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Thierry Renard (Autre)
EAN : 9782330135508
400 pages
Actes Sud (07/10/2020)
  Existe en édition audio
3.22/5   322 notes
Résumé :
Pour les besoins d'une thèse sur « la vie à la campagne au XXIe siècle », un étudiant en anthropologie prend ses quartiers à La Pierre-Saint-Christophe, village fictif au bord du Marais poitevin, pour y observer les us et coutumes de ses pittoresques habitants - monsieur le Maire en tête, truculent patron de l'entreprise locale de Pompes Funèbres. Car ainsi va la grande Histoire : partout la mort saisit le vif - sauf pendant ces trois jours où elle marque une trêve,... >Voir plus
Que lire après Le banquet annuel de la confrérie des fossoyeursVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (89) Voir plus Ajouter une critique
3,22

sur 322 notes
Finir cette année avec un titre pareil, je sais, il faut vraiment être un peu cynique. Cela me ressemble si peu...
Un roman qui prend pour décor Les Deux Sèvres en plein hiver, The place to be, qui interroge le destin et la mort, c'est idéal pour les fêtes non ?
Pour donner un petit côté terroir à sa thèse consacrée à la vie à la campagne au 21ème siècle, un ethnologue en devenir quitte Paris et sa petite amie pour un petit village paumé et ses autochtones. le Lévi-Strauss sédentaire enfile son jean et part à la découverte de la France profonde avec son bistrotier et ses dinosaures du zinc, son curé et ses veuves, ses agriculteurs besogneux, son médecin qui fait les trois huit, ses retraités anglais qui trouvent que la pluie mouille moins par chez nous et ses lotissements dortoirs pour travailleurs banlieusards.
Au contact des sauvages, la thèse avance moins vite que le taux de cholestérol de l'éternel étudiant qui trouve peu à peu sa place dans le microcosme, aidé par une zadiste forcément rebelle et un maire très accueillant, bien que directeur d'un établissement de pompes funèbres, lequel ne connait pas la crise grâce à une pyramide des âges pharaonique.
Matthias Enard aurait pu se limiter à cette plaisante chronique qui ne manque pas d'humour, qui a le mérite de ne pas être condescendante et qui tente de rendre hommage à son pays natal. Il faut dire que depuis que Houellebecq avait déclaré que Niort était une des villes les plus laides de France dans Sérotonine, le blason avait besoin d'une nouvelle couche de dorures.
Pas sur néanmoins que le standard de l'office du tourisme du coin explose après ce roman qui est loin d'être le meilleur à mes yeux de l'auteur. Je trouve que ce romancier érudit est plus doué pour l'exotisme, les récits d'exploration culturelles qui traversent les pays et les âges. Ses précédents titres m'avaient fait voyager et rêver d'Orient. Cet opus ne m'a pas fait léviter de mon confinement.
En fait, je ne suis pas entré dans cette histoire pour les raisons qui m'avaient conduit à la découvrir. C'est ballot.
D'abord, le journal de bord du thésard s'interrompt d'un coup pour laisser place au récit rabelaisien de la fameuse confrérie des fossoyeurs qui se réunissent pendant trois jours sur place pour leur séminaire gourmand. C'est une orgie de charcutaille et une beuverie qui obéit à certaines règles, notamment celle qui incite chaque participant à conter une histoire. C'est brillant, grivois et drôle durant une vingtaine de pages mais je me suis vite lassé du menu et j'ai sauté quelques plats et quelques pages. Nul ne peut égaler Pantagruel ou la Grande Bouffe dans le genre. Légère indigestion.
Ensuite vint l'astuce de la métempsychose qui traverse le roman, doctrine selon laquelle une âme est recyclable ce qui lui permet de se transvaser à chaque trépas vers un nouveau corps humain, animal ou végétal. Autant dire que les mauvaises actions se paient cher et que les brebis galeuses se retrouvent vite à l'état de lombric ou de nuisibles pour plusieurs générations. La réincarnation discount. Ainsi, le narrateur se fait parfois curé puis sanglier, le bourreau devient gibier de potence dans une autre vie, le boucher mute en filet mignon, etc… et quand le récit remonte parfois à des vies antérieures, on comprend que l'auteur ne décrit pas l'histoire d'un personnage mais celui d'une âme dans un territoire. Une vie sans chronologie. C'est déroutant, souvent inégal mais original. Cet artifice permet de découvrir les secrets de famille du village mais cela segmente encore plus l'histoire. Les pièces du puzzle se mélangent et j'ai fini par inverser certaines pièces..
