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sur 604 notes
L'Aleph est le dernier texte, éponyme, du présent recueil de récits du type fantastique si cher à Borges. Ce volume se distingue par une grande variété d'approche de cet univers protéiforme  : biographie, rêve, glose, méditation, récit légendaire, spéculation sur un épisode de la vie d'un personnage historique. L'auteur oeuvre sans cesse sur des rapports de correspondance : le fini s'inscrit dans l'infini, 
 l'avers répond à l'envers, l'antonyme se dresse sur le chemin du synonyme. Les constructions narratives prennent souvent la forme de labyrinthes qui ne conduisent nulle part.

Jorge Luis Borges est un maître du cours récit spéculatif. Il allie érudition, inventivité, finesse de conception, espièglerie dans la mise en oeuvre. Ce n'est pas un pédant, il ne vous écrase pas d'un fatras pseudo scientifique, tout au contraire, il vous salue d'un clin d'oeil complice. Sans doute la plus grande figure de la littérature argentine. 
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L'Aleph est un recueil de nouvelles ecrites dans les annees 40-50 (?). Plutot que nouvelles, je devrais parler de contes fantastiques voire metaphysiques. On y retrouve des thematiques deja presentes dans d'autres recits, comme les variations sur le theme de l'infini, du temps, des labyrinthes. Chaque conte est tisse avec style, erudition (ou pseudo erudition, on ne sait jamais ce qui est vrai de ce qui est invente) et doigte. On ne sait jamais ou le chemin des mots nous mene mais on arrive souvent a bon port. le port qui donne sur la mer avec au loin la ligne d'horizon. Apres le point final, on reste la, le regard visse sur cette ligne qui separe l'ecume salee des idees et le ciel du mystere.

On pourrait poser des critiques a ces nouvelles, comme l'utilisation recurente du sceau de l'authenticite pour donner force au fantastique, la surabondances de references erudites (je ne suis pas tres erudi et j'en rate donc beaucoup !), le style parfois un peu hautain, … mais ces critiques n'ont pas annules mon plaisir de lecture. Je sais que j'y reviendrai. Je sais aussi que je ne conseillerais pas ces nouvelles les yeux fermes. Je vois milles raisons de ne pas rentrer dedans … mais chez moi, la magie a trop souvent opere. de nombreuses fois j'ai ferme ce livre, et je regardais autrement. Mon esprit etait autre, mon regard sur les choses etait eveille … un peu comme si ce livre etait l'Aleph, ce point de l'Univers ou on voit tout l'Univers de tous les points de vue …
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N° 1431 - Février 2020.

L'AlephJorge Luis Borges – Gallimard.
Traduit de l'espagnol par Roger Gallois et et René LF Durand.

