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la filiation sous (presque) toutes ses formes

C'est sûrement la question intime qui a dirigé Erri de Luca vers la filiation, nous apprend-il en préface : « Je suis resté fils de ce père mort à l'âge que j'ai aujourd'hui. Même si je peux mourir plus vieux que lui, je reste un fils. Je ne connais pas le degré profond de la paternité qui produit le saut de génération. J'ignore sa grandeur nature ».

Mais c'est aussi sa culture et sa propension à mettre en relief les détails accrocheurs dans les histoires qui l'ont sûrement poussé vers l'écriture de ce recueil, dans lequel il sera question de filiation sous différentes formes, et pas forcément celles que l'on imagine : Naples sera ainsi à l'honneur chez l'auteur de Montedidio, une ville-mère de tous ces enfants des rues, « qui avait accouché d'eux par grappes après la guerre et qui les dressait à surmonter la journée ». Nous assisterons aussi à la rencontre d'un fils célèbre avec son père dans la création, face au chevalet et sa toile blanche. Nous connaîtrons mieux l'auteur malgré « l'économie des souvenirs » en le croisant dans sa désobéissance, au gré de la question du droit à l'insubordination. Il sera aussi question d'infanticide ou de tuer le père, de transmission de don ou du refus d'intervenir en faveur de son fils, au cours de voyages dans l'espace et le temps, le réel ou le mystique.

Mais le point d'orgue de ce recueil est sans conteste l'histoire de la fille d'un nazi, plus longue que les autres et réécrite par Erri de Luca à cette occasion. Il y questionne la morale et le choix de la descendance quand le sang est assassin, quand papa semble plus compliqué à articuler avec ses «  deux syllabes qui ne peuvent pas s'attacher en un seul mot », et fait résonner dans notre société le choix contemporain de certains pour la stérilisation, par engagement volontaire envers la planète et ses ressources.

Faute d'enfant, Erri de Luca plante ainsi des graines en littérature. Recueil de nouvelles ou recueil de récits peu importe, c'est un court recueil d'histoires savoureuses à coup sûr – à lire comme un écoute un conteur près d'une cheminée. le ton rocailleux de l'auteur enrobe ces histoires jugées extrêmes par lui-même, mais elles croustillent délicatement sous sa prose, empreinte de finesse et de poésie.
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L'auteur italien Erri de Luca (que d'ailleurs je vois souvent rangé à la lettre l'des librairies, alors qu'il me semble qu'on tient compte de cette particule pour les noms italiens) publie un nouveau recueil de textes.
Le fil conducteur de ceux-ci sont la filiation, un thème assez nouveau dans la prose de De Luca, du moins de façon aussi explicite.
On retrouve à travers ces textes les autres fils rouge de l'écrivain: la bible, Naples, la shoah, les mouvements sociaux de 68, les guerres et leurs victimes, la montagne.
Chose étonnante, est présent dans ce livre un texte déjà publié pour lui même (Le Tort du Soldat) mais remanié pour l'occasion ! On y (re)découvre le récit d'un autre point de vue. Intéressant !
On passe donc de Chagall peignant son père, d'Abraham sacrifiant son fils a De Luca quittant le sien pour s'opposer à la vieille société italienne.

L'écriture de l'auteur aujourd'hui septuagénaire est toujours de la même qualité, mêlant force et simplicité, peut être plus intime qu'avant, mettant un peu plus en scène sa personnalité profonde et ses fêlures...