Récit fourre-tout, gratin à la niortaise, qui déborde d'idées mais que Mathias Enard semble avoir assemblé de façon un peu artificielle. J'ai parfois eu l'impression qu'il avait écrit son roman comme je remplis la malle de ma voiture avant un départ en vacances : rangement clinique des premières valises et on tasse les derniers sacs comme on peut pour caser la caisse du chat et les boules de pétanque.
J'ai été content de retrouver l'étudiant en fin de roman, ligne de vie cette histoire qui donne le vertige pour un happy end qui fleure bon le retour à la nature, l'exode urbain et le règne du brocolis.
Meilleurs voeux.

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"Les princes à la mort sont destinés,
Ainsi que tous les autres vivants.
Qu'ils en soient courroucés ou affligés,
Autant en emporte le vent."
(F. Villon)

Il était une fois dans l'Ouest, ou le dharma en Deux-Sèvres...
Il y a deux raisons qui m'ont poussée à lire le nouveau roman d'Enard (mis à part le fait que j'ai beaucoup apprécié "Boussole"). La première est François Rabelais, et la deuxième est le choix géographique.
Hélas, le département des Deux-Sèvres n'est que très rarement mis à l'honneur. A l'époque, quelques affiches publicitaires montrant le Marais poitevin apportaient une note verte et bucolique aux couloirs du métro parisien ("Une autre Venise près de chez vous !"), et on peut presque remercier Michel Houellebecq d'attirer un semblant d'attention sur Niort, en créant une petite polémique par une remarque anodine sur sa prétendue laideur.
Niort avec son donjon, ses assurances, ses quais de la Sèvre, et ses dragons de bronze...
Mathias Enard lui-même a troqué sa culotte courte contre un pantalon digne de ce nom au lycée niortais Jean Macé, et il y retourne toujours volontiers pour entretenir les élèves tant de littérature que de ce changement de pantalon.
Cette sympathique pantalonnade sur le banquet des fossoyeurs est donc plutôt dans la continuité logique des événements... mais parlons plutôt d'une sorte de roue qui ramasse les choses en bas, pour les remonter à la surface de l'autre côté ; toujours les mêmes, et pourtant déjà différentes.

Après tout, le roman est aussi construit de façon circulaire, en rendant hommage à la fois au passé et au présent de la région.
Et ce qui commence comme le journal de bord d'un ethnologue parisien venu étudier la "ruralité" va doucement se transformer en un livre sur l'éternel cycle de la Vie et de la Mort, qui trouvera son apogée dans le chapitre du fameux banquet, pour revenir ensuite à son point de départ. On retrouvera notre ethnologue, mais plus exactement tel qu'on l'a quitté.

Le journal de David Mazon est amusant par ses observations cliniques de la campagne et des autochtones, pour les besoins de son érudite thèse "La vie à la campagne au 21ème siècle". Non, on ne parle plus vraiment le poitevin-saintongeais au marché de Coulonges, mais il y a du vrai ragondin mouliné dans le pâté de ragondin, et les oeufs sortent vraiment de la poule. Entraîné un peu malgré lui dans la vie locale, il va rencontrer toute une galerie de personnages agréablement "typiques", que ce soit la clientèle du Café Pêche, le maire, l'illuminé du village, un artiste parisien expatrié, ou les Anglais, toujours plus au moins présents dans la régions depuis...
... ha ! Au moment où une voix omnisciente reprend subitement le rôle de narrateur pour nous informer de la réincarnation de l'abbé Largeau en sanglier, le lecteur sait déjà que tout sera un peu plus compliqué que prévu.