Le titre tout d'abord évoque la première lettre de l'alphabet hébreux, elle-même issue de l'écriture phénicienne et on peut y voir une idée de début de quelque chose puisque, dans les autres alphabets cela aurait donné le A. En mathématiques c'est « Le nombre d'éléments d'un ensemble infini », une sorte d'idée d'α et d'ω. Dans cette nouvelle éponyme l'auteur nous confie que c'est « l'un des points de l'espace qui contient tous les points… le lieu où se trouvent sans se confondre, tous les lieux de l'univers ». Pour Borges on pourrait le définir comme le concept d'un savoir impossible où se croisent toutes les disciplines. Plus simplement c'est un ensemble de 17 nouvelles fantastiques, écrites par Borges à différentes périodes de sa vie dont chacune raconte une histoire distincte, soit à la première personne sur le ton de la confidence, soit sous la forme d'une histoire narrée par un témoin, avec des symétries, des antinomies, des préoccupations obsessionnelles propres à l'auteur. le concept d'oxymore est d'ailleurs présent dans ce recueil. Il est un écrivain réputé difficile qui donne à réfléchir, mais on y retrouve ses thèmes métaphysiques favoris, l'immortalité, la notion d'infini, l'existence de Dieu et sa difficile connaissance par l'homme, le bien et le mal, la vie, le labyrinthe en même temps que la dualité de l'homme, sa folie, ses obsessions, son destin parfois brisé, parfois surprenant voire contradictoire et qui le met souvent dans des situations ambiguës, sa mort dans la violence, la trace qu'il laisse, souvent ténue et vite oubliée dans la mémoire des autres hommes, autant dire des questions existentielles que tout homme est capable de se poser. Argentin, Borges y ajoute une certaine admiration pour les gauchos, leur mode de vie et leur liberté, leurs absence d'attaches, le tout enveloppé dans une immense érudition de nature notamment mythologique, théologique et philosophique, une grande culture et dans un style parfois diffus mais agréable à lire. Il nous rappelle que la vie est une quête, un combat avec beaucoup de cruauté et de vengeance, qui se termine inéluctablement par la mort. Chaque texte demanderait un commentaire approfondi mais je voudrais mettre l'accent sur le miroir dont l'exemple revient souvent dans ces textes. Il met en exergue cette notion de la double nature que l'homme porte en lui, l'image réelle qui est celle qu'il donne à voir et celle, virtuelle et bien différente parce qu'inversée et située derrière la glace, qu'il est seul à voir et à connaître, lue dans son propre reflet. Cela fait de Borges, certes un conteur d'exception, mais aussi, à travers les personnages qu'il met en scène, un fin observateur de la condition humaine.
L'idée du labyrinthe appelle l'image du Minotaure d'ailleurs évoquée dans une nouvelle. Elle peut sans doute être rapprochée de la lettre « Aleph » qui donne son titre au recueil et qui, dans l'écriture phénicienne, signifie taureau.
Je me suis souvent demandé ce qui pousse quelqu'un à écrire. C'est souvent la volonté de raconter une histoire réelle ou imaginaire, ces deux concepts qui, sous la plume de l'écrivain se conjuguent et se complètent, peuvent parfaitement se contredire, s'inverser ou se renforcer. Dans ce processus narratif et descriptif il y met toute son inspiration, sa sensibilité, son travail, son humanisme, ses convictions, ou laisse libre court à son inconscient comme l'ont fait les surréalistes. Cette volonté d'écrire réside autant dans la faculté d'accepter les épreuves ou de les exorciser dans le huit clos de son intimité que de rechercher la reconnaissance, la notoriété ou de stabilité financière. Il y a aussi, me semble-t-il, de l'utopie, de l'idéalisme à écrire, une volonté d'expliquer le monde dans lequel il vit ou de le refaire à sa convenance, autant dire une constante de la condition de certains hommes d'exception. Cette quête menée dans les arcanes de soi-même me paraît révéler aussi sa propre solitude et c'est, me semble-t-il, ce qui principalement motive l'écriture, et peut-être, pourquoi pas, celle de Borges ?
©Hervé Gautier http:// hervegautier.e-monsite.com
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J'ai vu des millions d'actes délectables ou atroces ; aucun ne s'étonna autant que le fait que tous occupaient le même point, sans superposition et sans transparence. Ce que virent mes yeux fut simultané: Ce que je transcrirai, successif, car c'est ainsi qu'est le langage.

La dix neuvième marche. le point des points dimension métaphysique de tous les devenirs tel un lieu que l'on ne peut définir qu'en se servant d'un verbe transcendé.

L'inconcevable univers sous tous ses angles dans une infinité d'évènements et de lieux, d'objets et de personnes dont tous les comportements se réalisent ensemble en un seul instant.

L'aleph deux ou trois centimètres d'une surface impalpable.

Tout ce qui peut être, Dieu et le monde, un théâtre sensoriel vibrant de toutes parts semblable à une fresque instantanée non encore mécanisée par chacun de ses concepts naturels ou sensitifs.

Une conscience sans entrée ni sortie rassemblant simultanément dans un labyrinthe évanescent la Monade de ses monades.

L'écriture de Dieu, particule originelle du tout en un sur une figure circulaire regroupant en une seule mesure les trois concepts nécessaire à l'élaboration d'une histoire que nos sens se chargeront d'écrire.

Brahman sans teint ni apparence dupliquant son reflet à l'infini.

L'aube et le crépuscule en une seule couleur délestée d'un itinéraire temporel menant de l'un à l'autre.

