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3,76

sur 415 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le Faucon Maltais est sans doute le roman le plus connu de Dashiell Hammett, notamment en raison de la très grande adaptation cinématographique qu'en a faite John Huston avec, dans le rôle fameux de Sam Spade l'inimitable Humphrey Bogart. Celui-ci accèdera via ce film au rang de véritable star hollywoodienne ; rang qu'il n'occupait pas auparavant.

La Faucon Maltais est peut-être le roman le plus exotique de Dashiell Hammett, au travers de ses incursions dans le temps (histoire ancienne) et dans l'espace (géographie au long cours), mais malgré tous ces " plus ", c'est à ce jour, celui qui m'a le moins plu de son auteur, moi qui avait littéralement adoré Moisson Rouge et L'Introuvable.

Le début du livre me semble un peu poussif et franchement moins réussi que ce que l'auteur a su faire ailleurs. De même, contrairement à ce qui est le cas d'habitude, le héros, le détective privé Samuel Spade, a parfois des allures de superman extra-lucide ce qui diminue, selon moi, son crédit. Dans les deux romans sus-mentionnés, le héros, tout autant détective privé, me paraissait plus friable, plus fragile et, du même coup, plus authentique.

Bien sûr, ce personnage du détective privé malin, dur à cuire, à la moralité parfois douteuse, un brin porté sur la boisson et intraitable avec la police est un pilier majeur dans l'histoire du polar et du roman noir. Mais ce que j'y vois, moi, surtout, c'est Dashiell Hammett lui-même. Un écrivain qui n'a pas fait qu'écrire, qui a lui-même risqué sa peau en tant que véritable détective privé, qui s'est même carrément opposé à l'appareil d'état américain lors de la chasse aux sorcières organisée par le député McCarthy et que cet appareil d'état n'a pas hésité à briser, pour le punir de son insoumission, alors même qu'il avait fait montre d'un patriotisme et d'un sens du dévouement pour son pays hors du commun.

Hormis ces quelques points et un scénario qui se ficelle, somme toute, un peu trop bien, cette lecture reste un moment très agréable et le final est vraiment intéressant. Le personnage le plus captivant étant, d'après moi, la superbe, inquiétante et indomptable Brigid O'Shaughnessy qu'on sent absolument capable de tout pour arriver à ses fins.

C'est d'ailleurs par elle et ses charmes que tous commence lorsqu'elle arrive aux abois à l'agende des détectives privés Spade & Archer indiquant qu'elle craint pour la sécurité de sa jeune sœur qui se trouve sous l'emprise d'un homme qu'elle juge dangereux.

Sam Spade a à peine le temps d'écouter l'histoire de la jeune femme que son associé Archer se propose de tout de suite prendre en charge cette affaire, subjugué qu'il est par les charmes de la cliente.

Spade voit la chose d'un œil dubitatif jusqu'à ce que très vite on lui rapporte la mort à la fois de son associé et de l'homme qu'il était censé suivre. Il apparaît également que de jeune sœur il n'y a probablement jamais eu et que la cliente a en fait donné un nom d'emprunt.

Tout à coup, la filature l'enquête prend un tour beaucoup plus intriqué, sachant que la police soupçonne Sam Spade d'être à l'origine de la mort de son associé car elle découvre vite que la femme d'Archer était la maîtresse de Spade.

Viennent encore s'adjoindre un Grec au nom à consonance égyptienne et un mystérieux objet d'art qui semble être la cause de bon nombre des péripéties qui se succèdent au bureau de l'agence de Sam Spade. Mais vous comprendrez aisément qu'il m'est difficile d'en révéler davantage à ce stade de l'enquête sous peine d'éveiller les soupçons des véritables coupables et de leurs commanditaires.

En somme, un bon polar, pas non plus exceptionnel, et dont on peut considérer que l'adaptation cinématographique vaut amplement le livre, l'une étant très fidèles à l'autre (j'ai vu le film il y a quelques années mais dans mon souvenir, ça colle parfaitement au roman). Néanmoins, sachez conserver votre œil d'aigle et ne perdez pas votre latin à Malte car ce n'est bien évidemment qu'un avis, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Encore un livre culte de Hammett. Pour moi, beaucoup plus abouti que La moisson rouge.