La mythique Roue du Destin se mettra en mouvement, pour faire disparaître et réapparaître les personnages au fil des siècles dans leurs incarnations successives. Les personnages du roman, leurs ancêtres, mais aussi Jules César, Richard Coeur de Lion, Charles Martel, Rabelais, Villon, Agrippa d'Aubigné, Pierre Loti... bref, riches et pauvres, heureux et malheureux, connus ou inconnus, avec leur lot de légendes et d'histoires qui font la mémoire de la région poitevine.
La "grande" Histoire est mélangée à la "petite", tout cela encore agrémenté par des "chansons" insérées entre les chapitres, qui rappellent la tradition orale perpétuée par les troubadours ou par les ritournelles populaires qu'on chantait aux marchés sur les faits divers particulièrement atroces.
Et comme cet éternel cycle est sous la responsabilité de la Grande Faucheuse, il n'est que naturel que le récit aboutisse sur le banquet annuel de ses fidèles assistants, pendant les deux jours où, selon la tradition, la Mort se repose. Avec une exubérance toute rabelaisienne, on va donc profiter de la Vie, tout en rendant hommage à la Mort dans des discours savants ou grivois. Comment mieux défier la Mort qu'en mangeant et en buvant à sa santé ? En lui laissant voir que nous sommes des bon-vivants bien vivants, tout en sachant que tôt ou tard, un fossoyeur gourmand pourra se retrouver dans l'assiette d'un autre fossoyeur sous la forme d'une délicieuse anguille ou d'un escargot au beurre ? Mais aussi que l'immortelle âme de cet escargot aura ainsi l'occasion de se réincarner à son tour en Napoléon ou en ethnologue parisien, car la Roue continue à tourner. Tout comme les gens continuent à naître et à mourir, en contribuant chacun à leur tour à L Histoire, et tout comme les quatre saisons doivent obligatoirement passer avant le prochain banquet annuel des fossoyeurs.

J'ai lu le roman de Mathias Enard avec plaisir, tout en ayant parfois l'impression que dans certains passages la Roue dévie de son axe et qu'on l'entend grincer dans un laborieux effort pour y revenir . Dans la partie "rabelaisienne", tantôt je me délectais, tantôt il me semblait être devant un Rabelais qui se parodie lui-même, même si je dois admettre que ce bidonnant chapitre donne finalement beaucoup de saveur et tout son sens au livre. Sans parler du happy end qui vous donne envie de chausser des galoches et aller chercher votre lait à la ferme, en sifflotant en route "Le Poitevin est un gourmand".
3,5/5 pour le livre, plus une demi-étoile supplémentaire de la part d'une autochtone qui se nourrit de fromage de chèvre, entretient sa longévité par la liqueur d'angélique et se déplace de préférence sur un étrange âne poilu nommé baudet.
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Une certaine critique littéraire affirme qu'une oeuvre touchera d'autant plus à l'universel qu'elle sera ancrée dans la réalité la plus spécifique. Plus que Racine et ses héros décontextualisés, Zola en décrivant la société du 2nd Empire tendrait un miroir fidèle à tout un chacun, y compris à ceux pour qui Napoléon III est un inconnu même pas illustre.
C'est le moment de vérifier cette théorie parce que, plus ancré à un territoire spécifique que ce roman, cela paraît difficile. Malheureusement, ce n'est pas moi qui pourrai juger de l'universalité de ce Banquet parce que, justement, le Middle West, c'est chez moi, c'est mon coin. Et de même que je n'ai jamais réussi à trouver J.-P. Raffarin antipathique, bien qu'éloigné de ma famille politique, pour l'avoir entendu dire « Un coup de gorgeon, un coup de mâchon, ni vu ni connu, j't'embrouille », j'ai évidemment adoré le roman d'Enard. Mais maintenant, hein, qu'est-ce qu'un lecteur qui ignore ce que sont les lumas et qui ne se dit pas qu'il est benaise en retrouvant sa couette peut bien avoir à faire d'une telle histoire ?