Borges sur le fil du rasoir du mur de Planck entre le monde quantique et la gravitation universelle simultanéité désincarnée accompagnée de ses premiers fragments déterministes.
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C'est une série de nouvelles fantastiques où l'auteur imagine l'immortalité, s'interroge sur la mort et les doubles, les effets de miroir, l'existence d'un ou de plusieurs dieux, le labyrinthe, lieu où l'on se perd pour méditer mais aussi allégorie de la pensée, l'univers, le sens de la vie tout cela souvent inclus dans de courtes biographies.

« Juifs, chrétiens, musulmans confessent l'immortalité, mais la vénération qu'ils portent au premier âge prouve qu'ils n'ont foi qu'en lui, puisqu'ils destinent tous les autres, en nombre infini, à le récompenser ou à le punir. »

Il semble qu'en littérature le temps soit aboli et qu'avec la nouvelle « l'Aleph », tout soit dans tout et réciproquement.

« Il précisa qu'un Aleph est l'un des points de l'espace qui contient tous les points. »

Des images obsédantes se font jour (« le Zahir ») et l'on perd le sens des « réalités » ou au contraire on perçoit l'univers dans son infini (« l'aleph ») et le lecteur, comme l'auteur, est semblable à un dieu omniscient. Les références littéraires sont nombreuses, le propos est érudit, on n'oubliera pas que Borges fut bibliothécaire, comme le Jorge de Burgos du « nom de la rose » qui est une allusion directe d'Umberto Eco à l'auteur. On pense, à la lecture, aux textes érudits, philosophiques, poétiques et contemplatifs de Quignard.
On voyage dans l'espace (Allemagne, Angleterre, Italie…) et dans le temps. On fait allusion à Homère, aux auteurs latins et grecs, aux divers textes sacrés. Par exemple les lecteurs des Mille et une Nuits ont pu voir qu'un épisode de « Sindbad le Marin » ressemblait fort à l'Odyssée.

« Il est étrange que celui-ci [Homère] copie au XIIIe siècle, les aventures de Sindbad, d'un autre Ulysse, et qu'il découvre, au détour de plusieurs siècles, dans un royaume boréal et dans un langage barbare, les formes de son Illiade. »

Borges connaît très bien la poésie anglaise ancienne et notamment Tennyson :

"Tennyson a dit que si nous pouvions comprendre une seule fleur nous saurions qui nous sommes et ce qu'est le monde. Il a peut-être voulu dire qu'il n'y a aucun fait, si humble soit-il, qui n'implique l'histoire universelle et son enchaînement infini d'effets et de causes."

Difficile ensuite de parler des autres textes qui s'illuminent au présent de la lecture et font cogiter le lecteur comme cette descente dans la cave où se trouve l'Aleph qui ressemble tant à la descente de Dante dans l'Enfer d'autant que le narrateur cherche à retrouver une Beatriz récemment disparue et dont il était amoureux. Il est guidé par le cousin de celle-ci qui écrit un poème général sur le monde. le livre regorge d'allusions de pensées à méditer, de références érudites.
Être ou n'être pas semble, à la lecture de l'ouvrage, une seule et même entité, comme un effet de miroir entre deux mondes et notre intelligence s'en trouve ainsi multipliée.
Ma première incursion dans Borges et je me suis pris une grande claque. Je chercherai volontiers à en lire d'autres.

