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EAN : 9782020427852
672 pages
Seuil (19/08/2000)
3.71/5   620 notes
Résumé :
De même que Le Monde de Sophie de Jostein Gaarder, en mélangeant un roman et l'histoire de la philosophie, avait mis ce domaine du savoir à la portée d'un grand nombre de lecteurs, Le Théorème du perroquet de Denis Guedj mêle étroitement une histoire captivante, où il est question de forêt amazonienne, de bibliothèque perdue et... de perroquet, et l'histoire des mathématiques. Ce romancier, scénariste ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (62) Voir plus Ajouter une critique
3,71

sur 620 notes
Dès qu'un ouvrage parle de mathématiques, j'ouvre un oeil intéressé. Si son but affiché est de les mettre en valeur, de les faire découvrir sous un meilleur jour, là, j'ouvre les deux.
"Emporté par un enthousiasme communicatif, le lecteur le plus hermétique saisit non seulement le sens général de la recherche mathématique, mais il en vient aussi, non sans quelque agressivité, à se demander pourquoi l'enseignement qu'on lui a dispensé à l'école lui a dissimulé tant de merveilles !"
C'est ce que nous promet la quatrième de couverture. Plutôt alléchant, non ?
J'ai assez vite dévoré cette petit brique (plus de cinq cent pages grand format, bien remplies), et si je ne m'y suis pas ennuyée, je n'ai pas non plus sauté de joie à chaque page.
L'intention de départ est louable, mais je trouve que l'auteur a un peu manqué son but, ou pour être moins sévère, n'a pas autant réussi que ce qu'il aurait pu le faire.
Tout d'abord, en ce qui concerne le contenu mathématique. Étant mathématicienne, je suis évidemment difficile à contenter. Ce roman se voulant avant tout un ouvrage de vulgarisation, je ne m'attendais pas à y apprendre grand-chose. Mais je me mets à la place d'une personne moins avertie, et je suis dubitative.
Denis Guedj en dit trop ou trop peu. Trop parce que certaines pages sont trop denses et ne sont pas compréhensibles pour qui n'a pas le bagage mathématique suffisant ; trop peu parce que certains aspects auraient dû être plus détaillés pour être accessibles. Ce qui fait que finalement, je ne vois pas bien à qui s'adresse cet ouvrage : la barre est trop haute ou trop basse pour la grande majorité des lecteurs.
Déception également en ce qui concerne l'histoire "captivante" annoncée. Beaucoup d'éléments sont tirés par les cheveux et l'intrigue policière est cousue de fil blanc. Rien à découvrir de ce côté-là.
Enfin, et c'est un aspect auquel je suis toujours très attachée, quel que soit l'ouvrage : le style.
Je suis désolée de le dire, mais le livre est globalement mal écrit. Certaines phrases sont inutilement lourdes ou pompeuses, tandis que d'autres sont bancales ou grossières (Pour s'exclamer, le mot "putain" n'est pas indispensable...).
J'ai lu ce roman avec mon fils de treize ans, passionné de mathématiques (Nous aimons beaucoup tous les deux partager des lectures, et j'apprécie vraiment qu'à son âge il aime encore lire avec moi. Nous varions les genres : en ce moment, nous sommes dans le dernier jour d'un condamné de Victor Hugo). Le récit l'a beaucoup amusé, même s'il a trouvé, tout comme moi, qu'il y avait des invraisemblances. En ce qui concerne le contenu mathématique : il en connaissait déjà une bonne partie, et pour le reste, m'a inondée de questions, content que je puisse y répondre.
Si le Théorème du perroquet peut produire cet effet sur d'autres lecteurs, dans ce cas, j'approuve ! D'autant plus que l'idée de présenter les différentes branches des mathématiques est intéressante, et que le passage en revue de l'histoire des mathématiques est bienvenu, bien qu'un peu désordonné et pas toujours facile à suivre.
Les mathématiques sont, hélas, souvent mal-aimées. Beaucoup de personnes en ont une vision fausse, et ne les considèrent que comme un fatras de règles incompréhensibles.
Cette vision, entretenue par la société (il est de bon ton de dénigrer cette matière, et de dire d'un air snob "oh, moi les maths...") et cela me navre.
L'univers mathématique est passionnant, mais pour que les enfants puissent le découvrir dès leur plus jeune âge, encore faudrait-il arrêter de ne le leur présenter que comme un tas de formules à apprendre par coeur et de procédures à exécuter sans réfléchir. En France particulièrement, cette matière est la plupart du temps massacrée d'entrée de jeu.
Il y aurait beaucoup à dire, mais j'arrête là mon discours : ma passion déborde quelquefois et je suis facilement intarissable sur ce sujet... j'y reviendrai.
Pour conclure sur ce perroquet : mon avis est mitigé. Si le livre vous tente, pourquoi pas, mais n'attendez pas de miracle, vous risqueriez d'être déçu.
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Pierre Ruche, vieux libraire en fauteuil roulant, reçoit une imposante cargaison de livres de la part de son vieil ami Elgar Grosrouve, vieil ami qu'il croyait perdu depuis des années. Entouré de Perrette Liard et de ses trois enfants, Max et les jumeaux Jonathan et Léa, ainsi que d'un perroquet fort bavard et amnésique, il tente de percer le mystère de cette bibliothèque. Pourquoi Elgar lui a-t-il envoyé ses précieux ouvrages de mathématiques ? Quelle menace pesait sur lui en Amazonie ? A-t-il vraiment résolu deux des plus grandes énigmes mathématiques de tous les temps ? Pour percer le mystère qui entoure l'histoire d'Elgar, la petite famille de la librairie Mille et une feuilles va remonter aux origines des mathématiques et s'attaquer aux fameuses conjectures de Fermat et de Goldbach.

