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Robert Rovini (Autre)
EAN : 9782070705078
532 pages
Gallimard (20/02/1986)
4.31/5   26 notes
Résumé :
Fortement impressionné par la grande manifestation qui s'acheva par l'incendie du Palais de justice de Vienne en juillet 1927 et dont il fut témoin, Canetti s'interroge sur « l'instinct de masse » (l'homme, par peur de l'inconnu, se réfugie au sein de la masse, seule apte à le préserver de la phobie du contact) et les manifestations de puissance qui en résultent. Ce singulier essai anthropologique et philosophique, auquel son auteur travailla pendant près de vingt a... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Comment s'enclenchent les automatismes de masse? Ferveur, fureur quelles sont les lois qui régissent le groupe ? L'homme seul est il le même lorsqu'il devient pluriel? Les ressorts qui mettent en mouvement la masse sont ils commandés par un instinct de sociabilité ou justement par une incapacité primaire à se fondre dans le groupe?. Conflit, alliance, charge et décharge d'émotions collectives, quelle est l'architecture de ces mouvements perpétuels et donc éternels ? Une étude incontournable surtout lorsque les foules commencent à refuser de marcher dans le sens des aiguilles de la ronde.
Astrid Shriqui Garain
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La thèse de Canetti est simple. Elle part d'une phobie : "Il n'est rien que l'homme redoute davantage que le contact de l'inconnu." Et la résolution de cette phobie trouve son accomplissement dans la masse. "C'est dans la masse seulement que l'homme peut être libéré de cette phobie du contact".Ensuite, se déploie une pensée touffue qui classifie les masses, dissèque leurs comportements et analyses leurs rapports à la puissance en empruntant à l'histoire, la sociologie et l'éthnologie. Plus qu'une démonstration, qu'un argumentaire, Elias Canetti développe sa réflexion comme une obsession avec en filigrane l'anéantissement de l'individu. Ce livre est unes sorte d'ovni qui cadre mal avec nos canons car il pense la société sans l'individu. Il élabore une psychologie avec le collectif en son centre. Il conçoit la société et l'organisation humaine à partir du (re)groupement des hommes (dans la peur).Alors pourquoi la masse ? D'abord, pour sortir de la "foule" de Gusave le Bon. Ensuite parce qu'il s'agit de l'histoire d'une pensée aujourd'hui arrêtée. Sauf erreur de ma part, on ne réfléchit plus beaucoup sur cette chose unique, collective, invisible, omniprésente et incompréhensible que serait une foule, une masse, un groupe, une meute. Aujourd'hui, nous avons nos instituts de sondages qui sondent cette masse, la découpe et la divise, la structure et lui donne corps au-delà de ses manifestations physiques.Il y a quelque chose de pénible à lire ce livre car il brille surtout par son étrangeté, voire sa désuétude.
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Une oeuvre qui prit plus de vingt ans à son auteur. Elle parle des phénomènes de masse en sociologie, tellement importants dans ces premières décennies du XXe siècle. Et tellement étudiés aux quatre coins de l'Europe (et sans doute ailleurs aussi), par des philosophes et par les premiers psychanalystes.
Canetti, justement, fait partie des premiers, comme Ortega y Gasset, et, tout en vivant dans la même ville de Vienne que le Dr. Freud - qu'il semble détester - il peut produire un essai de quelques 600 p. en pur style XVIIIe siècle, sans se soucier le moins du monde de la nouvelle science de l'inconscient...
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Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
Mais quand le temps de paix est passé, la guerre sainte reprend ses droits. "Mahomet, dit un des meilleurs connaisseurs de l'Islam, est le prophète de la lutte et de la guerre... Ce qu'il a commencé par faire dans son milieu arabe, c'est le testament qu'il laisse ensuite à l'avenir de sa communauté : guerre aux infidèles, extension non pas tellement de la foi que de sa sphère d'influence, qui est la sphère même de la puissance d'Allah. Ce qui compte pour les guerriers de l'Islam n'est pas tellement la conversion que la soumission des incroyants."
Le Coran, le livre du prophète inspiré par Dieu, ne laisse aucun doute là-dessus. "Quand les mois saints sont passés, tuez les incroyants où que vous les trouviez ; saisissez-vous d'eux, refoulez-les et tendez-leur toutes les embuscades que vous pourrez."
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La pluie

En tous lieux, et surtout là où elle est rare, c'est, avant qu'elle tombe, l'unité de la pluie que l'on perçoit. Elle s'approche sous forme de nuage et commence par couvrir le ciel, qui s'assombrit avant qu'il ne pleuve ; tout se voile de grisaille. On a peut-être une conscience plus globale de l'instant où la pluie semble assurée que du phénomène lui-même. Car on la désire souvent très intensément, ce peut-être une question de vie ou de mort que la pluie tombe. Il n'est pas toujours facile de l'obtenir, et l'on recourt alors aux incantations ; il existe des méthodes nombreuses et fort diverses de l'attirer.