Le livre plaît ou déplaît fortement. Il faut dire qu'il commence comme le journal d'un jeune benêt décidé à anthropologiser les pèquenots des Deux-Sèvres (pléonasme). Et après cette première partie proprement hilarante, nous voilà sevrés, justement, des aventures du thésard par un auteur décidé à faire feu de tout bois, qui va multiplier les ruptures de ton: chaque partie est séparée de la suivante par la paraphrase d'une chanson patrimoniale, et la région que sillonne à vélomoteur David Mazon est explorée non seulement géographiquement mais aussi historiquement par un récit qui se fait poétique et épique, mêlant le folklore au pastiche d'Agrippa d'Aubigné. Cette construction, qui peut paraître alambiquée, a à voir avec l'essai de Levi-Strauss, « La pensée sauvage », qui définit le bricolage comme la forme la plus manifeste de la « science » des peuples primitifs. (« La pensée sauvage » est aussi le nom donné à la location d'où l'anthropologue en herbe espère expertiser les gens du cru.) D'où ce magnifique salmigondis qui convoque théâtre, chansons, journal, notes de bas de page, récits mythologiques, récits historiques et la grande roue de la réincarnation en guise de raton-laveur. Chaque brin d'herbe de la campagne niortaise est scruté aux confins de son passé et de son avenir, il fut infanticide avant d'être brin d'herbe et une fois arraché se réincarnera en mésange; et vu le nombre de brins d'herbe de la susdite campagne, on comprend que certains lecteurs se sentent dépassés par le nombre de personnages…
La substantifique moelle de l'ouvrage vaut-elle l'effort que sa lecture demande parfois ? Alors, c'est vrai que dans les parties 5 et 6 ça patine. le coeur du livre est occupé par le fameux banquet du titre et j'ai souvent eu l'impression que les chapitres suivants servaient surtout à justifier sa centralité. Ce banquet pantagruélique est celui des fossoyeurs, de la mort ensemençant la vie, comme la nourriture et la défécation se répondent, comme l'amour et la haine se donnent la main pour former une ronde. Et c'est vrai aussi que le lecteur frôle parfois l'indigestion, d'autant plus que la maestria narrative peut sembler n'accoucher que d'une souris: le roman se termine bien entendu comme il a commencé, par le journal de David Mazon qui découvre les joies du retour à la terre en filant le parfait amour avec une maraîchère inculte, (vengeant ainsi de malheureuses dentellières goncourisées mais larguées par de prétentieux intellectuels) et en faisant la promotion de la décroissance bio. Moi, j'aime les histoires qui se terminent bien, mais encore plus celles dont l'optimisme est discrètement tempéré par de multiples allusions à une fin du monde inéluctable. Il faut aimer, manger et picoler, avoir les mains dans la terre et pas seulement autour d'un livre, et il faut constamment sauver le monde même si ça paraît mal barré.
Les Deux-Sèvres sont le microcosme qui raconte l'univers dans son étendue et sa profondeur. On est quelques-uns pour qui c'était une évidence, mais cela va encore mieux en le disant.
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Au travers de plusieurs de ses romans, j'avais déjà pu apprécier le talent de l'auteur qui nous emmène à chaque nouveau récit dans des mondes différents. Son érudition mêlée à son art de conter est infinie.
Dans son dernier roman, c'est sur les pas de David Mazon, jeune chercheur en ethnologie qui se consacre à sa thèse sur » la vie à la campagne au XXIe siècle » que Mathias Enard nous entraîne. Et voilà le lecteur propulsé dans un village poitevin près de Niort ou le héros, monté sur une mobylette hors d'âge, parcourt la campagne à la recherche de témoignages. Les personnages qu'il côtoie sont tous savoureux qu'il s'agisse du maire et croque-mort, du tenancier de bistrot ou de ce peintre dont l'inspiration est scatophage. Et, entre choux et salades, le jeune ethnologue un peu perché va rencontrer l'amour tout en poursuivant une correspondance amoureuse avec Lara sa petite amie restée à Paris. Tout cela serait très classique s'il n'y avait ces petites histoires de réincarnation des personnages et de leurs aïeux (ce qu'on nomme la métempsychose) en humains ou en animaux. Cette intrusion dans le fantastique permet des diversions historiques ou naturalistes et l'on assiste aux amours d'un sanglier solitaire et à la rencontre d'une punaise de lit et de Napoléon Bonaparte himself !