L'intrigue est simple a resumer: trois aventuriers cherchent chacun d'eux a se procurer une statuette de grande valeur, “le faucon de Malte”, et engagent, chacun a part, le detective prive Sam Spade, pour la leur procurer, ou la leur assurer, au depens des autres. Sur cette base, Hammett construit un petit chef-d'oeuvre.


Commencons par les personnages. le detective est le frere jumeau de celui de la moisson rouge, grand buveur, grand fumeur, un peu debraille, grand seducteur legerement misogyne, en fait plutot misanthrope tout court, un solitaire romantique et pessimiste, cynique, violent quand il faut l'etre et d'un phlegme olympien quand il ne le faut pas, impertinent avec la police ou toute autre autorite, donnant l'impression que rien de ce qui se fait ou se dit ne l'interesse, alors qu'il ne perd pas un seul detail en toute situation. Bref, Humphrey Bogart. Mais cette fois il est a son propre compte, il a un nom, Sam Spade, il a une figure et des tics faciaux qu'Hammett se complait a decrire, et surtout, cette fois, il apparait comme quelqu'un qui sait se plonger aussi dans des recherches d'archives, qui a de la culture et qui sait, quand il veut, raconter de belles et longues histoires. Bref, un Humphrey Bogart plus complexe que le detective de la moisson.


Et le trio qui veut l'embaucher? Une femme fatale archetypique, un oriental effemine, un ponte de la pegre sur le retour d'age. Mais aucun d'eux n'est ce qu'il semble etre au premier abord, tous jouent a cache cache entre eux et forcement avec Spade. Ils sont largement decrits physiquement mais leurs paroles, dans tous les dialogues, creent toujours une sensation de flou, de mystere. Avec un trio pareil rien de ce qui arrive n'est ce qu'il parait, sauf evidemment les cadavres.


Et tout, sauf les dialogues, est raconte a la troisieme personne, par un narrateur externe, ce qui accentue la sensation de mystere, puisqu'on ne sait pas vraiment ce que chacun des personnages pense, et que tous, y compris Spade, sont soupconnables (et soupconnes) d'un des deux meurtres perpetres au debut du roman.


Et j'ai beaucoup aime deux passages, purement litteraires. le premier, quand Hammett relate l'histoire de la statuette, du faucon de Malte. Une histoire qui se base – et brode, evidemment, c'est de la litterature – sur des faits reels. J'ai fait ma petite enquete, tellement ca m'a plu: en 1530 Charles Quint (pour les espagnols Carlos Primero de Espana y Quinto de Alemania) ceda Malte a l'ordre des Hospitaliers de Saint Jean de Jerusalem, qui, en remerciement, lui envoyerent chaque annee un faucon pour sa fauconnerie de Carabanchel. La, chaque annee, le “faucon maltais" fut eleve pour les parties de chasse du monarque. Hammett a donc fait pas mal de recherche historique pour ce livre. le deuxieme passage est une digression venue de nulle part et qui n'ajoute rien a l'intrigue, une parenthese completement gratuite mais tres interessante, une anecdote que Spade raconte a la femme fatale: un certain Flitcraft disparait un beau jour sans laisser de traces. Des annees apres sa famille engage Spade pour elucider le mystere de sa disparition. Spade le retrouve dans une autre ville, sous un autre nom, avec une nouvelle famille. Aux questions de Spade il explique qu'ayant eu un leger accident il avait saisi tout d'un coup combien la vie est ephemere, “sa vie pouvait être brusquement interrompue par la chute d'une poutre ; il en changerait brusquement le cours en disparaissant”. le cote humoristique de l'histoire est qu'ailleurs et plus tard, il avait fonde une nouvelle famille, en tous points semblable a celle qu'il avait quitte. C'est donc l'histoire d'une remise en question existencielle qui change tout et ne change rien. Une parabole ou Hammett interroge le sens de la vie et la possibilite de changer. de la grande litterature. du grand art.


J'ai aussi beaucoup aime qu'Hammet s'appesantisse plus que dans La moisson rouge sur des descriptions de lieux, d'appartements, de chambres, et pas seulement de personnes. Et j'ai enfin trouve les vas et vient de l'intrigue beaucoup moins incongrus, appreciant ainsi chaque detour.

