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Denise Laroutis (Traducteur)
EAN : 9782743617936
243 pages
Payot et Rivages (06/03/2008)
3.4/5   5 notes
Résumé :

Il y a trente ans, ils ont lutté au coude à coude contre la dictature franquiste. Puis le groupe s'est éparpillé, dissout, comme la révolution. Aujourd'hui les vieux amis se retrouvent à la nuit tombée dans un restaurant madrilène. Le temps est venu des mises au point, des mises à plat et en demeure. Du désespoir aussi. Ils sont désormais promoteur immobilier, veilleur de nuit, fonctionnaire ou profes... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
A la fin des années 60, Carlos ,Pedrito, Rita , Narcisso et les autres ( ça commence comme un film de Claude Sautet, mais on ne va pas retrouver le regard tendre de Claude Sautet...) croyaient que le communisme créerait un monde meilleur. Et, de réunions de cellule aux nuits passées dans des bars à refaire le monde , ils y ont cru ensemble.
Seulement, trente ans plus tard, ils ne sont plus ensemble. Chacun a suivi son chemin, et la seule chose qui me semble les rapprocher, c'est bien le désespoir. Propre à ceux qui ont attendu beaucoup et qui n'ont pas su faire le deuil de ce qu'ils n'ont pas obtenu. Difficile de faire ensemble le constat lors d'un dîner de retrouvailles ( quelle idée, aussi...) qu'ils n'agitaient que du vent. Et que le vent des idéologies est plus facile à agiter -parce que plus abstrait- que la prise de conscience de la détresse de ceux qui nous entourent de très près.. Et trente ans après, il en est encore qui ne l'ont pas compris , et qui attendent..
" Merde au futur. C'est rien, c'est une idée qu'on s'est mis dans la tête- nous qui pensons. le futur n'existe pas. Ce n'est que de la pensée, vous comprenez?...Le pire du futur, c'est ça: le futur n'existe pas et pèse sur nous plus que le passé, qui s'est déjà évanoui aussi. Une vie provisoire, une vie en salle d'attente, tu n'as pas l'impression que nous attendons qu'il se passe quelque chose, qu'il nous arrive une vie nouvelle?"

C'est un roman que j'ai trouvé difficile à lire . D'abord parce que c'est un roman musical- choral comme on dit- dans lequel chaque personnage raconte son histoire et sa façon de voir les choses , que chaque version éclaire ou contredit celle de l'autre, mais qu'il n'y a pas de vrai passage de l'une à l'autre si bien que l'on a du mal à se repérer . Mais que c'est très bien comme cela, cet assemblage de partitions qui finalement aboutit à un ensemble, sans vraie dissonance..
Et puis parce que c'est un roman implacablement réaliste, et que la réalité est toujours dure.Amère. Je le trouve quand même un peu trop sévère, Rafael Chibres, pour ses personnages. Et surtout pour lui, car c'est lui -même qu'il vise:

"J'en avais assez des discours bigots sur notre génération et sur la perte des idéologies, je me suis dit que j'allais les faire exploser à la poudre. Sans idéologie, on n'est rien, on est des ruines! Chaque personnage de ce roman est une parcelle de moi que je me suis acharné à détruire...
Ecrire ce livre m'a fait beaucoup de mal. Depuis je ne trouve plus de voie vers l'écriture. Il n'y a pas de littérature sans Histoire, ne comptez pas sur moi pour verser dans l'ordure autobiographique..."
dit-il dans un entretien.

Rafael Chibres a fait de la perte de ses illusions un fort beau roman...et m'a renvoyée au fameux texte de Philip Roth, plein de la même difficile mais indispensable lucidité , qui dit que c'est se tromper et se tromper encore qui fait que l'on est vivant..
Et j'aurais envie de lui dire que la "lutte finale", ça c'est du vent, oui, mais que la lutte constante n'en est pas ... mais cela n'a pas sa place dans un petit compte rendu de lecture!
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Les vieux amis

«  Comme si je n'avais pas appris après tout ça que savoir et vivre sont incompatibles ; que savoir nous bousille la vie, nous lamine. »