La pluie tombe en gouttes nombreuses. On les voit et l'on voit surtout leur direction. On dit dans toutes les langues qu'elle tombe. On voit la pluie en nombreuses raies parallèles, le grand nombre de gouttes qui tombent accentue leur unité de direction. Il n'est pas de direction qui impressionne l'homme davantage que celle de la chute ; toutes les autres ont en comparaison quelque chose de dérivé, de secondaire. La chute est ce que l'on redoute le plus dès l'enfance, et la première chose contre laquelle on soit armé dans la vie. On apprend à s'en garder ; à partir d'un certain âge, toute défaillance en ce domaine est ridicule ou dangereuse. La pluie, au contraire de l'homme, est ce qui doit tomber. Rien ne tombe aussi fréquemment et diversement que la pluie.
Il est possible que le nombre des gouttes enlève quelque chose de sa pesanteur et de sa dureté à la chute. On les entend frapper le sol, c'est un bruit agréable. On les sent sur sa peau, c'est un contacte agréable. Peut-être n'est-il pas sans importance que trois sens au mois participent à l'expérience de la pluie : la vue, l'ouï et le toucher. Tous ces sens la perçoivent comme multiplicité. Il est facile de s'en protéger. Il est rare qu'elle soit vraiment menaçante, et la plupart du temps elle enveloppe l'homme d'une bienfaisante épaisseur.
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De tous les malheurs dont l’humanité a été affligée de tous temps, les grandes épidémies ont laissé un souvenir particulièrement vivace. Elles éclatent avec la soudaineté de catastrophes naturelles, mais alors qu’un tremblement de terre s’achève après quelques brèves secousses, l’épidémie a une durée qui peut s’étendre sur des mois ou même une année. Le tremblement de terre atteint d’un seul coup le sommet de l’horreur, ses victimes périssent toutes à la fois. Une épidémie de peste agit au contraire par sommation, au début quelques-uns seulement sont pris, puis les cas augmentent ; on voit des morts partout, bientôt on en voit rassemblés plus que des vivants. Il se peut que le résultat de l’épidémie soit finalement identique à celui d’un tremblement de terre. Mais les gens sont témoins de la grande mort, elle se joue et s’accroît sous leurs yeux. C’est comme s’ils participaient à une bataille qui dure plus longtemps que toutes les batailles connues. Mais l’ennemi est dissimulé, on ne peut le voir ni le rencontrer nulle part. On se contente d’attendre d’en être touché. L’adversaire mène seul le combat. Il frappe qui il veut. Il en frappe tellement que l’on en vient fatalement à redouter qu’il ne frappe tout le monde.
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Certains peuples imaginent leurs morts, ou un certain nombre d'entre eux, comme des armées au combat. Chez les Celtes des hautes plateaux d'Ecosse, l'armée des morts est désignée d'un mot spécial, SLUAGH. Ce mot est rendu en anglais par SPIRITMULTITUDE, multitude d'esprits. L'armée des esprits va et vient en volant par grandes nuées, comme étourneaux sur le visage de la terre. Ils reviennent toujours sur les lieux de leurs péchés terrestres. De leurs infaillibles flèches empoisonnées, ils tuent chats, chiens, moutons et bestiaux des hommes. Ils livrent des batailles dans les airs comme les hommes sur la terre. On peut les entendre par les claires nuits de gel et voir leurs armées s'avancer l'une contre l'autre et se retirer, se retirer et s'avancer de nouveau. Après une bataille, rochers et pierres sont rougis par leur sang. Le mot GAIRM signifie cri, appel, et SLUAGH-GAIRM était le cri de bataille des morts. Le mot "slogan" vient de là : les cris de ralliement de nos masses modernes tirent leur nom des armées des morts de la haute Ecosse.
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Nous partirons d'un phénomène familier à tout le monde, la joie de trancher. "Mauvais livre", dit quelqu'un, ou "mauvais tableau", et il se donne l'apparence d'avoir à dire quelque chose d'objectif. Toujours est-il que sa mine trahit qu'il le dit avec plaisir. Car la forme du jugement trompe, et ne tarde pas à se faire personnelle. "Mauvais auteur" ou "mauvais peintre", entend-on tout de suite après, du ton dont on dirait "un méchant homme". On a constamment l'occasion de prendre des amis, des inconnus et soi-même en flagrant délit de trancher ainsi; impossible de méconnaitre cette joie du jugement négatif.
C'est une joie dure et cruelle que rien n'égare; le jugement n'est jugement que lorsqu'il est porté avec une sorte d'assurance inquiétante. Il ignore la clémence, comme la prudence. il est vite trouvé; le plus conforme à son essence est de se former sans reflexion. La passion qu'il trahit tient à sa rapidité. C'est le jugement inconditionné et le jugement rapide qui se peignent en plaisir sur les traits de celui qui juge.