Pour conclure, un livre qui m'a reconcilie avec Hammett. Un tres bon roman noir, que je peux classer quant a moi dans la litterature dite blanche. Mais qui c'est qui a instaure ces frontieres non naturelles?
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Un bon polar en plein coeur de San Francisco.

Sam Spade, détective privé, va se retrouver impliqué dans une intrigue qu'il aura bien du mal à démêler. Une statue est le noeud de l'histoire mais le lecteur autant que le protagoniste savent peu de choses à son sujet et les explications sont toujours différées. Une mise en attente presque envoûtante, parfois agaçante : le résultat est toutefois là, on a envie de lire la suite !

Sam Spade est un personnage énigmatique, qui observe beaucoup et montre peu de ce qu'il pense. Il semble tout en pensées et réflexions. Sa motivation première semble être l'argent, ou est-ce l'image qu'il souhaite donner de lui ? Il devra cependant faire preuve d'un certain cynisme pour s'en sortir.
J'ai apprécié les dialogues où les paroles sont mesurées et participent à ce suspens et cette mise en attente du lecteur.
Les gestes, les objets et le décor sont mis en avant et on entre de plein pied dans l'intrigue sans temps mort et sans délai. L'écriture est assez cinématographique, j'avais l'impression de lire un scénario: on passe d'une scène à l'autre, d'un lieu à l'autre sans transition. Un film avec le célèbre Humphrey Bogart a d'ailleurs été réalisé en 1941, plutôt fidèle au texte même s'il y a toutefois une adaptation.

Style d'écriture tout à fait singulier, roman offrant toutes les caractéristiques d'un bon polar au sens noble du terme, c'est une lecture vraiment agréable à faire !
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Une lecture en a amené une autre.
C'est en effet à cause (ou plutôt grâce à) Paul Auster et sa nuit de l'oracle que je me suis mis à relire le roman phare de Hammett. Dans la nuit de l'oracle, le narrateur y fait allusion, compose même une histoire inspirée d'une histoire que raconte Sam Spade, le héros du Faucon à Brigid O'Shaughnessy, la « femme fatale ». Il s'agit dans les deux cas d'une histoire dans l'histoire, bien que celle Hammett n'apporte pas grand' chose à l'intrigue si ce n'est de montrer que Spade est habitué aux histoires glauques, ce qui renforce la noirceur du récit.
Donc le fameux Sam Spade, détective de son état, est chargé par diverses personnes, de retrouver un oiseau précieux, cadeau du roi d'Espagne à Charles Quint, sur ce point aussi le narrateur donne bien des détails.
Ecrit dans les obscures années trente et révisé dans les années cinquante, l'ouvrage est ce qu'on peut légitimement appeler un « roman noir. » Tous les ingrédients y sont réunis : la « femme fatale » donc –ces deux termes « roman noir » et « femme fatale » restent étonnamment tels quels en anglais, ne se traduisent pas – le détective bourru et finement intelligent, tombeur de ses dames et puis des personnages plus typés tel Cairo, ce Levantin maniéré ou Gutman, ce gros homme à la politesse d'autant plus raffinée qu'elle est dangereuse. le personnage le plus profond restant Brigid, dissimulatrice professionnelle dont les divers mensonges – le premier étant sur son identité – font rebondir toute l'affaire qui s'avère d'une rare complexité. Car l'oiseau a voyagé. Son histoire remontant à des temps encore plus obscurs que ceux du roman s'apparente à la quête du Graal. Mais là encore rien n'est gagné. Sauf symboliquement.
A priori mû par l'appât du gain, Spade échafaude sa recherche avec la complexité et la subtilité que mérite le désir étrange de la possession de ce volatile mythique. Car on court après un mythe, un peu comme après un âge d'or, un passé glorieux, un eldorado perdu. Allégorie de la crise économique américaine contemporaine au roman ? En tout cas un chef d'oeuvre de construction romanesque.
Bon nombre d'écrivains de policiers doivent beaucoup à Dashiell Hammett. En France, où les mots « romans noirs » et « femme fatale » furent inventés, on pense au néo-polar français des années 70-80 (Manchette, ADG) mais surtout à celui qui a renouvelé le genre, Léo Malet et son Nestor Burma jusqu'à la secrétaire toute entière dévouée à la cause de son patron. Sans cesse, paraissent en surimpression, les visages de Bogart et de Mary Astor dans le film éponyme de John Huston en 1941.
Cette lecture va m'amener à revoir le film de Huston et peut-être aussi celui que Wim Wenders consacra à l'écrivain, Hammett. Et la boucle est bouclée.
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Le Faucon Maltais est un classique du roman noir... En fait, un "classique", cela ne veut rien dire et cela dit tout, en même temps.

