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EAN : 9782021009835
450 pages
Seuil (08/09/2011)
3.67/5   3 notes
Résumé :

Cette toute première biographie consacrée à l’un des derniers prix Nobel de littérature française retrace l’itinéraire d’un écrivain qui en dépit des innombrables thèses qui lui ont été dédiées reste tout à la fois universellement admiré et curieusement méconnu. La haute exigence formelle de cette oeuvre trop souvent jugée ardue a longtemps occulté une... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
"Claude Simon, une vie à écrire" est une bonne biographie du romancier Claude Simon, pas toujours rédigée avec le soin qu'il faudrait, mais pleine d'intérêt. On ne s'y limite pas aux éléments vécus de la vie du personnage principal, mais on tente d'étudier en profondeur l'oeuvre et surtout, le travail d'écrivain de Claude Simon. Ce livre en effet permet de donner un sens nouveau, un sens plein et fécond, au mot "écriture", si galvaudé par tant d'auteurs banals et de critiques sans imagination. "Ecriture" est d'abord une mise en mots de ce qui a été vécu et perçu, mais c'est aussi, à l'inverse, une manière de vivre, de faire entrer le langage et la littérature dans la vie d'un homme né privilégié, dilettante, peu engagé et peu concerné par le monde, qui trouve vers 1950 sa véritable vocation et trace, peu à peu, le sillon de sa création romanesque où sa vie se concentre.

Claude Simon, dans ce livre, est avant tout un travailleur du langage : d'abord, il s'entraîne comme un jeune apprenti à analyser les techniques de fabrication des grands romans et s'exerce à écrire comme d'autres font leurs gammes. C'est par ce labeur obstiné que l'artisan écrivain construit - parfois à grand peine - ses romans, et conçoit donc la littérature comme un art du langage. Cette perspective, dans les années 50 et 60, le préserve heureusement d'une littérature à idées, d'une production idéologique et morale dont Sartre, Camus et tous les engagés de ces temps-là ont encombré les rayonnages. Cette dimension langagière et stylistique fit de lui, pendant quelque temps, un compagnon de route du Nouveau Roman.

Si la matière première des romans de Claude Simon est le langage, celui-ci renvoie non aux idées généreuses et rhétoriques, aux discours humanistes, mais aux perceptions les plus physiques de l'existence. "La Route des Flandres", son roman le plus célèbre, raconte la débâcle de 1940, mais c'est aussi, et surtout, un roman de chevaux, de cavaliers, de sangles et de courroies, de pluie et de printemps. Il en va de même de tous les autres ouvrages de l'auteur, nourris par une sensibilité de peintre (Claude Simon a d'abord peint) aux formes, aux textures et aux lumières. En cela, comme le dit Elie Faure plusieurs fois cité par l'auteur, l'art est la moins intellectuelle des disciplines, la plus imperméable aux grandes idées sermonneuses et aux causes sociales, la plus amorale. Par réalisme rigoureux, Claude Simon t fait face, franchement, aux intermittences de l'esprit et de la mémoire, ce qui interdit tout discours idéologique artificiellement composé qui ne s'interrogerait pas sur ces questions là.

Jamais, malgré le Prix Nobel et les mondanités qu'il entraîna, Claude Simon n'abandonna cette discipline artisanale des mots, cette éducation du regard et de tous les sens, cette sobriété de l'âme. Mireille Calle-Gruber, dans la partie la plus fatigante de son ouvrage, consacrée aux dernières années de la vie de l'auteur, note consciencieusement toutes les rencontres avec les intellectuels médiatiques, tous les colloques, les expositions, la présence des personnes et des journaux un peu répugnants que nous connaissons encore aujourd'hui (Le Monde, Sollers, Libération, Jack Lang, BHL, etc) .
Socialement et idéologiquement, Claude Simon appartient à ce milieu douteux de publicistes des années 1990-2000, mais il leur échappe toujours par sa discipline et son labeur obstiné d'écrivain, sa dignité d'ouvrier des mots.