Que ce roman fait du bien ! Il est charmant et drôle et il est indéniable que l'auteur aime ses personnages, ce qui a tendance à se faire un peu rare dans certains romans contemporains. Non seulement il les aime, mais il les a faits complexes et attachants. « L'oiseau semblait ne se souvenir de rien. Ce qui en faisait un spécimen unique : il était le seul perroquet qui répétait ce qu'il n'avait jamais entendu. » (p. 22) Entre aventure, thriller et histoire de famille, on suit chaque personnage, ses secrets, ses désirs et ses interrogations. Et il est impossible de ne pas les aimer, à notre tour. Je retiens cette très belle pensée sur les jumeaux. « Ce que chacun des enfants Liard apercevait dans l'autre, c'était justement ce qui n'était pas le même : les infimes différences qui mieux que tout disaient leur forme commune ! […] Ils n'étaient pas pareils comme deux livres imprimés, mais comme deux copies du même scribe. En un mot, ils se disaient qu'ils étaient les mêmes à si peu près que ça valait le coup qu'ils soient deux. » (p. 295 & 296)

J'ai retrouvé dans ces pages l'intelligence et la tendresse présentes dans La formule préférée du professeur et le bizarre incident du chien pendant la nuit. Sous la plume de Denis Guedj, il est indéniable que les mathématiques racontent des histoires. Agrémenté de schémas et de formules très claires, l'auteur invite son lecteur à jouer avec les chiffres, les formes et les démonstrations. Ah, si mes professeurs m'avaient présenté les mathématiques de cette façon, j'aurais peut-être brillé un peu plus dans cette matière. « Les mathématiques sont simples […]. C'est leur application qui est compliquée. » (p. 56) Mais avec un professeur comme Denis Guedj, j'annonce un zéro faute !
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En ce 1er mois de 2020, je me trouve devant le défi, de rattraper un retard de 20 chroniques, bassement délaissées au profit de jeux à quatre pattes avec mes 3 petits derniers.

Commencer en 2020, est un jeu d'enfant grâce, au Théorème du Perroquet, un livre de 520 pages, tel un bref résumé chiffré du roman de Denis Guedj.
En délivrant un 20/20 je salue un livre distrayant, souvent drôle, parfois instructif, qui met en scène les mathématiques, un peu comme l'acteur Luchini, qui n'a rien compris au Bateau Ivre dit-il, mais qui le trouve génial.


Comment résumer 2000 ans et plus d'histoire des nombres, des figures, de l'espace, des probabilités, des ensembles, des logarithmes, de la trigonométrie....
Sans parler des nombres qui sont entiers, réels ou rationnels, irrationnels et parfois imaginaires ?

Quand Monsieur Ruche reçoit l'équivalent de la bibliothèque nationale (section math) de son ami Elgar, il aurait pu prendre la tangente, ou partir à la dérive, il décide d'affronter l'inconnu.
L'idée s'impose de tracer la vie de tous les plus grands mathématiciens, à travers leurs plus fabuleuses découvertes nées d'une imagination fantasque et logique, mais aux axiomes inutilisables.

En effet :
écrire que deux parallèles sont des droites qui se coupent à l'infini, est faux par contre par un point ne passe qu'une droite parallèle à une autre et une seule. C'est juste. Notons la nuance.



Deux femmes extraordinaires se sont illustrées, et leur nom flotte au panthéon des sciences mathématiques.
Leur destin ouvre aussi une question pourquoi si peu de femmes, à développer une imagination logique et fantasque, seraient-elles illogiques, et trop intuitives puisque souvent fantasques. Que suggère le perroquet ?

