l'impression même d'une sorte d'accélération d'autant plus importante sur le récit avance. Ainsi le séjour d‘Ama à Paris pendant les années où elle étudie la médecine est balayé en quelques phrases et on aurait aimé en savoir un peu plus sur ce point.

Premier roman instructif et agréable qui aurait mérité un peu plus de développement.

Merci à Netgalley et aux éditions Préludes.




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Merci aux éditions Préludes et à Babelio pour ce roman reçu dans le cadre d'une Masse critique privilégiée
Céline Bentz est née d'un père français et d'une mère libanaise et c'est cette dernière qui lui a transmis sa culture, sa langue et son histoire. Ce premier roman aux personnages fictifs est donc fortement imprégné de son histoire familiale.

L'héroïne, Amal, est la sixième des sept enfants des Haddad, famille modeste de Saïda dans le Liban Sud. Élève brillante, elle passe son baccalauréat et ses parents mettent tous leurs espoirs
dans sa réussite. C'est décidé, elle partira à Nancy où vit son frère ainé et y suivra des études de médecine.
Amal est confrontée à la violence qui règne au Liban car l'histoire débute en 1984, en plein coeur de cette guerre civile responsable de nombreuses victimes civiles. Ses parents ont dû quitter le Golan annexé par Israël pour venir s'installer à Saïda dans un pays morcelé. Mais, malgré la guerre et les difficultés économiques, Amal veut vivre sa vie de jeune fille. Difficile lorsqu'on est élevé dans une famille musulmane où l'honneur des filles est un sujet sérieux. Elle croise un jeune homme chrétien, Youssef, dont elle tombe amoureuse. Cet amour interdit, elle doit le cacher à sa famille tout en préparant son départ vers la France. L'exil dans une région froide, auprès d'une belle-soeur dépressive et peu accueillante sera une épreuve pour la jeune fille mais aussi l'occasion de conquérir sa liberté et d'affirmer ses choix.
On s'attache à cette héroïne écartelée entre sa famille, l'honneur et la tradition d'un côté et un amour impossible et une existence plus libre de l'autre.

Dans la première partie de ce roman, l'auteure relate les évènements qui ont parsemé la vie du Liban durant les années 80, éclairant ainsi les opinions, la révolte et les peurs du peuple libanais pris dans les mailles d'une guerre civile complexe et impitoyable. C'est là l'intérêt de ce premier roman dont la faiblesse littéraire et le style sans relief m'ont déçue.
J'ai trouvé la seconde partie qui se déroule à Nancy, moins convaincante et le dénouement, trop abrupt, m'a laissée sur ma faim.
Sans doute ne suis-je pas la lectrice idéale pour ce genre de roman
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La famille Haddad est composée de Dibba la mère et Ahmad le père et leurs enfants, notamment Abbas qui s'est installé à Nancy avec sa femme professeur d'italien et ses deux enfants leur fils Yacine, militant actif au parti communiste, les deux filles ainées qui se sont mariées au Liban, Amal, la plus jeune des filles, veut faire des études et enfin le dernier enfant, trisomique.

Les parents ont été sommés de quitter leur maison et leurs terres dont ils ont été expulsés à la fin de la guerre des six jours, ce qui va leur laisser une blessure importante, le père étant obligé d'aller faire le ménage et nettoyer les toilettes pour faire vivre sa famille.

Illettrés tous les deux, Ahmad et Dibba veulent que leurs enfants fassent des études, s'ils en ont les moyens, quitte à trimer pour les aider.

On est en 1984, Amal est en première et va se trouver un travail pour aider la famille, dans une boutique tenue par un homme libidineux qui laisse traîner ses mains partout et la jeune fille est obligée de quitter le magasin. Elle fait la connaissance de Youssef, de confession maronite, dont elle commence à tomber amoureuse alors que leurs religions respectives ne voient pas cela d'un bon oeil. le Liban est en guerre, les rues ne sont pas sûres, les différentes parties ne se font pas de cadeaux, mais Amal s'accrocher et décroche son bac. Elle veut faire des études de médecine à Nancy où vit son frère Abbas et la famille est d'accord, malgré le déchirement, l'éloignement, mais Marie-Rose sa belle-soeur promet de l'aider tandis qu'en échange elle s'occupera des enfants…

Yacine milite de plus en plus activement au parti communiste ce qui le met en danger, et un jour il disparaît, enlevé et torturé…

Malgré sa culpabilité et le sentiment de trahir les siens Amal s'envole vers la France vers une nouvelle vie.

L'auteure nous raconte la difficulté des filles, au Liban, les mariages arrangés et les violences conjugales, les communautés qui peuvent cohabiter mais ne pas s'unir entre elles ce qui ne va pas en s'arrangeant… Elle parle aussi très bien de la pauvreté des gens, de leur chaleur, et de leur générosité : ils n'ont pratiquement rien mais ils se débrouillent par exemple pour faire une diner pour célébrer Amal.

