👁 « Elle but longtemps les yeux fermés. Il attendait à côté d'elle qu'elle les rouvre. Là, une rangée de cils avait cligné. Il enfonça la cuillère dans l'orbite et récupéra l'oeil entre le pouce et l'index. Il tira légèrement sur les nerfs pour mesurer leur solidité et attendit qu'elle reprenne conscience. Il resta debout. Dans sa main, l'oeil regardait son frère clos. » (p.14)
👁 Ne me demandez pas comment j'ai trouvé ce livre ; je flânais en librairie, et comme à mon habitude, j'ai fait une sélection à l'aveugle (c'est le cas de le dire !), sans lire la quatrième de couverture, bien évidemment. Je dois également préciser que l'extrait ci-dessus est le pire passage du livre et il se trouve au tout début de ce roman : l'expression « ça passe ou ça casse » n'aura jamais été aussi vraie. Je dois avouer que j'ai tout de même été quelque peu rebutée par le propos, mais j'ai pris mon courage à deux mains et j'ai continué cette drôle de lecture.
👁 le personnage principal est un jeune homme de 20 ans, Tianshi, qui tue femme après femme en les énucléant, dans la Chine du XVIIè siècle. Sa mère lui a ordonné de tuer 42 femmes pour aider l'âme de son mari, décédé lors d'un voyage, à retrouver la voie du paradis. Enterré sur le haut d'une colline, la dépouille du père est entourée de sculptures : Tianshi sculpte en effet des visages de femmes dans de l'argile, en y mettant les yeux des femmes qu'il a tuées, et les dispose de telle sorte que leur regard soit dirigé vers feu son père. Arrivé presque au terme de son « contrat », sa mère ordonne à Tianshi de tuer la fille du chasseur d'oiseaux. Lorsqu'il l'a trouve enfin, cette dernière lui fait des révélations qui changeront à jamais le cours de leur vie...
👁 Si ce court roman s'avère en fait être un conte poétique et gothique, dans lequel se frôlent tour à tour l'amour et la haine, la religion et le dogmatisme, le silence et les mensonges, je ne suis qu'à demi convaincue. le langage est parfois trop cru, l'histoire est parfois floue, le déroulement des événements et le rôle des personnages n'est pas toujours facile à comprendre. S'il est clair qu'il y a une morale, il manque pour moi plus de poésie, plus de délicatesse, plus de nuances pour que ce conte soit efficace.
👁 Et vous, connaissez-vous cette histoire ? Vous attire-t-elle ?
Commenter  J’apprécie         60
Je n'ai pas réussi à rentrer dans ce conte baroque, cruel, déroutant et finalement vide de sens à mes yeux (sans jeu de mots par rapport au leitmotiv du livre).
Commenter  J’apprécie         10
Pourquoi n’avons-nous jamais appris à sculpter ? Est-ce que l’argile, les rochers, le marbre renferment des fantômes que nous ne devons pas réveiller ? La forme reste invisible à l’œil. Elle est blottie au plus profond du moindre caillou, si l’on casse le caillou pour trouver une forme, il ne reste que les éclats de caillou et la forme est brisée. Le vent et la pluie nous servent de burin et d’alliage. Chaque saison sculpte de nouveaux arbres, des fleurs différentes et des montagnes autres. Le temps se charge de les sauver.
« Fa Ming, petite sœur, un client pour toi »
Une jeune fille de vingt ans arriva à la porte. Le frère partit dans la cour s'occuper des cochons.
« Bonjour, mademoiselle. Je ne peux découvrir mon visage et je m'en excuse, j'ai souffert d'une tempête de sable hier, et j'ai très mal aux yeux. »
C'est la première fois qu'il mentait.
« Ce n'est rien, rien du tout. Quel oiseau cherchez-vous?
-L'oiseau de Kunlun. »
Fa Ming ferma la porte.
Il resta dehors immobile.
Un rideau s'écarta. Un œil scrute par la fenêtre.
Le rideau tomba. La porte s'ouvrit.
« Allez-vous-en!. Cet oiseau est maudit et tous ceux qui m'en parlent aussi. Partez. Allons, partez! »
« Je vous prie! Au nom de mon seul espoir! Je mourrai peut-être demain. »
Elle tourna la tête en sifflant comme un rossignol.
« Et peut-on connaître vos honorables non et prénom, monsieur le voyageur?
-Je suis le fils de Li de Yinmen. Mon prénom est…
-Ah! Mais qu'est-ce que tu fais ici? Mais viens, rentre. »
Dire que j’ai tué quarante et une femme qui chacune aurait pu me servir de modèle. Qui aux quatre coins de la Chine sait sculpter une femme . Pas un seul homme ne sait. Les seules statues que j’ai vues pendant mon enfance, c’étaient des bouddhas, des ârhats, des bodhisattvas, des soldats pour jouer. Pourquoi n’a-t-on jamais sculpté de vrais hommes ? J’ai bien sculpté des visages avec de vrais yeux, moi !
De quoi ont-ils peur ? Qu’ils se mettent à bouger ? On raconte que lorsqu’on peint un dragon parfait, il ne faut pas lui dessiner les yeux sinon il s’envole de la feuille de papier…
Elle but longtemps les yeux fermés. Il attendait à côté d'elle qu'elle les rouvre. Là, une rangée de cils avait cligné. Il enfonça la cuillère dans l'orbite et récupéra l'oeil entre le pouce et l'index. Il tira légèrement sur les nerfs pour mesurer leur solidité et attendit qu'elle reprenne conscience. Il resta debout. Dans sa main, l'oeil regardait son frère clos
Le Cercle de Minuit, présenté par MIchel Field. FRANCE 2, 13 décembre 1993.
Avec Lisa Bresner -> démarrer la vidéo à partir de 4:57