Au quatrième siècle vivait à Alexandrie une famille de mathématiciens. Fille de Théon, Hypatie était aussi philosophe que mathématicienne et enseignait les deux disciplines. À la suite de son père elle approfondit la méthode de calcul des racines carrées. Son succès et ses qualités étaient insupportables aux partisans du nouvel ordre moral qui s'abattait sur Alexandrie, elle fut torturée avant d'être brûlé vive.
Une seule mathématicienne dans toute l'Antiquité et la torturer, et on s'étonne qu'il n'y ait pas beaucoup de filles qui fasse des mathématiques.


Fort de cette expérience la deuxième mathématicienne de notre histoire publia un certain nombre de démonstrations sous le nom de Monsieur le Blanc, la conjecture de Fermat, Mme Germain est la première à formuler le résultat général sur une catégorie entière de nombres premiers d'une certaine forme. Quelle belle revanche sur les fous et les fanatiques

Je pourrais extraire bien des sujets en allant aux racines de toutes les étonnantes aventures de l'esprit matheux.
Évariste Gallois reste un exemple tout à fait étonnant, puisque de toutes ses découvertes aucun mathématicien de l'époque n'a pu entrevoir l'intérêt de ses équations.
Son imagination est ainsi mis au grand jour, par des avancées hallucinantes contenues dans un manuscrit écrit une nuit entière avant d'être tué au petit jour dans un duel.


La science mathématique voudrait-elle rendre rigoureux le hasard est effacé tout incertitude jusqu'à créer un ensemble, tout simplement appelé la géométrie du hasard, le nom que Pascal lui a donné.

Ainsi d'anecdotes en anecdotes depuis les Grecs en passant par l'Iran et Bagdad, on découvre les théorèmes de Thalès pour mesurer les ouvrages comme les pyramides, l'utilité du nombre zéro, comme tous les défis que ces scientifiques ne cessèrent de s'envoyer sous le nom de conjecture, conjectures dont les plus connues sont celles de Fermat de Goldbach.

