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EAN : 9782020069984
192 pages
Seuil (01/11/1984)
3.2/5   5 notes
Résumé :
Rien ne nous est plus étranger que notre famille. Un homme, ici, raconte la vie de son père qui meurt dans un hôpital de province. Une vie dont il n'a perçu que les dehors sans gloire, une vie coincée entre une femme dominatrice et un travail routinier. Mais, derrière cette apparence décevante, n'y a-t-il pas autre chose, une aventure qui a tourné court ? Pour la retrouver, la recréer et mieux l'inventer, peut-être faut-il gagner l'île méditerranéenne que le père a ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Voici un roman que je soupçonne d'être très largement autobiographique. C'est un livre dans le livre, puisque le narrateur écrivain, écrit dans le roman un livre racontant la vie de son père qui vient de mourir. Ce roman est assez déstabilisant, car il remet en cause les sentiments familiaux et filiaux que l'on croit indestructibles et tout puissants en Corse. Mais comme partout, ailleurs, et même dans ce village de l'île, on constate qu'il y a des tensions, des inimitiés, des rancoeurs, de la haine aussi, du mépris, et puis aussi de l'autorité, de la négligence, des non-dits, des secrets... le désamour ou la plus totale indifférence entre parents et enfants et ceci sur plusieurs générations... Sentiments que l'on croirait impossibles à croître en Corse où la famille est sacrée, vénérée... et pourtant... et il y a aussi le rejet manifeste de "la pièce rapportée", parce qu'elle ne convient pas car pas assez bien née, ou alors étrangère, continentale... et qui doit se contenter d'être juste tolérée, mais à jamais usurpatrice d'un nom et à qui au mieux on accorde une politesse d'usage... Un livre dur... qui me parle...
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Je me décide enfin ce week-end à mettre un billet sur ce livre.

Le personnage principal vient d'apprendre que son père agonise, et il se rend à son chevet, en Corse, où il doit retrouver sa mère. Sur la route, il se remémore son enfance. La plupart des souvenirs qui jaillissent à sa pensée sont grinçants, cyniques, angoissés. Ce roman intimiste ne s'étend pas beaucoup sur les sentiments de tendresse, mais il aiguise surtout les moments les plus cruels, les plus ambigus, difficiles. On se demande ce que peut cacher ce sentiment de haine sourde du personnage pour son père. On est dans la tête du personnage et sa pensée, par moments éclatée, ne nous dit pas les raisons de ce ressentiment, qui pourrait être une frustration quelconque, ou tout simplement un manque d'amour, ou le désespoir de perdre son père.
Dans les premières pages, j'étais déstabilisée, mais par la suite, en réécrivant le contexte, j'ai trouvé le récit d'une profondeur extraordinaire, assez bouleversant, fait d'une écriture splendide.

Un récit plein d'aspérités et pas du tout édulcoré. Il s'agit ici surtout du deuil du père, qui envahit les pages. Un texte que j'ai trouvé poignant.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
A la mort de son père, il ne versa pas une larme. Il se mit à rêver de lui. D'abord il le vit en cavalier un peu grotesque : Sancho Pança sur un âne squelettique quelque part à la lisière d'une forêt de pins dans la montagne. Puis - même paysage en toile de fond - c'était lui qui rejoignait son père. Ils se promenaient bras dessus, bras dessous. Ensemble ils parlaient, une longue conversation telle qu'ils n'en avaient jamais eu. A un moment ils s'arrêtaient. Le père pointait l'index vers le sol. Et lui, il se baissait, écartait des deux mains les feuilles vertes. Une petite flaque apparaissait avec en son centre un jet d'eau pareil à ceux des tirs forains. L'un après l'autre ils buvaient à la source. C'était très froid, ça coupait le souffle. Ils se regardaient en riant. Le père n'avait pas encore de ventre ou il n'en avait plus. Ses cheveux repoussaient, lui les voyait renaître, s'allonger, tomber sur le front, couvrir les oreilles. Et soudain, dans ce visage qui, dès l'enfance, lui avait semblé si lointain, si étranger, il rencontrait son visage, son visage qui le dévisageait.
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Mon père s'appelle Antoine. Au village, il est très populaire. Lorsque le 15 ou le 16 juillet nous descendons du car, il y a toujours un tas de cousins et d'amis d'enfance pour l'accueillir. Embrassades, grandes tapes dans le dos, on ne lui ménage pas les marques de sympathie. Ma mère n'a droit qu'à de la politesse. Fatiguée par la traversée nocturne du continent à l'île sur un rafiot peu stable malgré l'absence de vagues, elle n'a pas supporté les quarante kilomètres de ce matin (la route, à peine le port disparu, s'élève en lacets de col en col dans la montagne). Elle a réussi à ne pas vomir mais sort du car plus morte que vive. Après les souhaits de bienvenue, personne ne s'occupe d'elle. En un échange de coups d'oeil ironiques, cousins et amis - tous des hommes - l'ont jugée : une petite nature de Française, fragile comme du verre, plus un décor qu'une femme. Antoine aurait mieux fait de choisir son épouse au pays, une de leurs soeurs par exemple, solide et travailleuse.
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- Mon pauvre Jacquot...
Oh! non, pas de pitié ou je cogne.
- Tu partiras avec une bien triste impression de ton pays. Hier j'étais sûre que tu reviendrais, à présent je n'ai plus confiance.
Un soupir et elle passe aux aveux :
- Ma mère vit encore, Jacquot... ton arrière-grand-mère. Elle a envoyé sa servante parce qu'elle ne se déplace plus. Elle s'enferme chez elle... à cause de Jacques et de moi... Elle n'était pas favorable à notre mariage. Quand mon père est mort, juste après la guerre, elle n'a plus quitté sa maison à l'autre bout du village. Depuis quinze ans je ne l'ai pas vue. Jadis, lorsque je la croisais avec Antoine tout enfant, elle n'avait pas le moindre geste, à ses yeux nous n'existions pas. Si elle désire te rencontrer, c'est pour te faire du mal.
- Elle a quel âge?
- Plus de quatre-vingt-dix.
- Je ne suis pas obligé de lui obéir.
- Si
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Bientôt, la grand-mère aura quatre-vingt-cinq ans. Depuis vingt-deux ans, Jacques ne l'a plus vue, n'étant pas retourné dans l'île après l'adolescence. Quant à elle, l'idée de prendre le bateau ou l'avion pour le continent ne l'a sans doute pas effleurée. Ou elle l'a repoussée : "C'est là-bas qu'ils ont tué mon pauvre Jacquot, dans leur guerre idiote." Jacques l'avait entendue plusieurs fois prononcer cette phrase, sans haine dans la voix, calmement, sur le ton du constat. Elle désirait ignorer un monde qui avait réduit en charpie le jeune corps de son amour. D'où la scène faite à son fils Antoine qui, le bac réussi, avait décidé d'aller tenter sa chance de l'autre côté de la mer. Scène mémorable que Jacques reconstituait à partir de rares allusions échappées à ses deux protagonistes.
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- C’est drôle, di sa mère, toi et moi je trouve que c’est en mangeant qu’on se raconte les choses.
- Quelles choses ?
- Des choses qui nous rapprochent.
- Peut-être parce quemanger facilite le partage.
Partager quoi ? Un regard, une souffrance, ce qu’il y a d’informulé entre un fils et sa mère ?
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