Ce livre ne m'a pas charmé... pourtant ça partait plutôt bien, une virée entre copines quadra au fond de la campagne dans un village fantôme. L'idée est sympathique mais le ton de la narratrice frôle la condescendance jugeant chacun et chacune, critiquant sur le fond un peu tout: les ecolos, les véganes, les athées, les trans, les bobos... un peu trop amer pour moi, j'aurai voulu en savoir plus sur les autres personnages .
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L’appréhension que je ressens à la campagne, hostile pour des citadins qui n’en connaissent pas les codes, repose sur l’idée qu’elle est investie de sa pensée propre, au sein de laquelle les hommes ne peuvent être que des ennemis. Idée quasi délirante, que je ne peux avouer à mes amies qui, elles, sont subjuguées, et s’imaginent déjà passer leurs journées à contempler ce spectacle unique, assises autour de la table en fer forgé posée devant la maison. Chaque fois que je suis mal à l’aise dans ce type d’environnement, la conscience que j’ai d’être en décalage par rapport aux autres se renforce, et alors, je me referme sur moi-même. Je sais, à cet instant, que je frôle la maladie mentale, cette distorsion de la perception qui fait qu’on n’est bien nulle part : l’extérieur représente une menace, mais, repliée sur soi, on ne peut échapper à sa peau, qui devient une prison.
J’avais l’illusion de vivre des choses fortes, différentes, mais au fond, ça ne rimait à rien. La grosse descente. Je me suis traîné
jusqu’à Adicora, et je suis resté longtemps sur la plage, à regarder le coucher de soleil… »
Cette suite de clichés me fait sourire intérieurement. Les zoreilles, comme on les appelle, c’est-à-direles Français de métropole, sont tous pareils : un peu d’exotisme, et ils sont persuadés d’être dans le vrai.
La façon de vivre occidentale leur semble factice,
parce que trop sophistiquée, comme si dans les autres
pays, soi-disant plus authentiques ou proches des
valeurs traditionnelles, les questionnements existentiels n’étaient pas les mêmes.
Ce « les filles » est si familier, il nous ramène à une bande d’ados écervelées : qu’on se désigne ainsi entre nous, d’accord, mais venant de lui, alors qu’on ne se connaît pas, c’est condescendant et vulgaire. Sur un ton sec, je lui donne nos prénoms, et lui explique qu’on s’est connues au lycée à Nouméa. Après le bac,
on est venues étudier en France, et finalement, on est restées, parce qu’on a choisi des carrières artistiques, impossibles à mener là-bas, sauf So, qui est agrégée
d’allemand, prof dans un lycée à Vincennes, mais, elle, c’est parce qu’elle a rencontré son mari.
Est-ce parce qu’il y a un homme que nous avons eu le réflexe de nous mettre en valeur ? Ce n’est pourtant pas pour le séduire, mais il y a, comme intégré à
notre inconscient, l’idée que les femmes doivent être agréables à regarder et s’assortir au décor. Corvolle est désert, et Philippe ne semble pas porté sur le style,
même si le combo chemise retroussée-chino, l’un des musts du sex-appeal masculin, est assez étudié, mais peut-être est-ce pour nous plaire à nous-mêmes,
nous avons revêtu de jolies robes, enfilé des sandales à bride, et appliqué du baume sur nos lèvres.
Pleines de contradictions, elles ont un désir de liberté, mais sont
rattrapées par leur besoin de confort. Pas de connexion
internet, pas de magasins écoresponsables, on est au beau milieu de nulle part, à quoi s’attendaient-elles ?
En ce qui me concerne, je n’ai pas de velléité idéaliste : libérale et démocrate, je n’ai aucun complexe vis-à-vis du capitalisme ou de la vie citadine. Là, je ne me
sens pas à ma place, mais je prends sur moi, malgré la grossesse, et suis prête à me laisser porter par le cours des choses.
Colette Maciet pour son livre « Haute couture » et Angie David pour son livre « La Renommée »