Car, vous l'aurez compris, ce roman plein d'humour est truffé d'anecdotes cocasses et farfelues qui s'entrecroisent avec bonheur à du plus sérieux comme l'histoire de la région, la gastronomie, la littérature et la langue.
Mais, pour moi, le morceau de bravoure c'est la soixantaine de pages contant par le menu (en suivant le menu !) cet épisode qui a donné son titre au roman : le banquet annuel de la confrérie des fossoyeurs. Vegans, passez votre chemin, car on nage dans la crème et le beurre, on s'empiffre de chair et de graisse et on termine en apothéose par une bataille de choux à la crème. C'est bougrement goûteux, truculent et rabelaisien en diable et on en reprendrait bien une resucée.
Roman savoureux à la lecture gouleyante.
Je souhaite bon appétit aux futurs lecteurs… !
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Pour une fois , la théorie des cent premières pages se fait à l'envers ...
On savoure l'arrivée de David, l'étudiant parisien dans un village du Marais poitevin pour y écrire sa thèse sur la vie rurale dans le pays niortais .Le décalage fonctionne heureusement toujours et les lecteurs provinciaux (peut-être les autres aussi mais je ne suis pas bien placée dans ma commune girondine et rurale de 600 habitants pour en juger ) rient de bon coeur et les barrières mentales et les habitudes bien réglées de David vont peu à peu tomber devant la simplicité et la bonhommie locales . Même si cet art de vivre n'est pas qu'édénique .

Las, Mathias Enard abandonne notre thésard au milieu de ses doutes existentiels pour partir dans de multiples directions en évoquant la Roue , nom qu'il donne à la métempsychose et les différentes bribes de vie des trépassés de la commune , car son maire est le patron des pompes funèbres, entreprise qui ne connait pas la crise .

C'est lui qui organise cette année là le fameux banquet des fossoyeurs : une description rabelaisienne qui vire rapidement à mon gout vers l'indigestion .

Nous retrouvons bien tard David et sa thèse dont on ne doute pas trop de son devenir .C'est bien la seule chose qui m'a fait poursuivre ma lecture, la curiosité de savoir comment le jeune homme allait s'en sortir .Dommage car Mathias Enard est un écrivain attachant mais je n'ai pas aimé la dispersion de ces propos .
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critiques presse (7)
LeDevoir
23 novembre 2020
Dans «Banquet annuel de la Confrérie des fossoyeurs», le romancier laboure l'histoire et le terroir de son Poitou natal.
Lire la critique sur le site : LeDevoir
LeJournaldeQuebec
17 novembre 2020
Après Boussole, qui a remporté le Goncourt en 2015, l'écrivain Mathias Enard signe un nouveau roman qui va permettre aux lecteurs de se régaler!
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
LaLibreBelgique
30 octobre 2020
Mathias Enard dans un voyage vertigineux dans les mots et la Roue de la vie et la mort.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
LeFigaro
22 octobre 2020
Un récit aussi baroque que rabelaisien, autour d’un banquet délirant, est aussi un hommage au pays natal de l’auteur.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LaCroix
13 octobre 2020
L'écrivain français, prix Goncourt 2015, se lance avec ce nouveau roman dans une ronde cosmique, follement macabre et drôle comme tout.
Lire la critique sur le site : LaCroix
LesInrocks
12 octobre 2020
Pour son nouveau roman, Le Banquet annuel de la confrérie des fossoyeurs, Mathias Enard installe au cœur de son Poitou natal un anthropologue des villes. Parfois hilarant, le récit sombre dans des méandres trop souvent vaseux.
Lire la critique sur le site : LesInrocks
LeSoir
12 octobre 2020
La mort n'est pas si triste. L'écrivain français le prouve dans «Le banquet annuel de la Confrérie des Fossoyeurs», où il jongle avec les réincarnations.