Un peu court à mon goût, néanmoins.
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Neuf récits composent ce petit livre. Chacun d'eux est un regard sur les relations entre parents et enfants et, plus largement, entre générations.
On y croisera le sacrifice d'Abraham, le « mai 68 » italien , une fille découvrant que son père a eu un passé nazi, Marc Chagall peignant son père, les enfants de la rue napolitaine, etc...
On retrouve ici le poète, l'homme féru de la Bible, l'engagé qui conclut avec sagesse, que malgré les remous de l'Histoire les générations sont comme les jambes : "l'une avance d'abord, puis c'est au tour de l'autre. Nous ne nous croisons pas, nous avançons. Nous sommes les générations, nul ne peut nous arrêter".
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J'ai découvert Erri de Luca avec Montedidio qui m'a incité à partir illico pour Naples, j'ai fait confiance à l'auteur et ai rarement été déçue quoique ses romans napolitains sont mes préférés. Impossible et les textes écrits pendant le confinement le Samedi de la Terre ont aussi trouvé un écho militant et écologique qui m'ont parlé. Récemment j'ai écouté sa voix dans des podcasts de Radio France : L'Heure Bleue. 

Grandeur nature est un recueil d'une vingtaine de nouvelles et textes courts  souvent autobiographiques, sur le thème du rapport père-fils. Erri de Luca même septuagénaire, se considère toujours un fils puisque qu'il n'a jamais eu d'enfant. 



Le texte GRANDEUR NATURE s'ouvre sur le portrait du père de Chagall avec l'émancipation du fils qui s'exile, de sa ville et de sa langue, le yiddisch, mais il se mêle au texte biblique du sacrifice d'Abraham et de l'obéissance d'Isaac qui se laisse lier, attacher pour le sacrifice . Obéissance insensée.

N'existe-t-il pas de légitime défense contre son père, n'existe-t-il pas un droit de rébellion ? Est-ce bien moi qui ai écrit cette phrase, démenti de moi-même, des jeunes d'une génération qui s'est insurgée contre les pères ?

Je n'arrive pas à adhérer aux références au textes sacrés et surtout à l'hébreu bibliques. Pourquoi donc traduire lecaved en "donner du poids" et non pas en "honorer"? Quand on félicite quelqu'un "col hacavod" c'est un honneur et  non pas une charge! peut être mon hébreu moderne parasite la lecture religieuse. La recherche du sacré dans les textes m'est totalement étrangère et même m'agace un peu. Ironie de cette référence quand je lis plus avant dans le livre le chapitre sur Mai 68

Un court texte intitulé Note rappelle que Marc Chagall  et Stravinsky étaient détenteurs d'un passeport Nansen 

"Un apatride est quelqu'un qui perd sa nationalité par privation d'État. En Italie, les lois raciales de 1938 la retirèrent aux personnes d'origine juive.
Nansen reçut le prix Nobel de la paix en 1922 pour le passeport qu'il avait voulu et réalisé."

Utile rappel dans l'Italie de Meloni!

Dans Notion d'Economie, Erri de Luca raconte son enfance, son éducation, les rapports à l'argent que lui ont transmis ses parents. 

le texte suivant raconte les enfants misérables de Naples. Erri de Luca n'est jamais meilleurs que quand il raconte sa ville.

le Tort du Soldat est une histoire plus longue, tirée d'une version théâtrale ancienne. la culpabilité peut-elle se transmettre à travers les générations? La fille doit-elle porter le lourd héritage du père (alors qu'on lui a caché le tort?). Ici aussi, j'ai calé aux références de la kabbale. Décidément je suis anticléricale totale! le nazi se penchant sur la kabbale, très tordu! 

MERCI est une histoire sur la relation mère/fille que j'ai bien aimé.

UNE EXPRESSION ARTISTIQUE  illustré par un pavé lancé : Qui chute Anvidalfarei  

1968 fut l'année académique du pavé extrait de sa base et projeté en l'air.

nous étions nombreux, enfants de l'après-guerre, de l'élan d'un peuple à se reproduire après les décimations. Nous étions aussi la première génération cultivée en masse. Les deux vertus réunies étaient incendiaires.

Continuons le combat ». de là aussi le nom de l'organisation révolutionnaire italienne qui a suivi : Lotta Continua

Expression artistique : il cite les artistes qui ont donné des oeuvres pour la lutte :

Beuys, Boetti, Castellani, Kounellis, Matta, Schifano.

et il termine :

On me demande parfois ce qu'il en a été de ce temps-là, ce qu'il a laissé. Je réponds : le vide, celui du trou des
parasols retirés à la fin de l'été, profond, même beau à voir, avant que le sable le recouvre sans laisser de trace.