J'ai admiré le courage d'Amal qui part dans un pays dont elle connaît à peine la langue, dans une ville où il fait froid l'hiver et où la magie de la première chute de neige se heurte à la difficulté de tous les jours. Elle réussit à refaire une terminale et passer le bac en France et surtout à faire ses études de médecine avec les difficulté du concours, le numerus clausus, le bachotage, le chacun pour soi des étudiants… Chapeau mademoiselle !

Céline Bentz explique très bien la douleur de l'exil la difficulté de vivre au Liban à cette époque de guerre, avec les bombes, les mines qui estropient des enfants qui jouaient tranquillement, les méthodes utilisées par chaque camp pour terroriser l'autre, les enlèvements.

Cette lecture a fait remonter beaucoup de souvenirs en moi, je me souviens l'enlèvement de Jean-Paul Kaufmann, Michel Seurat et leurs deux autres compagnons, et de l'anxiété qui régnait en France à ce moment-là : tous les soirs aux infos, le JT commençait avec leurs photos et le présentateur disait cela fait tant de jours qu'ils ont été enlevés et on est toujours sans nouvelles ainsi que du combat de Joëlle Kaufmann pour qu'on ne les oublie pas.

J'ai beaucoup aimé ce roman, qui est en fait l'histoire de la mère de l'auteure, si j'ai bien compris, j'ai aimé voir Amal grandir, évoluer, ses relations avec sa famille… C'est tellement difficile de leur dire qu'elle est tombée amoureuse d'un chrétien, qu'elle doit se cacher.

L'écriture est belle, sensuelle, j'avais le coeur rempli par l'odeur des fruits, de la bananeraie, des épices, de la cuisine et de la mer….

Une image qui m'a bouleversée parmi d'autres : Ahmad emmène sa fille au souk pour organiser le repas et lui offre un luth car il sait qu'elle aime la musique, en dépit des privations que cela va entraîner pour la famille.

Je mettrais un petit bémol : la fin est brutale et on ne sait pas ce que devient réellement Amal, on le devine mais j'aurais aimé en savoir plus. Mais, pour un premier roman, c'est réussi et j'espère qu'on aura l'occasion de retrouver l'auteure bientôt.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Préludes qui m'ont permis de découvrir ce roman et son auteure qui rend un bel hommage au Liban.

Si le Liban dans ces années vous intéresse et notamment les otages français, je vous conseille le livre de Marie Seurat, l'épouse du chercheur Michel « les corbeaux d'Alep » où elle évoque tout ce qu'elle a pu faire pour trouver les traces de son mari, les trahisons…

#Oublierlesfleurssauvages #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Céline Bentz, héritière d'une culture orientale transmise par sa mère, a désiré faire revivre une famille, une famille libanaise à l'image de celle dont le sang coule dans ses veines.
Attentive aux souvenirs que sa mère laissait difficilement échapper sur ses propres parents, sur son amie Salima, sur ses frères et soeurs puis sur la guerre qui ravageait son beau pays, elle a combiné ces instants vécus avec son imagination pour nous offrir cette page libano-française pleine de douleurs, de chagrins, de séparations mais aussi de chaleur orientale et d'espoir en l'avenir.

Dans la famille Haddad, Amal a dix-sept ans et pendant les longs congés scolaires de cet été 1984, elle gagne quelques sous chez un tailleur du centre-ville de Saïda. Bien que les aînés aient déjà quitté la cellule familiale, ses parents peinent à vivre correctement dans le chaos ambiant et ils désirent surtout farouchement pouvoir offrir à Amal les études qui lui ouvriront les uniques portes vers la liberté. Ils savent désormais que c'est loin de ce pays enlisé dans des combats incessants, dans un conflit changeant inlassablement de camps et d'intérêts, dans des promesses de pacification jamais tenues et des espoirs toujours déçus, qu'Amal trouvera les bases de son avenir. Elle ira à Nancy, chez son frère et sa belle-soeur, suivre des études de médecine selon son souhait.
C'est donc d'abord au Liban que nous faisons connaissance avec cette famille nombreuse. Les parcours des uns et des autres sont variés mais les filles semblent inévitablement tomber sous le joug de leur mari, au grand désespoir de la mère qui les aime tous profondément. Les parents sont sans fortune, sans instruction et c'est avec leur amour et des sacrifices qu'ils veulent donner toutes leurs chances à leurs enfants, sans toutefois y parvenir pour chacun.
Dans cette première partie, j'ai ressenti une grande frustration au niveau du contexte géopolitique qui est très complexe pour la néophyte que je suis. Les différents évènements secouant le pays sont justes nommés, comme récités, et manquent cruellement d'approfondissements que j'aurais jugé salutaires vu les difficultés à comprendre les motivations des uns et des autres.
Mais revenons à notre jeune Amal qui, au milieu de ses rêves de réussite, tombe subitement amoureuse du séduisant Youssef, un Chrétien, donc un amour annonçant plutôt l'orage, l'antagonisme entre maronite et sunnite. La peur de démériter dans le coeur de ses parents livrera combat avec ses sentiments et son envie de vivre cette passion naissante.