Lire la critique sur le site : LeSoir
Citations et extraits (51) Voir plus Ajouter une citation
Quelle alchimie de désir, sorcellerie de luxe ! Pardon, mais je suis certain qu'à la campagne on baise mieux qu'en ville. On est plus libres; on est inspiré par l'orgie continuelle de la nature, la débauche de reproductions, les insectes, les poules, les lapins, les chevreuils, les taillis ou les plantes grimpantes. Ces milliards de copulations constantes vous envahissent. En ville, au contraire, on souffre d'une sexualité de plantes grasses ou de voitures de pompiers. A Paris soit on a le coït haussmannien, soit on copule en klaxonnant comme un chauffeur de Uber.
(page382)
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Donc, le premier, Sèchepine le Lorrain, fier schlitteur de sapins et grand maître de la Confrérie des fossoyeurs prononça dans le silence général ce simple mot "Mourir", solennel et univoque, et leva son étrange fiole à gnôle remplie d'esprit-de-vin avant de la vider d'un trait sans trembler et son voisin poursuivit, "trépasser", et but à son tour, le suivant susurra "succomber", et but, puis celui d'après "décéder" celui à sa droite "expirer", l'autre "rendre l'âme", l'homme après ajouta "rendre l'esprit", son voisin "rendre le dernier souffle", tous vidaient leurs flacons en bon ordre, "calancher", et "périr", "s'éteindre" un par un les fossoyeux disaient gravement un verbe ou une expression, "trouver la mort", puis s'envoyaient un coup de goutte, "caner" au suivant, "claquer", toujours un de plus vers la droite - aucun profane n'avait jamais assisté à ce rituel secret, le plus profond de la Confrérie, "clamser", puis "crever", l'un après l'autre, "partir", sans hésitation, solennellement, "casser sa pipe", puis "claboter", à Poiraudeau échut "cronir", à Pouvreau "y rester", à un autre "s'éteindre", puis "aller ad patres", et "passer dans l'autre monde", et tout un chacun buvait quand venait son moment de prononcer un des quatre-vingt-dix-neuf noms de la Mort, "passer de la vie à trépas", "faire le grand voyage", ou "descendre au tombeau", des plus simples "finir ses jours" "avoir vécu", "perdre la vie", "quitter la vie", aux plus imagés, "nager le ventre en l'air", ou galvaudés, "exhaler le dernier soupir" tous fossoyeurs en prononçaient un, et s'envoyaient leur breuvage, l'esprit-de-vin, "fermer les paupières", "s'endormir du dernier sommeil", "se coucher dans les bras du Seigneur", "paraître devant Dieu", et les argotiques, "avaler sa chique", "avaler son bulletin de naissance", "boire le bouillon de onze heures", faire la cabriole", faire couic", déposer le bilan", ou même le rare "dévisser son billard", le naturel "éteindre sa lampe", le simple "souffler sa bougie", l'optimiste "faire sa valise", le réaliste "lâcher la rampe", le militaire "passer l'arme à gauche", le pratique "ramasser ses outils", l'élégant "mettre un costume en sapin", le courant "laisser glisser", le descriptif "sortir les pieds devant", et chaque membre de la Très Noble Confrérie des fossoyeurs, dont les privilèges remontaient à la croisade et à la prise de Jérusalem par Saladin s'envoyaient un petit verre en signe de désolation d'être ainsi contraints de porter tous les malheurs du monde, d'en avoir toute la tristesse sur les épaules, ils buvaient en prononçant tour à tour un des noms de la mort, une des expressions qui signifie mourir, "se retrouver entre quatre planches", "souffler sa camoufle", et l'on continua, godet après godet, expression après expression, ""aller chez les taupes", "nourrir les vers de terre", manger les pissenlits par la racine", "engraisser les chrysanthèmes", "tomber au champ d'honneur", et les noms des anges de la Mort, Azraël, Samaël, Thanatos, puis tous les vocables secrets, ceux qu'on ne peut écrire, ni même lire, sans que la Mort n'advienne, qu'Elle n'arrive en personne, et le vrai nom de la Mort, le centième, celui qu'aucune bouche humaine n'a jamais prononcé, car ces phonèmes sont le secret de l'humanité, notre secret car nous sommes les seuls à mourir.
Et on vida un dernier verre, histoire de.
