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Marie-Claude Char (Éditeur scientifique)Yves Battistini (Auteur de la postface, du colophon, etc.)
EAN : 9782070410682
198 pages
Gallimard (15/10/2002)
3.92/5   33 notes
Résumé :
Le Marteau sans maître est un recueil de poèmes de René Char paru en 1934. Il reparaît l'année suivante chez José Corti, puis suivi de Moulin premier à partir de 1945.

Bien que paru aux éditions surréalistes, et contenant des poèmes écrits entre 1927 et 1935, il marque la prise de distance de René Char avec le surréalisme.

Source : Wikipédia
Que lire après Le Marteau sans maître, suivi de 'Moulin premier'Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Publié pour la première fois en 1934 aux Éditions surréalistes puis chez José Corti, le Marteau sans maître n'est sans doute pas le plus accessible des recueils de René Char mais il est un moment essentiel dans la compréhension de son oeuvre.
En 1934, Sans totalement renier le surréalisme et ses valeurs, René Char prend ses distances avec le mouvement.

René Char est un homme de l'action autant que de la pensée, il est aussi un homme épris de liberté et de solitude. Dans le Marteau sans maître composé de textes en prose et d'aphorismes (dans Moulin premier, deuxième partie du recueil), l'écriture semble en mouvement perpétuel. Elle paraît disloquée, fragmentée, abrupte, vidée de sens… C'est comme si dans le poème, chaque mot ou presque, devait être utilisé dans son sens originel, unique, sans dépendance avec les autres.

" J'écoute marcher dans mes jambes
La mer morte vagues par-dessus tête

Enfant la jetée-promenade sauvage
Homme l'illusion imitée

Des yeux purs dans les bois
Cherchent en pleurant la tête habitable. " *

Sous la dissonance apparente des textes qui composent le Marteau sans maître, une impression apparaît, celle chez René Char d'une recherche de totalité, de vérité.
Chez le poète, le mot, la phrase sont à eux seuls une totalité, ils sont comme un espace, un sens qui s'ouvrent séparément, indépendamment. Né d'un silence préalable à son existence, isolé des autres, le mot agit comme une origine, une étincelle, une déflagration qui fait apparaître tout son sens, tout son potentiel d'évocation aussi. C'est en cela, que les textes fragmentés, morcelés du Marteau sans maître font apparaître une certaine unité, naître une portée singulière.

J'ai pour René Char et sa poésie un attachement tout particulier. Dans le Marteau sans maître qui préfigure tout ce que sera le reste de son oeuvre, je retrouve l'homme engagé, intransigeant, exigent, d'une générosité sans fard, au regard profond et lucide sur ses contemporains, sur le monde qui l'entoure. René Char était un poète profondément humain.
Pour preuve ce très beau poème extrait de Commune présence, un texte qui ponctue le recueil :

" Tu es pressé d'écrire
Comme si tu étais en retard sur la vie
S'il en est ainsi fais cortège à tes sources
Hâte-toi
Hâte-toi de transmettre
Ta part de merveilleux de rébellion de bienfaisance
Effectivement tu es en retard sur la vie
La vie inexprimable
La seule en fin de compte à laquelle tu acceptes de t'unir
Celle qui t'es refusée chaque jour par les êtres et par
les choses
Dont tu obtiens péniblement de-ci de-là quelques
fragments décharnés
Au bout de combats sans merci
Hors d'elle tout n'est qu'agonie soumise fin grossière
Si tu rencontres la mort durant ton labeur
Reçois-la comme la nuque en sueur trouve bon
le mouchoir aride
En t'inclinant
Si tu veux rire
Offre ta soumission
Jamais tes armes
Tu as été créé pour des moments peu communs
Modifie-toi disparais sans regret
Au gré de la rigueur suave
Quartier suivant quartier la liquidation du monde
se poursuit
Sans interruption
Sans égarement

Essaime la poussière
Nul ne décèlera votre union. "