Un livre qui se lit en diagonale ou bien en parallèle, où l'on peut faire des impasses, monter en puissance, s'extraire du nombre de pages, lire au hasard, se passionner pour les séries, découvrir le nombre d'or, résoudre ses nuits de mélancolie.
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le théorème du perroquet
Denis Guedj (1940-2010)
Voici un roman étonnant de 650 pages que je vous invite à lire : il vous fera découvrir le monde mathématique comme vous ne l'avez jamais imaginé. Et vous saisirez alors comment vous auriez aimé que l'arithmétique, la géométrie, l'algèbre et la trigonométrie vous fussent enseignés au cours de votre adolescence. En annexe, vous y apprendrez une foule de petites choses comme l'origine du mot « poubelle ». C'était tout simplement le nom du préfet de Paris qui inventa le système de collecte des déchets. Mais plus sérieux, venons-en aux maths !
Monsieur Ruche est libraire à Montmartre. Handicapé à la suite d'un accident, il se déplace au moyen d'une chaise roulante. Il est secondé dans sa tâche de libraire par Mlle Perette qui a trois enfants. Max l'aîné, qui souffre de surdité, a été adopté, Léa et Jonathan sont jumeaux et sont nés avant que Max ne soit adopté. Tout ce petit monde vit dans un petit appartement de Montmartre aux multiples dépendances souvent encombrées de livres.
L'histoire commence aux Puces de Clignancourt alors que Max s'approprie un perroquet maltraité par des malotrus trafiquants d'animaux. Il le baptise Nofutur. le même jour, M. Ruche reçoit une lettre d'Amazonie signée d'un ami récemment disparu, qui lui lègue une incroyable bibliothèque d'ouvrages de sciences mathématiques.
M. Ruche féru de mathématiques s'exprime d'abord sur Thalès, l'homme dit de l'ombre car il peut mesurer la hauteur de la pyramide de Chéops grâce à son ombre portée. Il est le premier à faire face à ce défi avec succès. Son idée est la suivante : le rapport qu'il entretient avec son ombre est le même que celui que la pyramide entretient avec la sienne. Reste à la mettre en application.
Thalès de Milet a aussi énoncé le théorème des proportions pour en déduire que la forme est ce qui se conserve quand on garde les proportions et que l'on change les dimensions.
La cargaison de livres partie de Manaus arrive enfin à Montmartre après quelques péripéties. Et M. Ruche de se demander pourquoi son ami s'est débarrassé en catastrophe de toute sa bibliothèque. Et l'autre question est : comment classer ces milliers de livres de mathématiques dans tous les rayonnages qu'il a fait aménager spécialement. En vérité cela revient à recomposer l'architecture entière des mathématiques depuis le VIe siècle avant J.C. avec Thalès et Pythagore jusqu'à nos jours. Ce qu'il va faire avec constance et minutie en s'installant à la Bibliothèque Nationale, passant des mathématiciens grecs aux savants arabes, qui au IXe et Xe siècle furent de grands mathématiciens et des traducteurs accomplis des spécialistes grecs avant de créer l'algèbre, la combinatoire et la trigonométrie. Puis il passe aux Italiens spécialistes au XVIe siècle de l'algèbre élémentaire, des nombres complexes, puis ceux de l'Europe entière avec l'invention des logarithmes avec Napier (appelé aussi Neper), de la géométrie analytique avec Fermat et Descartes, le calcul infinitésimal avec Leibniz et Newton, les probabilités avec Pascal…etc. Au XVIIIe, il trouve l'âge d'or de l'analyse avec Euler et D Alembert, au XXe les groupes et les matrices avec Riemann et Gauss, la géométrie non euclidienne avec Riemann et Lobatchevski, la théorie des ensembles avec Hibert et Cantor.
Sont évoquées aussi la conjecture de Fermat qu'un certain Ibn al Kawwam avait pressentie, à savoir qu'un cube ne peut être la somme de deux cubes. L'équation x au cube+ y au cube= z au cube n'a pas de solution à priori.
Presque tous les ouvrages sont des éditions originales, certaines vieilles de cinq siècles.
Une deuxième lettre de Grosrouvre arrive qui apporte des précisions sur la collection de livres et les raisons qui l'ont amené à se séparer de sa bibliothèque. Il parle aussi de Pythagore qui a découvert les nombres amiables comme 220 et 284. La somme des diviseurs de 220 est égale à 284 et celle des diviseurs de 284 égale à 220.
Dans la foulée, M. Ruche se précipite sur les ouvrages relatifs à Pythagore, qui a dix huit ans participa aux jeux olympiques et remporta les compétitions de pugilat. Il fonda ensuite son école à Crotone au sud de l'Italie. Élève de Thalès son école vit passer Hippase, le premier des pythagoriciens, qui inventa la troisième médiété, Hippocrate de Chios inventeur du raisonnement par l'absurde, Philolaos le premier qui comprit que la Terre n'était pas au centre de l'univers, Archytas inventeur du nombre un, qu'auparavant les Grecs ne considérait pas comme faisant partie des nombres. Pythagore établit aussi que pair + pair= pair, impair + impair= pair, pair + impair= impair. Et aussi que pair x pair= pair, impair x impair= impair, pair x impair= pair. On en vient au théorème de Pythagore qui avait en fait été découvert par les babyloniens, mille ans auparavant. : la somme des carrés des côtés d'un triangle rectangle est égale au carré du troisième côté (hypoténuse) .
À la suite de l'incendie qui a détruit la demeure de Grosrouvre à Manaus, M. Ruche se demande si le cadavre retrouvé dans les décombres est bien celui d'Elgar. Cette histoire rappelle étrangement celle de Philolaos qui fut le seul rescapé de l'incendie de sa demeure à Crotone. La deuxième lettre plonge la maisonnée dans une série d'interrogations.
M. Ruche continue ses investigations et il énonce : « si un nombre représente le côté d'un carré, aucun nombre ne pourra représenter sa diagonale. Diagonale et côté sont incommensurables. Il existe donc des grandeurs qu'aucun nombre ne peut exprimer !! le nombre équivalent à la racine de 2 est un nombre irrationnel approchant 1,414213…etc. L'incommensurabilité n'est pas visible ! La figure représentant un carré de côté 1 et sa diagonale égale à racine carrée de 2, est muette, seul le travail de la pensée peut révéler l'incommensurabilité. La réalité est plus riche que les nombres. Donc dans un carré, si un nombre mesure le côté, aucun nombre ne mesure la diagonale et vice versa. C'est le « scandale logique » d'Hippase de Métaponte !