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Poiraudeau avait une petite soif et vida une timbale de rouge, car il méprisait le blanc, dans lequel il manquait, trouvait-il, la part virile. Le vin dépourvu, soutenait-il de ses aspects les plus charnus, les plus musqués, les plus couillus, était un genre d'eunuque, lunaire, lisse, transparent. Si on pouvait voir à travers, c'est qu'il ne cachait aucun mystère.
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J’ai gravi les marches du proche, vite, pas de bruit de voiture, j’ai tâtonné pour introduire la clé dans la serrure, j’ai dû m’y prendre à deux ou trois reprises, mais la porte s’est ouverte, dans un bruit déchirant, strident, interminable, les gonds grinçaient, on m’entendait à l’autre bout du village, j’étais cuit. Paralysé de trouille devant l’ouverture je voyais déjà Mathilde accourir pour protéger sa sacristie et me prendre la main dans le sac. Poussé par le désespoir je me suis engouffré à l’intérieur, plaqué contre le mur, et j’ai attendu. Rien, le silence. Au bout d’un moment, je me suis décidé à repousser tout doucement la lourde et à allumer la lampe. L’ombre du Christ tordu de douleur a failli me faire crever de peur. C’est vraiment sinistre, une église dans la pénombre. Je ne me suis pas attardé, je sentais le regard des saints et des martyrs sur mes épaules, je suis allé directement vers la gauche, où je me souvenais d’avoir vu les cierges, et effectivement, le trésor était là : de pleines brassées de bâtons de cire, certains à demi brûlés, d’autres intacts, des fins, des épais, des longs, des courts. J’en ai pris une demi-douzaine, parmi les plus gros, sans réfléchir ; je me suis précipité vers la sortie. J’ai hésité à laisser la porte ouverte et à m’enfuir, mais c’était signer mon crime, j’ai préféré prendre le risque de la refermer tout doucement, millimètre par millimètre, de l’intérieur, avant de me faufiler, pour rester le moins de temps possible dehors. La serrure a fonctionné à merveille, j’ai pris mes jambes à mon cou, le larcin sous le bras, paniqué, j’ai glissé et je me suis étalé de tout mon long. J’imaginais déjà les titres du journal local :

SENSATIONNEL !
L’ETHNOLOGUE PROFITE DE L’OBSCURITÉ
POUR PILLER UNE ÉGLISE !

Comment ai-je pu me mettre dans une situation pareille, j’ai pensé la gueule dans la neige. Courage, maintenant, courage ; j’ai ramassé mon butin, retraversé la route, le cœur à cent à l’heure. J’ai posé les cierges devant ma porte le temps de remettre la clé à sa place, vite, vite. J’ai planqué le corpus delicti dans mon anorak et je suis reparti vers chez Lucie plein de remords mais aussi de fierté, je dois bien l’avouer.
En marchant dans la nuit, j’ai repris un peu mes esprits.
Par temps de pénurie, il faut savoir se débrouiller.
J’ai été capable d’imagination et de célérité.
Tout le monde peut devenir criminel, j’en avais la preuve.
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J'ai osé livrer mes phantasmes à Lara, graphiquement, j'ai eu une vision, je lui ai envoyé :
(.)¡(.)
Elle a tout de suite compris ce que ça représentait. (Je suis assez content du réalisme de mes seins informatiques). Elle m'a répondu :
Ta « ¡ » !!!! Tu me fais bien rire, mais perspective assez excitante tout de même.
Comme j'ai vu qu'elle était sur la même longueur d'onde, j'ai posté plus osé encore :
Ensuite tu t'allongerais sur le ventre et, doucement, je te )o(
Elle a deviné de quoi il s'agissait :
Ouille ouille, pas d'accord mon lapin, tu te contenteras de ),(
Lara si intelligente, si vive. C'est la femme parfaite.
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Vidéo de Mathias Enard
Grand entretien de clôture avec Mathias Enard - Modération par Zoé Sfez - dimanche 2 octobre 2022, 17h30-18h30 - Château du Val Fleury, Gif-sur-Yvette (Paris-Saclay) Festival Vo-Vf, traduire le monde (les traducteurs à l'honneur)
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