Ecrit en 1930, pour la petite histoire, le roman reprend deux thèmes précédemment traités par Hammett (qui a bossé chez Pinkerton) dans des nouvelles, écrites vers 1925. Ce passé de détective permet à Hammett de considérer que Sam Spade est en fait un rêve fait homme. Il correspond à ce que les détectives qu'il a rencontrés voudraient être et qu'ils pensent avoir été dans leurs meilleurs moments.

Hammett nous livre les ingrédients habituels: le détective désabusé (qui inspirera Léo Malet, d'ailleurs), la secrétaire complice (et plus si affinités), l'associé qui se fait dézinguer, la rousse incendiaire qui vampe et ment comme elle respire, le malfrat cynique, son homme de main jeune et impétueux, les flics qui rêvent de serrer Spade... Secouez bien, servez sur glace et consommez sans modération.

Le Faucon Maltais, je le connaissais avant de le lire... Je l'avais vu et revu. Les dialogues du livre, je les lisais avec la voix de Bogart... ERREUR ! Grossière erreur. Cela m'a pourri la lecture. Car le livre n'est pas à la hauteur (de mes souvenirs) du film. Humphrey Bogart, Mary Astor, et surtout Peter Lorre... que l'on oublie souvent en parlant du film et qui apporte une touche glauque incroyable. A l'instar de Bogart, Lorre a aussi explosé suite au film.

Trève de bavardage sur le film. le roman est une succession de duels verbaux. Peu d'action, et toujours très rapide. Deux coups de poing, un peu de somnifère dans le whisky, et l'affaire est faite. le lecteur du XXIè siècle, habitué aux meurtres en série, à l'hémoglobine giclant de partout, aux règlements de compte multiples... sera sans doute désarçonné. Tant pis. J'ai la faiblesse de croire que l'univers de Hammett est plus proche de la réalité que celui d'un Thilliez, par exemple. Il faut savoir faire fi de ce que l'on sait, quand on s'immerge dans un tel roman.

Il faut s'arrêter aux dialogues, calibrés, finement ciselés, distillés au fleuret pas toujours mouchetés. Cela sabre et cela fait mal. C'est là que réside tout le charme (un peu suranné sans doute) du livre.

Tant pis pour la rousse se dit Sam Spade, il y en aura d'autres. Tandis que l'honneur, on n'en a qu'un et il importe de le garder immaculé.
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Le détective Sam Spade est payé par une certaine Miss Wonderly pour retrouver sa soeur Thursby. Celle-ci a eu pendant un temps entre les mains le "faucon noir", joyau du trésor des chevaliers de Malte, pièce recherchée par Caro d'abord, Wilmen et Gutman ensuite.
L'auteur sait admirablement tenir le lecteur en haleine et ne pas lui laisser trouver la vérité avant le moment qu'il a lui-même choisi. L'action ne piétine jamais, se précipite, et chaque nouveau venu ajoute au suspense. Sam Spade est un détective peu banal, terriblement vivant et humain avec sa lassitude, sa corpulence d'homme plus très jeune mais aimant et étant aimé par les femmes, assez lucide toutefois pour ne pas se laisser berner en dernier ressort.
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Un roman considéré comme un chef d'oeuvre du roman noir du XXème siècle, occupant la 10e place au classement des cent meilleurs romans policiers de tous les temps établi par la Crime Writers' Association en 1990.