Erri de Luca ancien militant soixante-huitard m'intéresse décidément plus que l'exégèse de la Bible. 
Lien : https://netsdevoyages.car.bl..
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Un auteur que j'avais découvert par hasard avec le formidable « Impossible », et que j'ai retrouvé avec beaucoup de plaisir.
Erri de Luca explique dans sa préface avoir réuni dans ce livre « des histoires extrêmes de parents et d'enfants. » Il dit aussi que, s'il en est « à moitié étranger : n'étant pas père », il est resté « nécessairement fils. »

« Grandeur nature », ce sont neuf récits sur le thème de la filiation. On y côtoie Marc Chagall, Abraham et Isaac, des enfants des rues napolitains, la fille d'un criminel de guerre en cavale, le directeur héroïque d'un orphelinat de Varsovie. L'auteur se souvient aussi avec émotion de son propre père, passant ainsi de l'universel à l'intime.
Il y a aussi l'empreinte de Naples dans ce livre, car même si Erri de Luca l'a fui à 18 ans, il ne s'en est pas détaché pour autant. D'ailleurs, le napolitain est sa langue maternelle.

Ce passionné d'alpinisme, animé par la justice sociale et la liberté, est un homme solitaire et humaniste, menant une existence presque ascétique. Il considère l'écriture comme une fête. Son style est épuré et lapidaire. Il l'explique en disant que ses textes sont « le format réduit de l'expérience de la vie. »
Ces neuf récits sont merveilleux, et donnent au lien filial émotion et noblesse.
« Grandeur nature » est un livre incontournable, je pense, car Erri de Luca est un conteur épatant.
Touchant de savoir que tous les écrits d'Erri de Luca sont traduits par la même personne, Danièle Valin, suite à un véritable coup de foudre littéraire.
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Recueil intéressant de récits courts mais denses traversés par le thème de la filiation.
On y retrouve les thèmes chers à l'auteur ,empreints d'une grande culture et d'une connaissance de la Bible , référence par rapport à laquelle l'auteur lit les relations père /enfant .
L'ensemble est pétri d'une grande humanité.
Erri de Luca , sans descendance, est resté un fils.Dans des passages autobiographiques, il rend hommage à ses parents,économes en tout, y compris en souvenirs: « se contenter de ce qu'on a », il évoque son départ à 17 ans de la maison pour vivre librement, fait de génération
souligne-t-il.
A partir de l'analyse d'un tableau, il revisite la relation de Chagall avec son père .
Le fil conducteur est la conduite d'Abraham le père envers Isaac le fils: «  le christianisme se fonde sur l'obéissance extrême et docile d'un fils envers son père « 
Dans un texte il évoque les jeunes mendiants napolitains , doublement victimes:à cause de la misère, ils ne sont les enfants de personne et la « ville-mère « est indifférente à ces/ses enfants …
Il y a la filiation insupportable d'une jeune femme fille d'un nazi..,
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Après Impossible, paru il y a trois ans, Erri de Luca présente son nouveau roman uniquement sur la filiation, thème pourtant récurent dans son oeuvre, et plus particulièrement de la relation entre un père et un fils. N'ayant pas eu d'enfants, l'écrivain napolitain est toujours resté un fils, comme il le précise, au début.

Le Musée d'Art et d'histoire du judaïsme a demandé d'écrire sur une des oeuvres présentées. Face au tableau Père de Marc Chagall, Erri de Luca redonne au fils la possibilité de reparler à son père.

Après, Erri de Luca explore la relation d'Abraham et Isaac. Il rappelle que Abraham a l'époque était un centenaire, certes vaillant, mais rien en comparaison avec son fils Isaac sorte de mastodonte qui, malgré tout, à accepter l'ordre de Dieu que son père à respecter, à la lettre.

