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3,7

sur 2124 notes
Au risque de ne pas brosser la majorité dans le sens du poil, je vais donner un avis honnête, qui n'engage que moi mais qui est tellement différent de ceux que j'avais pu lire qu'il peut éventuellement être utile à certaines et certains.
J'avais beaucoup entendu parler de la réputation de ce livre sans jamais toutefois avoir cherché à en connaître plus. C'est donc à peu près vierge d'a priori que j'entamai ce roman :

Acte I : les faux espoirs...

Après un bref moment d'euphorie suscitée par la joie de me plonger dans un grand vieux classique, m'attendant à être happée par l'histoire ou le style ou les deux, une quelconque magie qui aurait pu opérer, je me suis rendue compte que je m'ennuyais effroyablement et, chose qui ne m'est quasiment jamais arrivée, j'ai laissé tomber après 10 chapitres tellement ce livre ne m'accrochait pas du tout, mais alors ce qui s'appelle pas du tout.

Les dialogues où les personnages parlent au passé simple étaient artificiels au possible à mes yeux et sonnaient faux comme une casserole à mes oreilles ; je ne m'identifiais à personne, l'histoire ne présentais pas un grand attrait de prime abord. Bref, j'ai vécu une réelle déception avec ce livre et, si vous avez le courage, essayez de passer le cap du chapitre 10. (Il est vrai que je sortais d'une lecture qui m'avait enthousiasmée et d'un style hyper pêchu, ceci pouvant expliquer cela.)

Acte II : le syndrome musée d'art moderne...

Néanmoins, étant d'un naturel obstiné, j'ai décidé, après plusieurs mois, d'en reprendre la lecture. Est-ce par masochisme ? est-ce par sensation de rater quelque chose ? Je ne saurais le dire.

Je me suis donc fait violence pour retourner m'engluer dans la mélasse de cette lecture. Je ne le regrette pas car j'ai pris un peu plus de plaisir à la lecture (m'attendant à mal) et découvert les véritables intentions de l'auteur. Elles sont exprimées assez clairement, je crois, dans le chapitre 3 de la deuxième partie. En somme, faire un roman sur le processus de gestation d'un roman.

Assez lumineusement, Gide nous dévoile tous les points faibles de son livre, risque d'ennuyer le lecteur, aspect artificiel de l'ouvrage, etc. C'est donc très courageux à lui d'avoir pris le parti de faire ce livre sachant les obstacles auxquels il se heurterait.

C'est un travail très rigoureux qu'a livré l'auteur, une mise en abîme, un procédé stylistique élaboré mais, cela ne veut pas dire pour moi chef d'oeuvre et c'est en cela que je le compare à un tableau de musée d'art moderne : si vous comprenez la démarche mais que vous n'êtes pas enthousiasmé par la réalisation finale, vous passez pour une débile qui n'a rien compris, exactement comme lorsque devant un tableau que vous comprenez mais que vous jugez abject, vous vous entendez répondre que vous êtes ignorante en art.

Pour conclure, il y a une certaine virtuosité dans ce livre, mais cela ne signifie pas pour moi une virtuosité certaine car ce n'est vraiment pas un livre qui me transporte ou qui fasse palpiter quoi que ce soit en moi, or si je lis, ce n'est pas pour voir un exercice formel d'un auteur façon James Joyce, c'est pour ressentir quelque chose résonner en moi. À vous de voir, je vous ai donné mon avis, mon tout petit avis, c'est-à-dire, pas grand chose.
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Après Yourcenar, dans la catégorie, "je ne connais que lui mais bon sang pourquoi je ne l'ai pas encore lu ?", voici André Gide. Avec la circonstance aggravante que c'est un Prix Nobel et les meilleurs savent.

Est-ce que je vais vous ressortir la crainte de l'Académisme comme raison d'une lecture si tardive... ? Peut-être... Alors que si j'avais réfléchi un peu à ce que je savais (homosexualité assumée à une époque où le coming out n'était pas trop in), j'aurais pu me douter que le style avait peu de chances d'être totalement rigide.