Hier encore j'avais vingt ans
Je caressais le temps
Et jouais de la vie
Comme on joue de l'amour
Et je vivais la nuit
Sans compter sur mes jours
Qui fuyaient dans le temps
J'ai fait tant de projets qui sont restés en l'air
J'ai fondé tant d'espoirs qui se sont envolés
Que je reste perdu ne sachant où aller
Les yeux cherchant le ciel, mais le coeur mis en terre
(Charles Aznavour)

C'est la chanson que Pedrito va faire entendre au dessert, avant les toasts.
Dans leur jeunesse, du temps de Franco, ils participaient à des réunions de cellules, ils menaient des actions violentes ; ils sont même passés par la prison. « Poussières d'étoile qui ont brillé un instant puis se sont éteintes. » On n'en saura pas beaucoup plus.

Et là, la vie les ayant menés – malmenés ou choyés - chacun sur son propre chemin, ils se retrouvent dans un grand restaurant madrilène, du moins ceux qui ont bien voulu répondre à l'invitation. Histoire de reconnaître : "Qu'avons nous gagné ? Qu'avons nous perdu ? Nos illusions ? Salope de vie, non ?"

Du repas, on ne saura pas grand chose, non plus. Car ce qui intéresse Chirbes, c'est ce qui se passe dans leur tête, l'un après l'autre. Cet enchaînement d'idées, de rétrospectives, de considérations parfois fumeuses. Cette litanie d'histoires ressassées. On est un peu perdu , d'ailleurs, on ne sait pas toujours qui parle, qui a épousé qui, quel métier fait tel autre. Quelle importance ? Ce qui compte ce sont à peine les individus, c'est cette amertume commune, ces regrets. Ceux qui portent beau, ceux qui ont souffert ou souffrent encore, ceux qui simulent la réussite : tous, amers , entre regrets, nostalgies et rancune. Rancune face à leur passé, où ils ont tant voulu tout changer. Et le changement est là, oui, sans doute. Pas celui qu'ils auraient voulu, mais d'une évidence telle que, paresseux, il n'ont su que trahir leurs illusions pour lui, pour son opulence, sa vulgarité, sa facilité. Qui sont si douces, pourtant....

Qu'est ce qu'ils ont tant voulu dans leur jeunesse qu'il n'ont pas su trouver ? Qu'est ce qu'ils ont tant voulu dans ces retrouvailles auxquelles ils n'ont su donner plus de sens ? Ont-ils réellement cru que cela suffirait à écarter les gigantesques solitudes dans lesquelles ils se sont enfermées ? Tant de douleurs sur le parcours, tant d'amitiés trahies, , tant de morts, tant d'amours dévastés, tant de mesquineries...

« Nous avons tellement changé, nous avons tellement peu changé. »

C'est un livre incroyablement triste sur des vies mal vécues et vite passées, sur l'amer désespoir des illusions perdues. Car, comme les autres, les anciens combattants de la révolution ont leurs faiblesses, leurs médiocrités, leur facilités. J'ai pleuré avec ces antihéros qui ne savent même plus s'ils se sont tant aimés dans leur jeunesse. Mais la flamme qui continue à s'entretenir, bien cachée au fond d'eux même, éclaire ces petites compromissions d'une lueur bien cruelle.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
(…) que je lui raconte qui ils sont, mes camarades de jeunesse, ce que j'ai aimé, ce que j'ai cherché, ce que je n'ai pas su trouver et ce que j'ai perdu, parce que c'est ce que je veux raconter, qu'en plus de la maturité j'ai moi aussi, en moi, une parcelle de jeunesse, les vieux ont tout, sous un emballage laid et rugueux, tout est là au chaud, je veux lui raconter que je suis ce qu'il est et en même temps ce qu'il sera un jour.
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Videos de Rafael Chirbes (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Rafael Chirbes
Rafael Chirbes - Sur le Rivage .Rafael Chirbes - Sur le Rivage aux éditions Rivages. Traduit de l'espagnol par Denise Laroutis. Rentrée littéraire janvier 2015. http://www.mollat.com/livres/chirbes-rafael-sur-rivage-9782743629489.html Notes de Musique : ?Polarity? (by HE-LUX). Free Music Archive.
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