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Citations sur Chronique japonaise (66)

Depuis quinze siècles qu'ils coexistent, jamais le Bouddha et le Shinto n'ont été en conflit ouvert, et, dans le jardin d'un temple bouddhique, vous trouverez toujours - dans un buisson, derrière le puits, à côté de la remise du jardinier, un petit sanctuaire shinto décoré de fleurs encore fraîches...
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Mais voyons, c’est moi qui m’excuse. Je n’ai malheureusement rien pu voir de la fille qui a disparu la première, vérifiant le proverbe « Jupe troussée court plus vite que pantalon baissé ».
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Au Seibo Hospital, Tokyo, décembre 1964-mars 1965.

Même à la lanterne magique, il ne faut pas se faire de cinéma : la plupart des liens solides se nouent au-delà de l'intellect et ne s'expriment que rarement dans les livres, mais dans les tatouages qu'on peut voir à la plage ou à la morgue, dans deux mains qui serrent une épaule sur un quai de gare et garderont – trop longtemps peut-être – cette chaleur et cette élasticité dans les doigts, dans des cartes écrites par des militaires et si mal adressées qu'elles arrivent par erreur chez de vieilles folles auxquelles ont n'avait jamais dit des choses si tendres, dans le silence de deux visages qui s'enfoncent au tréfonds de l'oreiller comme s'ils y voulaient disparaître, dans ce désir si rarement comblé qu'ont les mourants de trouver le bout de l'écheveau et quelque chose à dire, dans la fenêtre qu'on ouvre ensuite, dans la tête d'un enfant qui fond en larmes, perdu dans la rumeur d'une langue étrangère.

Courage, on est bien mieux relié qu'on ne le croit, mais on oublie de s'en souvenir.
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Pendant trois semaines, on se bat sur les plages. Au début de la quatrième, un typhon providentiel arrache les bateaux de leur ancres et détruits corps et biens l'immense armada chinoise.
(...) Aujourd'hui on donne aux typhons de gracieux noms de femme, sans doute pour apaiser leur fureur. Les japonais du XIIIe siècle baptisèrent ce typhon salvateur le Vent-Dieu (Kami kaze), et les pilotes-suicide de la guerre du Pacifique, alors que tout est déjà perdu, reprendront ce nom à leur compte.
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La calligraphie, c'est la véritable religion de cette Cour esthétisante où celui qui est affligé d'une "mauvaise main" n'a aucune chance de s'élever.
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Après avoir médité pendant des années, le Bouddha "traversa le miroir" et se trouva éveillé dans un monde indiciblement harmonieux. (...) Toute sa vie, il prêcha la méditation et l’éveil. Il dit encore que, lui disparu, il faudrait l’oublier. Puis il mourut. Alors on lui dressa des pagodes, on tailla de lui des effigies gigantesques, on lui adressa des prières, on se mit à gloser, philosopher, ergoter sur sa doctrine (…)
Méditez et réveillez-vous; cherchez en vous, sans rien ne vous arrête, la vie que vous ne voyez pas: voilà ce que le Zen a retenu du bouddhisme et, pour lui, Cakya-muni n’a rien dit de plus.
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Au lieu d'être une racine la tradition est un couvercle,et qui ferme bien.
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Le 15 août 1549, le jésuite François-Xavier arrive au Japon sans savoir que le Christ l'y a précédé de trois siècles. Les Bouddhistes chinois du moyen-âge ont en effet entendu parler de ce "Sage" d'Occident et l'on transformé en un bodhisattva qui pénètre au Japon sous le nom d'Inro Bosatsu et se noie dans l'immense panthéon national avec son message et son origine.

Au même moment, la chrétienté, qui a eu vent des mérites de Cakya-Muni, se l'est attribué sous le nom de saint Josephat (corruption de Bodhisat), qui, en compagnie de son convertisseur, saint Balaam, va se perdre presque aussi vite dans la foule des saints du calendrier (27 novembre). Mais d'un côté comme de l'autre, on a oublié cet échange de politesse. Tout est à reprendre.

[...] Mais François-Xavier ignore encore cet art du compromis [...] Il est chez les païens, il flaire l'idolâtre partout. Égaré dans une société dont il ne soupçonne encore ni les forts ni les faibles, il joue seul sa partie, tranche, embarrasse, brusque son monde, accumule les erreurs.

Quand les bonzes Zen qui l'on accueilli en ami l'entendent déclarer que les satori (illuminations) de leurs illustres devanciers chinois ne sont qu'impostures et sornettes, ils lui ferment leur temple au nez.
Quand le Daimyo de Satsuma apprend qu'aux dires du docteur étranger, ces ancêtres -qu'il faut vénérer- brûlent en enfer faute d'avoir été baptisés, il fronce le sourcil et le prie d'aller prêcher ailleurs.
Quand un seigneur voisin qui reçoit l'expulsé à bras ouverts -comptant lui acheter de la poudre à canon- l'entend assurer que la sodomie met l'homme en dessous du porc, le Daimyo, qui s'autorise ce passe-temps alors fort répandu chez les militaires, blêmit et le met à la porte. Les lettrés qui l'invitent courtoisement pour qu'il expose sa doctrine ne lui cachent pas combien l'idée d'un dieu parfaitement bon créant un diable très puissant pour tourmenter les créatures qu'il aime leur paraît singulière et même divertissante. Quand enfin il s'efforce, avec l'aide d’interprètes insuffisants, de rendre dans une des langues les plus difficiles du monde les rudiments de la doctrine chrétienne, il traduit Dieu par Kami (on sait l’ambiguïté du terme), pêché par tsumi (une "pollution" sans connotations morales), emprunte le reste du vocabulaire à la terminologie bouddhique et s'engage ainsi dans un maquis de quiproquos dont on n'est pas encore sorti.

C'est délicat d'apporter une morale nouvelle à des gens qui ont depuis si longtemps et si prudemment choisi celle qui leur convient.

Sans se laisser abattre, il visite encore plusieurs royaumes et, le cœur déchiré, quitte le Japon en 1551, n'ayant converti qu'une poignée de plébéiens et qu’un seul seigneur d'importance, dont la syphilis n'avait pas résisté au baptême.

(P 64)
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C'est le propre des longs voyages que d'en ramener tout autre chose que ce qu'on y est allé cherché.
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François-Xavier est chez les païens. Il flaire l’idolâtrie partout. Il joue tout seul sa partie, tranche, embarrasse, brusque son monde, accumule les erreurs. (…) Les lettrés, qui l’invitent courtoisement pour qu’il expose sa doctrine, ne lui cachent pas combien l’idée d’un Dieu parfaitement bon, créant un Diable très puissant pour tourmenter ses créatures qu’il aime, leur parait singulière et même divertissante.
(…) C’est délicat d’apporter une morale nouvelle à des gens qui ont depuis si longtemps et si prudemment choisi celle qui leur convient.
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