Bref, les challenges comme souvent (y compris mon Nobel) m'ont poussé à cette lecture et j'en suis fort aise. Après le contexte de ma lecture, retraçons brièvement le contexte du livre. C'est un roman "de la maturité", puisqu'il l'écrit passé 50 ans, au sommet de sa gloire et en déclarant que c'est son premier roman (pas gentil pour les autres, notamment Les Nourritures Terrestres qui lui valut sa renommée dès l'âge de 26 ans).

On sent en tout cas un auteur totalement à l'aise et qui mène une narration à plusieurs points de vue, avec un livre dans le livre, des extraits d'un journal d'un personnage principal, et un narrateur à la première personne qui apparaît subrepticement, le plus souvent comme guide de lecteur, mais parfois comme suiveur impuissant des personnages. J'ai trouvé cette narration particulièrement drôle et réjouissante, elle a allégé toute la lecture.

On peut se dire déçu du sujet et de l'histoire en elle-même, qui ne sont pas ébouriffants. L'auteur semble vouloir s'intéresser à plusieurs problématiques (l'amitié, les premières amours, les vieux couples, le suicide) et semble y jeter successivement certains des personnages, sans forcément chercher une cohésion, et en plus en nous faisant le coup de l'auteur qui se laisse guider par la réalité. On ne se fera pas avoir si facilement... mais on prend plaisir aux débats sur l'écriture du réel ou sur sa réinvention, et on n'oublie pas que Gide a été contemporain dans sa jeunesse d'un certain Zola et on comprend qu'il se plaise à déconstruire le naturalisme.

Je ne passerais pas sous silence un aspect qui ne peut que choquer : un inceste oncle-neveu, tranquillement décrit, sans envisager une seconde le côté délictueux de la chose. Gide évite les détails scabreux mais ne laisse tout de même planer aucun doute sur la réalité de la chose. Il l'aborde tellement naturellement que j'ai mis du temps à m'en "offusquer" (tranquillisez-vous je n'appelle pas au boycott !) et cela m'a fait me demander deux choses: quelles raisons ont amené Gide à évoquer ce genre de relations et pourquoi ai-je mis autant de temps à le relever ? Pour la première, je pense que l'époque des années folles permettait plus de libertés dans l'imagination et Gide cherchait peut-être à tester les limites de son lectorat, lui dont l'homosexualité assumée avait du lui valoir déjà certains jugements de ses contemporains. Quitte à être mal vu, autant aller jusqu'au bout ? Ce n'est qu'une hypothèse que je vous livre là. Pour la deuxième, je pense que le talent de Gide permet d'installer doucement l'histoire et de faire accepter comme naturel ce genre d'amour oncle-neveu. Pour éviter qu'on ne renchérisse sur la pédophilie, précisons tout de même que le neveu est majeur (tout juste bachelier mais on peut le supposer) et consentant voire lui-même en demande (même si l'influence de l'ascendance ne peut qu'interroger sur le consentement). Tout cela n'a pas gâché mon plaisir de lecteur, mais m'a quand même poussé dans mes retranchements.

Vous vous en doutez après cette critique, originalité de la narration oblige, cela me donne bien envie de remettre le Gide et le couvert pour une prochaine lecture... histoire de déguster certaines nourritures terrestres ?



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J'ai attaqué ce roman sans à priori aucun, sans connaissance particulière sur l'auteur, avec simplement dans l'idée de découvrir Gide. Or il est rare que je lâche un livre en cours de route, mais dans le cas présent je n'ai pas dépassé le quart. Je n'ai pas vu l'intérêt de m'en infliger plus... Les choses ne commençaient pas mal pourtant. le jeune homme décidant de quitter sa famille, partir brutalement en abandonnant tout et sans un sous en poche. le courage de se tenir debout face au monde sans toit, sans argent, sans rien, et de faire un pas en avant...