On passe ensuite à Euclide l'homme de la rigueur qui a défini la géométrie et la théorie des nombres. C'est lui qui a mis au point une méthode inventée par Eudoxe, la méthode d'exhaustion qui permet de déterminer la surface d'un cercle en inscrivant un carré à l'intérieur, puis en doublant le nombre des côtés et ainsi de suite jusqu'à obtenir un polygone aux multiples côtés. Mais on ne connaîtra jamais la surface exacte du cercle, même en multipliant les côtés à l'infini, tout en s'en rapprochant de plus en plus.
C'est Euclide aussi qui a défini qu'il existe 5 polyèdres réguliers inscriptibles dans une sphère : le tétraèdre, le cube, l'octaèdre, le dodécaèdre et l'icosaèdre.
Alors que dans un plan, il existe une infinité de polygones réguliers inscriptibles dans un cercle, mais dans l'espace il n'y a que 5 volumes seulement inscriptibles dans une sphère.
Euclide énonça que l'on démontre une proposition en la déduisant d'une autre déjà admise comme vraie. Ainsi il posé toute une série d'axiomes dont d'ailleurs le champ s'étend bien au delà des mathématiques et concerne la logique.
de même, il a énoncé les cinq postulats qui n'existent qu'en géométrie et jamais en arithmétique.
Il est à remarquer qu'autant les sciences furent chéries en Grèce, autant elles furent délaissées à Rome. Après la pléthore de mathématiciens grecs, en mille ans il n'y eut aucun mathématicien romain. La conjugaison du désintérêt romain pour les choses de l'esprit et de l'hostilité des chrétiens pour ces savoirs qui ne devaient rien à Dieu ni à ses saints eut des conséquences tragiques pour la survie des sciences. La première victime fut une certaine Hypatie, dont le père, Théon, découvrit une méthode de calcul des racines carrées. Elle travailla sur les résultats de Claude Ptolémée et de Diophante. Les partisans du nouvel ordre moral ne purent supporter qu'elle enseignât les mathématiques et la philosophie et elle fut torturée et mise à mort au bûcher comme sorcière.
La belle histoire du papyrus de Rhind fait alors l'objet d'un bel exposé de la part de M. Ruche à ses enfants. Découvert au XIXe siècle dans le tombeau mortuaire de Ramsés II à Thèbes, il est le plus vieux traité de mathématiques connu. Il est l'oeuvre de Ahmès, un scribe vivant 1700 ans avant notre ère., qui a retranscrit un papyrus vieux de plus de 500 ans pour lui, datant d'Ammenemès III qui régna 2000 avant notre ère.
Et puis reviennent les trois questions toujours pas élucidées : qui voulait voler les documents exposant les démonstrations de Grosrouvre ? Et comment est mort cet ami de M. Ruche ? Pas de preuve formelle de sa mort d'ailleurs ! Qui était le fidèle compagnon évoqué par Grosrouvre et qui pourrait détenir les solutions aux conjectures ?
Trois questions comme les trois grands problèmes de mathématiques de l'Antiquité : la quadrature du cercle, la duplication du cube et la trisection de l'angle à la règle et au compas ! Ahmès se posait déjà la question ; comment trouver un carré équivalent à un cercle donné ? Anaxagore s'y risqua et puis Hippocrate de Chios, sans succès.
Omar al Khayyam, le poète de Samarcande fut aussi un illustre mathématicien et son ouvrage Rubâiyât, recueil de quatrains donne un avant goût de sa recherche en mathématique. On admirera ces deux vers pleins de douce insolence et de provocation :
« le vin, les beaux cheveux dans les mains, c'est autant de pris dans cette vie. Combien de jours te reste-t-il ? »
Les mathématiciens arabes en traduisant nombre de documents grecs en arabe nous ont fait parvenir notamment les Éléments d'Euclide. Souvent en complétant la recherche par exemple pour les nombres amiables. Khayyam fut à l'origine de la notion de polynôme.
C'est à Bagdad après Alexandrie que s'instaura l'amour des sciences et des arts et que se constitua une immense bibliothèque. Tous les livres écrits en grec furent traduit par de vastes ateliers de calligraphie et des équipes de scribes traducteur en arabe. Une véritable chasse aux manuscrits ! Ses troupes ayant remporté une victoire sur les armées byzantines de l'Empire romain d'Orient, al Mamun préféra échanger des prisonniers chrétiens contre des livres qui arrivèrent à la Maison de la Sagesse de Bagdad.
Venu d'Inde au Ve siècle, le manuscrit Sindhind révéla au monde les dix chiffres, le zéro compris. Ces dix chiffres constituaient l'une des pièces d'un dispositif global qui permettait d'écrire les nombres et de calculer avec eux : la numérotation décimale de position avec un zéro : une des plus importantes inventions de l'humanité. Les chiffres que le monde entier utilise, ont donc été inventés par les Indiens en Inde. Et non pas par les Arabes comme on le dit généralement. D'ailleurs, lorsque les chiffres sont arrivés à Bagdad, les Arabes les ont appelés « les figures indiennes ».
Par contre ce sont bien les Arabes à Bagdad qui ont inventé l'algèbre en la personne de al Khwarizmi.
Et Lea de se demander pourquoi x dans les équations est l'inconnue et non pas l'inconnu !!
Sharaf al Din al Tusi poursuivit l'oeuvre de al Khayyam en ce qui concerne les équations du 3e degré et mit en oeuvre la dérivée. C'est Nasir al Din al Tusi qui mit au point et donna ses lettres de noblesse avec Abual Wafa à la trigonométrie qui existait déjà en Grèce (Hipparque, Ptolémée, Théodose et Ménélaos) et en Inde mais à l'état de rudiments. C'est Ménélaos au IIe siècle après JC qui démontra le premier que la somme des angles d'un triangle construit sur une sphère était supérieure à 180°.
Puis M. Ruche nous emmène en Italie du XVe siècle pour faire connaissance de Fibonacci qui écrivit le premier grand traité de mathématique d'Occident. C'est lui qui dressa la fameuse liste de nombres qui porte son nom. C'est aussi l'époque où le papier, découverte arrivée de Chine, permet à l'imprimerie de se développer à Bagdad et multiplier les ouvrages. On fait connaissance avec Pacioli puis Tartaglia qui s'intéressa à la résolution des équations du troisième degré et par ailleurs fonda une nouvelle science, la balistique qui étudie les mouvements des projectiles. Mais c'est Cardan- (celui qui a inventé le système antiroulis sur les véhicules de l'époque et qui a abouti plus tard à faire en sorte que le volant fasse tourner les roues et au moteur d'entrainer les roues)-qui permit la résolution des équations du troisième degré par radicaux . Puis Ferrari résolut ainsi celle du quatrième degré.
L'invention des signes + et – remonte à 1489 avec Widmann, et x à 1631 avec Oughtred. Les parenthèses apparurent avec Bombelli à la même époque.
Une invention astucieuse et très utile vit le jour en 1557 avec un anglais du nom de Recorde, celle du signe =.