(*)  Bel édifice et les pressentiments, extrait d'Arsenal.
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L'avant-propos du recueil commence par ces paroles de René Char : « Je pense que si je n'avais écrit que "Le Marteau sans maître", on me situerait quelque part dans le surréalisme, ce qui serait inexact. Quand j'ai écrit "Arsenal", je n'avais que dix-sept ans et je ne savais même pas que le surréalisme existait. Eluard m'avait écrit, c'est comme cela que je l'ai connu et c'est par amitié pour Eluard que j'ai pris place dans le surréalisme sans qu'il y ait eu de ma part une adhésion à la doctrine et sans que j'aie pratiqué la méthode surréaliste. J'ai toujours ignoré l'écriture automatique et tout ce que j'ai écrit était consciemment élaboré. » Cette précision de l'auteur révèle bien les vives ressemblances de ce recueil du jeune Char avec les poètes surréalistes. Inutile donc de chercher dans les poèmes de ce recueil (aphorismes, vers et récits en prose) une quelconque construction narrative. Je fais peut-être erreur, mais j'y ai vu une suite de jeux sonores ou d'associations lexicales originales et insolites cherchant à créer des images. Même si je fus sensible à d'autres recueils postérieurs du poète de l'Isle-sur-Sorgues, l'univers de ces premiers poèmes ne m'a pas touché. Je suis resté froid aux tentatives complexes et mystiques de René Char, qui se nourrissait, à l'époque, des obscurs écrits d'alchimistes ou autres cabalistes. C'est probablement cet univers là, assez hermétique, qui me laissa quelque peu froid et distant.
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Il est des livres que l'on frôle. Sentiment désarmant d'être passé à côté. Des éclairs, de temps à autre, au coeur de l'obscur, du concret surgissant, rarement, au coeur d'une oeuvre abstraite, mélange déroutant de corps et de concepts, d'idées à la Platon et de lutte vitale.

René Char, disons-le tout net, ça se présente comme difficile, même si la notion de difficulté n'a que peu de sens en poésie; ça résiste, ça sonne sacré, le profane est à distance, ou alors il se plonge dans le mystère, on entre en lecture à la manière dont on entre en religion. Je reste au seuil, je n'ai pas le courage de plonger. J'aime ce qui parle directement, ce qui résonne. Ici, pas grand chose, pas encore grand chose. Des aphorismes, lapidaires. Relever quand même des formules, sans doute géniales : "Terre, devenir de mon abîme, tu es ma baignoire à réflexion", "Nous nous galvanisons dans les cendres qui nous ont vomis", "L'éternité / C'est l'insistant reflet amoureux de votre corps", "La rose violente / Des amants nuls et transcendants".

Abrupte, violente, coupante, sèche, la poésie de Char a quelque chose de la pierre, de la pierre taillée, du couteau (sans manche), du meurtre. Impression que les vivants deviennent statues de marbre. Poésie pour poètes ? comme toujours. Sentiment de n'être pas assez poète, communion refusée, mais espoirs nés dans les flashs cités. Nécessité de relire, de se laisser piquer, d'errer, de gommer l'intellectualité. Peut-être aller voir la suite. Lire plus lentement.
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Si l'on se fie à Albert Camus, René Char (1907-1988) est certainement l'un des grands poètes français du XXème siècle. Personnellement, je ne l'avais jamais lu avant de découvrir ce livre dont le titre a attiré mon attention, par référence à l'oeuvre musicale de Pierre Boulez. "Le marteau sans maître" a été publié en 1934, puis en 1945 (dans une version révisée).
René Char s'est d'abord placé dans l'orbite surréaliste, ensuite il s'en est éloigné. Dans un bon nombre de poésies du présent recueil, on trouve des marques de "l'écriture automatique" initiée par les amis d'André Breton. J'avoue que cette pratique ne m'a jamais fait vibrer; je la trouve très surestimée. C'est pourquoi beaucoup de ces vers m'ont laissé assez froid. Désolé… Toutefois, j'ai apprécié quelques poésies que je vais mettre en citation sur Babelio.
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En 1934, le premier véritable recueil poétique, déjà fulgurant, de René Char.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2019/08/27/note-de-lecture-le-marteau-sans-maitre-suivi-de-moulin-premier-rene-char/
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
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Commune présence

Tu es pressé d’écrire
Comme si tu étais en retard sur la vie
S’il en est ainsi, fais cortège à tes sources
Hâte-toi
Hâte-toi de transmettre
Ta part de merveilleux de rébellion de bienfaisance
Effectivement tu est en retard sur la vie
La vie inexprimable
La seule en fin de compte à laquelle tu acceptes de t’unir
Celle qui t’est refusée chaque jour par les êtres et les choses
Dont tu obtiens péniblement de-ci de-là quelques fragments décharnés
Au bout de combats sans merci (…)
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A l'horizon remarquable