Malheureusement, l'histoire continue d'avancer. S'allongeant. S'encombrant de fioritures. Digressant. Et peu à peu, m'a envahi l'impression... D'entendre Gide s'écouter écrire. Nous connaissons tous une personne qui aime plus que tout le son de sa voix, et pourrait discourir des heures pour ne rien dire. Ah, mais qu'est-ce que j'écris bien ! Je suis en train d'inventer une nouvelle forme de roman, c'est incontestable. Et que dire de cette mise en abîme de ma vie. Allez, encore une petite scène. Allez, on déconstruit, on délaye ! C'est cela, la forme de la nouveauté ! Et la valise, tient, insistons sur sa description, ça ne sers à rien mais c'est cela qui est beau.

Certes. Mais là c'est un peu gros.

Par ailleurs, l'histoire m'a paru moins homosexuelle que pédérastique... Voir pédophilique par moment. Un vieux beaux ou deux tournant autours des jeunes éphèbes, et passant aux suivants une fois la date de péremption de tous ces Ganymède passée. Quand ils ne vont pas directement reluquer les gamins dans les librairies. A peu près aussi romantique et émouvant qu'une intrigue entre Juliette et le père de Roméo ; aussi sympathique que le beau-père de Lolita...

L'agacement me gagnait. Ce qui n'est jamais bon dans le métro parisien. A Dieu va monsieur Gide, je n'ai pas pris la bonne porte pour vous rencontrer. Heureusement, il y en a beaucoup d'autres.
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Les Faux-Monnayeurs est un livre qui sort de l'ordinaire et qui se présente comme le roman d'un roman. Nous sommes tout de suite plongés dans l'histoire, le roman commence in media res par la découverte par Bernard de sa bâtardise. Les personnages sont nombreux , Gide nous offre une multiplicité des points de vue. le livre est divisé en trois parties dont deux qui se déroulent à Paris et une à Saas-Fée en Suisse. Edouard est un jeune homme qui tient son journal, il veut écrire les faux-monnayeurs et va se lier d'amitié avec Bernard. Ce dernier va dérober la valise d'Edouard à la gare alors qu'il parle avec son neveu, Olivier. La découverte du journal par Bernard nous permet d'en apprendre plus sur les personnages, il prend une fonction informative. L'intrigue est complexe, il n'y a quasiment aucune description mais Gide se justifie dans son journal. L'action s'organise autour d'une bande d'adolescents qui s'affranchissent de leur famille. de nombreux thèmes sont présents : l'adolescence, l'amitié, l'homosexualité, les relations familiales et l'écriture d'un roman. Edouard initient les plus jeunes, une relation de maître/disciple s'installe avec Olivier et Bernard. Ce livre peut se lire comme un roman d'apprentissage dans lequel les ados évoluent vers l'âge adulte. Ils vont découvrir l'amour, voyager, rencontrer de nouvelles personnes et se remettre en question. Ce livre est unique dans son genre, il présente une réflexion sur le roman extrêmement intéressante. Gide m'a conquise avec ce premier roman et je compte bien lire d'autres livres de cet auteur. LISEZ LE !
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Un titre énigmatique et une histoire qui commence à Paris par la lettre féroce que Bernard envoie à son père adoptif ; il vient d'apprendre qu'il est un « bâtard », selon la terminologie de l'époque. Fracassant début de roman dont il ne faut pas attendre d'autre conséquence que la liberté qu'elle octroie au jeune homme en coupant tout net les ponts avec sa famille. Renverrait-elle à celle que prend l'auteur avec la composition de ce roman si peu orthodoxe ? La première partie se noue, au moment de leur baccalauréat, autour de Bernard et Olivier auxquels se joint bientôt Edouard, plus âgé, qui arrive d'Angleterre. le livre commence par prendre forme autour du journal d'Edouard découvert par Bernard dans la valise qu'il lui a subtilisée. Il est ensuite bien délicat de rendre compte de toute la série d'événements simultanés affectant les trajectoires individuelles des personnages dans ce roman à tiroirs.