Plusieurs éléments m'ont marqué lors de la lecture de ce polar dont l'intrigue se déroule à San Francisco dans les années 30.
L'intrigue se déroule essentiellement dans un nombre restreint de chambre d'hôtels, et les dialogues, parfois volontairement alambiqués, confèrent une dimension théâtrale à cet ouvrage, dont la dernière scène est un "huis-clos" à part entière.
La complexité du détective Sam Spade est singulière: sa moralité peut souvent apparaître comme douteuse, mais son sens du devoir est indéniable. J'ai constamment apprécié sa répartie, son sens de la formule et son cynisme, ainsi que sa nonchalance et son indifférence au niveau de certains moments clés. Il n'est pas si simple de deviner toutes ses pensées, et il échappe ainsi à toute tentative de caricature, et induisant chez le lecteur une absence de maîtrise des rouages de l'intrigue.
Les descriptions sont parfois exagérément précises (par exemple, le contenu des poches de Cairo) mais toujours très réalistes.
Le personnage faussement ingénu de Brigid O'Shaughnessy m'a souvent déstabilisé: il diffère assez nettement de la femme fatale "chasienne".
Les personnages respectivement éléphantesque et efféminé de Gutman et de Cairon apportent un peu de fraîcheur à la noirceur de l'intrigue.
Enfin, force est de constater que l'action n'est pas omniprésente, et les flingues aboient avec pudeur dans ce polar que je vous invite à découvrir.
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Sam Spade n'est pas un perdreau de l'année, ni un vrai pigeon et encore moins un Faucon...

Si vous aimez les ambiances moites, les brumes sur les quais pavés, les bars louches, les douces lignes des limousines noires, les femmes fatales aux courbes envoûtantes armées jusqu'au porte-jarretelles, ce livre est pour vous....

Ça a peu daté, reconnaissons-le... Mais "Le Faucon" reste toujours dans le vrai...

Et puis, on a tous l'image de Humphrey Bogart dans la peau de Sam Spade dans le film de John Huston...
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Je clôture ma trilogie Dashiell Hammett avec son oeuvre la plus célèbre, le Faucon Maltais. J'avais entamé ce cycle avec l'excellent Moisson Rouge (1929) puis enchainé avec La Clé de verre (1931), restait LE chainon manquant, ce satané Faucon de Malte, l'équivalent des Tables de la Loi pour plusieurs générations d'écrivains qui se lanceraient dans le polar par la suite (Westlake, Himes, Leonard, Ellroy,...). Publié en 1930 donc, ce troisième livre fut pour son auteur un triomphe littéraire que les adaptations cinématographiques (en particulier celle de John Huston avec Humphrey Bogart en 1941) ont contribué à asseoir parmi les plus grands romans policiers jamais écrits. Ça met à peine la pression quand on vient d'enchainer deux perles du même auteur, elles aussi considérées comme des incontournables du genre.

Au petit jeu des préférences, je pense que Moisson Rouge conserverait une légère tête d'avance sur ses deux confrères que je mettrais exactement au même niveau. C'est à dire assez haut quand même. Déjà, Sam Spade et Ned Beaumont (héros dans La Clé de verre) sont très similaires. L'un et l'autre cultivent les bons mots, entretiennent leur cynisme bien qu'ils soient dotés d'un sens moral inamovible et n'ont pas peur d'arroser de coups leurs adversaires. le statut du Continental Op (personnage principal de Moisson Rouge) est lui plus trouble. Ex-détective privé lui-même, il y a fort à parier que Dashiell Hammett a mis beaucoup de lui chez Spade (qui porte d'ailleurs son prénom) et Beaumont, deux hommes qui flirtent avec l'obscurité sans jamais lui céder un pouce de terrain. Un zeste de romantisme collant à merveille à ces hommes qui taquinent la bouteille, fument comme des pompiers et plongent les mains dans le cambouis couleur sang. le héros du Faucon de Malte est peut-être un peu plus lumineux, ne serait-ce que dans ses rapports affectueux avec son assistante Effie ou ses relations teintées d'humour avec la police.

L'intrigue est moins politique, néanmoins le jeu permanent du rapport de forces entre les personnages maintient un climat orageux, menaçant. Une fois de plus, Hammett offre le beau rôle à une femme, Brigid O'Shaughnessy, le vrai joker du roman. À l'instar de Spade, l'écrivain joue avec les angles, les ellipses ou le "hors-champ" pour placer son lecteur dans une position d'incertitude. Tout cela file jusqu'à un final en mode partie de poker à haut risque qui prend aux tripes. On achève les 325 pages encore bien sonné mais parfaitement conscient de l'importance du Faucon Maltais sur ses héritiers, sur le roman noir et à fortiori le film noir. C'est peu dire que le cycle Hammett m'a apporté entière satisfaction.
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