Et M. Ruche nous fait découvrir des êtres bizarres : les nombres « impossibles » que Descartes appela « imaginaires » et plus tard encore Gauss « complexes ». les autres nombres, qu'ils soient positifs ou négatifs ou encore rationnels ou irrationnels sont des nombres « réels ». C'est Euler qui imagina « i » le nombre imaginaire (racine de moins 1), permettant de résoudre nombre d'équations. C'est à la suite de cela que M. Ruche se demanda si l'on pouvait extraire la racine carrée d'un négatif ! La réponse à travers les traités s'avère étonnante puisqu'elle est : Oui et Non !! Non si l'on considère les nombres réels, oui si l'on considère les nombres complexes, grâce à « i », racine imaginaire de l'unité négative.
Et qu'en est-il des équations algébriques du 5e degré ? Trois siècles de calculs et de recherches avec Tartaglia, Cardan, Ferrari, Bombelli, Euler, Lagrange, puis avec le norvégien Niels Abel, qui en 1823 conclut qu'elles n'étaient pas solubles par radicaux ni toutes celles de degré supérieur. Épuisé par ses calculs il est mort à 27 ans !
Plus tard, Evariste Galois va révolutionner ce secteur des mathématiques en introduisant la notion de « structures » en algèbre.
Quand on arrive au chapitre Fermat (1601 ?- 1665) , on ne peut qu'être ébahi, car cet homme, magistrat à Toulouse, est à l'origine de la théorie des nombres, avec Blaise Pascal de la théories des probabilités, avec Descartes de la géométrie analytique, et précurseur du calcul différentiel et du calcul intégral ! Fermat a démontré qu'aucun triangle rectangle n'a pour aire un carré !! Dans sa théorie des nombres, il a démontré en 1650 qu'il n'est pas possible de partager un cube en deux autres cubes et en général une puissance quelconque supérieure en deux puissances de même degré excepté pour la puissance 2. La démonstration de ce dernier théorème de Fermat ayant disparu, personne n'a pu la refaire avant 1995 en les personnes de Wiles et Taylor, deux mathématiciens anglais de l'Université de Princeton ! On peut formuler le théorème aussi de la façon suivante : on ne peut pas décomposer une puissance en somme de deux mêmes puissances sauf pour les carrés.
Quant à Blaise Pascal (1623-1662), c'est à 16 ans qu'il a écrit son fameux traité « Essai pour les coniques » ! il est l'inventeur de la machine à calculer. Il va se lancer ensuite dans l'analyse combinatoire. Dans le domaine des probabilités, il faut aussi mentionner la famille Bernoulli au nombre de dix, étalés sur deux siècles et tous des matheux ! Jacques Bernoulli mit au point l'art de conjecturer, appelé la stochastique.
C'est Newton et Leibniz qui mirent au point après Fermat le calcul intégral, Leibniz inventant de plus le signe S allongé .
C'est alors qu'un soir, ô rage ô désespoir, M. Ruche découvre que Nofutur a été kidnappé ! Max va remuer ciel et terre pour le retrouver…
On en arrive alors à Euler (1707-1783), qui a laissé son nom à un quantité de théorèmes, formules et autres équations. Son oeuvre occupe 75 volumes et 45 000 pages !! de mathématiques ! Il a beaucoup travaillé sur le nombre π . Et notamment démontré que le sixième du carré de π était égal à la somme des inverses des carrés des différents nombres entiers ! Il a montré aussi que la longueur de l'arc de cercle pour aller d'un point à un autre est π/2 fois plus long que la ligne droite représentant le diamètre.
Une partie du chapitre consacré à π évoque la chasse aux décimales qui sont en nombre infini.
Il fallait bien parler de la fameuse formule de Euler : e puissance iπ =-1 Une assez longue explication nous fait découvrir que e= 2,7182… résultat d'une fonction exponentielle. La formule s'écrit aussi e puissance iπ+1=0. (en n'oubliant pas que i=racine de -1, nombre imaginaire)
Puis sont abordés les logarithmes népériens et autres, inventés par Napier (ou Neper) (1550-1617) d'origine écossaise. Il a mis vingt ans pour établir les tables de logarithmes !!
C'est Goldbach en 1742 qui établit que tout nombre pair différent de 2 est la somme de deux nombres premiers. C'est la conjecture de Goldbach qui n'a jamais pu être démontrée sans que l'on puisse affirmer qu'elle est fausse. À moins que les travaux secrets de Grosrouvre ne contiennent cette démonstration lui qui l'affirmait avant de mourir On a vu ce qu'il en était de la conjecture ou dernier théorème de Fermat ! Quant à la conjecture de Euler (1772) : la somme de trois bicarrés ne peut être un bicarré, il a fallu attendre Noam Elkies en 1988 pour prouver qu'elle était fausse ! Elkies après une très longue recherche a trouvé : 2 682 440 puissance 4 +15 365 639 puissance 4 +18 796 760 puissance 4 = 20 615 673 puissance 4 !!!
Et la quadrature du cercle ? C'est un allemand nommé Stiefel qui a énoncé vers 1550 qu'elle était impossible. Et depuis, des milliers de mathématiciens se sont attelés à cette recherche, vainement !
Plusieurs pages sont consacrées aux nombres irrationnels et transcendants, avec notamment la démonstration de l'irrationalité du rapport entre le périmètre et la diagonale d'un carré, et celle plus difficile à établir du rapport entre la circonférence et le rayon d'un cercle, = à π qui est donc un irrationnel et en même temps transcendant. C'est Euler qui l'affirma sans pouvoir le démontrer. C'est Lambert en 1761 qui y parvint.
Il ne faut pas perdre de vue au cours du récit que Grosrouvre a prétendu avoir démontrer les trois conjectures les plus célèbres, mais M. Ruche n'en a pas trouvé trace dans les notes incluses dans la bibliothèque dont il a hérité et qu'il eu le temps de compulser.
En attendant on apprend que le volume de la sphère est égal au 2/3 de celui du cylindre qui la contient et leur surface est dans le même rapport. // LA SUITE DU COMMENTAIRE DANS LA CASE "COMMENTER".
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Lorsque j'étais au lycée, j'aurais aimé que le premier cours au moins de math serve à présenter la matière. Que l'on nous dise “Dans la grande famille des maths il y a tel domaine qui consiste à … Ça à été découvert à telle époque, on s'en servait alors pour … Et aujourd'hui on s'en sert encore dans telles circonstances, ou on ne s'en sert plus parce que…”
Et j'ai trouvé une partie de cette exposition page 84 et suivantes de mon édition.
Le savoir quand j'étais élève n'aurait certes pas fait de moi une mathématicienne mais au moins j'aurais moins eu l'impression d'être torturée. D'autant qu'il y avait quand même des chapitres que j'aimais : l'algèbre et la trigonométrie.
Tout cela pour dire que ce livre didactique et néanmoins amusant est tout à fait utile.