Même l'enquête, évoquée en filigrane concernant une affaire de maison close et un réseau de fausse monnaie écoulée par une bande de lycéens (animée par Georges le frère cadet d'Olivier), n'est qu'un écran. C'est une piste se profilant parmi d'autres dans un mille-feuille d'histoires alambiquées qui se juxtaposent ou s'entrecroisent et dont ne sont pas exclues allées et venues entre présent et passé mais dont les tenants et les aboutissants importent peu. Des nombreux personnages qu'on y rencontre tous, peu ou prou, sont à un moment donné principaux puis secondaires ou vice-versa, mais ceux d'Edouard, l'écrivain en train d'écrire, et de Passavant, le dandy mondain, qui se pique de littérature, auteur de «La Barre fixe», représentent chacun un pôle nettement plus identifiable autour duquel gravitent leurs satellites.

La deuxième partie du roman, en Suisse (Saas-Fé) fait apparaître de nouveaux personnages (Boris et sa psychanalyste) et toujours plus de complexité puisqu'il s'avère que le journal d'Edouard, connu au début grâce à Bernard, n'est que la préhistoire d'un roman en gestation : « Les Faux-Monnayeurs ». Roman futur d'Edouard dans le roman présent d'André. Ainsi Gide embarque-t-il le lecteur dans les arcanes de sa création littéraire avec toutefois assez de recul et d'ironie, décelables dans les propos verbeux qu'il prête à Edouard (2ème partie, chapitre 3), pour faire penser qu'il ne prend pas forcément au sérieux sa propre tentative romanesque. du coup la fausseté de la monnaie qui s'écoule dans le roman peut prendre une tout autre signification. Parabole mettant en jeu les fondements de l'écriture ? Au royaume du faux chacun règne ici en maître : Edouard et Passavant l'illustrant à merveille avec leur appétence pour l'artifice ou la phrase creuse. La littérature n'est-elle finalement qu'une forme d'illusion, de fausse-monnaie ? On sent bien que ce questionnement traverse la composition. La troisième partie se déroule à la pension Vedel, où le jeune Boris, venu retrouver son grand-père, trouvera une fin tragique (issue d'un fait divers réel relevé par Gide). Rien ne s'achève mais tout se transforme, se poursuit en apparence, dans ce vrai/faux roman. Gide jauge et examine aussi ses personnages, leur façon de fonctionner dans le récit et, comme s'ils lui échappaient presque, semble prendre le lecteur à témoin de leur autonomie. Roman nouveau ou nouveau roman, on ne sait, mais Gide novateur sûrement.

On fait tout aussi bien de se laisser porter par la vague d'énergie qui traverse les dialogues dans un flot ininterrompu de théories et de réflexions échangées entre les personnages (sur l'homosexualité, l'éducation, le couple, la paternité, la création littéraire, l'amour, le mariage, les femmes etc.) ; lecture très tonique sur ce plan là. La nouveauté de la construction autorise peut-être Gide à faire de l'homosexualité un des sujets majeurs du livre. Les multiples départs d'intrigues sont autant de prétextes, dans cette composition en abyme, lui permettant de dévoiler en creux ce qui doit rester discret : l'amour entre personnes de même sexe et l'ambivalence des sentiments. Dans cet espace conquis sur les conventions on aurait d'ailleurs pu espérer que les personnages féminins s'émancipent aussi du schéma traditionnel or c'est tout le contraire : piégées par le mariage elles sont soit dévouées à leur mari et leurs enfants, soit lâchées par leurs amants ou résignées comme Laura, la femme du pasteur Vedel, et Pauline, la mère d'Olivier, seule Sarah s'en tire un peu mieux. On reste en 1925 tout de même !