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L'Aleph est le troisième recueil de nouvelles de Borges que je lis ces derniers temps. Publié initialement en 1949, il est chronologiquement beaucoup plus proche de Fictions (1944) que du Livre de sable (1975), et cela se sent un peu à la lecture. J'ai retrouvé des sensations que je n'avais pas eues avec ce dernier. le style, la malice de Borges sont bien là, avec ce côté érudit, parfois authentique, parfois complètement imaginaire, cette fascination pour les labyrinthes, les jeux de miroirs, le rêve et tout ce qui relève d'un infini souvent circulaire, d'un éternel recommencement. Les textes de ce recueil sont très centrés sur les personnalités qui les habitent, Averroës, Emma Zunz, Astérion, Droctulf... tous sont d'une façon ou d'une autre malmenés par un destin hors du commun. Je profite de cette chronique pour encourager à lire Borges : je vois ici et là des commentaires de lecteurs que ce nom seul intimide, qui pensent qu'une grande érudition est nécessaire pour percevoir le sel de ces nouvelles, qu'il est difficile d'y entrer. Honnêtement ce n'est pas le cas. Borges est un grand écrivain et un érudit, oui, mais il s'amuse et n'a d'autre but que se (et donc nous) distraire. Oui, ses textes se prêtent à l'analyse savante, mais non, elle n'est en aucun cas nécessaire pour prendre plaisir à la lecture !
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On ne relit jamais deux fois le même livre.
L'aleph est la première lettre de l'alphabet hébreux et des alphabets qui en sont dérivés c'est donc le commencement mais aussi la fin de toutes choses par conséquent l'Aleph c'est quelque chose de circulaire comme on peut le voir dans les nouvelles qui suivent. le temps est circulaire dans «l'immortel». Cela fait que, partir à la recherche des immortels c'est revenir à son point de départ et ce, parce que celui qui cherche erre lamentablement dans un labyrinthe, labyrinthe qui est le domaine du Minotaure, le taureau et celui-ci est
représenté dans l'alphabet phénicien par une tête de taureau: l'Aleph. Cela fait aussi que le narrateur, le romain et Homère ne sont qu'une seule et même personne
Difficile de comprendre Borges sans explications car Borges c'est de la métaphysique et ça, ce n'est pas tout le monde qui apprécie alors il vaut mieux prendre le texte comme on peut et y voir ce qu'on veut cela évite de s'arracher les cheveux et on arrive a y trouver du plaisir. Pour ma part si autrefois j'ai pris du plaisir a essayer de suivre Borges dans ses pérégrinations métaphysiques aujourd'hui je me prend moins le but avec ces états d'âmes et j'essaye d'apprécier les nouvelles pour ce qu'elles sont: des histoires mais des histoires érudites.
Otalora est gaucho il a de l'ambition et comme Iznogoud veut devenir chef à la place du chef mais il va trouver rapidement la mort car il a cru marcher dans le monde des vivants mais il était déjà mort et ne le savait pas.
Les théologiens : Pour les théologiens Aurélien et Jean de Pannonie rivaux qui, en fait, disent la même chose combattent les thèses des monotones et des histrions pour qui le temps est circulaire ou qui fini lorsqu'il n'y a plus rien à faire ou même dont on ne sait pas grand-chose et ou chacun a son avis. Leur rhétorique rivale va les amener à défendre les doctrines hérétiques auxquelles ils sont opposés avec la mort pour l'un deux et l'absence de regrets pour l'autre toutefois teintée d'une impression de n'avoir pas été à la hauteur. Mais Dieu dans tout ça qu'en pense-t-il?
Histoire du Guerrier et de la Captive : nous raconte qu'un barbare s'est laissé séduire par la civilisation et à l'inverse une captive anglaise s'est accoutumé aux moeurs des indiens qui l'on enlevé.
Biographie de Tadeo Isidoro Cruz: de gibier de potence il devient sergent de la police rurale mais là n'était pas sa vocation. Un loup ne devient jamais un mouton.
Emma Zunz : une histoire de viol qui couvre un assassinat vengeur
La Demeure d'Astérion: Un minotaure solitaire et bien attachant.
L'Autre Mort : Une mort et un sursis donné par dieu pour sa rédemption à un lâche et une deuxième histoire du même personnage
Deutsches Requiem : la mort était son métier pour régénérer l'Allemagne
La Quête d'Averroès nous plonge dans un monde d'érudit l'écriture est telle qu'on a l'impression de participer. Il y a une érudition profonde qui ne ressemble en rien à celle que procure les encyclopédies libres du web utilisée par nos écrivains contemporains, c'est une immersion dans l' ambiance médiévale de l'Andalousie d'autrefois et l'art éternels des salamalecs philosophiques et de la rhétorique fleurie orientale. Borges nous enveloppe avec «onction» dans une douce torpeur littéraire
Un véritable raffinement. Excellent.
Et encore… le Zahir, L'Écriture du dieu, Aben Hakam el Bokhari mort dans son labyrinthe, Les Deux Rois et les Deux Labyrinthes, L'Attente L'Homme sur le seuil, L'Aleph
L'Aleph toutefois reste pour Borges un point qui contient tout l'univers… du moins c'est ce qu'il dit
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Même si l'écriture est belle, je dois avoir avoué n'être rentré dans aucune des histoires , nouvelles de ce livre. j'en suis désolé car je me faisais une joie d'apprécier cet auteur de que je ne connaissais pas. tant pis et cela n'enlève rien biensur à sa notoritété et son tatent!
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Dans ces textes très courts, vous trouverez :
Un fleuve qui rend immortel et un homme déterminé à s'y baigner, Un bandit brésilien très ambitieux, Des théologiens qui s'affrontent autour d'hérésies, Un barbare converti, Une fille qui venge son père, le Minotaure, La confession d'un officier nazi, Averroës, Une pièce de monnaie particulière, le mystère du pelage des tigres, Des rois et des dieux, Un peu d'alchimie.