Ce sera ensuite le départ, laisser les siens dans l'inquiétude et les menaces permanentes liées à cette guerre. On ressentira chez Amal ce mélange de déchirement et d'impatience.
L'exil sera bien sûr douloureux même si c'est pour fuir une insécurité gangrenée de peurs et de cauchemars, pour fuir cette guerre sans fin. Même si c'est pour réaliser le désir longtemps ruminé d'accéder à une position sociale que tout le monde lui enviera. Les difficultés s'accumulent pour Amal, autour de la barrière de la langue loin d'être maîtrisée, avec un environnement qu'elle sentira comme oppressant loin de la chaleur de son foyer natal, avec la froideur de sa belle-soeur et les températures glaciales de l'Est de la France.

Le partage entre ces deux cultures, ces deux pays, amèneront inévitablement le sujet des origines, la sensation de trahir peut-être sa patrie dévastée, le sentiment de recouvrir son identité par une autre culture.
L'ascension sur l'échelle sociale reste le seul et l'unique objectif pour sortir du carcan de la condition féminine au Liban qui aurait dû enserrer la jeune fille mais dans ce roman la question du choix se pose ; est-ce celui d'Amal ou celui de ses parents ? Choisit-elle sa vie, son exil ? L'amour maternel peut-il être aussi une mainmise sur son destin ?

L'écriture de Céline Bentz, quoique très bien maîtrisée, est peut-être un peu trop formelle, d'où une sensation de monotonie qui m'a empêchée de saisir pleinement les émotions qui se bousculent chez cette jeune Libanaise. Ce premier roman reste cependant fort immersif dans cet univers libanais des années quatre-vingts, son environnement ravagé par les années de guerre et son réconfort puisé dans des mets savoureux qui égayent les moments difficiles.

Merci à Babelio et aux éditions Préludes pour cette rencontre enrichissante.
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Citations et extraits (35) Voir plus Ajouter une citation
Comment vivre sans le bruit de la mer, la chaleur du soleil, la générosité des arbres, sans sa langue, ces couleurs magnifiques, les couchers de soleil qu’elle ne voyait plus à force de les contempler. S’asseyant sous un mandarinier, elle resta une heure à ne penser qu’à la nostalgie qu’elle vivait déjà, par anticipation. Le calme du soir l’enveloppait, la clameur de la route était lointaine, elle avait envie de pleurer et de dormir ici, dans la douceur de cette nature domestiquée qui l’avait nourrie et consolée tant de fois.
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Partant de là, la guerre à tout prix n'avait plus de sens. La lutte, les idéaux, les grands combats des Musulmans comme ceux des Chrétiens devenaient vains. Extraire un ennemi de son milieu en estimant que c'était peut=être un homme de bien rendait impossible la systématisation et l'essentialisation qui justifiaient la guerre. D'une certaine façon, Youssef, Yacine et Salima avaient dû le comprendre et l'accepter en rejoignant un parti qui faisait si peu de cas des origines confessionnelles. Mais ce qu'ils n'avaient pas saisi pour autant, c'est qu'il était absurde de se poster quelque part pour tirer sur un combattant au seul motif qu'il portait le mauvais uniforme, ou le mauvais brassard. Considérer qu'il fallait prendre les gens un à un, pour ce qu'ils étaient - indépendants de leurs appartenances -, c'était un ces temps-ci devenir terriblement relativiste. Cesser de penser par assignation, c'était rendre l'action politique et militaire impossible, parce que, derrière tout militant, soldat, idéologue, croyant, pèlerin, se cachait un homme qui avait peut-être bien plus de valeur que les slogans et les couleurs qu'il arborait.
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il lui arrivait de fermer les yeux quelques instants, essayant de faire renaître en elle la chaleur caressante du soleil libanais, la saturation colorimétrique du ciel, de la mer et des fleurs. Elle aimait tant les fleurs, même les plus viles, celles qui poussaient au fond des caniveaux, au milieu des terrains vagues, des interstices improbables. En France, la fleur était domestique, elle obéissait à une volonté de planter, de cueillir et d'offrir. Tout était si peu spontané ...
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- Je m'en veux de vous quitter, tu sais ?
- Je le sais, ma fille, et tu ne devrais pas. Si je te reprochais ton départ, je serais un père indigne, car tu ne m'appartiens pas. Tu n'es pas ma chose, tu n'es pas mon objet. Le fait de t'avoir engendrée ne me donne pas le droit de propriété sur toi. Tu es l'enfant de la vie, l'enfant d'une puissance qui me dépasse et dont je n'ai été que l'intermédiaire.
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Au fond, les chiffres importaient peu. Personne ne saurait jamais vraiment combien ont mordu la poussière. Ce que chacun savait cependant, c'est qu'au moins un ami, un voisin, un frère ou un parent a disparu pendant les onze années de conflit déjà écoulées. Tout le monde connaissait quelqu'un, qui connaissait quelqu'un à qui une histoire abominable était arrivée, une histoire de renfermé, de sang, de sueur au vieux goût dégueulasse. Tout le monde connaissait quelqu'un qui connaissait quelqu'un qui n'était plus, avait disparu, avait été passé par les armes, s'était suicidé, s'était exilé.
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