Une bonne relecture. Suscitant réflexions - intérêt majeur du livre. Une phrase de G. Painter en conclusion : « le but visé par les Faux-Monnayeurs n'est pas de transmettre une monnaie, même authentique, fabriquée par Gide, mais de permettre au lecteur d'accéder à son indépendance en frappant la sienne »
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Un roman à plusieurs pistes au point qu'il est difficile de pénétrer l'âme de l'auteur, encore moins du personnage d'Edouard, un écrivain solitaire, en qui on reconnait le reflet de l'auteur qui, nous envoie bien plus dans des incertitudes. Tout thème entamé semble ne pas avoir de fin, toute idée, tout raisonnement, toute critique ne prennent aucun envol. Tout reste à l'étape d'un penseur qui glane un peu de tout, tout en s'attachant à rien...
Quant au style de l'auteur, c'est une prouesse, en ce sens qu'on arrive à cerner une espèce de confusion en lui, comme si tout sujet dans Les faux-monnayeurs, n'est qu'interdit...comment écrire aisément sur de l'interdit, si ce n'est de se sentir faux! C'est aussi dans cette grande confusion que se conjugue la grandeur de cet auteur à la plume pointilleuse!
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"Rien ne saurait-être différent de moi que moi-même" écrit, dans son journal intime, Edouard, romancier réputé qui aime les éphèbes.
Projet d'écriture, balbutiements, son manuscrit Les faux-monnayeurs, dont le titre allégorique en référence à cette fausse monnaie que sont les romans à la mode inintéressants, n'avance pas car il se perd dans la réalité ambiante compliquée. Roman dans le roman, c'est ce journal précédant la création littéraire qui va donner vie à son auteur.
A travers le personnage d'Edouard, volontairement assimilé à un écrivain réaliste du XIX° siècle, c'est André Gide qui parle pour assumer en toute liberté ses différences: ne pas se laisser aller au jeu de la réalité en écriture (trop linéaire) et vivre pleinement son homosexualité malgré son éducation rigoriste.
Les jolis garçons ne manquent pas dans se drame sombre.
Son neveu Olivier, timide bachelier en révolte, dont il est amoureux (et réciproquement) qui par jalousie tombera sous l'influence d'un cynique Comte écrivain aussi (ennemi d'Edouard), se ridiculisera, aigri, essaiera de se supprimer avant de se voir tel qu'il est.
Bernard son copain qui, après avoir appris par inadvertance qu'il est un bâtard, fugue en colère. Devenu secrétaire d'Edouard lors d'un voyage en Suisse, il tombe amoureux de l'écrivain et de Laura, amie d'Edouard femme mariée "enfantine encore" enceinte de Vincent (frère lâche d'Olivier).
Georges, jeune frère d'Olivier et délinquant, qui lui fabrique de la vraie fausse-monnaie....Armand le nihiliste...Boris le suicidaire... (surtout éviter d'intervertir les prénoms! ).
Véritable chassé-croisé de jeunes personnalités (de leurs pères dépassés, mère bienveillante, grand-père déçu...), d'intrigues amoureuses et de différents points de vue, Les faux-monnayeurs se veut d'être vrai, sincère pour que la littérature "puisse devenir autre chose".
L' écriture élégante, l' introspection,le "roman expérimental", la maîtrise du style d' André Gide, intellectuel d'avant-garde, le mettent au niveau de Ulysse de James Joyce. A noter le thème de la pédérastie, retrouvé dans son essai: Corydon.Couronnée par le Prix Nobel de littérature, l'oeuvre d'André Gide le place au rang des plus grands écrivains du XX° siècle!
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Qu'on apprécie ou pas l'homme qu'il fut, Gide, même de nos jours, demeure un écrivain incontournable. Tout d'abord à mon sens parce que, à sa manière, il tenta d'innover. Ne peut-on pas voir en effet dans "Les Faux-Monnayeurs" un roman précurseur de l'esthétique - ou de l'absence d'esthétique - du "Nouveau Roman" ?
Résumer l'intrigue de ce livre qui n'est pourtant pas un pavé est voué à l'échec. Disons que, en gros, le rejet de la famille si cher à son créateur et l'homosexualité constituent la trame du récit.