Les grands chemins
Dorment à l'ombre de ses mains

Elle marche au supplice
Demain
Comme une traînée de poudre.
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LES SOLEILS CHANTEURS
Les disparitions inexplicables
Les accidents imprévisibles
Les malheurs un peu gros
Les catastrophes de tout ordre
Les cataclysmes qui noient et qui carbonisent
Le suicide considéré comme un crime
Les dégénérés intraitables
Ceux qui s’entourent la tête d’un tablier de forgeron
Les naïfs de première grandeur
Ceux qui descendent le cercueil de leur mère au fond d’un puits
Les cerveaux incultes
Les cervelles de cuir
Ceux qui hivernent à l’hôpital et que leur linge éclaté enivre encore
La mauve des prisons
L’ortie des prisons
La pariétaire des prisons
Le figuier allaiteur de ruines
Les silencieux incurables
Ceux qui canalisent l’écume du monde souterrain
Les amoureux dans l’extase
Les poètes terrassiers
Les magiciens à l’épi
Règnent température clémente autour des fauves embaumeurs de travail.
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La vase sur la peau des reins, le gravier sur le nerf optique, tolérance et contenance. Absolue aridité, tu as absorbé toute la mémoire individuelle en la traversant. Tu t'es établie dans le voisinage des fontaines, autour de la couque, ce guêpier. Tu rumines. Tu t'orientes. Souveraine et mère d'un grand muet, l'homme te voit dans son rasoir, la compensation de sa disgrâce, d'une dynastie essentielle.

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CRUAUTÉ

L’abondant été de l’homme
Que celui qui suivit l’établissement par ses soins des premières dénaturations
En faisant la part de l’aveuglement
Piétinée la croûte tiède pulvérisé l’avorton
Celui qui éclaire ne sera pas éclairé
Contemple sans pouvoir l’achever la merveille agonisante
Le portail poussé tu t’abats

Nous subissons la loi corruptrice du Borgne
Les brûlantes détresses locales sont le fruit de nos glandes
Nous nous galvanisons dans les cendres qui nous ont vomi
Comme si les excroissances de chair contenaient des dépôts malsains
Instruments de perfection types précis
Nous sommes les pieds d’une grandeur sans pareille

Les peuples danseurs obnubilés par le sentiment de plénitude
Après l’exaltation
Se dévêtent de la substance de jouir
Retournent à la projection permanente
Alors les fumées coriaces construisent des postes dans le vent
La décomposition jamais surprise par la justesse du projectile
Va dans le cadavre
Accomplir sa besogne massive de couleuvre
Jusqu’à nous.
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Videos de René Char (57) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de René Char
Les grands classiques du répertoire N°1 : René Char. “Claire”, suivi de “Fêtes des Arbres et du Chasseur” - Première diffusion sur la Radiodiffusion-Télévision Française : 14/05/1955. Réalisation : Alain Trutat. Musique originale : Pierick Houdy. Chef d'orchestre : Pierre Michel Le Conte. Avec Jacqueline Pagnol, Pierre Vaneck, Roger Blin, Madeleine Sylvain, Jean Mauvais, Pierre Leproux, Gaetan Jor, Jean-Jacques Morvan, Jean Péméja, Roger Pigaut, Jean Topart, Paul Emile Deiber, Lucienne Bogaert, Pierre Larquey, Michel Dumur, Catherine Goetgheluck. Et Cyril Dives à la guitare et l’Orchestre National de la RTF. “Claire” Dans cette suite, René Char suit le cours d’une rivière à laquelle il donne le nom familier de Claire. Il imagine que dans les villages et les lieux qu’elle traverse vivent, participant de l’existence de tous, des jeunes filles et des jeunes femmes appelées également Claire. Mais elles ne sont que des personnifications vivantes de la rivière elle-même. Claire est celle que le poète attend, la “Rencontrée” qui seule lui permet de chasser ses fantômes et de continuer à vivre. Claire est une et plusieurs, toutes celles qui “aiment, rêvent, attendent, souffrent, questionnent, espèrent, travaillent”. À travers les personnages d’un chef d’opérations dans le maquis puis d’un chargé de mission de la Résistance, ce sont ses propres contradictions qu’interroge le poète des “Feuillets d’Hypnos”. Dans “Claire”, il poursuit sous une forme dramatique son analyse à la fois poétique et politique du réel, avoue ses déceptions face à l’hostilité d’un monde qui aurait dû changer et s’est reconstruit, étranger à cette espérance. “Fêtes des Arbres et du chasseur” Poème pour voix et guitare. Deux joueurs de guitare sont assis en plein air dans l’attente du chasseur. Ils échangent des poèmes. Thèmes : Création Radiophonique| Radiodiffusion-Télévision Française| Grands Classiques| Poésie| France Culture| René Char
Source : France Culture
+ Lire la suite
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