En quoi consiste ce plaisir? On écarte quelque chose de soi pour le mettre dans un groupe médiocre, étant admis que l'on appartient soi-même à un groupe meilleur. On s'élève en abaissant autre chose. On suppose naturelle et nécessaire l'existence de ces deux groupes distincts, représentant des valeurs opposés. quel que soit le Bon, il est là pour contraster avec le Mauvais. On détermine soi-même ce qui appartient à l'un et à l'autre.
C'est la puissance du juge que l'on s'attribue ainsi...
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Video de Elias Canetti (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Elias Canetti
http://le-semaphore.blogspot.fr/2014/.... Elias Canetti (1905-1994), l’éveilleur d’un futur antérieur : Une vie, une œuvre (1998 / France Culture). Émission “Une vie, une œuvre” diffusée sur France Culture le 19 novembre 1998. Par Catherine Paoletti. Réalisation : Anna Szmuc. Enregistrement et mixage : Marie-Dominique Bougaud, Philippe Bredin et Dimitri Gronoff. Elias Canetti, né à Roussé ( en Bulgarie le 25 juillet 1905 et mort le 14 août 1994 à Zurich en Suisse, est un écrivain d'expression allemande, originaire de Bulgarie, devenu citoyen britannique en 1952 et qui a longtemps résidé en Suisse. Il a reçu le prix Nobel de littérature en 1981. Canetti est souvent associé à la littérature autrichienne mais il couvre une perspective plus large. Son œuvre a défendu une idée pluraliste de la culture européenne dans sa richesse et sa diversité, liée à un parcours de vie singulier. Il est l'auteur d'analyses de grande envergure sur le XXème siècle et de réflexions détaillées sur les mécanismes humains et les modes de fonctionnement psycho-sociaux. Son œuvre est composée de pièces de théâtre, d'un unique roman, d’essais, de recueils d’aphorismes et d'une autobiographie en quatre volumes. Entre 1924 et 1929, il vit à Vienne où il étudie la chimie et est bientôt reçu docteur. Pendant cette période, il entreprend de nombreux voyages à travers l’Europe, notamment à Paris, en Bulgarie et à Berlin… C’est également pendant cette époque charnière de l’histoire, où l’on peut entendre les premiers bruits de bottes en Allemagne, qu’il développe de façon autodidacte ses connaissances puis ses théories artistiques en participant à des rencontres d’intellectuels - des salons - et aussi en travaillant sur ses premières idées littéraires. Canetti fera la connaissance de Karl Kraus, un intellectuel polémiste, fondateur de la revue “Die Fackel” (“Le Flambeau”), qui aura une influence majeure sur lui. Il rencontre peu après sa future femme : Venetiana (dite Veza) Taubner-Calderon. Pour subvenir à ses besoins et pour écrire, il traduit en allemand plusieurs livres de l’anglais. Toutes ses activités le happent et le poussent à délaisser la chimie et son enseignement. En effet, il va entre autres fréquenter les réunions qui s’organisent autour d’Alma Mahler, la veuve du compositeur Gustav Mahler, et entamer la rédaction de son roman “Die Blendung” (“Auto-da-fé”) ainsi que d'œuvres théâtrales. Il rencontrera des personnalités du monde de la culture comme Bertolt Brecht, George Grosz, Alban Berg, Robert Musil… Le 15 juillet 2927, un événement marque à jamais sa vie et son œuvre : une manifestation populaire qui tourne à l’incendie du palais de justice de Vienne. Cela provoque en lui le désir d’analyser et de comprendre le rapport entre les comportements de masse et le pouvoir. Il étudie alors cette problématique centrale de l’histoire du XXème siècle jusqu’en 1960, date de la publication de l’œuvre majeure de sa vie, “Masse und Macht” (“Masse et puissance”), presque exclusivement consacrée à cette phénoménologie des masses ainsi qu'à l'illustration de toutes les manifestations du pouvoir politique : « Il se peut que toute la substance du 15 juillet soit entièrement passée dans Masse et puissance. » Canetti s'y débarrasse de toutes les théories préexistantes à l'époque et cherche à « arracher le masque » de la figure centrale du pouvoir qu'il nomme le « survivant », pour « prendre le siècle à la gorge ». Avec : Alain Brossat, professeur de philosophie à l’Université Paris-VIII Youssef Ishaghpour, auteur de “Elias Canetti : métamorphose et identité” (La Différence) Marc de Launay, philosophe et traducteur français de philosophie et de littérature allemandes Gerald Stieg, professeur de littérature et civilisations allemandes et autrichiennes à l’Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3 Avec les voix d’Elias Canetti, Karl Kraus, Raphaël Sorin et Angèle Saül Textes lus par Daniel Mesguich Archives sonores : Dominique Jameux Archives INA : Martine Auger Sources : France Culture et Wikipédia
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