Sous couvert d'une bibliothèque spécialisée à classer et d'une enquête à mener, les protagonistes, une famille un peu particulière, s'embarquent dans l'histoire des maths et des mathématiciens.
Parce que l'histoire des maths, c'est aussi l'histoire de ceux qui ont découvert petit à petit tous les secrets des nombres et des figures. D'Archimède qui protège d'un général romain sa ville de Syracuse, à Évariste Galois mort à 20 ans dans un duel et dont la carrière fut donc très courte bien que fructueuse, et bien d'autres. Leur vie et leur recherches ont aussi dépendu de leur époque et des aléas de leur vie.

Je ne prétend pas avoir tout compris, mais j'ai pris plaisir à ce roman souvent tiré par les cheveux mais pas ennuyeux.


Challenge ABC 2016-2017
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Comme tous les élèves du monde, Jonathan avait croisé Thalès à plusieurs reprises. Chaque fois, le professeur avait parlé du théorème, jamais de l'homme. D'ailleurs, en cours de maths, on ne parlait jamais de personne. De temps en temps, un nom tombait, Thalès, Pythagore, Pascal, Descartes, mais c'était seulement un nom. Comme celui d'un fromage ou d'une station de métro. On ne parlait pas non plus de où ni de quand ça s'était fait. Les formules, les démonstrations, les théorèmes atterrissaient sur le tableau. Comme si personne ne les avait créés, comme s'ils avaient été là de tous temps, comme les montagnes ou les fleuves. Encore que les montagnes, elles, n'avaient pas été là de tous temps. Et l'on arrivait à ceci que les théorèmes avaient l'air plus intemporels que les montagnes ou les fleuves !
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Cela se passait à la fin des années 20. Chaque matin, un professeur d'Université se rendait à la gare de Shibuya, accompagné de son chien Hachiko. Un peu avant l'heure du retour de son maître, Hachiko retournait à la gare et l'attendait. Ensuite, ils rentraient tous les deux. Cela durait depuis des années. Un soir, le professeur ne revint pas. Dans la journée, il avait été renversé par une voiture et était mort sur le coup. Personne ne prévint le chien. Tous les soirs, Hachiko retournait à la gare de Shibuya pour attendre son maître. Lorsque le dernier voyageur descendait, Hachiko s'en retournait. Cela dura sept ans. En 1935, Hachiko mourut. En souvenir de cette fidélité, les habitants de Tokyo élevèrent une statue en l'honneur de Hachiko. Se donner rendez-vous à la statue du Chien, c'est être assuré que l'on vous attendra le temps qu'il faudra.
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Il en a fait du chemin notre zéro :

