Quel beau titre, très poétique, qui fait davantage penser à un vers de
Victor Hugo plein de lyrisme et d'élan qu'à un ouvrage historique sérieux, didactique et froid. Mais ce n'est pas pas un livre purement intellectuel, car son sujet lui-même est poétique, la perception du vent dans l'histoire.
Alain Corbin est un historien du corps, qui a évolué comme historien des sensibilités. Il travaille sur l'évolution des représentations, des sensations et des perceptions de phénomènes qui touchent les hommes : les odeurs, les bruits et le silence... Ici, ressentir le vent se fait par tous les sens : ouïe pour évaluer la force d'une brise ou d'une bourrasque, vue avec l'observation de feuilles qui volent, odorat car le vent apporte des senteurs, le toucher quand on ressent sur sa peau la caresse ou la violence du vent, même le goût aussi.
Le titre oppose deux termes, comme deux éléments perçus différemment de façon parallèle au cours de l'histoire. La "rafale" renvoie à l'étude scientifique du vent, le développement des appareils de mesure, des prédictions, des analyses des tempêtes... C'est au XVIII ème siècle, à l'époque des Lumières, que les premières expérimentations rationnelles apparaissent, les connaissances progressent vraiment au XIX ème siècle.
Le terme de "zéphir", lui, renvoie à la perception poétique du vent, de la conception mythologique des Grecs qui incarnent les formes du vent avec le dieu Eole ou, à la conception biblique qui y voit le souffle de l'esprit divin voire la colère divine comme un châtiment, au souffle du Printemps chez Botticcelli, au lyrisme romantique. Évidemment,
Alain Corbin évoque
Victor Hugo, par exemple avec
les Travailleurs de la mer, mais aussi
Leconte de Lisle. Enfin, le vent est aussi perçu pour son potentiel érotique, notamment lorsqu'il dévoile les formes féminines collant leurs vêtements sur le corps, ou qu'il émeut les femmes en provoquant des caresses sensuelles.
Je regretterai juste d'un point de vue très personnel que dans un court panorama plus contemporain,
Alain Corbin n'ait pas évoqué la Horde de Contrevent, roman où le vent est le personnage principal, sous toutes ses formes.