POÈME
Il a posé un doigt sur ses lèvres :
Il faut se taire.
Au-dehors
Les arbres continuent de trembler dans la brise
Et l'oiseau sur le mur blanc, par la fenêtre
De lumière, ouvre un œil sage
Couleur de raisin noir.
De l'autre main
I
Il a posé un doigt sur ses lèvres :
Il faut se taire.
Au-dehors
Les arbres continuent de trembler dans la brise
Et l'oiseau sur le mur blanc, par la fenêtre
De lumière, ouvre un œil sage
Couleur de raisin noir.
De l'autre main
Il tient l'écritoire et la plume; la nuit
Chaude descend sur ses épaules; derrière,
Le mur est comme l'âme dépouillée, terne et nue.
Alors seulement commence la lumière.
II
À peine le bruit d'un silence ténu
Fait-il trembler l'ombre des feuillages.
Ni l'orage grondant au-dessus de la grève,
Ni le ronronnement des automobiles dans l'avenue,
Ni le sifflement des lourds avions d'argent,
Moins que la brise parmi les feuilles.
Heureux dans l'obscure ténèbre, celui
Qui écoute et se prosterne.
III
Peut-être alors entendrons-nous
Sur le mur blanc qui ferme l'horizon
Lorsque la nuit ouvre ses poings de feu,
Germer les graines saintes du silence
Et poindre l'aube.
IV
Les poèmes vieillissent confusément,
Parlant encore de forêts, d'or et de roses; toutefois,
Quel sage aurait pu dans une seule fable,
Serpentant au-dessus des hommes et des fleurs,
Dire comme la perle un peu l'attente
Qui est au creux du monde, et peut-être à la fin composer
Pour un prince las du soleil et des livres,
Un autre chant qui ne vieillirait pas,
Qui parlerait sans fin de ce qui recommence, au gré
Des libellules bleues, des armoiries de l'onde?
Alors l'image en ce poème serait plus limpide
Que le bruit continu de l'eau, plus sombre qu'un silence
Au pied mauve de l'arbre, à celui
Qui écoute la nuit parfaire les saisons,
En quête de sagesse nébuleuse et d'ordonnance.
V
Voici la plus belle heure, les arbres
Sont roses dans le jour qui se lève.
Les parfums n'ont encore épuisé leurs timides
Secrets, dans le lacis des herbes, parmi les fleurs.
Alors le soleil blanc et rond quitte son écurie,
Perdue dans la douceur du ciel au-dessus de la crête
Des arbres centenaires; le lourd charroi qu'il tire
De la chaleur d'été d'où tombe le foin rouge,
S'engage sur l'ornière de la
Loire jusqu'au soir des collines,
Que des merles, des hirondelles, veillent de leurs cris.
Festival Voix Vives 2016
Entre mer et ciel : Philippe Delaveau
Images et montage : Thibault Grasset - ITC Production
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