Dans ces courts écrits qui relèvent du conte, de la nouvelle, de la parabole, de la légende ou encore de la chronique, Jorge Luis Borges interroge la destinée et ses mystères. Les personnages qu'il met en avant sont nombreux à s'engager dans une quête de leur identité et de leur rôle dans le monde, et souvent c'est dans l'autre, le double et l'opposé qu'ils se retrouvent le mieux. Loin d'être de simples historiettes, ces textes ont un sens profond, parfois caché et sont riches d'une grande poésie et d'une forte spiritualité.
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Le recueil intitulé "L'Aleph" est l'un des chefs d'oeuvre de l'écrivain argentin J.-L. Borges. Il est composé uniquement de nouvelles courtes et, à mon avis, de valeur inégale.
Le texte qui donne son titre à l'ensemble du livre est un vrai petit bijou. Dans cette nouvelle, un infime recoin dans une cave quelconque se révèle être « le lieu où se trouvent, sans se confondre, tous les lieux de l'univers, vus sous tous les angles »; et l'auteur explique, à ce propos, son « désespoir d'écrivain »: « Tout langage est un alphabet de symboles dont l'exercice suppose un passé que les interlocuteurs partagent; comment transmettre aux autres l'Aleph infini, que ma craintive mémoire embrasse à peine ? ». On pourrait imaginer un développement dans le registre du fantastique, mais non… Les cartes sont habilement brouillées, car la découverte inouïe de l'Aleph se trouve malicieusement éclipsée par une mesquine histoire de rivalité: l'auteur jalouse un apprenti écrivain, qui s'est lancé dans une description poétique de toute la planète - rien que ça ! Le tableau de ces deux hommes qui se détestent cordialement est un morceau d'anthologie. Mais finalement le plus fort, c'est que le lecteur apprend incidemment que, étant enfant, le découvreur de l'Aleph avait entendu dire que « il y avait là [dans cette cave] tout un monde » ! Ce clin d'oeil, c'est tout Borges.

Il n'est pas question d'analyser ici toutes les nouvelles qui composent ce recueil. Mais je me dois de mentionner au moins "Emma Zunz", un conte bizarre et émouvant, et surtout l'extraordinaire récit intitulé "L'immortel". Cette nouvelle raconte une histoire étrange, suggérant une mythologie tout à la fois fascinante et dérisoire; l'atmosphère créée par J.-L. Borges est inoubliable. La traduction française a des difficultés à rendre le style très particulier choisi volontairement par l'auteur pour écrire ce texte. Mais je regrette une seule chose: le dénouement de "L'immortel" me semble inutilement compliqué.
Comme dans le recueil de "Fictions", l'intrigue dans ces nouvelles est en elle-même originale; mais c'est surtout la manière de raconter qui est inimitable. Le lecteur se sent entraîné dans un récit original, mais c'est orchestré avec une extraordinaire finesse. En compagnie de J.-L. Borges, Le lecteur se prend au jeu de la subtilité et se sent… comment dire ? intelligent. Très peu d'auteurs ont été capables de créer ce climat de lecture.
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