En allant faire son footing un beau matin, le narrateur, homme au chômage, marié et père d'une petite fille, perd étrangement connaissance et se retrouve après quatre heures de black-out total dans les sous-sols d'un cimetière, à des dizaines de mètres sous terre, où s'étend un dédale de couloirs obscurs, de souterrains, d'excavations et autres galeries labyrinthiques.
L'homme est perdu ; naturellement, il a peur, il s'interroge, il lui faut à tout prix partir à la recherche de la Stèle d'Immanence, « unique espoir de retour vers la surface ».
La Stèle d'Immanence ??...D'où tient-il cela ? Quelle est cette folie ? Et quelle est cette étrange impression qu'un second lui, étranger à lui-même, accapare parfois son cerveau ? Serait-il fou ?
Mais non ! Ce sont seulement les êtres télépathes peuplant les profondeurs qui l'ont guidé mentalement jusqu'à eux pour une mission qu'il semble être le seul à pouvoir mener à bien.
C'est ainsi que notre homme va prendre connaissance de la vie qui grouille sous Terre, toute une civilisation vieille de plusieurs millénaires rassemblant une faune hétéroclite de créatures plus ou moins monstrueuses appartenant à la famille des champignons et dont les plus évolués, les Homo-myciens, vivent dans la gigantesque cité-forteresse de
Siraen, la capitale du royaume souterrain gouverné par la reine Zerxeiir.
Depuis quelques temps, celle-ci, aidée de certaines hautes instances du monde d'en-haut, se serait mise en tête de détruire le pays en le faisant sombrer dans la barbarie et le chaos.
La rébellion s'est organisée et compte sur le chômeur marginal et anticonformiste pour adoucir les humeurs vengeresses de leur méchante reine…
On ne le répètera jamais assez, méfions-nous des « plats versos » ! Hélas, la tentation est toujours grande de commencer un livre par son envers !
Dans le roman «
Siraen » de
Ronan Foll, la quatrième de couverture était attirante, promettant une descente infernale (ah ! que ne devrions-nous jamais être pris au piège des termes employés tel cet intriguant « catabase » !) dans les profondeurs de la Terre, dans un mélange de genres pseudo-poético-fantastico-philosophico-humoristico - enfin beaucoup de choses en « O » - particulièrement variés, omettant toutefois un point crucial de la lecture : le niveau « zéro » où nous plongerait cette incursion sous la croûte terrestre !
On exagère un peu là…mais il faut bien avouer qu'on est à vingt mille lieues des romans de
Jules Verne et si l'auteur s'est délecté des oeuvres de
Lovecraft, un nouveau Mythe de Cthulhu n'est pas encore prêt de voir le jour malgré la cohorte de créatures affreuses, dignes d'un tableau de Jérôme Bosch, qui apparait au gré des pages.
De nombreuses maladresses viennent étayer ce roman qui se veut singulier mais finit par rater sa cible par manque de cohésion et d'homogénéité, comme si l'auteur, intéressé par plusieurs pistes, n'avait pas su choisir le genre dans lequel faire évoluer son histoire, entre littérature de l'imaginaire, poésie ou roman social.
Pas assez de force, de rebondissements et d'action pour mener à bien un roman fantastique; bien trop peu de consistance et d'énergie pour développer la critique sociale (pollution, télé réalité, politiques corrompus, médias diaboliques) ; et à la sortie, c'est un premier roman qui part dans tous les sens. C'est dommage car le jeune romancier fait montre d'une écriture assez recherchée, d'un langage soutenu et d'un humour pince sans rire qui amène ça et là le lecteur à esquisser un sourire.
Cependant, cela ne suffit à contenter ni l'amateur de fantasy, ni l'adepte d'aventures, ni le féru de poésie.
Mauvaise pioche donc que celle de ce livre pour cette nouvelle opération Masse Critique !
Merci toutefois aux éditions Bruit Blanc de nous avoir permis la lecture de cet ouvrage orné d'une jolie couverture…
Hélas, ce n'est pas aujourd'hui que nous succomberons au chant des «
Siraen » !...