Madame Eniger,
Après deux dernières lectures inutiles, j'ai sorti « ma » valeur sure d'une étagère. Un de vos recueils Madame Eniger, «
le monastère de l'instant ». Au risque de me répéter, vous êtes la femme qui me touche le plus parmi celles que j'ai lu. Ce recueil ne fait pas exception.
Comment vous dire tout le bien que me font vos mots Madame Eniger ?
Ces mots qui donnent sens à mes émotions, à moins que ça ne soit le contraire tant les deux me semblent intimement liés.
Votre poésie ne se définie pas. Elle est plurielle, fourmillante, abondante, fertile et luxuriante, insoumise et révoltée. Elle est sans concessions et donne à l'expression « une main de fer dans un gant de velours » tout son sens. Vous ne lâchez rien mais vos colères, vos indignations, vos incompréhensions quant aux maux de notre société, s'expriment avec une douceur extrême. Une douceur qui donne encore plus d'impact au message. Votre poésie infuse, décante pour mieux pénétrer et diffuser une conscience qui fait tant défaut.
J'aime la poésie qui s'engage sous toutes ses formes. Celle qui met les pieds dans la fourmilière, celle qui tire à vue, celle qui répond coup pour coup à la violence de notre système, à son absurdité. Elle me correspond. Mais votre poésie Madame Eniger, votre poésie… quelle merveille pour moi. Elle entre en résistance, subtilement, discrètement. C'est une poésie de maquisard.
Vous ne donnez aucune leçon de vie, vous n'êtes pas celle qui sait et qui mène ses apôtres sur le droit chemin. Vous n'êtes pas la sagesse incarnée femme loin de là. Vous êtes l'évidence, le bon sens, la logique. Mais non, vous n'êtes pas de ces sages qui ont une phrase toute faite avec de jolis mots pour chaque problème, de ceux ayant réponse à tout. A cette sagesse abstraite que j'appelle « facilité » pour ne pas dire parfois « lâcheté » , à cet entre soi, ce repli, ce nombrilisme caché derrière une bienveillance parfois douteuse, vous répondez par l'ouverture à la vie, par la conscience de la fragilité de cette vie et du miracle qu'est chaque seconde qui passe. Vous mettez chacun devant ses responsabilités.
Je dis que vous répondez parce que si certaines « idées » reviennent chez les sages et dans vos recueils, vous poétisez collectif alors que les sages le font souvent pour le « moi ».
Ah votre poésie Madame Eniger… elle est le feu et l'Océan, elle est vous, Ile volcanique. C'est un souffle où le chaud et l'effroi ne peuvent propager qu'une épidémie d'essentiel. Votre poésie est un frisson porté par les vents, une onde marine qui d'un terrain vague fait une mer d'huile ou un océan déchaîné. Votre poésie est une poésie de grandes marées, une poésie à fort coefficient de sensations. C'est une vibration, une résonnance, une palpitation.
Que dire de vos instantanés, vos toiles de maîtres, ces tableaux des quatre saisons qui parcourent chacun de vos recueils. D'eaux rage en eaux des espoirs, ces eaux tonnent comme un fait divers. Et puis cette mélancolie qui vient baigner l'emprunt temps, celui d'être et d'avoir été.
Vos textes sont des odes à l'Amour et si dans ce recueil vous laissez les vôtres de coté, vous êtes une amoureuse chronique. Amoureuse du beau, de l'authentique.
Non votre poésie ne se définie pas tant elle est multiple.
Que je les aime vos mots Madame Eniger, que je les aime.
Je vais m'arrêter là parce que je pourrais continuer inlassablement de vous remercier d'écrire si bien ces choses que j'exprime quelques fois maladroitement, brutalement ou pas du tout.
Et puis il y a encore un mois de confinement et plusieurs de vos recueils en réserve sur mes étagères.
Il ne serait pas étonnant que je revienne vers vous rapidement.
Que vive la poésie, le reste n'est que… littérature.