Bernard Profitendieu - on reconnaît bien là l'acidité gidienne - vient de découvrir qu'il n'est pas le fils de son père. Il faut dire que, déjà, ses relations avec celui-ci ne sont pas des meilleures puisqu'elles se placent sous le signe du mépris. Exalté comme on l'est souvent à l'âge de 17 ans, il décide sur le champ de quitter l'appartement familial après avoir laissé une fort belle lettre à son père avoué. Et il demande un asile provisoire à un ami de lycée, Olivier Molinier, qui, lui, est amoureux de son oncle Edouard.
Comme Bernard a besoin de gagner sa vie, Edouard l'engage en tant que secrétaire particulier et tous deux s'en vont en voyage, laissant derrière eux un Olivier délaissé et jaloux qui, comme en représailles, se laisse séduire par le comte de Passavant, un dandy pédéraste qui tient assez de Dorian Gray mais un Dorian bien plus stupide (et bien moins beau garçon) que l'original.
Sous cette influence détestable, Olivier s'aigrit, devient violent, brutal, méchant même. Gide en profite pour nous le représenter à une soirée littéraire où il croise Alfred Jarry et quelques autres - et ce moment-clin d'oeil est un véritable petit régal. Fort heureusement, Edouard, qui fait partie des invités, parvient à récupérer son neveu et ...
... et tout se termine bien - quoique de façon assez a-morale - sauf pour le personnage de Boris, un jeune garçon qui sert en quelque chose à Gide, éternel torturé, de victime expiatoire.
Mais plus que l'intrigue en elle-même - ou plutôt des intrigues car plusieurs autres viennent se greffer sur le tronc central - c'est l'habileté avec laquelle Gide entremêle le tout et la décision avec laquelle il applique le procédé de la mise en abîme qui retiennent l'attention du lecteur. L'oncle Edouard en effet se propose d'écrire un roman qui s'intitulera ... "Les Faux-Monnayeurs" et, çà et là, des extraits de son journal personnel s'intercalent dans un récit qui n'est linéaire qu'en apparence. Et à cette première "mise en abyme", s'ajoute celle de l'Auteur qui intervient au chapitre VII de la deuxième partie et qui semble bien être Gide lui-même.
On affirme souvent que "Les Caves du Vatican" constitue le chef-d'oeuvre de Gide - je suis assez de cet avis-là. Mais ce serait une erreur de passer auprès d'oeuvres comme "Les Faux-Monnayeurs" qui montre bien la volonté de l'auteur de rompre - en tous cas d'essayer de rompre - avec le récit classique tel que l'avaient laissé les grands auteurs du XIXème siècle. Sachant cela, il est sans doute plus facile de comprendre pourquoi "La Recherche ..." - avec ou sans vertèbres Wink - n'a pas "accroché" Gide à la première lecture. ;o)
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Gide m' avait intrigué et séduit avec ses caves du Vatican.
Gide avait pu m' émouvoir avec sa Symphonie pastorale.
Les Faux - monnayeurs ont su, l'an dernier, m' emmener dans leurs tours et tourments.
Gide, à mon goût, reste une sorte de magicien ou plutôt de prestidigitateur sans numéro défini...
Gide est un écrivain comme je les attend, toujours surprenant et profond sans lourdeur.
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J'aime Gide pour la langue. J'adore m'envelopper dans ses phrases souples, chaudes et légères. J'ai encore trouvé ce plaisir dans "les Faux-monnayeurs". Officiellement, c'est le seul roman écrit par Gide puisqu'à d'autres textes, on donne d'autres noms comme sotie ou récit. Pourtant, ce n'est pas un roman comme on l'entend ( il semble que ce fut justement le but de l'auteur que de prouver qu'un roman n'en est pas un). Je sais tout cela a l'air bien fumeux, alors je me contente de me laisser porter par cet imbroglio et sa myriade de personnages, tous remarquablement brossés, du plus insignifiant au plus important. Je savoure l'art de l'évocation, le rendu de l'ambiance et les dialogues recherchés. En un mot, je lis.
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