-Çunya !

Un long battement de derbouka salua l'arrivée du dernier des nombres.

« Çunya veut dire vide en sanskrit. Le zéro est représenté par un petit rond. Pourquoi un rond? On ne le sait pas vraiment. Par contre, on sait que, traduit en arabe, çunya devient sifr qui, traduit en latin, de zéphirum qui, traduit en italien, donna zéphiro. Et de zéphiro à zéro, il n'y a pas loin. Et le nom du zéro, devint celui de tous les chiffres.

Le zéro, « ce rien peut tout », n'avait pas volé son surnom
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Il faut aux vérités de la science de belles histoires pour que les hommes s'y attachent. Le mythe, ici, n'est pas là pour entrer en concurrence avec le vrai, mais pour le rattacher à ce à quoi les hommes tiennent et qui les font rêver.
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" Le commencement est la moitié de tout " (Polybe). Autant dire que si ça commence mal, c'est parti pour longtemps !
(p.200 - Points)
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Vidéo de Denis Guedj
#mathématiques #chiffres #CulturePrime
Vous avez affaire à eux tous les jours, vous les manipulez depuis l'enfance, mais avouez, cette question vous turlupine : pourquoi les chiffres ont-ils la forme qu'ils ont ?
(On attend vos réponses en commentaire )
Sources principales d'information :
- Marc Moyon : "Apprendre les mathématiques au Moyen Âge : l'importance des traductions arabo-latines" - Agathe Keller : "Comment on a écrit les nombres dans le sous-continent indien" - Clarisse Herrenschmidt, "Les Trois Écritures, Langue, nombre, code" (Gallimard, 2007) - Guy Beaujean : "Étude paléographique sur la « rotation » des chiffres et l'emploi des apices du Xe au XIIe siècle" - Jérôme Peignot, "Du Chiffre" (Damase, 1982) - Georges Ifrah, "Histoire universelle des chiffres" (Seghers, 1981) - Denis Guedj, "L'Empire des nombres" (Découverte Gallimard, 1996), "Le Théorème du perroquet" (Seuil, 1998) - et les ressources éclairantes de Jean-Michel Delire, Marc Smith, Océane Juvin, Matthieu Cortat, Rémi Forte, Thomas Huot-Marchand.
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