Puis, de façon beaucoup plus intime, Erri de Luca raconte sa relation avec son père. A dix-sept ans, par envie de liberté extrême, il est parti de chez lui. Heureusement, il a pu se réfugier dans une communauté de la jeunesse de 1968 et combattre à leurs côtés, lui l'enfant timide.

Mais, l'homme vieilli qu'il est devenu se souvient encore du bruit de la déchirure de la chemise que son père a faite lors de son départ par tristesse et qu'en réalité, le jeune homme n'a jamais vraiment entendu. Manière toujours très poétique de Erri de Luca de parler de ses regrets d'avoir fait souffrir l'homme qu'il aimait autant !

Comme il ne voulait pas reprendre le chemin de son milieu, le jeune Erri, après son expérience de contestation, s'est fait ouvrier, lui l'enfant issu d'un milieu aisé et lettré.

A travers d'autres exemples, Erri de Luca explore cette relation et rassemble celles qui sont cassées.

Avec son style qui mélange sagesse, poésie et résumé essentiel de vie, Erri de Luca livre avec Grandeur nature une étude émouvante et intime sur la filiation au père avec cet étendard de liberté qui caractérise ses engagements. Roman court, mais intense, que l'on découvre avec délectation !
Lien : https://vagabondageautourdes..
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toujours un plaisir de retrouver l'écriture aiguisée d'Eri de Luca et ses thèmes favoris....J'ai beaucoup aimé la premiere nouvelle même si elle est complexe à lire mettant en parallèle le thème d'Abraham et l'hommage de Chagal à son père....La deuxième est une variante de son roman "le tort du soldat"...je me suis mis à rêver de la traduction en piece de théâtre ( dans une petite scène comme celle du Lucernaire à Paris) de ces 2 histoires ( Chagal et le tort du soldat....cela pourrait être tres émouvant et il me semble que l'écriture d'Eri de Luca pourrait s'y prêter plutôt bien.
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Deuxième roman de Erri de Luca, que je lis, le thème abordé me convenait pourtant mais je n'ai pas accroché à cette lecture, ce qui m'a sauvé, c'est le peu de pages (un peu moins de 200), car j'ai trouvé cette lecture assez laborieuse. Nous avons dans l'ensemble des nouvelles assez courtes, format que j'apprécie d'habitude, mais aucune ne m'a vraiment séduite, le thème abordé est toujours la filiation enfant parent, l'auteur ayant été fils de quelqu'un mais jamais père de quelqu'un, il a voulu au travers de ce livre, nous décrire des histoires de relation entre enfants et parents, ce qui aurait pu rendre ces histoires plaisantes, mais au final, on se retrouve à suivre des histoires qui m'ont semblé bien compliquées à suivre pour le peu de pages qu'elles contenaient.
Je n'ai pas adhéré du tout à ce livre, et j'ai été bien heureuse de l'avoir terminé rapidement pour pouvoir passer à autre chose.
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C'est toujours un plaisir de retrouver l'écriture d' Erri de Luca, avec cette impression d'un tête à tête avec l'écrivain qui sait si bien parler de lui à demi mots tout en nous racontant des histoires jamais choisies au hasard. C'est ce qu'il fait dans ce recueil de 9 récits plus ou moins courts. Il y trace un parcours qui peut ressembler du bout de son âge à une forme de testament littéraire. Il s'interroge dans les premières pages sur ce qui le fait écrire, et fait le constat en contrepoint aux mots de Nazim Hikmet sur sa postérité, que lui, Erri de Lucca n'aura après sa mort, aucun prolongement. " N'étant pas père je suis resté nécessairement fils". Ainsi choisit -il cet éclairage du rapport au père, dans ce qu'il a de fort jusqu'à la douleur, c'est de cette douleur là, qu'il nous entretient avec toute la richesse de sa pensée et sa connaissance profonde de l'humain.
Un livre qui fait réfléchir à ce qu'est la transmission.
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