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Citations sur Chronique japonaise (66)

Au XVIII éme, le voyageur Allemand Kaempfer (qui visite le Japon) conclut "que le système tout entier des Dieux du Shinto est un tissu si ridicule de fables monstrueuses et inacceptables que ceux-là même dont l'affaire est de les étudier ont vergogne de révéler ces inepties à leurs propres sectateurs et encore bien plus aux bouddhistes ou aux membres de quelques autre religion". Et je vous devine bien près de lui donner raison.

Question d'habitude et de latitude. Après tout, un Homme-Dieu né d'une vierge dans une étable, réchauffée par un âne et un bœuf, et cloué sur deux poutres entre deux voleurs par la volonté d'un père miséricordieux... Mettez-vous à la place du premier japonais qui a entendu cette histoire pour nous si familière!

(P 20)
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En quinze ans de persécutions massives, la chrétienté japonaise est détruite. On renie Dieu ou on meurt sur la croix, dans l'huile bouillante, dans la lave des volcans du Kyushu... cela avec un empressement, un courage, un mépris de ce bas monde qui édifient et médusent l'Occident. C'est que, dans l'éthique japonaise, mourir pour son seigneur est dans l'ordre des choses : même un vaurien connaît cette règle-là. A plus forte raison quand le Seigneur est déjà mort pour vous. Aux yeux des convertis japonais, le Christ est devenu le daimyo suprême...
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On traduit ce qui vous tombe sous la main (...) Rousseau, qui dit que la nature est bonne, Tourgueniev, dont la mélancolie rend un son familier, enfin Jules Verne, parce que les japonais ne font pas les choses à moitié et que, s'il faut déjà penser "moderne", autant penser futuriste.
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Il y a des bergères qui épousent le fils du roi, et il y a aussi des gens dont le karma était de vivre - et quoi qu'ils aient pu tenter avant- un torchon à la main. J'y pense en observant le patron de ce petit café " ouvert la nuit" sur la grand-route de Nagasaki. Son visage gris ressemble exactement à un torchon ou à un mouchoir qui aurait écrasé bien des larmes, connu bien des fonds de poche et des lessives. Il est plein d'une bonté chiffonnée. Je trouve aussi dans ses gestes les traces de cette hésitation continuelle que l'instruction vous donne, et cette distinction fourbue. Il vient d'une autre vie, c'est évident, et rien dans son enfance ne devait sentir le percolateur ni le gas-oil. Ses parents ou ses maîtres n'avaient jamais prévu qu'il finirait ici, passant le torchon sur ce petit comptoir en parlant d'une voix sourde. Peu importent les débuts, étudiant recalé ou instituteur resté en rade après une querelle avec le syndicat.
L'essentiel c'est que ce torchon qu'il tient comme un sceptre était dans ses étoiles et que la vie les a désormais réunis. Il semble le savoir et s'en trouver très bien. Certain d'être à sa place, sorti de la mêlée des coudes et des épaules, il est tout au spectacle de son café et écoute ses clients avec une attention que, même dans l'amour, on rencontre rarement. Les gens ne sont pas accoutumés à ce qu'on leur prête autant d'existence, au bout de cinq minutes, les voilà déjà aux confidences. Lui, la tête penchée, il enregistre, opinant parfois du torchon; et je me demande quels sentiments il collectionne ainsi, à quelle passion, à quelle maladie, à quelle insuffisance de l'âme il s'intéresse aussi fort?
p 249-250
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Thème de no: un voyageur fatigué s'endort près d'un puits; l'ombre d'une femme qui s'y était autrefois jetée en sort et danse l'amour malheureux qui l'a conduite à cette fin. Le voyageur se réveille, inexplicablement remué par ce rêve qui - on le sent - va le faire cheminer vers son éveil spirituel. Avec cela on vous tient facilement deux heures en haleine. J'aime beaucoup cette économie et, après tout, une vie humaine contient-elle vraiment plus que cette trajectoire-là? Le reste n'est que péripéties, qu'on a bien raison de ne pas porter à la scène.
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En revenant de voyage nous sommes comme des galions pleins de poivre et de muscade et d’autres épices précieuses, mais une fois revenu au port, nous ne savons jamais que faire de notre cargaison.
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Cessez de vous en faire
Et suivez le courant
Si vos pensées sont liées
Elles perdent leur fraîcheur

Seng-t'san
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Kyoto, temple du Ryo-an-ji,
le 3 avril 1964

Trois Américaines mûres, solidement chapeautées, corsetées et équipées de caméras - de l'espèce qui vous digère en une journée une douzaine de temps et une ou deux résidences impériales sans même senti leur estomac -, s'installent devant le fameux "Jardin de pierres", bien résolues à n'en faire qu'une bouchée. Soleil d'avril blanc et sournois ; quant au jardin (une des manifestations les plus parfaites de l'esthétique du Zen), c'est quelques rocs aux formes tourmentées choisis avec un soin jaloux par des "spécialistes" voilà bientôt cinq cents ans et merveilleusement disposés sur un éblouissant fond de sable blanc. Cela et cela seulement. Chaque élément de ce microcosme a sa signification traditionnelle : la mer de nuages, le rocher de la grue (félicité), celui de la tortue (longévité), etc., ainsi qu'une jeune fonctionnaire du Japan Travel Bureau l'explique à ces dames. Exposées d'une voix docile par cette personne en bonnet de police, ces allégories prennent quelque chose d'un peu plaqué et benêt. Devant la perplexité de ses clientes, le guide ajoute qu'il ne faut pas attacher trop d'importance à cette symbolique, que le jardin est un chef d’œuvre d'abstraction pure, un instrument de méditation qui permet à chacun d'y laisser flotter librement son esprit.
"Cute little garden", disent les trois dames, et la plus résolue conclut d'une voix de stentor : "As I look at those rock patterns, I can't help thinking of... Jesus Christ." (! ?)
J'ai bien peur, avec Kipling, que cet ouest (ce Middle West) et cet Est ne se rencontrent jamais.
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Celui qui ici n'accepte pas de commencer par faire l'apprentissage du moins est certain de perdre son temps.
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"Nous sommes douloureusement conscient des sentiments qui sont aujourd'hui les vôtres, vous, Nos sujets. Cependant, Nous avons décidé, en accord avec les décrets du sort et du temps présent, de paver la route vers une grande paix pour les générations à venir en endurant l'intolérable et en supportant l'insupportable."
(Décret impérial radiodiffusé du 15 août 1945.)

Le parti qui l'emporte, c'est le parti impérial.
(Proverbe japonais.)

Par ces brèves sentences, l'empereur avait annoncé la capitulation aux siens et mis un terme à la guerre. Il fut entendu avec stupeur et respect jusqu'au fond des campagnes, où bien des paysans croyaient encore que cette voix auguste ressemblait au tonnerre ou à l'ouragan. Bon nombre d'esprits rustiques interprétèrent son message ainsi : l'état-major japonais s'était montré en dessous de sa tâche, l'empereur s'était débarrassé de ces incapables et s'était entendu avec un meilleur conseiller - MacArthur. L'ordre avait été compris : les officiers qui le désapprouvaient s'étaient suicidés ; et les GI's avaient débarqué dans un Japon en cendres, sans essuyer un coup de feu, mais tombant parfois, à l'entrée des villages détruits, sur des enfants postés là pour les accueillir et brandissant des drapeaux... japonais.
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