Voilà donc un livre instructif et très utile.
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critiques presse (6)
NonFiction
01 février 2012
Une biographie intime et vivante de Claude Simon, nourrie d’un grand nombre d’archives et de documents inédits.
Lire la critique sur le site : NonFiction
Telerama
14 décembre 2011
Claire, parfaitement documentée, ménageant un juste équilibre entre le récit factuel et l'analyse textuelle, cette biographie passionnante signée Mireille Calle-Gruber [...], restitue la singularité obstinée, la solitude voulue de l'auteur admirable de La Route des Flandres et des Géorgiques [...].
Lire la critique sur le site : Telerama
Lexpress
10 novembre 2011
L'imposante biographie que [Mireille Calle-Gruber] consacre aujourd'hui au Prix Nobel de littérature 1985 vient éclairer avant tout avec une rare acuité une oeuvre qui représente pour elle "une magnifique leçon de littérature et de vie, et qui mieux qu'un essai philosophique explore dans la chair des phrases et la tension extrême des vocables appelés à la ligne les apprentissages du vivre et du mourir".
Lire la critique sur le site : Lexpress
LeMonde
28 octobre 2011
Mireille Calle-Gruber a fait un travail précis, documenté, une enquête minutieuse - elle a eu aussi accès aux archives privées de Claude Simon. Ce n'est pas une hagiographie, mais un exercice d'admiration et d'empathie.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Lexpress
20 septembre 2011
Alliant brillamment les faits biographiques et l'analyse des textes, cette spécialiste du nouveau roman revient sur la carrière du cousin minimaliste de Proust et de Faulkner […], brossant au passage une peinture amère des lettres françaises, de l'après-guerre aux années 2000.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Bibliobs
16 septembre 2011
Une bonne biographie? En voici une, passionnante, fouillée, précise, qui démontre la force de la littérature pour la compréhension de l'Histoire. Les historiens peuvent raconter l'Histoire, un romancier, lui, la vit.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
[1988, conférence des Nobel, Paris, sur les promesses et menaces du XXI°s]
Lorsque le mardi 19 janvier vient son tour d'intervenir, loin d'enfourcher les grands chevaux du discours humaniste, Claude Simon, impavide et non sans un certain aplomb, a choisi d'entretenir ses collègues sur "Le rôle amoral de la culture". D'entrée, citant un texte d'Elie Faure écrit dans les années vingt, il expose les thèmes sur lesquels il estime qu'il n'y a pas à transiger : "L'art, dit Elie Faure, n'a rien à voir avec une finalité sociale quelconque [...] Il est antisocial du point de vue optimiste où la société - du moins la société occidentale - se place, je veux dire la poursuite du perfectionnement indéfini d'un bonheur unanime que bouleverse sa perpétuelle évolution. Il est immoral dans bien des cas, et avant tout pour son exaltation inexorable de l'amour. Il est amoral, toujours, puisqu'il cherche à tirer des événements et des objets des harmonies indifférentes à la qualité sentimentale que les moralistes prêtent à ces objets et à ces événements."

p.371
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(Merleau-Ponty, notes publiées dans Médiations n°4, 1961-1962)
Claude Simon hier soir - quand je lui dis que lui parlant et lui écrivant ne sont pas le même, celui qui parle est celui qui a des opinions, des jugements, etc., celui qui écrit est celui qui sent et vit. Il ajoute : "et puis, il faut le réveiller, ou l'exciter, ou l'appeler" (je ne sais plus quel mot il a employé). Donc celui qui sent et vit n'est pas immédiatement donné. Il se développe par le travail. Sentir, vivre, la vie sensorielle est comme un trésor, mais qui ne vaut encore rien tant qu'il n'y a pas eu travail. Le travail ne consiste pas seulement, d'ailleurs, à "convertir en mots" le vécu ; il s'agit de faire parler ce qui est senti.

p. 270
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Lorsqu'il [Claude Simon] prend part aux débats, c'est selon ses termes, suivant sa propre exigence et la recherche d'une élaboration des formes ; et s'il répète volontiers avec Robbe-Grillet que "le monde n'est ni signifiant ni absurde, il est, tout simplement", il l'entend avec les inflexions d'Elie Faure, dans cette phrase sur Poussin notamment, qu'il a plus d'une fois reprise au critique d'art : "Le massacre aussi bien que l'amour est un prétexte à glorifier la forme dont la splendeur calme apparaît seulement à ceux qui ont pénétré l'indifférence de la nature devant le massacre et l'amour."

p. 229
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[Entretien filmé de 1974]
Je me suis aperçu d'une chose : une fois mon livre achevé, au lieu de l'écrivain qui dit "mon dieu je n'ai pas pu dire ce que je voulais dire", je disais "mon dieu mais comme ce que je voulais dire était pauvre par rapport à ce qui s'est dit par mon travail, lorsque j'ai travaillé."

Le sens n'est pas une chose que l'on possède, que l'écrivain-prophète va délivrer au vulgaire peuple par le moyen du langage - on ne "s'exprime" pas - mais le sens est le produit du travail de l'écrivain dans le langage.

p. 298
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Une vie à écrire. Car Claude Simon aura su très vite que les temps courts du vécu appellent les temps longs de l’écriture, laquelle a, seule, la force têtue de suivre indéfiniment les méandres pli par pli de l’événement, de déplier ce qui a fait masse, vous est tombé dessus comme une destinée. Il sait que n’est véritablement vécu que ce qui aura pris le temps de revivre dans la langue littéraire – où les choses arrivent au présent du travail sur la page, où il arrive infiniment plus, l’écrivain découvrant que « ce que je voulais dire était pauvre par rapport à ce qui s’est dit par mon travail, lorsque je travaillais ». Et que ce qui revit ainsi au passage des langues est infiniment plus vaste que le compte rendu d’une histoire personnelle.
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Videos de Mireille Calle-Gruber (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Mireille Calle-Gruber
Dans le cadre d'"Un Après-midi à Bordeaux : « À quoi sert d'écrire ? À ne pas vivre mort. » rencontre avec Pascal Quignard. Animation par Jean-Michel Devésa.
Avec Dolorès Lyotard, "Vol de nuit", Frédérique Toudoire-Surlapierre, "Quignardises", Bénédicte Gorrillot, « Pascal Quignard : lire-traduire-écrire en Gréco-latin », Dominique Rabaté, « Un irrésistible élan d'émancipation », Mireille Calle-Gruber, "Pascal Quignard : L'incatalogable écriture du sentiment océanique"
Retrouvez les livres : https://www.mollat.com/Recherche?requete=Quignard%2C%20Pascal
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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